3. Mobiliser davantage les chercheurs publics
a) Mettre le brevet au coeur de la mission de valorisation
Des initiatives importantes, rappelées ci-dessus, ont été prises pour améliorer la valorisation des résultats de la recherche publique. Outre l'impulsion donnée par la loi dite « Allègre » sur l'innovation et la recherche, un appel à projets a favorisé la constitution d'incubateurs et de fonds d'amorçage autour des acteurs de la recherche publique : universités et organismes de recherche. La valorisation technologique a ainsi été réaffirmée comme un objectif de la recherche publique. La Commission des Affaires économiques a soutenu l'ensemble de ces initiatives.
Dans ce cadre, la propriété industrielle pose des problèmes spécifiques, en termes de divulgation mais aussi de propriété et d'exploitation de l'invention. Il est nécessaire que les laboratoires publics protègent au mieux leurs inventions dans le cadre des collaborations avec le secteur industriel, au niveau :
- des recherches contractuelles avec un industriel (régime de propriété de l'invention, responsabilités respectives des co-contractants) ;
- de protection des recherches non contractuelles ;
- de la création d'entreprises par des chercheurs autour de l'exploitation d'un brevet.
La situation des laboratoires au regard de la valorisation est très diverse :
- si, dans l'ensemble, les grands organismes de recherche ont des politiques actives, bien que différenciées, en matière de valorisation (et pas toujours bien reflétées par le seul nombre du dépôt de brevets par ces organismes, compte tenu de la politique consistant à laisser à l'industriel partenaire le soin de déposer le brevet en son nom) ;
- l'université semble, dans son ensemble, moins « outillée » et moins bien organisée pour mener sa mission de valorisation via un dépôt de brevet. Une étude commandée par le ministère de la recherche 77 ( * ) a même conclu que « la situation dans ce secteur semble particulièrement confuse. Sans méconnaître pour autant l'autonomie des universités, il est évident qu'un important effort d'organisation s'impose pour valoriser la recherche universitaire, qui doit, autant que les autres, féconder le tissu économique ». La négociation, la gestion et le suivi des contrats de recherche conclus avec des entreprises n'assurent en effet pas toujours le meilleur « rendement » possible de l'invention à l'université. En outre, les recherches non contractuelles sont rarement protégées par brevet avant d'être divulguées.
Les propositions de la Commission des Affaires économiques sont les suivantes :
- pour les organismes de recherche , une certaine souplesse peut être utile quant aux modalités de mise en oeuvre des politiques de dépôt de brevets. Il importe toutefois que l'État ait à coeur :
1) de recenser plus exactement qu'aujourd'hui les dépôts -même effectués par l'industriel partenaire- ;
2) de veiller à l'adoption de règles contractuelles équilibrées en matière de droits de propriété du brevet, d'exploitation commerciale, de prise en charge des éventuels coûts d'un litige, entre l'industriel et l'organisme de recherche. Des instructions en ce sens devraient être données aux laboratoires concernés.
- pour les universités , il importe qu'un meilleur retour de la recherche publique soit assurée à l'économie nationale sous forme de dépôt de brevets. Aucune université ne semble aujourd'hui parfaitement outillée pour mener jusqu'à son terme la négociation des clauses contractuelles souvent très pointues que requièrent la protection, la valorisation et l'exploitation d'une invention. En outre, la constitution d'une cellule de valorisation interne ne se justifie pas toujours, compte tenu du volume parfois insuffisant d'innovations à valoriser.
Le recours à des experts extérieurs semble donc nécessaire. L'ANVAR peut prendre en charge certains frais afférents à des transferts de technologie par les universités. Toutefois, il semble nécessaire d'aller plus loin : un groupe d'experts constitué par le ministère de la recherche faisait, en la matière, une proposition très intéressante, sous forme d'alternative, de mise en place d'un réseau d'agences de valorisation universitaire spécialisées, chargées de décider s'il convient ou non de faire breveter l'invention et de mener à son terme la démarche de valorisation :
- soit des agences régionales, généralistes ;
- soit des agences nationales, spécialisées par technologies.
Ces agences seraient également chargées de trouver l'entreprise susceptible d'exploiter l'invention, de mener les négociations avec elle et de parvenir à la conclusion d'un contrat. Elles s'assureraient la collaboration de conseils et de juristes de droit privé connaissant bien la technique contractuelle et les règles de droit, tant français qu'étranger, en matière de propriété industrielle. L'État donnerait à ces agences les moyens financiers et les compétences nécessaires pour conduire cette mission.
La Commission des Affaires économiques fait siennes ces propositions qui lui paraissent particulièrement appropriées.
* 77 A un groupe de travail composé d'éminents spécialistes, sous l'égide du professeur GALLOCHAT.