B. LES QUESTIONS DE MÉTHODE
1. Des idées intéressantes d'affectation des surplus de recettes
a) Les suggestions du rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale
Notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général du budget, propose de compléter la fixation d'une norme de dépense par une règle d'affectation des fruits de la croissance.
Pour lui, les excédents conjoncturels de recettes ont vocation à compenser les moins-values de recettes dans la phase basse du cycle. La prudence requiert que ces « dividendes provisoires de la croissance » soient intégralement affectés à la réduction des déficits.
En revanche, il estime que la question peut rester ouverte en ce qui concerne les excédents structurels de recettes correspondant aux rentrées à long terme résultant de la croissance de l'économie conformément à son potentiel.
Après avoir souligné que le déficit actuel serait sensiblement inférieur si l'on avait appliqué ce type de règle de bon sens, le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale indique dans son rapport d'information sur l'exécution du budget 2003 que « si 100 % du surplus est affecté à la réduction du déficit, il est possible d'atteindre l'équilibre du budget de l'Etat en 5 à 7 ans », notant également qu'une « redistribution de 50 % de ces excédents (soit environ 5 milliards d'euros par an) reporte ce but à horizon de 10 à 13 ans ».
Il conclut que « l'état de nos finances publiques, l'ampleur des défis qui les attendent, et l'imprévoyance de la précédente majorité ne laissent aujourd'hui guère le choix. Il faut que tous les fruits de la croissance soient consacrés à la stabilisation puis la réduction de la dette . »
b) La perspective de loi organique ouverte par le gouvernement
Dans son rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques, le gouvernement affiche sa volonté de mettre en place des règles de gestion claires en vue de répondre à trois objectifs :
« - renforcer la démarche de maîtrise de la dépense comme clef de voûte de la stratégie d'ajustement des finances publiques ;
- mettre davantage l'accent sur le long terme pour apprécier la viabilité des finances publiques ;
- éviter de rééditer l'épisode de la « cagnotte » en adoptant une règle d'utilisation des recettes fiscales supplémentaires perçues pendant les périodes de forte croissance . »
La fixation d'un objectif de croissance modérée pour les dépenses publiques à un rythme inférieur à la progression moyenne de l'économie (« croissance potentielle »), qui assure en effet une amélioration structurelle des finances publiques, doit s'effectuer dans une perspective consolidée incluant les sphères sociale et locale. Votre commission des finances ne peut que suivre le gouvernement sur ce point même si elle s'interroge sur la méthode de nature à garantir cette cohérence.
Mais le gouvernement va plus loin en suggérant une règle d'affectation des surplus de recettes pour ne pas renouveler les erreurs du passé dans l'affectation des surplus conjoncturels.
Comme on l'a vu, le recyclage pérenne de plus values conjoncturelles de recettes, au-delà des marges de manoeuvre permises par l'évolution de la dépense, un temps masquée par l'abondance des recettes, devient manifeste dès que la conjoncture se retourne.
En vue d'éviter pour l'avenir ce genre de comportement de facilité, le gouvernement évoque la perspective d'une règle qu'il veut « la plus simple possible dans son principe et la plus transparente dans ses modalités d'application » et qui pourrait, au moins dans son principe faire l'objet d'une loi organique :
« - le critère d'application d'une telle règle pourrait être le surplus de recettes fiscales de l'État par rapport au niveau de recettes fiscales prévues dans la loi de finances initiale. En effet, une référence directe au niveau des recettes paraît préférable à un critère de croissance, une surprise de croissance ne se traduisant pas toujours par un surplus de recettes ;
- la mesure de cet écart pour une année donnée pourrait se faire au moment de l'élaboration de la loi de finances de l'année suivante, quand le Gouvernement dispose déjà de suffisamment d'information sur les rentrées fiscales pour avoir une bonne prévision du niveau des recettes ;
- les surplus ainsi constatés pourraient être, par exemple, affectés dans une proportion d'au moins des deux tiers à la réduction du déficit et pour le solde restant au financement de priorités gouvernementales tournées vers l'avenir, à travers des investissements, en particulier dans les domaines de la recherche, ou à des baisses ciblées et temporaires de prélèvements obligatoires . »