CHAPITRE II :

CONSTATER L'ÉTAT D'URGENCE FINANCIÈRE

La France se trouve « en état d'urgence financière », tel est le constat que la commission des finances a fait en examinant l'exécution du budget 2003 ; la formule n'est pas excessive à en juger par les analyses de la Cour des comptes dans son rapport préliminaire précité et, surtout, tout dernièrement, de l'INSEE, qui estime que l'on ne peut « écarter le risque de devoir procéder à un ajustement important » .

Comme l'indique le rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques présenté par le gouvernement en vue du débat d'orientation budgétaire, « la dette est une variable de stock, qui garde la mémoire des chocs passés. » .

L'accumulation des déficits, quelle que soit la conjoncture et sous tous les gouvernements, est à l'origine d'une remontée importante d'un endettement, qui n'est manifestement pas supportable à long terme.

Mais à court et moyen termes, c'est de l'évolution des recettes, dont on a vu la sensibilité à la conjoncture, que dépend l'équilibre budgétaire.

I. UN DÉFICIT STRUCTUREL ANORMALEMENT ÉLEVÉ

La persistance en France, à la différence des autres pays de la zone euro, d'un déficit structurel élevé, conduit à s'interroger sur la soutenabilité d'une telle politique de « douce insouciance ».

De fait, un fort déficit structurel interdit d'utiliser pleinement l'outil budgétaire et fiscal en vue de soutenir l'activité, dans la mesure où ce déficit empêche de prendre les mesures de relance conjoncturelle les mieux à même de relancer la consommation et l'investissement.

A. UN DÉFICIT DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES PLUS DÉGRADÉ QUE CELUI DES AUTRES MEMBRES DE LA ZONE EURO

1. Le déficit des administrations publiques : 4,1 % en 2003

Le solde des administrations publiques s'est encore dégradé entre 2002 et 2003. Alors qu'ils avaient atteint 3,2 points de PIB en 2002, les déficits publics se sont élevés à 4,1 points de PIB en 2003.

Le retournement de conjoncture a ainsi provoqué une détérioration de grande ampleur du solde des administrations publiques. Un cycle économique plus tard, en effet, les déficits publics retrouvent leur niveau de 1996 . Entre 2001 et 2003, le solde des administrations publiques s'est dégradé de 2,6 points de PIB.

Solde des administrations publiques 1996-2003

(en % du PIB)

Source : INSEE

La décomposition du solde des administrations publiques montre la part prépondérante du déficit du budget de l'Etat. Toutefois, la détérioration des comptes des administrations de sécurité sociale, dont le besoin de financement a atteint 11,1 milliards d'euros en 2003, contre 4,1 milliards d'euros en 2002, explique aussi très largement la progression des déficits publics.

Répartition du besoin de financement des administrations publiques en 2003

(en milliards d'euros)

Source : INSEE

Le besoin de financement du budget de l'Etat a crû de 5,8 % par rapport à 2002 (58,2 milliards d'euros). La hausse avait par ailleurs été particulièrement marquée entre 2001 et 2002 : + 69,2 %. En ce qui concerne les autres composantes du besoin/capacité de financement des administrations publiques, le solde des administrations publiques locales demeure relativement stable sur moyenne période tandis que le solde des organismes divers d'administration centrale (ODAC) se creuse en revanche légèrement.

Le solde des organismes divers d'administration centrale constitue depuis plusieurs années une variable d'ajustement des déficits de l'Etat et des administrations de sécurité sociale. Selon le rapport préliminaire de la Cour des comptes présenté en application de l'article 58-3 de la loi organique du 1 er août 2001, « la capacité de financement qu'ils dégagent traditionnellement corrige le déficit de l'Etat ». La Cour des comptes note que « les changements de périmètre entre l'Etat, les ODAC et le secteur marchand peuvent avoir un impact sensible sur le besoin de financement et l'endettement des administrations publiques ».

Surtout, la Cour des comptes montre que « certains organismes doivent mettre en oeuvre des éléments de politiques publiques que l'Etat a décidé de ne pas assurer directement, sans recevoir toujours les moyens budgétaires pour les financer ». Il en est ainsi, selon elle, de l'Etablissement Public de Financement et de Restructuration (EPFR), qui n'a reçu en 2003 aucun versement de l'Etat et qui a donc fait appel à sa trésorerie pour financer les charges encourues. Elle cite en outre l'exemple de la recapitalisation de France Telecom par le biais de l'Entreprise de Recherche et d'Activités Pétrolières (ERAP), qui a permis de ne pas creuser les déficits publics de 9,2 milliards d'euros supplémentaires.

Evolution du besoin de financement des administrations publiques entre 1996 et 2003

(en % du PIB)

Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Sauf pour l'exercice 2003, il convient de souligner que le besoin de financement du budget de l'Etat a été sur les cinq dernières années supérieur au besoin de financement global des administrations publiques.

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