MERCREDI 21 JUIN 2000
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I. Audition de Mmes Eliane
Lancette et Isabelle Sargeni-Chetaud,
Secrétaires nationales du
Syndical national unitaire des instituteurs, Professeurs des écoles et
Professeurs d'enseignement général des collèges
(SNUIPP)
Les aides éducateurs dans le premier degré, exercent leurs activités dans un contexte profondément différent de ceux du second degré : le seul personnel de l'éducation nationale présent dans les écoles était jusqu'alors les enseignants. Dès lors, la présence d'aides éducateurs a pu permettre de faire émerger des besoins effectivement existants mais insuffisamment couverts par les enseignants.
En dehors des activités d'aide à la surveillance, à l'encadrement, certains besoins semblent pouvoir être identifiés :
- l'animation et la maintenance des bibliothèques,
- l'animation et la maintenance de l'outil informatique,
- l'aide administrative,
- l'aide à l'intégration des élèves handicapés, même si ce domaine reste plus marginal.
La mise en place du dispositif ne s'est accompagnée d'aucune concertation préalable avec les organisations d'enseignants et les personnels. Les deux premières années ont été largement des " années blanches " pour les aides éducateurs.
Ainsi, les seules formations qui étaient initialement proposées se limitaient en pratique aux formations proposées par le Centre national d'études à distance (CNED), une modalité de formation qui apparaît inadaptée : si 90 % des aides éducateurs du premier degré étaient inscrits au CNED, seuls 10 % suivaient réellement la formation proposée (ou imposée). Dans la mesure où une forte proportion des aides éducateurs avait interrompu leurs études, il leur était en effet difficile de suivre une formation à distance tout en travaillant entre 35 et 39 heures chaque semaine. En outre, le CNED a rencontré des difficultés pour répondre à toutes les demandes de formation.
Ces difficultés expliquent entre autres pourquoi le ministère de l'éducation nationale a annoncé, en 1999, l'arrêt du recrutement des aides éducateurs tant que les difficultés de formation n'étaient pas résolues. L'arrêt de recrutement ne concerne toutefois pas le remplacement des aides éducateurs sortant du dispositif, le turn over étant estimé à 20 % dans le premier degré.
On constate aujourd'hui une amélioration de l'offre de formation, mais elle reste insuffisante. Ainsi, les conventions signées entre le ministère de l'éducation nationale et les ministères de l'emploi et de la solidarité et celui de la jeunesse et des sports ne proposent que 7.000 formations.
Les conventions-cadres signées avec des entreprises pour le recrutement des aides éducateurs peuvent également entraîner certains risques. Dans la mesure où les entreprises sélectionnent les plus qualifiés, ce sont les aides éducateurs les moins qualifiés qui risquent de se retrouver sans perspective.
On constate déjà des refus de formations à des aides éducateurs sous prétexte que leur contrat doit s'achever à brève échéance, alors même que l'accès à la formation n'a été effectif qu'avec retard.
L'une des insuffisances majeures du dispositif est aujourd'hui son manque de cohérence territoriale.
De fortes disparités dans les profils des aides éducateurs recrutés existent, leur niveau de formation initiale étant par exemple bien plus élevé dans les départements du sud qu'en région parisienne.
De même, les conditions de travail n'ont été homogénéisées que très récemment. Ainsi, en matière de formation, les régimes appliqués différaient selon les académies. Dans certaines académies, la formation n'était pas autorisée pendant le temps de travail alors qu'elle l'était dans d'autres : environ 50 % des aides éducateurs n'ont pas été en mesure de suivre une formation pendant leur temps de travail. De même, des aides éducateurs ayant un même profil se voyaient refuser une formation dans un département, alors qu'elle était pourtant autorisée dans un autre département.
Certaines insuffisances du dispositif se révèlent persistantes.
- la méconnaissance par les services des rectorats des formations accessibles aux emplois-jeunes ;
- le risque d'une trop grande " poly-activité " des aides éducateurs, qu'il s'agisse de leurs fonctions ou de leurs lieux de travail ;
- un accès imparfait aux droits sociaux, notamment en matière de congés maladies ou d'accidents du travail (pour les accidents du travail, seul 60 % du salaire est pris en charge par la sécurité sociale). Ce retard dans l'accès aux droits sociaux s'explique par le recours à des contrats de droit privé ;
- la trop faible préparation de la sortie du dispositif, les dernières déclarations du ministre de l'éducation nationale ayant laissé entendre une future pérennisation des emplois (notamment en informatique), mais non des personnes ;
- le non-remboursement des frais de déplacement qui subsiste dans certaines académies alors que le ministère a pourtant donné la consigne de payer ces déplacements.
Dans ces conditions, plusieurs propositions peuvent être formulées pour les écoles et les aides éducateurs :
- la création de postes d'enseignants supplémentaire, les aides éducateurs pouvant passer ces concours ;
- la création d'emplois publics équivalant à ceux de maître d'internat-surveillant d'externat (MI-SE) dans le second degré (aide à l'encadrement...) ;
- la création d'emplois statutaires dans les domaines de la documentation ou de l'informatique avec une formation adéquate ;
- la validation des années passées en tant qu'aide éducateur pour ceux qui intégreront la fonction publique.