CHAPITRE II :
LES RECETTES ET LES DÉPENSES
I. LES RECETTES
Evolution des recettes nettes totales du budget général de 1997 à 1998
|
1998 |
1997 |
% |
Recettes fiscales brutes |
1.769,3 |
1.682,2 |
5,2% |
Remboursements et dégrèvements |
-316,9 |
-265,6 |
19,3% |
Recettes fiscales nettes |
1.452,3 |
1.416,6 |
2,5% |
Recettes non fiscales |
159 |
157,8 |
0,7% |
Prélèvements sur recettes |
-254,4 |
-252,8 |
0,6% |
au profit des collectivités locales |
-162,8 |
-164,9 |
-1,3% |
au profit de l'Union européenne |
-91,6 |
-87,8 |
4,3% |
Total des recettes nettes |
1.355,6 |
1.320,7 |
2,6% |
Fonds de concours |
65,0 |
64,5 |
0,8% |
Total recettes nettes du budget général |
1.421,9 |
1.386,2 |
2,6% |
Source : Projet de loi de règlement
définitif
du budget de 1998
Les recettes nettes du budget général se sont
élevées à 1.421,9 milliards de francs en 1998, soit
une progression de 2,6 %, moins forte toutefois que celle
enregistrée en 1997 (+ 3 %), qui avait subi les effets de la loi
portant mesures urgentes à caractère fiscal et financier (MUFF)
du 10 novembre 1997.
La croissance d'ensemble des recettes est imputable presque
intégralement, comme en 1997, à la progression des recettes
fiscales
nettes des remboursements et dégrèvements
d'impôts (+ 2,5 %) alors que les recettes non fiscales, les
fonds de concours et les prélèvements sur recettes sont
relativement stables, avec des progressions inférieures à
1 %.
Cependant, le chiffre de progression des recettes budgétaires cache une
situation bien particulière : les recettes brutes du budget
général ont en effet progressé de 5,3 % en 1998, mais
cette progression très importante a été réduite de
moitié par l'ampleur des dégrèvements et remboursements
d'impôts (+ 19,3 %).
A. L'ÉVOLUTION DES PRINCIPALES RECETTES FISCALES
Les recettes fiscales en 1998
|
1998 |
1997 |
% |
Impôts directs |
664,7 |
626,7 |
+ 6,1 |
dont impôt sur le revenu |
304,0 |
293,4 |
+ 3,6 |
impôt sur les sociétés |
226,0 |
202,0 |
+ 12,0 |
impôt net sur les sociétés |
184,7 |
172,2 |
+ 7,3 |
impôt de solidarité sur la fortune |
11,1 |
10,1 |
+ 9,9 |
Impôts indirects |
1.104,6 |
1.055,5 |
+ 4,7 |
dont TVA |
807,5 |
755,4 |
+ 6,9 |
TVA nette |
641,9 |
626,1 |
+ 2,5 |
TIPP |
153,9 |
150,7 |
+ 2,1 |
Recettes fiscales brutes |
1.769,3 |
1.682,2 |
+ 5,2 |
Dégrèvements et remboursements d'impôts |
-316,9 |
-265,6 |
+ 19,3 |
Recettes fiscales nettes |
1.452,4 |
1.416,6 |
+ 2,5 |
Sources : Cour des comptes et rapport de présentation du compte général de l'administration des finances 1998
1. Les impôts perçus par voie de rôle
Après la diminution de 1997,
l'impôt sur le
revenu
recommence à progresser (+ 3,6 %) en 1998, pour
atteindre 304 milliards de francs, soit près de 10 milliards de francs
de produit supplémentaire par rapport à la loi de finances
initiale.
Alors que les allégements intervenus en 1997 avaient eu un
effet non négligeable sur
l'impôt sur le revenu, qui n'a
progressé que de 2,8 % en 4 ans (1994-1998),
l'année
1998 marque donc la reprise, à un rythme soutenu de l'augmentation du
produit de cet impôt.
Il faut remarquer que l'année 1998 est marquée par l'abandon de
la réforme de l'impôt sur le revenu votée en 1997 pour les
impôts 1998 et suivants. Si cette réforme avait été
maintenue, elle aurait eu un impact négatif sur les recettes de 17,8
milliards de francs.
Le produit net de
l'impôt sur les sociétés
enregistre une augmentation encore très importante (+ 7,3 %),
à 184,7 milliards de francs, après le " bond " de
1997 (+ 20,3 %). La moindre progression par rapport à 1997
s'explique à la fois par l'impact moins sensible de la loi
" MUFF " et par l'importance des remboursements (41,3 milliards
de francs, soit + 38,6 %).
2. Les autres impôts
Les
impôts indirects
progressent globalement de 4,7 %, soit
davantage qu'en 1997 (+ 3,8 %).
Alors que les encaissements de
taxe sur la valeur ajoutée
(TVA)
brute progressent très fortement en 1998 (+ 6,9 %),
l'importance exceptionnelle des remboursements (+ 28,1 %)
réduit la progression de la TVA nette à 2,5 %, soit une
progression nettement inférieure à la moyenne annuelle de la TVA
nette sur 1994-1998. Le produit de la TVA s'élève, en
définitive à 641,9 milliards de francs, soit seulement 5
milliards de plus que les prévisions de la loi de finances initiale, et
9 milliards de francs de moins que les évaluations de la loi de finances
rectificative.
La
taxe intérieure sur les produits pétroliers
(TIPP)
progresse de 2,1 %, soit moins vite que la moyenne des recettes fiscales,
pour atteindre 153,9 milliards de francs.
3. Les remboursements et dégrèvements d'impôts
Les
remboursements et dégrèvements retenus pour déterminer le
montant des recettes fiscales nettes s'établissent en 1998 à
316,92 milliards de francs contre 265,59 milliards en 1997, soit une
très forte progression par rapport à 1997 (+ 19,3%), ce qui,
selon la Cour des comptes,
" ne laisse pas de surprendre ".
Les remboursements et dégrèvements sur contributions
directes
(inscrits au chapitre 15-01 du budget des charges communes)
augmentent de 14,6 %, pour atteindre 147,6 milliards de francs. Cette
hausse est essentiellement imputable aux restitutions d'impôt sur les
sociétés (+ 29,7 %), aux restitutions sur les revenus de
capitaux mobiliers (+ 17,8 %) et aux admissions en non-valeur (+
17,1 %).
Les remboursements sur produits indirects
(inscrits au chapitre 15-02 du
budget des charges communes) atteignent 169,1 milliards de francs, en raison de
la très forte augmentation des remboursements de TVA
(165,6 milliards de francs), soit une hausse de 28,1% par rapport à
1997.
4. Des évolutions qui suscitent des interrogations
La Cour
des comptes relève tout d'abord des
problèmes de
méthodes comptables
pour l'enregistrement des recettes fiscales.
Elle constate "
de fréquents écarts entre la balance de
sortie d'un exercice et la balance d'entrée de l'exercice suivant ainsi
qu'un manque de cohérence dans le traitement comptable des recettes
recouvrées par la direction générale de la
comptabilité publique et par la direction générale des
impôts
". Elle observe toutefois "
l'amélioration
de la nomenclature des remboursements et dégrèvements
".
Surtout,
la Cour des comptes s'interroge sur l'ampleur des remboursements et
dégrèvements d'impôts en 1998.
Lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 1998, votre
rapporteur s'était déjà interrogé sur la faiblesse
des réévaluations de recettes pour 1998, se demandant si les
estimations révisées ne présentaient pas une
sous-évaluation de plus-values de recettes fiscales, pourtant visibles
en cours d'année.
Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie
arguait alors de
" modifications techniques et calendaires "
.
Il invoquait également l'effet de la loi " MUFF " sur
l'impôt sur les sociétés. S'agissant de la TVA, il
expliquait que le dynamisme observé au cours des premiers mois de
l'année 1998, s'agissant des encaissements bruts, devrait être
tempéré par des remboursements et dégrèvements
d'impôts importants en fin d'année, ajoutant que la baisse notable
des importations de marchandises en provenance des pays tiers, constatée
depuis le recouvrement de septembre, devait avoir des incidences importantes en
fin d'année.
Votre rapporteur général estimait ces explications
"
largement insuffisantes pour expliquer que les recettes fiscales
nettes ne progresseraient, en définitive, que de 11 milliards de
francs par rapport à la loi de finances pour 1998 "
. Il
ajoutait en relevant que "
l'évolution attendue en
matière de TVA paraît improbable
".
Deux explications lui semblaient alors envisageables : ou l'estimation
était effectivement sous-évaluée, ou le ralentissement de
la croissance à la fin de 1998 était tel que les encaissements de
TVA se ralentiraient considérablement.
Au vu des résultats de l'exécution 1998, il apparaît que
les recettes fiscales nettes ont encore moins progressé
qu'envisagé par rapport aux prévisions de la loi de finances
rectificative (1.452,3 milliards de francs contre 1.459,1 milliards de francs),
en raison de l'ampleur inattendue des remboursements et
dégrèvements d'impôts, concernant particulièrement
la taxe sur la valeur ajoutée.
Votre rapporteur note qu'il est très difficile de justifier l'ampleur de
ces remboursements, d'autant que dans son rapport préliminaire sur
l'exécution de la loi de finances pour 1998, la Cour des comptes,
observant que les remboursements de TVA (165,6 milliards de francs) ont
progressé de 28% (36,3 milliards de francs) reconnait l'absence
d'explications plausibles: "
il est difficile d'expliquer une telle
augmentation
".
Dans son rapport définitif, la Cour des comptes maintient que
l'augmentation des remboursements de TVA "
reste largement
inexpliquée même si la direction générale des
impôts met en avant plusieurs phénomènes
extra-économiques d'ordre législatif (mesures nouvelles),
administratif (grèves, nouvelles procédures de contrôle) ou
juridique (restructurations d'entreprises) dont l'importance paraît
surestimée eu égard à l'ampleur des variations
enregistrées ".
Comme le notait la Cour des comptes dans son rapport préliminaire
"
on peut penser que des reports ont été effectués
en 1997 sur 1998, et qu'à l'inverse, les remboursements ont
été accélérés en fin d'année
1998
".
L'augmentation des remboursements de TVA en 1998 :
les explications du gouvernement
Plusieurs causes ont été avancées pour
expliquer l'accroissement des remboursements d'impôts :
- le développement des exportations et la reprise des
investissements ;
- l'incidence de l'assujettissement au taux réduit de TVA pour les
travaux de construction, de livraisons à soi-même et les
réhabilitations de logements locatifs sociaux ;
- la bonne tenue de la trésorerie des entreprises à la fin
1997 ;
- la mise en place de Réseau ferré de France, qui aurait
demandé 6 milliards de francs de remboursements ;
- les grèves des services informatiques fin 1997.
Votre rapporteur regrette donc que les seuls effets de " reports "
ou " d'accélérations " puissent sensiblement modifier
le résultat d'exécution de la loi de finances pour 1998.
En effet, l'ampleur de l'augmentation des remboursements et
dégrèvements d'impôts exerce à la fois un effet
important sur la progression globale des recettes nettes et sur le
résultat final de l'exécution du budget de 1998.
La moindre progression des recettes budgétaires nettes a très
légèrement réduit l'ampleur de la réduction des
déficits (qui ont été ramenés à 2,9 %
du PIB) mais a surtout permis de constater une légère diminution
des prélèvements de l'Etat, compensant strictement l'augmentation
des prélèvements sociaux et permettant ainsi d'afficher une
stabilité des prélèvements obligatoires.