III. SE DOTER DE RÈGLES DURABLES DE SAGESSE BUDGÉTAIRE
Un certain nombre de pays ont mis en place des normes législatives de gestion budgétaire à moyen terme. Ce fut en particulier le cas de la Grande-Bretagne en 1997. S'il n'est pas question de prohiber le déficit budgétaire pour des raisons de réalisme et de principe dans la mesure où il convient, comme le gouvernement l'a fait en 2002 et 2003 de laisser jouer les stabilisateurs automatiques, la France aurait tout à gagner à se doter, au-delà de sa « Constitution financière », de règles de bonne gestion budgétaire.
C'est ce qu'envisage le rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques lorsqu'il propose de doter le pays d'une règle d'affectation des surplus de recettes, suivant en cela l'exemple donné par notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général du budget.
Votre rapporteur général souscrit pleinement à ce type d'initiatives qui rejoignent le souci de rigueur qui avait animé votre commission des finances lorsqu'elle s'était efforcée de faire prendre en compte dans le cadre de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, la « règle d'or » tendant à prohiber le financement des dépenses de fonctionnement par l'endettement.
Votre commission des finances souhaite apporter sa contribution à la réflexion en cours en examinant un certain nombre de problèmes connexes, qu'il s'agisse du débat sur les baisses d'impôts en période de déficit budgétaire, ou de la façon dont se déroulent les arbitrages budgétaires préalables au dépôt du projet de loi de finances de l'année sur le bureau des assemblées.
A. DU BON USAGE DES BAISSES D'IMPÔTS
Votre rapporteur général insiste, une fois de plus, sur la nécessité d'éviter, autant que possible, les baisses d'impôts « non gagées » par une réduction équivalente des dépenses publiques, ou une augmentation équivalente d'autres ressources fiscales.
La Cour des comptes critique, dans son rapport préliminaire sur l'exécution 2003 précité la « méthode d' allègements fiscaux non gagés qui mérite un examen au regard des missions confiées à l'Etat, dont on n'aperçoit pas la diminution ». Elle cite la suppression de la vignette auto comme illustration de cette politique fiscale « naturellement orientée à la réduction de l'assiette fiscale », ainsi que le maintien d'importantes « niches fiscales ».
Pour la Cour des comptes, les recettes sont réduites sans qu'il y ait d'efforts parallèles et équivalents sur les dépenses. Elle conclut : « la France est aujourd'hui confrontée à un fossé croissant entre le niveau de ses recettes et celui de ses dépenses. Il ne pourra pas être uniquement comblé par l'espoir d'embellies économiques ».
1. Des baisses d'impôt que l'on peut dans certains cas tolérer en période de croissance faible
Certes, des baisses d'impôt peuvent être bénéfiques à l'activité en période de croissance faible. Mais on peut discuter de la pertinence d'une politique qui consisterait à maintenir à tout prix le déficit structurel inchangé, quelles que soient les fluctuations de la conjoncture, et à laisser jouer les seuls « stabilisateurs automatiques ».
Ainsi, comme le souligne le gouvernement, l'augmentation du déficit structurel de 2000 à 2002 a en grande partie résulté de « mesures nouvelles sur les prélèvements obligatoires », c'est-à-dire d'allègements d'impôts, comme l'indique le graphique ci-après.
L'importance des allégements fiscaux dans l'augmentation récente du solde structurel
(variation annuelle, en %)
Source : rapport présenté par le gouvernement dans le cadre du présent débat d'orientation budgétaire