B. L'EFFORT DE SINCÉRITE BUDGÉTAIRE SE POURSUIT
Le
budget pour 1999 présentait une image des moyens du ministère
beaucoup plus fidèle que celle qu'il donnait depuis au moins cinquante
ans.
Cet effort de sincérité, salué en son temps par la
commission des finances, était venu pour beaucoup des efforts
déployés pour convaincre le ministère de sa
nécessité. Il se poursuit cette année ce dont il faut se
féliciter.
1. Un écart entre les moyens décrits par le projet de loi de finances initiale et les moyens réellement disponibles...
Il
existait traditionnellement un écart considérable entre le budget
des services financiers voté par le Parlement et les moyens
réellement disponibles. Au terme de divers rattachements de "fonds de
concours" et du fait de l'existence de crédits "hors budget",
l'écart entre les moyens apparents du ministère et ses moyens
réels était usuellement de l'ordre du quart des crédits
ouverts par la loi de finances initiale.
En 1998, les rattachements de fonds de concours avaient atteint
12.220 millions de francs pour un budget voté de
46.547 millions. Plus du cinquième des moyens du ministère
échappait à toute autorisation parlementaire.
Ces pratiques pour le moins peu satisfaisantes avaient été
régulièrement dénoncées par votre commission des
finances qui, outre ses observations mettant en évidence
l'opacité de la gestion d'un ministère qui, à bien des
titres, devrait montrer l'exemple de la transparence, avait fait valoir les
objections juridiques associées au recours à de telles
méthodes. Celles-ci concernaient en particulier deux catégories
de ressources considérées à tort comme des fonds de
concours et plusieurs comptes extrabudgétaires.
- S'agissant du prélèvement sur le produit des impositions
locales ("crédits de l'article 6")
, votre commission avait tout
d'abord constamment souligné que, malgré son intitulé, il
n'était en aucune manière assimilable à une redevance pour
services rendus.
Elle ajoutait que, dans ces conditions, le traitement budgétaire
hybride du produit de ce prélèvement obligatoire était
insatisfaisant.
En effet, la loi de finances initiale comportait d'abord
une ligne de
recettes n° 309
intitulée "Frais d'assiette et de
recouvrement des impôts et taxes établis ou perçus au
profit des collectivités locales et de divers organismes". Son produit
incluait une part du produit du prélèvement en cause, mais une
autre partie du produit du prélèvement était, à
tort, considérée comme un fonds de concours.
Une stricte application des règles budgétaires aurait conduit
à réintégrer les sommes considérées
jusqu'à présent comme des fonds de concours au titre des recettes
fiscales de l'Etat, ce que demandait votre commission.
- S'agissant du prélèvement sur le produit du contrôle
fiscal (article 5 de la loi du 17 août 1948)
, il posait des
difficultés analogues.
Fondé sur l'article 5 de la loi du 17 août 1948, il
constituait à l'évidence une survivance après
l'entrée en vigueur de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959.
En outre, il apparaissait clairement que les principes constitutionnels qui
inspirent notre droit budgétaire, prohibaient les
prélèvements sur recettes effectués pour couvrir des
dépenses de l'Etat, comme avait pu le rappeler le Conseil
constitutionnel dans une décision déjà ancienne puisque
datant de 1982 (n° 82-14 DC du 29 décembre 1982).
- S'agissant des comptes extrabudgétaires
leur existence avait
paru à votre commission assise sur des bases légales incertaines
et non conforme aux principes de notre droit budgétaire.
C'est la raison pour laquelle le Sénat, avec l'Assemblée
nationale, avait voté l'article 110 de la loi de finances pour 1996 qui
dispose : "A compter du projet de loi de finances pour 1997, les recettes
et dépenses extrabudgétaires de toutes les administrations d'Etat
sont réintégrées au sein du budget général".
De la même manière, votre commission s'était réjouie
que soit programmé un certain nombre de régularisations :
- la transformation de la
Masse des douanes
gérée
jusqu'alors de façon extrabudgétaire en établissement
public qui devait déboucher sur la suppression du compte 466-224 ;
- la suppression du compte 466-21
d'opération d'encaissement et
répartition des remises et commissions sur emprunts et émissions
des correspondants nationaux du Trésor ;
- la régularisation progressive du compte 466-17, "
Frais de services
des comptables du Trésor".
Elle avait enregistré avec satisfaction la volonté qu'une partie
du reste des sommes à régulariser le soit à l'occasion des
prochains budgets. Il s'agissait des comptes :
466-266 concernant les hypothèques ;
466-223 et 466-224 concernant le cadastre ;
ainsi que les résidus des comptes 466-17 concernant les frais des
services des comptables du Trésor.
Mais, la commission des finances au Sénat avait émis toutes
réserves sur l'article 111 de la loi de finances
susmentionnée estimant que la récapitulation des produits des
crédits d'articles dans un jaune budgétaire n'apportait pas de
vraie solution aux difficultés identifiées par elle.
C'est pourquoi votre commission avait, sans ambiguïté,
réclamé l'intégration des "faux fonds de concours" au
budget initial pour 1999 en déposant deux amendements allant dans ce
sens à l'occasion de l'examen de la loi de finances pour 1998.
L'Assemblée nationale, en deuxième lecture, avait pris la
responsabilité de supprimer ces dispositions qui portaient sur les
crédits d'articles 6 et 5.
Le Conseil constitutionnel devait, dans sa décision n° 97-395,
donner une solution à ce conflit en faisant prévaloir la position
adoptée par le Sénat à l'initiative de sa commission des
finances et inviter le gouvernement à une régularisation
dès le projet de loi de finances pour 1999.