CHAPITRE V
LE DÉTOURNEMENT DE LA FISCALITÉ
ÉCOLOGIQUE
I. LA MONTÉE EN PUISSANCE DE LA TGAP EN 2000 ET 2001
La taxe
générale sur les activités polluantes (TGAP) a
été créée par la loi de finances pour 1999 par le
regroupement de cinq taxes précédemment affectées à
l'ADEME.
Comme l'indique le tableau ci-dessous, le Gouvernement envisage pour
2000
29(
*
)
:
• d'une part d'étendre la TGAP à d'autres assiettes
polluantes (lessives et adoucissants, produits phytosanitaires, granulats),
• et d'autre part d'en transférer le produit à un nouvel
établissement public : le fonds de financement de la réforme
des cotisations patronales de sécurité sociale qui serait
créé au sein du projet de loi de financement de la
sécurité sociale.
Présentation des modifications de la TGAP proposées pour 2000
(en millions de francs)
Compartiment |
Modifications 2000 |
Produit 1999 |
Produit 2000 |
COMPARTIMENTS EXISTANTS |
|||
Déchets |
sans modification |
1.422 |
1.500 |
Nuisances sonores |
sans modification |
66 |
100 |
Pollution atmosphérique |
Augmentation des taux |
198 |
300 |
Huiles usagées |
Augmentation des taux |
129 |
200 |
COMPARTIMENTS NOUVEAUX |
|||
Lessives et adoucissants |
Nouvelle taxe |
- |
500 |
Produits phytosanitaires |
Nouvelle taxe |
- |
300 |
Granulats |
Nouvelle taxe |
- |
200 |
Installations classées |
Incorporation de taxes existantes et augmentation des taux |
- |
100 |
TOTAL |
- |
1.815 |
3.200 |
Source : Ministère de l'économie, des
finances
et de l'industrie et Ministère de l'Aménagement du territoire et
de l'Environnement
Pour 2001, la TGAP devrait conserver cette nouvelle affectation, mais voir son
assiette considérablement élargie avec l'intégration de la
taxation des consommations intermédiaires des entreprises qui devrait
rapporter quelques 9 milliards de francs de recettes supplémentaires.
La montée en puissance de la TGAP (1999-2001)
(en millions de francs)
Evaluations initiales pour 1999 |
1.935 |
Evaluations révisées pour 1999 |
1.800 |
Evaluations pour 2000 (évolution / 1999) |
3.200 (+ 78 %) |
- dont effet de l'évolution spontanée |
200 |
- dont aménagement des droits |
1.200 |
Evaluations pour 2001 (évolution / 2000) |
12.500 (+ 290 %) |
II. LE DÉTOURNEMENT DE LA FISCALITÉ ÉCOLOGIQUE : LA TGAP VA DEVENIR UN IMPÔT DE RENDEMENT
Votre
rapporteur spécial considère que la fiscalité
écologique peut-être utile pour encourager la modification des
comportements polluants. Mais il estime que ce que propose le Gouvernement n'a
rien à voir avec une fiscalité environnementale.
Sous couvert de taxation dite écologique, ce qui est proposé est
en vérité un
impôt de rendement
, destiné
à produire des recettes pour le financement de la seconde loi sur les 35
heures. En effet, qu'a-t-il été choisi pour la TGAP de
l'année prochaine ? Des taux bas et des assiettes larges : en
somme, des taxes qui ne dissuaderont aucun comportement polluant et qui par
leur large acceptabilité rapporteront les recettes publiques attendues.
La logique de financement a très nettement pris le pas sur les
préoccupations écologiques comme en témoignent les
arbitrages Gouvernementaux sur cette taxe. A titre d'exemple, il est d'ores et
déjà prévu que l'éco-taxe (la taxe sur les
consommations intermédiaires d'énergie des entreprises) devra
rapporter environ 9 milliards de francs, financement des 35 heures oblige.
Seules ses modalités précises (taux, assiette,
exonérations, etc.) sont soumises à la concertation entre les
entreprises futures assujetties. Il s'agit donc bien ici d'un impôt de
répartition.
Votre rapporteur spécial juge inadmissible ce détournement de la
fiscalité écologique. Il est au contraire attaché à
une fiscalité environnementale, dissuasive des comportements les plus
polluants, qui ne mette pas en péril la compétitivité de
nos entreprises et qui, le cas échéant, permette de financer par
ses produits des actions complémentaires en faveur de l'environnement.
III. UNE TAXATION SUPPLÉMENTAIRE
L'instauration de la TGAP a été
présentée comme l'exacte contrepartie de l'allégement des
charges sociales pour les entreprises.
C'est oublier :
1) d'une part, que ces allégements de charges sont eux-mêmes
la contrepartie d'un alourdissement des coûts de production des
entreprises par la politique de réduction du temps de travail, c'est
à dire les " 35 heures " ;
2) d'autre part, que le transfert du produit de la TGAP existante au fonds
de financement des allégements de charges sociales crée un manque
à gagner fiscal pour le budget général de l'Etat de
l'ordre de 2 milliards de francs qui a du être compensé par de
moindres dépenses ou plus vraisemblablement par des recettes accrues.