E. LE PROBLÈME PARTICULIER DES MOYENS DE SIMULATION DU PARLEMENT
L'autonomie des moyens de simulation du Parlement est sans doute souhaitable, mais elle est limitée par le monopole gouvernemental des ressources statistiques.
Au cours de la présentation du présent rapport à votre commission des finances, le 18 octobre dernier, un débat intense s'est ouvert sur les moyens d'expertise technique dont dispose le Parlement en matière de finances publiques (voir infra - Examen en commission).
1. Des moyens autonomes
Plusieurs de nos collègues, se référant notamment à la situation des Etats-Unis 21 ( * ) , ont regretté l'absence de moyens de simulation propres au Parlement.
Le projet de réforme de l'ordonnance organique ne peut probablement pas doter le Parlement de tels moyens, mais il ne peut pas davantage rester indifférent à cette préoccupation.
Plusieurs des dispositifs déjà examinés, voués à améliorer l'information fournie au Parlement par le gouvernement, seraient de nature à y répondre partiellement. Il en va ainsi de toutes les obligations posées en matière d'exposé des résultats mais aussi, et surtout peut-être, de la délivrance des hypothèses relatives aux projections intéressant, globalement ou mesure par mesure, les finances publiques.
2. Un " droit de tirage " sur les administrations
Il pourrait être envisagé d'aller plus loin. Votre rapporteur rappelle à ce sujet l'excellente initiative de M. Raymond Barre, Premier ministre, en 1978, qui avait permis de conclure une convention entre le Sénat et le ministère de l'économie et des finances, permettant au Sénat de mobiliser les moyens d'expertise technique du ministère, en particulier ceux de la direction de la prévision et de l'INSEE pour réaliser des simulations. La responsabilité de la formulation des hypothèses était clairement attribuée au Sénat. Cette convention a fonctionné harmonieusement jusque dans le milieu des années 80 où elle fut dénoncée unilatéralement.
La prochaine loi organique pourrait donc poser le principe d'un " droit de tirage " défini conventionnellement au bénéfice du Parlement sur les moyens techniques de l'exécutif.
Rien n'empêcherait pour autant le Parlement de contracter avec des organismes indépendants. Mais, autant ceux-ci peuvent, dans divers domaines, disposer d'une réelle expertise, autant le bloc " finances publiques " échappe le plus souvent à celle-ci. Cette situation pose le problème des sources de l'information disponible en ce domaine dans notre pays. Elle sera l'un des points importants d'un prochain rapport confié à notre collègue Joël Bourdin. De fait, le ministère de l'économie et des finances et, plus généralement, les services statistiques des ministères, disposent d'un quasi-monopole en la matière. La diffusion externe de ces informations est insuffisamment développée. En pratique, cette situation empêche de construire des modèles de simulation fiables des phénomènes relatifs aux finances publiques.
La réforme de l'ordonnance doit être l'occasion de lever ces obstacles. Une exigence de mise à niveau de l'information statistique publique sera donc formulée.
* 21 Le Congrès des Etats-Unis dispose de deux organes propres, le Congressional Budget Office (CBO - environ 300 personnes) et le General Accounting Office (GAO - environ 1.000 personnes).