3. Deux problèmes non résolus : le financement des 35 heures et l'alignement du régimes des personnels
L'installation de France 2 et France 3 dans un siège commun, la perspective de regroupement au sein d'une société holding, suscitent très naturellement au sein du personnel des comparaisons de statut de nature à nourrir des revendications, que les perspectives d'application incertaines de la réduction du temps de travail ont eu tendance à stimuler.
a) La question des disparités
Les
revendications de parité ont constitué, au delà d'une
inquiétude diffuse sur l'avenir de la société, un des
moteurs de la grève qui a secoué France 3 en 1997.
Un protocole de sortie de grève, signé le
12 décembre 1997 prévoit une série de mesures
concernant principalement la poursuite du rapprochement des
rémunérations France 3 - France 2 et les besoins de
financement de la politique de développement régional. Une partie
de cette charge devait être financée par redéploiement au
sein du budget.
A la suite de cet accord, trois autres sociétés, Radio-France,
RFI et RFO ont conclu des accords similaires pendant le premier semestre 1998,
dont le coût total s'élève à près de
30 millions de francs hors charges patronales (plus de 40 millions de
francs avec charges) pour 1998, montant auquel il convient d'ajouter, à
France 3 uniquement, une enveloppe supplémentaire plafonnée
à 25 millions de francs (hors charges) pour 1999 et 2000, selon les
termes d'un protocole de levée de préavis de grève
signé en janvier 1999.
b) Les 35 heures
Les
entreprises du secteur de l'audiovisuel public sont exclues des aides publiques
destinées aux entreprises anticipant le passage à 35 heures
avant le 1
er
janvier 2000. Elle doivent, en conséquence,
financer le réduction du temps de travail sur leurs ressources propres.
Ainsi que le prévoit la loi, les modalités d'accompagnement de la
réduction du temps de travail seront déterminées dans le
cadre des procédures régissant ses relations avec les tutelles.
On peut rappeler que les modalités d'application des directives
générales concernant la réduction du temps de travail ont
été précisées aux représentants du secteur
public audiovisuel lors d'une réunion en juillet 1998 par les
représentants de la Direction du Budget et du Service juridique et
technique de l'information.
Les principes définis par les tutelles sont les suivants :
• prise en compte des situations réelles, des durées
effectives sur la semaine, sur l'année. Réalisation d'un
état des lieux préalable à l'ouverture des
négociations,
• toute négociation devra être encadrée par un
mandat, selon une procédure semblable à celle utilisée
pour les accords salariaux, dont le calendrier doit être homogène
pour tous les diffuseurs,
• les négociations sur la réduction du temps de
travail devront être couplées avec celles sur les salaires, dans
l'optique d'une modération salariale.
La réduction du temps de travail devra s'accompagner d'une
évolution de l'organisation du travail et d'une amélioration des
performances économiques de l'entreprise, ainsi que de la qualité
du service rendu au public. L'accord ne saurait reposer simplement sur la
hausse des subventions accordées par l'État.
Il avait été prévu qu'un état des lieux serait
établi pour préciser la durée du travail et sa
rémunération par services, fonctions, catégories, mais
aussi les règles et les pratiques en vigueur, notamment en
matière de contrôle des horaires.
La réduction du temps de travail a ainsi engagé un processus
de concertation qui s'est déroulé sur la base de ces directives
générales, suivant des modalités propres à chaque
société.
C'est ainsi que, par exemple, à
France 2
, ce processus a
donné lieu à la réalisation de fiches descriptives de
l'activité de chaque service de l'entreprise, sur la base desquelles a
été établi un projet économique et social transmis
aux autorités de tutelle en mars 1999.
Ce projet préconise le passage aux 35 heures sous des formes
diversifiées, la mise en place de modalités plus souples
d'organisation du travail, la redéfinition de procédures
précises en matière de fabrication des émissions, ainsi
que " le renforcement du rôle et des responsabilités de
l'encadrement et la réaffirmation des règles destinées
à favoriser la gestion des absences. ".
Ce projet ayant recueilli l'accord des autorités de tutelle, les
négociations ont pu commencer en septembre dernier.
Un processus analogue est en cours à
France 3,
à
ceci près que la négociation était compliquée par
le fait que le projet économique et social de la chaînes n'avait
pas reçu l'accord des autorités de tutelle.
Ce projet met notamment l'accent sur les points suivants :
modération salariale, amélioration de la flexibilité et de
l'organisation du travail avec, en particulier, une volonté de
rapprocher le temps de travail effectif et temps de travail utile, diminution
du recours aux emplois précaires, mise au point d'un concept de
forfaitaisation annuelle des jours d'activité assorti d'une baisse des
heures supplémentaires, réflexion sur l'optimisation du processus
de production enfin, avec recherche d'une meilleure polyvalence et de la
rémunération des gains de productivité.
En attendant la délivrance du mandat de négociation, des
rencontres et des réunions de travail ont néanmoins
été organisées, en particulier, autour des cinq processus
principaux de l'entreprise que sont l'antenne, les programmes, l'information,
la production, le tertiaire et l'encadrement.
A
Radio France
, la mise au point d'un mandat de négociation sur
la base d'un état des lieux remis en novembre 1998, s'est
révélée tout aussi laborieuse entravant la capacité
de négociation de l'entreprise.
Sur le fond, compte tenu des objectifs de l'entreprise en matière de
modernisation et d'ouverture sur le numérique, des contraintes
résultant de la taille réduite d'un certain nombre
d'unités, en particulier, pour les radios locales, des rigidités
budgétaires propres à l'entreprise, il est notamment
prévu : une nette priorité aux créations d'emplois de
journalistes et de techniciens, le rajeunissement des équipes et la
limitation du travail précaire, la réduction des heures
supplémentaires.
En ce qui concerne
Radio France internationale
, la perspective
d'application de la réduction du temps de travail s'est traduite par la
confection d'un état des lieux effectué par le cabinet Bernard
Brunhes transmis aux partenaires sociaux et d'un projet économique et
social précisant les orientations de l'entreprise en la matière.
Le processus de modernisation sur lequel vient se greffer la
négociations sur la réduction du temps de travail, s'accompagne
d'une réflexion sur les méthodes d'organisation et les modes de
production. Il est précisé que les gains de productivité
que ce processus devrait permettre de dégager, vont être en partie
absorbés par des redéploiements et en partie par la
réduction du temps de travail.
De son côté,
RFO
a signé le 30 mars 1999 avec
toutes les organisations syndicales un accord de méthode fixant le cadre
préalable à la négociation sur les 35 heures. Cet
accord a prévu une enquête de perception auprès de tous les
salariés, tandis qu'il était procédé à un
diagnostic sur l'organisation du travail. Parallèlement, un projet
économique et social a été élaboré en vue de
l'obtention d'un mandat de négociation auprès des tutelles.
De même, à l'
INA
où les négociations
s'inscrivent dans un contexte économique difficile, un projet
d'état des lieux - effectué à la suite d'un débat
avec les organisations syndicales de l'institut - à été
présenté aux autorités de tutelle dans une perspective
essentiellement défensive, de gestion à moyens constants.
Ce n'est qu'au début octobre qu'ont été
délivrés les mandats de négociation - à l'exception
de RFO. La teneur n'en est pas connue autrement que par des
indiscrétions de presse. La seule chose qui semble claire est que cet
accord s'appliquera uniquement aux personnels permanents des entreprises. En ce
qui concerne le financement, il avait été évoqué de
régler la question par le collectif pour 1999, mais l'adoption de
l'amendement susmentionné à l'article 55 obligerait à
trouver d'autres solutions pour permettre la prise en charge des
éventuelles charges immédiates consécutives à la
réduction du temps de travail.
Ce que votre rapporteur spécial peut faire remarquer, au regard des
perturbations actuelles, c'est que le processus de négociation s'engage
dans un contexte social naturellement risqué
. La fin de
l'année est toujours une période tensions sociales fortes avec
les négociations de cadrage salarial et les commissions mixtes
paritaires.
L'attente des personnels est évidente. Il est légitime qu'il
espèrent être traités de la même façon que
dans les autres secteurs
. Si tel n'était pas le cas, cela ne
pourrait que susciter de frustrations peu propices à la
nécessaire adaptation du secteur à un environnement de plus en
plus concurrentiel.