CHAPITRE PREMIER

LE DROIT POSITIF FRANÇAIS DES MUTATIONS À TITRE GRATUIT : DES ATOUTS MAIS AUSSI DES FAIBLESSES

I. DES MESURES D'ALLÉGEMENT QUI NE PARVIENNENT PAS À COMPENSER UN BARÈME INADAPTÉ, AUX TAUX FORTS ET AUX TRANCHES SOUS-VALORISÉES

La fiscalité des mutations à titre gratuit connaît en France une grande diversité de systèmes permettant d'alléger le poids des droits rendus exigibles par le transfert de propriété. Ces mécanismes apportent une amélioration non négligeable à la situation du contribuable devant acquitter des droits de mutation à titre gratuit, mais peuvent parfois être perçus comme insuffisants.

A. DES DISPOSITIFS PERMETTANT DE REDUIRE LE COUT FISCAL DES MUTATIONS

1. Des abattements réduisant la base taxable

Le processus de calcul des droits de mutation à titre gratuit comporte plusieurs étapes au cours desquelles s'offre à de nombreuses reprises la possibilité d'alléger le montant des droits exigibles. En effet, les droits de mutation à titre gratuit sont calculés sur la part nette revenant à chaque héritier, légataire ou donataire, après déduction, sous certaines conditions, d'un abattement. Est alors appliqué un tarif variable selon le lien de parenté existant entre le défunt ou donateur et le bénéficiaire, et enfin, sont déduites du montant des droits ainsi obtenu les éventuelles réductions d'impôt applicables.

Le montant des abattements est variable selon le lien de parenté existant entre le défunt ou donateur et le bénéficiaire. Il est particulièrement significatif s'agissant des mutations entre époux et en ligne directe, pour lesquels l'article 779-I du code général des impôts prévoit respectivement des abattements de 76.000 € et 46.000 €.

Selon une réponse ministérielle au sénateur Estrosi en date du 12 novembre 2001, ces deux abattements permettraient d'ores et déjà d'exonérer plus de 90 % des successions entre époux et près de 80 % des successions en ligne directe. Par ailleurs, il convient de souligner l'existence d'un abattement de 15.000 € sur les donations consenties par les grands-parents à leurs petits-enfants.

L'importance du lien de parenté unissant le donateur ou défunt et le bénéficiaire est omniprésente dans la fiscalité des mutations à titre gratuit. Ce lien détermine non seulement l'abattement applicable à la part nette revenant au bénéficiaire comme nous venons de le voir, mais aussi le barème utilisé pour calculer l'impôt. Plus le lien de parenté est diffus, plus le tarif applicable est défavorable et plus les taux marginaux sont élevés.

2. Une fiscalité qui s'est adaptée à certaines évolutions de la société

A cet égard, la loi du 15 novembre 1999, portant création d'un régime spécial pour les mutations à titre gratuit réalisées entre partenaires d'un Pacte Civil de Solidarité, a institué un abattement d'un montant de 57.000 € ainsi qu'un tarif spécifique. Si le barème applicable entre partenaires d'un Pacte Civil de Solidarité reste moins favorable que celui applicable entre époux, il apporte toutefois une certaine amélioration au statut fiscal des concubins qui jusque là étaient considérés comme des non-parents et à ce titre, imposés au taux fixe de 60% dès le premier franc en cas de mutation à titre gratuit.

3. Des réductions de droits

Il existe deux types de réductions de droits, l'une spécifique aux donations qui est subordonnée au respect d'une condition d'âge par le donateur, l'autre relative aux charges de famille. Ces réductions sont cumulatives avec les abattements applicables.

Depuis la loi de finances pour 1998, les donations ont été fortement encouragées par l'instauration d'une réduction de droits qui est fonction de l'âge du donateur et qui permet de réduire les droits de donation exigibles jusqu'à 50%. En effet, lorsque le donateur a moins de 65 ans, les droits de donation sont réduits de moitié sans qu'aucune autre condition ne soit exigée et ce, quel que soit le lien de parenté existant entre l'auteur de la donation et le bénéficiaire et quel que soit l'objet de la donation. Lorsque le donateur est âgé de plus de 65 ans mais de moins de 75 ans révolus, la réduction de droit est alors de 30%. Cette réduction n'est en revanche pas applicable aux successions.

Outre cette réduction de droits, certains contribuables peuvent également bénéficier d'une réduction pour charges de famille applicable tant en matière de donations que de successions (réduction de droits plafonnée cependant à 305 € par enfant en sus du deuxième au profit de bénéficiaires ayant au moins trois enfants vivants ou représentés au moment de la donation ou du décès, et portée à 610 € s'agissant des donations et successions en ligne directe et entre époux).

4. Des facilités de règlement des droits de mutation

La pression fiscale s'exerçant sur le bénéficiaire d'une mutation à titre gratuit peut encore être réduite par l'octroi de crédit de paiement. En effet, sous certaines conditions, les contribuables qui ont à charge le paiement de droits de mutation peuvent solliciter de l'administration fiscale une autorisation de paiement fractionné et/ou de paiement différé.

Le champ d'application de ces facilités de règlement est cependant très limité. En effet, le bénéfice du paiement fractionné ou du paiement différé est cantonné aux seuls cas de mutations par décès à l'exception des donations d'entreprises qui sont susceptibles de bénéficier d'un paiement fractionné et différé, à la condition que la mutation ne porte pas sur des titres cotés.

En cas de paiement fractionné, le paiement des droits est acquitté en plusieurs versements égaux et à intervalle de 6 mois au plus, sur une période maximum de 5 ans (leur nombre est fonction du pourcentage des droits exigibles). Ce délai maximum de 5 ans est porté à 10 ans pour les droits à la charge des héritiers en ligne directe et du conjoint du défunt à la condition que l'actif héréditaire comprenne, à concurrence de 50% au moins, des biens non liquides tels que des immeubles, fonds de commerce ou valeurs mobilières non cotées 12 ( * ) .

Dans le cadre des mutations par décès, il est possible de bénéficier d'un paiement différé des droits de succession, lorsque la succession porte sur certains biens ou droits limitativement énumérés, tels que des droits reçus en nue-propriété ou encore l'attribution préférentielle d'une exploitation agricole.

Cependant, l'avantage que peut représenter le bénéfice de ces mesures de crédit doit être relativisé en raison de leur champ d'application très limité et des conditions de leur application. Pour être acceptée par le comptable du Trésor, une demande de crédit doit en effet obligatoirement être accompagnée de la constitution de garanties suffisantes au regard du montant des droits exigibles. Or, le comptable du Trésor, seul compétent pour apprécier la qualité des garanties proposées, a toute latitude pour les refuser s'il les estime impropres à garantir le recouvrement à terme des droits de mutation. En pratique, le comptable du Trésor estimera que des garanties portant sur des biens immobiliers sont plus à même d'assurer le recouvrement de sa créance qu'un fonds de commerce ou des parts de société non cotée, lesquelles sont généralement refusées bien qu'elles constituent souvent les seules garanties qui peuvent être offertes par de nombreux contribuables .

5. Des opérations d'optimisation développées par la pratique

Le coût fiscal d'une donation ou d'une succession, lorsque cette dernière a fait l'objet d'une préparation, peut encore être réduit par la mise en place de certaines opérations d'optimisation créées par la pratique. Il en est notamment ainsi du recours à la technique du démembrement de propriété, largement utilisée dans le cadre de la transmission anticipée du patrimoine.

Le recours au démembrement de propriété permet soit d'anticiper la transmission de son patrimoine sans toutefois en perdre la jouissance, on parle alors de donation avec réserve d'usufruit, soit de partager les droits de propriété entre deux bénéficiaires distincts dans le cadre d'une donation ou plus fréquemment d'une succession.

Ainsi par exemple, une donation avec réserve d'usufruit consiste pour le propriétaire d'un bien, à faire donation de la nue-propriété de ce bien tout en conservant le droit d'usufruit, c'est-à-dire, le droit de jouir des produits générés par le bien transmis ou de jouir du bien lui-même. Ce droit d'usufruit peut être relatif à un simple droit d'habitation, lorsque la mutation porte par exemple sur un immeuble occupé par son propriétaire, comme à des revenus, lorsque la donation porte par exemple sur bien productif de revenus tel qu'un immeuble donné en location ou un portefeuille de valeurs mobilières.

Au plan fiscal, l'avantage du démembrement est double : d'une part l'assiette de calcul des droits de donation ne porte que sur la seule valeur du droit transmis (i.e. le plus souvent la seule nue-propriété) et, d'autre part au décès de l'usufruitier ou au terme de l'usufruit (en cas d'usufruit temporaire), le droit d'usufruit rejoint la nue-propriété en franchise de droits de mutation. La valeur du droit transmis, qui varie selon l'âge de l'usufruitier, est calculée d'après le barème de l'usufruit viager de l'article 762 du Code Général des Impôts. Selon ce barème, plus l'usufruitier est âgé moins la valeur de l'usufruit est importante et plus celle de la nue-propriété est importante. L'avantage résultant d'une donation d'un droit démembré est encore accentué par l'application, le cas échéant, de la réduction de droit lorsque le donateur, s'il s'agit d'une mutation entre vifs, est âgé de moins de 75 ans.

L'exemple chiffré ci-dessous, illustre la réduction du coût fiscal qui peut être opérée sur la transmission pour cause de mort d'un patrimoine, selon qu'elle a ou non été préparée du vivant de l'intéressé par le biais d'une donation de la pleine propriété ou de la seule nue-propriété de ses droits dans le patrimoine commun. Pour les besoins de l'exercice, la situation retenue est celle d'un contribuable âgé de 62 ans, marié sous le régime de la communauté légale, avec deux enfants, dont le patrimoine est uniquement composé de biens privés dont la valeur globale s'élève à 15 millions d'euros.

Dans le premier cas, la transmission du patrimoine qui n'a pas été préparée, s'opère intégralement à l'occasion du décès du contribuable. Dans le deuxième cas, la succession du défunt a été préparée de son vivant au moyen d'une donation à son conjoint et à ses deux enfants de la pleine propriété de ses droits dans la communauté. Enfin, dans le troisième cas, la succession à été optimisée au moyen d'une donation à son conjoint et à ses deux enfants de la nue-propriété des droits du défunt dans la communauté.

Cette comparaison permet de constater qu'en l'absence de préparation de la succession le taux effectif d'imposition du patrimoine ainsi transmis (hors effet du partage légal de la communauté) est de 32% (Cas n°1). En revanche, ce taux peut être réduit de moitié par le recours à une donation de la pleine propriété des biens (soit 16% pour le cas n°2) et à 12% (cas n°3) en cas de recours à une donation avec réserve d'usufruit qui, outre le fait d'optimiser fiscalement la succession du disposant, lui permet également de profiter des revenus de son patrimoine jusqu'à sa mort.

Exemple 1 : Contribuable de 62 ans marié sous le régime légal de la communauté réduite aux acquêts avec deux enfants

Patrimoine de 15 M€

Cas n° 1

Transmission par décès non préparée

Cas n° 2

Transmission préparée avec donation de la PP 13 ( * ) suivie du décès

Cas n° 3

Transmission préparée avec donation de la NP 14 ( * ) suivie du décès

Valeur de la NP 80%

Coût fiscal

Part successorale

Droits dus

Donation

Droits dus

Part successorale

Droits dus

Conjoint :

½ de 15 M€ n'est pas taxable

¼ de 7,5 M€ en PP 1

7,5 M€

1,875 M€

0

<537 K€>

7,5 M€

1,875 M€

0

<269 K€>

7,5 M€

80 % x 1,875

0

<200 K€>

Enfant 1 :

½ de ¾ de 7,5 M€ en PP 1

2,812 M€

<925 K€>

2,812 M€

<462,5 K€>

80 % x 2,812

<350 K€>

Enfant 2 :

½ de ¾ de 7,5 M€ en PP 1

2,812 M€

<925 K€>

2,812 M€

<462,5 K€>

80 % x 2,812

<350 K€>

Coût Total :

<2.388 K€>

<1.194 K€>

<900 K€>

Patrimoine net transmis :

Conjoint :

Partage légal de la communauté (non taxable) :

Dévolution successorale (cas 1) ou donation (cas 2 et 3) (taxable) :

Sous-total :

7.500 K€

1.338 K€

8.837 K€

7.500 K€

1606 K€

9.106 K€

7.500 K€

1.300 K€

9.175 K€

Enfant 1 :

Enfant 2 :

Dévolution successorale (cas 1) ou donation (cas 2 et 3) (taxable)

1.887 K€

1.887 K€

2.350 K€

2.350 K€

2.462 K€

2.462 K€

Total :

12.611 K€

13.806 K€

14.099 K€

Taux effectif d'imposition sur l'actif transmis par succession ou donation

32%

16% 15 ( * )

12% 16 ( * )

Explication du cas n°1 :

Dans le premier cas, du fait de l'absence de préparation, la succession du défunt est liquidée d'après les règles de dévolution de droit commun. A ce titre, la moitié de la communauté, appartenant en propre au conjoint survivant, est exclue de l'actif successoral et attribuée en franchise de droits au conjoint survivant lors de la liquidation de la communauté (i.e. effet du régime légal de communauté réduite aux acquêts). En conséquence, sur un patrimoine de 15 millions d'euros, l'actif successoral n'est que de 7,5 millions d'euros. Cette somme est ensuite répartie entre le conjoint survivant et les enfants de la façon suivante :

Le conjoint survivant peut au choix opter pour un quart en pleine propriété ou la totalité en usufruit 17 ( * ) . Au cas présent, le conjoint survivant décide d'opter pour un quart en pleine propriété, soit 1,875 M€.

Les enfants ont dès lors chacun droit à la moitié des trois quarts restants en pleine propriété, soit 2,812 M€ chacun.

En partant de l'hypothèse que ces sommes représentent l'actif net successoral taxable, les droits de succession sont alors calculés respectivement par application des barèmes entre époux et en ligne directe après déduction des abattements applicables. Ces abattements sont de 76.000 € pour le conjoint survivant et de 46.000 € pour chacun des enfants. Les droits exigibles sont alors de 537.000 euros sur la part successorale du conjoint survivant et de 925.000 euros sur la part successorale de chacun des enfants, soit une imposition totale de 2,388 millions d'euros.

Le patrimoine net transmis hors effet de la liquidation de la communauté entre époux (l'actif successoral après déduction des droits de succession) s'élève donc à 5,11 millions d'euros, soit 68% de l'actif successoral. La pression fiscale résultant de cette succession non préparée s'élève donc en l'espèce à 32% .

Explication du cas n° 2 :

Dans le deuxième cas, la succession est optimisée au moyen d'une donation en pleine propriété au conjoint et aux enfants de la totalité des droits du donataire dans le patrimoine commun, soit la moitié de 15 millions. La donation est consentie au profit de chaque donataire sur la base de leurs droits successoraux tels qu'ils ont été décrits dans le premier cas ci-dessus. Le conjoint reçoit donc 1,875 millions d'euros et chacun des enfants 2,812 millions de francs.

Les droits de donation sont calculés, après déduction d'un abattement de 76.000 euros pour la part reçue par le conjoint et de 46.000 euros sur la part reçue par chacun des enfants, par application des barèmes applicables entre époux et en ligne directe18 ( * ). Le montant des droits ainsi obtenu est ensuite réduit de 50% dans la mesure où le donateur a moins de 65 ans. Il en résulte que les droits de donation exigibles sont de 269.000 euros pour le conjoint et 462.500 euros pour chacun des enfants, ce qui représente un montant total de droits de donation de 1,194 million d'euros. Au jour du décès du donateur, sa succession ne comprend aucun bien et n'entraîne donc l'exigibilité d'aucun droit de succession. En effet, la moitié de la communauté (soit 7,5 millions d'euros) appartient en propre au conjoint survivant et se trouve donc exclu de l'actif successoral lors de la liquidation de la communauté. Par ailleurs, le défunt a précédemment fait donation de l'intégralité de ses droits dans le patrimoine commun.

Il résulte de cette donation, que le patrimoine net transmis (lors de la donation) s'élève à 6,3 millions d'euros, soit environ 84% du patrimoine propre du défunt. La pression fiscale s'appliquant sur cette transmission est donc de 16%.

On constate ainsi que le recours à une donation en pleine propriété de l'intégralité des droits du défunt dans la communauté, permet de réduire le coût fiscal de la transmission de 32% à 16% , ce qui représente une économie de droits de 50% (1,194 million d'euros) par rapport aux droits de mutation dus en l'absence de préparation de la succession.

L'économie ainsi réalisée par rapport au cas n°1, résulte en pratique de la réduction de droits de 50% applicable aux donations consenties par un donateur de moins de 65 ans.

Explication du cas n°3 :

Au cas présent, la succession est optimisée du vivant de l'intéressé au moyen d'une donation en démembrement avec réserve d'usufruit. La donation consentie au profit du conjoint et des enfants porte ainsi sur la seule nue-propriété des droits du donataire dans le patrimoine commun, soit la moitié de 15 millions. De même que dans le cas précédent, la donation est consentie au profit de chaque donataire sur la base de leurs droits successoraux tels qu'ils ont été décrits dans le premier cas ci-dessus. Le conjoint reçoit donc 1,875 millions d'euros et chacun des enfants 2,812 millions d'euros.

En vertu des règles de calcul applicables aux donations avec réserve d'usufruit 19 ( * ) , le donateur ayant 62 ans, la valeur de la nue-propriété donnée est estimée à 80% de la valeur de la pleine propriété des biens objet de la donation. Les droits sont alors calculés sur 80% du montant de la donation reçue par chaque bénéficiaire, après déduction toutefois, des abattements respectifs de 76.000 euros pour le conjoint et de 46.000 euros pour chacun des enfants. Les droits ainsi obtenus sont ensuite réduits de moitié en application de la réduction de droit de 50% applicable lorsque le donateur à moins de 65 ans. En application de ces règles, les droits de donation dus s'élèvent à 200.000 euros pour le conjoint survivant et 350.000 euros pour chacun des enfants, soit un montant total de 900.000 euros.

Lors du décès du donateur, sa succession ne comprend aucun bien taxable en raison de la donation antérieure de la nue-propriété des biens composant son patrimoine, mais également du fait que l'usufruit, dont le défunt s'était conservé la jouissance, rejoint en franchise de droits, lors de son décès, la quote-part détenue en nue-propriété par chacun des donataires/héritiers. Le patrimoine net transmis hors effet de la liquidation de la communauté entre époux s'élève donc à 6,6 millions d'euros, soit 88% du patrimoine du défunt avant la donation. La pression fiscale résultant de la donation avec réserve d'usufruit est donc seulement de 12% .

Par comparaison avec l'optimisation de la succession mise en place dans le cas numéro deux, l'optimisation résulte ici (outre la réduction de moitié des droits de donation en raison de l'âge du donateur) de la donation avec réserve d'usufruit en ce qu'une telle donation permet de réduire l'assiette de calcul des droits de donation 20 ( * ) à hauteur de la valeur de l'usufruit conservé, puis de transmettre l'usufruit en franchise de droits lors du décès du donateur.

Si l'on compare le coût de la transmission du patrimoine dans chacun des cas étudiés, la donation avec réserve d'usufruit (i.e. cas n°3) permet de réaliser l'économie de droits de mutation la plus importante à l'occasion de la transmission du patrimoine . En effet, les droits de mutation exigibles dans ce cas représentent une réduction de 62,3% (soit 1,488 M€) des droits de succession exigibles en l'absence de préparation de la succession (contre une réduction de 50% en cas de donation de la pleine propriété) et une économie de 24,6% (soit 294.000 €) des droits de mutation exigibles dans le cadre de la donation de la pleine propriété des droits du donateur dans la communauté (cas n°2).

Un deuxième exemple permet de comparer le coût fiscal d'une succession d'une personne mariée sous le régime de la séparation de biens. Les hypothèses retenues sont les mêmes que précédemment ainsi que les techniques d'optimisation appliquées (donation de la pleine propriété ou donation avec réserve d'usufruit). Le régime matrimonial de la séparation de biens permet simplement de comparer la pression fiscale s'appliquant dans les différents cas hors effet de partage de la communauté lors du décès de l'un des conjoints.

En effet, l'intégralité du patrimoine appartient ici en propre au conjoint souhaitant organiser sa succession. Il s'en suit qu'à son décès, ce patrimoine n'est pas partagé entre les époux et ainsi, dans le premier cas (absence de préparation de la succession), l'intégralité du patrimoine est comprise dans l'actif successoral soumis au droit de succession.

Dans le cas d'une séparation de biens, on constate que le taux effectif d'imposition de la succession, qui est au cas présent de 36% en l'absence de préparation, peut être réduit à 18% par le recours à une donation en pleine propriété, et à 14% en cas d'optimisation de la succession par recours à la technique de la donation avec réserve d'usufruit.

Exemple 2 : Contribuable de 62 ans, marié sous le régime de séparation de biens avec deux enfants

Patrimoine de 15 M€

Cas 1

Transmission par décès non préparée

Cas 2

Transmission préparée avec donation de la PP 21 ( * ) suivie du décès

Cas 3

Transmission préparée avec donation de la NP 22 ( * ) suivie du décès

Valeur de la NP 80%

Part successorale

Droits dus

Donation

Droits dus

Donation

Droits dus

Coût fiscal

Conjoint

¼ de 15 M€ en PP 1

3.750 K€

<1.287 K€>

3.750 K€

<643,5 K€>

80 % x 3.750

<494 K€>

Enfant 1 :

½ de ¾ de 15 M€ en PP 1

5.625 K€

<2.050 K€>

5.625 K€

<1.025K€>

80 % x 5.625

<800 K€>

Enfant 2 :

½ de ¾ de 15 M€ en PP 1

5.625 K€

<2.050 K€>

5.625 K€

<1.025K€>

80 % x 5.625

<800 K€>

Coût Total :

<5.387 K€>

<2.694 K€>

<2.094 K€>

Patrimoine net transmis

Dévolution successorale (cas 1) ou donation (cas 2 et 3) (taxable)

Conjoint :

2.463 K€

3.107 K€

3.256 K€

Enfant 1 :

3.575 K€

4.600 K€

4.825 K€

Enfant 2 :

3.575 K€

4.600K€

4.825 K€

Total :

9.613 K€

12.307 K€

12.906 K€

Taux effectif d'imposition sur l'actif transmis par succession ou donation

36 %

18 % 23 ( * )

14 % 24 ( * )

Si l'on compare le coût de la transmission du patrimoine dans chacun des cas étudiés, la donation avec réserve d'usufruit (cas n°3) permet, pour les mêmes raisons que celles développées dans le premier exemple, de réaliser l'économie de droits de mutation la plus importante à l'occasion de la transmission du patrimoine. En effet, les droits de mutation exigibles dans ce cas représentent une réduction de 61% (soit 3,293 M€) des droits de succession exigibles en l'absence de préparation de la succession (contre une réduction de 50% en cas de donation de la pleine propriété, soit une économie de 2,694 M€), et une réduction de 22,3% (soit une économie de 600.000 €) des droits de mutation exigibles dans le cadre de la donation de la pleine propriété des droits du donateur dans la communauté (cas n° 2).

On notera que la variation de ces pourcentages par rapport à ceux obtenus dans le premier exemple est due à la progressivité des droits de mutation à titre gratuit entre époux et en ligne directe. En effet, la part héritée ou donnée à l'époux et aux enfants étant plus importante (15 millions d'euros dans le deuxième exemple, au lieu de 7,5 millions d'euros dans le premier exemple), la pression fiscale est proportionnellement plus forte.

* 12 Ces biens sont énumérés à l'article 404 A, I de l'annexe III du CGI.

* 13 i.e. en pleine propriété

* 14 i.e en nue-propriété

* 15 . L'optimisation résulte de la seule réduction de droits de 50% applicable aux donations consenties par un donateur de moins de 65 ans.

* 16 L'optimisation résulte de la combinaison de l'assujettissement lors de la donation de la seule nue-propriété aux droits de mutation avec application de la réduction de droits de 50% applicable aux donations consenties par un donateur de moins de 65 ans, puis lors du décès de l'usufruitier, de la réunion de l'usufruit et de la nue-propriété entre les mains du nu-propriétaire en franchise de droits de succession.

* 17 Droits successoraux du conjoint survivant en présence d'enfant des deux époux, tels que résultant de la loi du 3 décembre 2001.

* 18 Il s'agit des mêmes barèmes que ceux applicables en matière de succession.

* 19 Application du barème de l'usufruit viager de l'article 762 du CGI.

* 20 Cette valeur étant fonction de l'âge du donateur.

* 21 i.e. pleine propriété

* 22 i.e. nue-propriété

* 23 L'optimisation résulte de la seule réduction de droits de 50% applicable aux donations consenties par un donateur de moins de 65 ans.

* 24 L'optimisation résulte de la combinaison de l'assujettissement lors de la donation de la seule nue-propriété aux droits de mutation avec application de la réduction de droits de 50% applicable aux donations consenties par un donateur de moins de 65 ans, puis lors du décès de l'usufruitier, de la réunion de l'usufruit et de la nue-propriété entre les mains du nu-propriétaire en franchise de droits de succession.

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