C) Les nouveaux systèmes de sûreté
La
grande nouveauté apportée par l'EPR est la prise en
considération, dès la conception, de l'éventualité
d'une fusion du coeur du réacteur nucléaire. D'une manière
générale, les améliorations portent sur la
prévention des accidents, le renforcement des systèmes de
sauvegarde, la récupération et le refroidissement du coeur en cas
de fusion, et la quasi-élimination de tout rejet radioactif gazeux ou
liquide hors de la double enceinte en béton. Pour cela :
• Les systèmes affectés aux fonctions de
sûreté (injection de sécurité, alimentation de
secours des générateurs de vapeur, refroidissement des
composants, alimentations électriques de secours) sont divisés en
4 trains indépendants et géographiquement
séparés. Ils peuvent être alimentés
séparément par un diesel affecté à chacun d'eux.
• L'ensemble des bâtiments du réacteur, du combustible et
des systèmes de sûreté, situé sur un même
radier, est conçu pour résister aux séismes et à
des ondes de choc.
• Les bâtiments contenant deux des trains sont "bunkerisés"
pour résister aux chutes d'avions militaires lourds
8(
*
)
. Leur structure interne est
découplée des structures externes pour minimiser la transmission
des vibrations. Les bâtiments des deux autres trains, "non
bunkerisés", sont à l'opposé l'un de l'autre, supprimant
le risque d'être affectés tous les deux lors d'un même
accident.
Le bâtiment réacteur, avec ses deux épaisseurs, assure une
protection renforcée dans les deux sens : celle de l'environnement
et celle du réacteur :
. le mur interne en béton précontraint (comme le N4), avec
une pression de conception portée à 6,5 bars, est
destiné à contenir le fluide primaire vaporisé, selon les
scénarios d'accidents les plus graves, avec un taux de fuite
inférieur à 1 % par jour du volume total
confiné ;
. le mur externe en béton armé est conçu (comme le
Konvoï) pour résister à des agressions externes (chutes
d'avions militaires) ;
. les éventuelles fuites de l'enceinte interne sont
récupérées entre les deux enceintes et filtrées.
• Le puits de cuve est aménagé pour la
récupération du coeur fondu, ou corium. La réserve d'eau
primaire servant normalement aux rechargements est stockée dans le
bâtiment réacteur pour servir au refroidissement du coeur fondu.
L'hydrogène généré par la décomposition de
l'eau sur le zircaloy des gaines de combustible est recombiné pour
éviter tout risque d'explosion.
• Le volume interne libre des composants primaires est augmenté.
De ce fait, l'opérateur dispose de plus de temps pour réagir
(particulièrement en cas d'accident tel que la perte de
réfrigérant primaire) :
. l'augmentation du volume du pressuriseur, par son effet de tampon,
évite un certain nombre d'ouvertures des soupapes de
sûreté ;
. l'augmentation du volume des générateurs de vapeur donne
une marge supplémentaire, en cas de perte de leurs alimentations en
eau ;
. le circuit primaire est protégé contre les surpressions
par un ensemble de soupapes pilotées combinant les conceptions du N4 et
du Konvoï.
• Le contrôle-commande est conçu pour minimiser les erreurs
humaines, et en particulier donner du temps (30 minutes en
général) à l'opérateur pour prendre sa
décision, que ce soit en fonctionnement normal, incidentel ou
accidentel. Une information claire et appropriée lui est fournie par des
systèmes informatiques. L'ensemble du contrôle-commande
bénéficie des derniers développements
réalisés en France (N4) et en Allemagne (Konvoï).
L'interface homme-machine est constitué d'écrans pour la conduite
en toutes circonstances en salle de commande. Celle-ci est doublée d'une
zone spécialement affectée à la sûreté et
équipée de moyens de secours pour la conduite post-accidentelle.
Une question importante, qui résulte de ces améliorations,
sera de définir les possibilités de leur intégration dans
les centrales en service, si cela est techniquement possible, à
l'occasion des révisions décennales.