II. LA PROPOSITION DE LOI N° 254 : UNE " BOÎTE À OUTILS " POUR LA FERTILITÉ ÉCONOMIQUE DES TERRITOIRES
Afin de
favoriser
la création et le développement d'entreprise dans
une optique d'aménagement du territoire
, votre Commission des
Affaires économiques a constitué, en juin 1998, un groupe de
travail "
Nouvelles entreprises et territoires
",
composé de 36 sénateurs, sous la présidence de
Jean-Pierre Raffarin, qui a rédigé la proposition de loi
aujourd'hui soumise à l'examen de votre commission.
Conformément à la vocation de la Haute Assemblée, ce
groupe a souhaité ancrer sa réflexion dans une logique de
développement local, pour donner aux territoires les moyens d'une
nouvelle fertilité.
La proposition de loi issue de ces travaux veut offrir une véritable
"
boîte à outils " aux acteurs du
développement local
,
en même temps qu'une série de
mesures à caractère national directement destinées aux
créateurs d'entreprises.
Si le groupe de travail, dont votre rapporteur a eu l'honneur d'être
rapporteur, a focalisé son attention sur la "
jeune
entreprise
", entendue comme l'entreprise, sous forme sociale ou
individuelle, depuis sa gestation et jusqu'à la fin de ses trois
premières années de vie, aucune des étapes
ultérieures de sa croissance n'a été oubliée, qu'il
s'agisse du
développement
ou même de la
transmission
, qui est un levier d'action important pour conserver et
développer l'activité, notamment en milieu rural et urbain
difficile.
La proposition de loi propose, en 23 articles, structurés en
4 titres,
18 mesures concrètes pour la création et
le développement des entreprises sur les territoires
.
Sans détailler ici le contenu de ces mesures, qui sera examiné
dans le commentaire d'articles du présent rapport, votre rapporteur
souhaite toutefois décrire brièvement leur philosophie
d'ensemble.
A. LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DES ZONES FRAGILES
Depuis
la loi d'aménagement du territoire du 4 février 1995 et le
Pacte de relance pour la ville de 1996, qui ont suscité un immense
espoir, le développement économique des territoires fragiles n'a
pas été -et c'est un euphémisme- au rang des
priorités nationales.
Le silence assourdissant de la loi d'aménagement du territoire du
25 juin 1999 en matière économique -dénoncé
notamment par le Sénat- n'est qu'un exemple, certes
particulièrement frappant, d'une situation souvent ressentie sur le
terrain comme un abandon.
Votre commission estime que, notamment dans les zones rurales et dans les zones
urbaines sensibles, où ils sont le mieux à même de
suppléer l'initiative privée,
les acteurs publics locaux
doivent disposer d'outils efficaces de développement territorial. La
proximité est en effet facteur de souplesse et d'efficacité
.
Or, les initiatives se heurtent, parfois, à l'absence de
financements
appropriés et, souvent, à
l'inadaptation
des textes
, qui mettent le " développeur " public local
dans une inconfortable " zone grise " juridique. La présente
proposition de loi vise à donner aux acteurs publics de terrain les
moyens légaux pour fédérer les initiatives de tous les
partenaires locaux pour l'accompagnement humain, juridique et financier du
créateur, ainsi que pour faire émerger les capitaux, notamment en
phase d'" amorçage " qui accompagnent le porteur de projet
dès l'origine.
Plusieurs outils sont proposés :
-
des fonds communs de placement de proximité
(
articles 1
et 2
) pour développer les fonds propres des entreprises à
partir de l'épargne de proximité, dans les zones où elle
peut faire défaut (zones peu denses ou zones urbaines sensibles) en
assurant une mutualisation des risques et un professionnalisme dans la
sélection des projets ;
-
une généralisation des " incubateurs " et des
fonds " d'amorçage "
(
articles 3 et 4
) qui
s'accompagne d'une sécurisation de l'intervention des
collectivités locales dans ces structures. Les
" incubateurs ", sorte de " couveuses " des
créateurs d'entreprise, offrent un accompagnement professionnel pour
tous les aspects de la création : expertise en matière de
développement, d'industrialisation, de production ; expertise
juridique en propriété intellectuelle, droit des
sociétés, droit fiscal, droit social ; expertise
financière avec l'aide à l'élaboration du plan d'affaires
(" business plan ") et la recherche de partenaires financiers ;
analyse de marché. Les fonds d'amorçage remédient, quant
à eux, à une des principales faiblesses du système
français : le financement du
" pré-démarrage " ;
-
une incitation à la mise en réseau des entreprises
(
article 5
) pour développer la solidarité
territoriale ;
-
une consécration de l'aide que les collectivités
apportent
-en marge de la loi pour l'instant-
aux organismes distribuant
des prêts d'honneur
, ou des avances remboursables -comme par exemple
les plates-formes d'initiative locale- organismes d'accompagnement avant tout,
qui ont montré leur efficacité en matière de
création d'entreprises (
article 6
) ;
-
une incitation à la transmission anticipée des
entreprises dans les zones privilégiées d'aménagement du
territoire
(
article 7
) où le maintien de l'activité
est essentiel.