E. UNE INCERTITUDE GRANDISSANTE SUR L'AVENIR DU DISPOSITIF
Cette incertitude est d'autant plus grande que le Gouvernement s'est bien gardé d'y répondre précisément depuis l'origine, si ce n'est en évoquant un " engagement moral de ne pas laisser les jeunes sur le chemin ".
Deux questions très concrètes se posent et attendent une réponse dans les meilleurs délais.
Que deviendront les jeunes à l'issue de leur contrat ?
Comment les postes créés seront-ils pérennisés ?
C'est à l'aune des réponses à ces questions qu'il appartiendra de définir l'avenir du dispositif.
1. L'inquiétude des jeunes
Plus de trois ans après le lancement du programme " Nouveaux services - Emplois-jeunes " et à moins de deux ans de l'échéance pour les premiers jeunes entrés dans le dispositif, les questions des jeunes sur leur avenir professionnel restent sans réponse.
Après avoir entretenu un réel espoir chez les jeunes, le Gouvernement, par son silence, alimente désormais leur inquiétude, voire pour certains leur exaspération.
Pour l'instant, les jeunes restent en effet dans l'incertitude quant à leur avenir professionnel.
Si une intégration dans la fonction publique par le biais de concours réservés semble se dessiner pour les adjoints de sécurité de la Police nationale, la question demeure entière dans l'Education nationale, dans les collectivités locales et dans les associations.
L'inquiétude des jeunes est encore aggravée par une certaine cacophonie gouvernementale se confirmant au gré des remaniements ministériels. Tel est en particulier le cas dans l'Education nationale. Alors que le précédent ministre affirmait que les aides éducateurs n'avaient pas vocation à rester dans la fonction publique et cherchait à inciter des entreprises à les recruter, le nouveau ministre prévoit désormais d'en faire des policiers... 12 ( * )
2. Les ambiguïtés de la pérennisation
L'inquiétude des jeunes pour leur avenir est encore renforcée par les ambiguïtés de la démarche de pérennisation.
Or, il est clair que la démarche de pérennisation reste aujourd'hui l'un des points faibles du dispositif.
Le Gouvernement se veut pourtant rassurant, en multipliant les déclarations optimistes.
Ainsi, lors de son audition par le groupe de travail, le représentant du ministre de l'Emploi et de la Solidarité affirmait que plus de 50 % des services créés seraient pérennisés.
Le 4 octobre dernier, la presse reprenait les propos du ministre qui déclarait que " 30 % des emplois, comme ceux orientés vers le tri sélectif des ordures ménagères, pourraient se financer eux-mêmes une fois l'aide de l'Etat retirée " 13 ( * ) .
Le lendemain, elle affirmait que " 55 % des emplois-jeunes relevant des associations ont d'ores et déjà été solvabilisés " 14 ( * ) .
Les variations dans les chiffres annoncés incitent cependant d'autant plus à la prudence que le Gouvernement ne précise pas comment ces emplois seront pérennisés.
En réalité, la pérennisation des emplois passe par une double condition : leur professionnalisation et leur solvabilisation.
En effet, pour assurer la pérennité de l'emploi, il faut que celui-ci soit en mesure de répondre efficacement à un besoin précis -c'est la professionnalisation des activités-, mais il faut également qu'il soit financé à l'expiration de l'aide publique -c'est la solvabilisation.
Ces deux conditions ne sont aujourd'hui pas réunies.
La professionnalisation ne s'est mise en place que tardivement au travers des plates-formes régionales de professionnalisation qui ont justement pour mission d'organiser le processus de professionnalisation au travers d'un plan d'action dans chaque région, en coordination avec la cellule nationale de professionnalisation.
Or le bilan de ces plates-formes est à l'heure actuelle très mitigé. Mises en place tardivement, ces plates-formes n'ont été réellement opérationnelles que courant 1999. Leur action s'est en outre, à l'origine, concentrée sur la constitution de référentiels de nouveaux métiers susceptibles d'être pérennisés, référentiels dont l'utilité profonde a largement échappé à votre commission, ceux-ci ressemblant curieusement aux référentiels de métiers proposés dès 1997.
Plus récemment, les plates-formes se sont réorientées vers les missions plus opérationnelles, après avoir pris conscience qu'il n'existait pas d'offre de formation réellement adaptée aux besoins de professionnalisation des jeunes dans leurs nouvelles activités. Elles cherchent désormais à mettre en place des formations nouvelles enfin destinées à former les jeunes à leur nouveau métier. Mieux vaut tard que jamais...
Mais, si le volet professionnalisation est insuffisant, le volet solvabilisation est lui inexistant.
Les employeurs ne sont pas incités à préparer la solvabilisation des nouvelles activités et beaucoup semblent s'en tenir à une simple anticipation de la prolongation des aides publiques.
* 12 La convention signée le 27 juillet dernier entre le ministre de l'Education nationale et le ministre de l'Intérieur prévoit en effet d'organiser une préparation spécifique de 3.000 aides éducateurs en trois ans pour passer les concours externes de la Police nationale.
* 13 Le Figaro, 4 octobre 2000.
* 14 Le Monde, 7 octobre 2000.