II. L'ASSEMBLÉE NATIONALE A DIFFÉRENCIÉ LE RÉGIME DE LA RENTE DE CELUI DU CAPITAL
L'Assemblée nationale, saisie deux ans plus tard par le
Gouvernement, n'a pas remis fondamentalement en cause les intentions
manifestées par le Sénat. Elle a cependant adopté
un
nouvel ordonnancement
des dispositions du code civil relatives à la
prestation compensatoire fondé sur la
différenciation du
régime de la rente viagère et de celui du capital.
Au vu des dispositions adoptées, le capital redeviendrait la
règle et la rente viagère l'exception. La rente viagère
serait révisable. Le capital ne le serait pas mais ses modalités
de paiement pourraient être aménagées. Dans les deux cas,
la prestation resterait transmissible aux héritiers du débiteur.
De huit articles, la proposition est ainsi passée à
17 articles, seul
l'article premier ter
, prévoyant
la possibilité de verser la prestation compensatoire sous forme de
capital par abandon de biens en propriété ou pour l'usage et
l'habitation, ayant été adopté sans modification.
L'Assemblée nationale a en premier lieu fixé le principe du
versement de la prestation compensatoire sous forme de
capital
pour les
divorces contentieux (
art. premier, art. 273 du code civil
).
L'attribution d'une
rente viagère
resterait néanmoins
possible à titre exceptionnel, et par décision
spécialement motivée, non plus en raison de la consistance des
biens du débiteur, mais en raison de l'âge ou de l'état de
santé du créancier. Le juge prendrait en compte les
éléments d'appréciation énumérés
à l'article 272 du code civil concernant l'évaluation des
besoins et des ressources des conjoints (
art. 2, art. 276-1 du
code civil
).
Le juge n'aurait donc plus la possibilité de fixer des prestations sous
forme de rente à durée limitée.
Les prestations compensatoires versées sous forme de capital et de rente
viagère obéiraient à des régimes distincts.
Le
régime du versement en capital
est inscrit à
l'article 276 du code civil
par
l'article 1
er
quater
de la proposition aux
termes duquel :
- le juge peut autoriser le paiement échelonné du capital sur une
durée maximum de huit ans, par versements mensuels ou annuels
indexés comme en matière de pensions alimentaires
;
- à la mort du débiteur, la charge du capital passe à ses
héritiers ;
-
le montant du capital n'est pas révisable
. Seules les
modalités de paiement fixées par le juge le sont, sur demande du
débiteur, en cas de changement notable de sa situation, ou sur demande
des héritiers du débiteur. Le juge peut alors, à titre
exceptionnel, par décision spéciale et motivée, autoriser
le versement du capital sur une durée supérieure à huit
ans ;
- le débiteur ou ses héritiers peuvent se libérer à
tout moment de la charge du capital. Le créancier lui-même, peut,
après la liquidation du régime matrimonial, saisir le juge d'une
demande en paiement du solde du capital.
Le
régime de la rente viagère
est fixé par les
articles 2 bis, 2 ter A et 2 ter B
de la
proposition aux termes desquels :
- la charge de la rente viagère passe à
l'hérédité sous déduction de plein droit de la
pension de réversion éventuellement versée du chef du
conjoint décédé (
art. 2 bis, art. 276-2
du code civil
) ;
- la rente peut être révisée à la baisse ou
supprimée en cas de changement important dans les ressources ou les
besoins des parties, à la demande du débiteur et de ses
héritiers (
art. 2 ter A, art. 276-3 nouveau du
code civil
) ;
- à tout moment, le débiteur ou ses héritiers peuvent
demander la capitalisation de la rente. Cette action est également
ouverte au créancier, s'il établit qu'une modification de la
situation du débiteur permet cette substitution, notamment lors de la
liquidation du régime matrimonial (
art. 2 ter B,
art. 276-4 nouveau du code civil
).
S'agissant des
divorces sur requête conjointe
, la convention
pourra prévoir un terme extinctif ou une condition résolutoire et
le versement d'une rente à durée déterminée restera
possible (
art. 2 sexies, art. 278 du code civil
).
L'Assemblée nationale a développé les
dispositions
transitoires
prévues par le Sénat en distinguant le cas des
diverses rentes en cours de versement :
- l'article 4
prévoit la révision des rentes
viagères et leur transformation en capital, dans les mêmes
conditions que pour les rentes à venir.
- l'article 5
prévoit les modalités de
révision ou de transformation en capital des rentes temporaires ;
-
l'article 6
donne la possibilité au débiteur de
demander au juge de décider que le montant de la pension de
réversion touchée du chef du conjoint décédé
pourra venir en déduction de la rente ;
-
l'article 7
applique les dispositions de la loi aux
instances en cours.
L'Assemblée nationale a, en outre, complété par la
durée du mariage et la situation professionnelle des époux au
regard du marché du travail la liste des critères pris en compte
par le juge pour définir les besoins et les ressources des parties et
fixer le montant de la prestation compensatoire
(
art. 1
er
A, art. 272 du code civil
).
Elle a également étendu au versement en capital les garanties qui
pourraient être apportées au versement de la rente, sans modifier
les garanties prévues par le Sénat (
art. 2 ter,
art. 277 du code civil
).
Elle a enfin admis la compétence du juge aux affaires familiales
prévue par le Sénat pour la révision de la prestation
compensatoire en précisant que ce juge serait également
compétent s'agissant de la révision de ses modalités de
paiement (
art. 2 quater, art. 247 du code civil
).