6. Organiser des Assises sur la solvabilisation des emplois-jeunes

Par cette proposition, votre rapporteur tient à donner un caractère public au débat sur la solvabilisation des emplois-jeunes.

Il importe de lever les incertitudes qui existent aujourd'hui sur un certain nombre d'emplois créés par des associations et qui bénéficient d'une prise en charge totale grâce aux compléments de rémunération couverts par des subventions versées soit par des établissements publics soit par les collectivités territoriales.

La solvabilisation de ces emplois ne paraît pas envisageable dès lors que l'aide de l'Etat correspondant à 80 % des charges salariales sera parvenue à terme.

S'agissant des emplois-jeunes créés par les associations à l'aide de subventions publiques : il serait trompeur pour ces dernières de penser que les collectivités territoriales pourront venir compenser la disparition de l'aide à la rémunération versée par l'Etat lorsque celle-ci arrivera à terme. Elles seront donc placées inéluctablement devant la perspective de faire financer directement l'emploi-jeune par l'usager ou de voir le titulaire de l'emploi-jeune rejoindre un autre emploi en relation plus ou moins directe avec les fonctions qu'il occupait.

Les futures " Assises sur la solvabilisation " devraient porter à la fois sur les emplois publics et sur les emplois de droit privé.

S'agissant des emplois publics , il convient de faire publiquement le point avec les grands syndicats de la fonction publique sur les aménagements de la grille des statuts de la fonction publique d'Etat et de la fonction publique territoriale qui pourraient s'avérer utiles à l'issue de la période de cinq ans : il est vraisemblable que certaines catégories d'emplois-jeunes tels que les aides éducateurs dans le domaine des nouvelles technologies de l'information et de la communication répondent à des besoins nouveaux et qu'ils peuvent ainsi être pérennisés de manière statutaire. Les conséquences pourront alors clairement être tirées sur les modalités de recrutement dans les nouveaux corps ou cadres d'emploi ainsi que sur l'ampleur des effectifs à recruter.

Concernant les emplois de droit privé , principalement les emplois du secteur associatif, il convient de faire la part des emplois-jeunes qui ont pu générer des flux de ressources susceptibles de les financer, de ceux qui ne pourront perdurer sans un taux important de subvention.

Ces Assises devront donc réunir à la fois les partenaires associatifs mais aussi les représentants des entreprises du secteur marchand.

Concernant les emplois-jeunes du secteur associatif, les Assises permettraient de faire le point sur le nombre et la nature des postes d'emplois-jeunes qui peuvent s'autofinancer après avoir créé leur propre demande.

L'objectif serait ensuite d'examiner dans quelle mesure une aide à la solvabilisation de la demande pourrait pallier les effets de l'arrivée à terme de la subvention versée par l'Etat au titre du financement des emplois-jeunes. Le dispositif des emplois-jeunes a permis sans doute de créer les structures susceptibles d'offrir des prestations nouvelles ; il importe dans une seconde phase de consolider cette démarche en définissant les aides notamment fiscales qui permettront de soutenir la demande auprès des consommateurs.

Enfin, pour les emplois qui ne peuvent être solvabilisés, les Assises envisageront dans quelles conditions une reconversion des emplois-jeunes du secteur associatif vers le secteur privé pourrait être opérée : la mise en place d'accord-cadre de recrutement, à l'image de ceux qui ont été mis en place sous l'égide par le ministère de l'Education nationale, pourrait ainsi être conclue ; l'Etat pouvant servir de relais aux multiples associations qui ne peuvent individuellement contracter directement avec les grandes entreprises.

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En conclusion, il convient de s'interroger sur l'opportunité ou non de réviser le dispositif des emplois-jeunes.

Il est important de rappeler que le mécanisme des conventions pluriannuelles conclues entre l'Etat et des organismes publics ou à but non lucratif ne connaît pas de limitation légale de durée . L'aide forfaitaire, dont le montant et la durée sont fixés par décret, a été effectivement prévue pour une durée de cinq ans. Mais cette durée correspond à celle de l'aide et non pas du dispositif. En d'autres termes, au-delà de 2002 un organisme aura toujours la faculté de demander la conclusion d'une nouvelle convention d'emploi-jeune. Si celle-ci est approuvée, il bénéficiera sauf modification du décret, de l'aide de cinq ans égale actuellement à 80 % du SMIC. Les années 2003 ou 2004 devraient être des années de forte sollicitation pour l'Etat puisque la majeure partie des conventions conclues en 1998 ou en 1999 arriveront alors à échéance.

Sera-t-il fondé, au-delà de 2002, de maintenir en l'état un dispositif aussi incitatif et aussi large de lutte contre le chômage des jeunes ?

Aujourd'hui, 60 % des jeunes trouvent un emploi en moins de neuf mois à la sortie de leurs études alors que ce taux ne dépassait pas 40 % en 1997. Seuls les jeunes les moins qualifiés ne connaissent pas de diminution sensible de la durée moyenne de recherche d'un premier emploi.

Mais se pose dès maintenant la question du dispositif qui devra succéder aux emplois-jeunes à l'issue de la période actuelle. La solution serait soit d'abroger le dispositif à compter d'octobre 2002, si la situation de l'emploi des jeunes continue à s'améliorer, soit de cibler le dispositif sur les publics les plus défavorisés.

En tout état de cause, votre rapporteur estime difficile d'envisager le maintien du dispositif actuel au-delà de 2002 en raison de son coût qui n'apparaît plus justifié au regard de la situation.

Au fond, les emplois-jeunes ont constitué une réponse d'urgence face à une aggravation sensible du chômage des jeunes résultant de circonstances conjoncturelles et d'un effet démographique.

Cette réponse a donné des résultats tangibles, à un prix qui est loin d'être négligeable, d'autant que l'amélioration de la conjoncture le rend aujourd'hui moins nécessaire.

Il devient évident que l'Etat, pour l'avenir, doit se donner les moyens d'être alerté des possibles à-coups conjoncturels pouvant frapper les jeunes sortant du cycle scolaire et sensibiliser les acteurs publics et privés de l'économie à la nécessité de réguler les flux de recrutement au fil des ans.

En outre, l'Etat doit veiller à ce que ne perdure pas une forme de fracture sociale à l'égard des jeunes les moins qualifiés ou victimes de discrimination.

Pour améliorer la capacité de réaction de votre appareil public, votre commission souhaite une réorganisation des structures administratives voire gouvernementales autour de la notion de " premier emploi ".

Il devient nécessaire de faire converger les efforts de certains services de l'Education nationale, de l'Emploi et de la Formation professionnelle pour relever un défi commun : permettre aux jeunes d'accéder rapidement et dans les meilleures conditions à leur premier emploi.

Cette restructuration administrative demandera sans doute un changement profond des mentalités, mais l'objectif commun devrait permettre de dépasser les rivalités et d'atténuer les réticences.

Si cette réforme devait voir le jour, les emplois-jeunes apparaîtraient alors pour ce qu'ils sont réellement : une réponse justifiée par les circonstances mais passablement rudimentaire dans son esprit comme dans ses méthodes.

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