CHAPITRE IV
LES CRÉDITS DU PROJET DE BUDGET POUR
2000
Les crédits de paiement prévus pour 2000 s'élèvent à 87,9 milliards d'euros en progression de 2,8 % par rapport à 1998 et les crédits d'engagement à 92,4 milliards d'euros, en diminution de 4,7 %.
Evolution des crédits
(En Mécus 1999)
Rubriques des perspectives |
Budget 1999 |
APB 2000 |
Ecart APB/B99 |
Conseil budget |
Ecart Conseil/APB |
Exécution 98 CP |
|||||
financières |
CE |
CP |
CE |
CP |
CE |
CP |
CE |
CP |
CE |
CP |
uniquement |
PAC |
40.440 |
40.440 |
40.901 |
40.901 |
1,1% |
1,1 % |
40.526 |
40.526 |
- 375 |
- 375 |
38.748 |
Marge |
4.748 |
|
837 |
|
|
|
1.212 |
|
|
|
|
Actions structurelles |
39.025 |
30.423 |
32.678 |
32.000 |
-16,3% |
5,2 % |
32.678 |
30.977 |
0 |
- 1.023 |
28.347 |
Fonds structurels |
35.902 |
27.541 |
30.019 |
29.200 |
-16,4 % |
6 % |
30.019 |
28.177 |
0 |
- 1.023 |
25.792 |
Fonds de cohésion |
3.118 |
2.877 |
2.659 |
2.800 |
-14,7 % |
- 2,7 % |
2.659 |
2.800 |
0 |
0 |
2.448 |
Mécanisme d'élargissement |
5 |
5 |
pm |
pm |
|
|
|
|
|
|
|
Marge |
0 |
|
|
|
|
|
0 |
|
|
|
|
Politiques internes |
5.862 |
5.049 |
5.937 |
5.626 |
1,3 % |
11,4 % |
5.809 |
5.410 |
- 128 |
- 216 |
4.729 |
Marge |
524 |
|
93 |
|
|
|
222 |
|
|
|
|
Actions extérieures |
4.535 |
3.146 |
4.479 |
3.356 |
- 1,2 % |
5 % |
4.611 |
3.437 |
132 |
81 |
3.104 |
Marge |
|
|
148 |
|
|
|
16 |
|
|
|
|
dont réserve Kosovo |
|
|
|
|
|
|
500 |
280 |
|
|
|
dont réserve accord pêche |
|
|
|
|
|
|
125 |
125 |
|
|
|
Dépenses administratives |
4.502 |
4.502 |
4.716 |
4.716 |
4,7 % |
4,7 % |
4.664 |
4.664 |
- 52 |
- 52 |
4.250 |
Marge |
221 |
82 |
0 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Réserves |
1.192 |
1.192 |
906 |
906 |
- 24 % |
- 24 % |
906 |
906 |
0 |
0 |
272 |
Pré-adhésion |
1.372 |
807 |
3.167 |
2.146 |
130,8% |
184 % |
3.167 |
2.025 |
0 |
- 121 |
954 |
Pré-adhésion agricole |
|
|
529 |
529 |
|
|
529 |
529 |
0 |
0 |
|
Pré-adhésion structurelle |
|
|
1.058 |
300 |
|
|
1.058 |
245 |
0 |
- 55 |
|
PHARE |
1.372 |
807 |
1.580 |
1.317 |
15,1 % |
74,3 % |
1.580 |
1.251 |
0 |
- 66 |
|
Total |
96.929 |
85.558 |
92.784 |
89.651 |
- 4,3 % |
4,8 % |
92.361 |
87.945 |
- 428 |
- 1.705 |
80.505 |
Marge (CE)/% PNB Eur15 (CP) |
7.828 |
1,12 |
1.159 |
1,11 |
|
|
1.595 |
1,09 |
|
|
|
*
Marge disponible en CE, pour chaque rubrique, sous le plafond des perspectives
financières
L'évolution des crédits de paiement est profondément
injustifiable.
Elle impose une contrainte excessive aux budgets nationaux
qui se voient amputés par une contribution européenne en forte
augmentation à l'heure où les Etats membres sont liés par
les disciplines financières nécessaires au rétablissement
de leurs finances publiques et formalisées dans le "pacte de
stabilité et de croissance" défini dans la perspective de
l'adoption de l'euro par onze Etats membres.
Les justifications apportées à de telles progressions ne sont
pas recevables.
On fera d'abord valoir que le budget européen peut être
arbitré au premier euro.
Il ne supporte en effet pas de ces charges
qui, comme les dépenses d'intérêt ou de personnel d'un
budget national, rendent les arbitrages budgétaires, sinon illusoires du
moins délicats. Rien ou presque de tout cela pour le budget
européen, et particulièrement cette année où les
crédits de la politique agricole commune sont stables par rapport
à l'exercice précédent.
Si donc les crédits de paiement s'accroissent tant c'est que les
institutions chargées d'établir le budget européen en ont
décidé ainsi.
Il est vrai que le Conseil a quelque peu modifié l'avant-projet de
budget de la Commission. Il a dégagé des "économies" pour
1.705 millions d'euros en crédits de paiement et pour 428 millions
d'euros en crédits d'engagement.
Synthèse des "économies
dégagées
par le Conseil
par rapport à l'avant-projet de budget de la
Commission.
(en millions d'euros)
1)
Crédits d'engagement :
PAC : - 375
Actions culturelles : 0
Politiques internes : - 128
Actions extérieures : + 132
Dépenses administratives : - 52
Total : - 428
2) Crédits de paiement :
PAC : - 375
Actions structurelles : - 1.023
Politiques internes : - 216
Actions extérieures : + 81
Dépenses administratives : - 52
Pré-adhésion - 121
Total : - 1.705
Mais l'exercice d'" économies " du Conseil s'est borné
à infléchir le rythme de croissance des dépenses
proposé par la Commission, qui apparaissait totalement irréaliste
(+ 4,8 %) et en contradiction avec la programmation financière
tout juste adoptée.
On peut mesurer la modicité de l'effort d'économies du Conseil en
rappelant que ses propositions représentent 1,9 % et 0,46 %
des propositions de la Commission en matière de crédits de
paiement et d'engagement respectivement.
Cet effort d'économies peut d'autant plus être relativisé
qu'il a porté pour l'essentiel sur les crédits d'actions
structurelles. Or, dans le budget 2000 -voir infra- le niveau de ces
crédits est largement arbitraire. L'essentiel des dotations inscrites
concerne les " restes à liquider " des engagements pris sur la
base de la programmation antérieure dont l'estimation peut
aisément varier. Les autres dotations correspondent à la nouvelle
programmation et sont, à leur tour, facilement " arbitrables ".
En outre, le Parlement européen n'a pas résisté, lui,
à son penchant naturel pour la dépense, accroissant de
3,5 milliards de francs les crédits. Dans ces conditions, il faut
exiger du Conseil qu'il annule ces décisions, mais on doit redouter
qu'il ne le puisse pas entièrement.
En effet, le Parlement européen arguant de l'apparition
d'éléments nouveaux liés en particulier à la guerre
du Kosovo s'est engagé dans un conflit avec le Conseil,
réclamant, à peine sèche l'encre des nouvelles
perspectives financières, leur révision.
Dans ce conflit qui a conduit le Parlement européen à abonder les
crédits de 3,5 milliards d'euros, celui-ci agite la menace de
recourir à la procédure de l'article 272 du Traité
qui lui offre la possibilité d'appliquer aux dépenses non
obligatoires un taux d'augmentation plafonné (le taux maximal
d'augmentation ; TMA). Cette procédure tombée en
désuétude conduirait à une augmentation des crédits
de paiement de 2,6 milliards d'euros, soit un chiffre inférieur
à celui des crédits supplémentaires votés par le
Parlement européen mais cependant excessif.
Si tel devait être le cas, les crédits du budget 2000
atteindraient 90,5 milliards d'euros et s'accroîtraient de
5,7 % par rapport à 1999.
Une telle perspective fonde à elle seule une condamnation sans
réserve de la procédure budgétaire européenne.
Il faut rappeler que la position du Parlement européen conduirait
à majorer notre contribution au budget qui, fixée à
98,5 milliards de francs, en hausse de 3,7 % par rapport aux
prévisions de la loi de finances pour 1999, passerait à
102 milliards de francs et progresserait ainsi de 7,4 % par
référence à la même base.
Or, le Parlement national qui assume la responsabilité d'autoriser la
perception des impôts sur lesquels sont prélevées les
ressources nécessaires au versement de la contribution française
n'a aucunement les moyens de s'opposer à une telle augmentation.
Il est pour le moins paradoxal que le Parlement européen, qui
n'assume en rien la responsabilité politique des
prélèvements obligatoires se voit en plus doté de la
capacité, finalement mal et peu encadrée, d'accroître les
charges publiques. Cette facilité n'est pas offerte au Parlement
français alors même qu'il a une responsabilité sans
ambiguïté en matière fiscale.
Il est donc temps de réfléchir à la rationalisation du
parlementarisme européen.
Si le projet de budget 2000 est si peu satisfaisant c'est que
l'autorité budgétaire européenne s'abrite
derrière les règles renouvelées à Berlin
et,
plus généralement, par les différents engagements
résultant des programmes financiers établis dans tel ou tel
domaine (recherche, politiques d'intervention extérieure, emploi...).
On insiste en particulier sur l'engagement selon lequel les crédits
programmés au titre des actions structurelles seraient non des plafonds
qu'on pourrait diminuer au gré des exercices budgétaires, mais
bien des objectifs de dépenses.
C'est cet objectif qui avait expliqué l'explosion des crédits
d'engagement au titre des actions structurelles dans le projet de budget 1999
(+ 16,6 % ; + 5,5 milliards d'euros). C'est à la lumière de
celle-ci que doit être appréciée la décrue de ces
crédits dans le budget 2000.
Cette année, l'augmentation des crédits provient donc d'autres
rubriques du budget. Mais, ce constat ne doit pas susciter de contresens :
l'évolution prévisible des crédits d'actions structurelles
amplifiera à l'avenir le dynamisme inquiétant des crédits
consacrés aux autres interventions du budget européen que
comporte le projet de budget 2000.
I. LES DÉPENSES AGRICOLES : UN CALIBRAGE VOLONTARISTE
Les
dépenses agricoles sont contraintes par la ligne directrice agricole,
plafond de la rubrique 1, revalorisée chaque année à
partir d'un indice égal à 74 % du rythme de croissance du
PNB en valeur, c'est-à-dire tenant compte de l'évolution
prévisible des prix.
Pour 2000, le montant de la ligne directrice agricole s'élève
à 46,5 milliards d'euros, soit de l'ordre de 50 % du plafond
global des crédits d'engagement du budget européen.
Le projet de budget agricole pour 2000 tient compte des
réaménagements de nomenclature décidés au Conseil
de Berlin.
Si celui-ci a maintenu le mécanisme de la ligne directrice agricole
comme plafond des dépenses communautaires destinées à
l'agriculture, la gamme des dépenses assujetties à ce plafond a
été élargie. En font désormais partie, d'une part
les mesures vétérinaires et phytosanitaires et les mesures de
développement rural autrefois financées sur les rubriques des
politiques internes et des actions structurelles, d'une part, les
dépenses agricoles liées aux perspectives d'élargissement
qu'il s'agisse du volet agricole des dépenses de
pré-adhésion ou de la marge mobilisable au moment de
l'élargissement.
Les décisions budgétaires du Conseil s'inspirent
étroitement de ces contraintes. Le plafond des dépenses agricoles
qui s'élève à 41,7 milliards d'euros est fixé
à un niveau sensiblement inférieur à celui de la ligne
directrice agricole. A cela s'ajoute la décision d'inscrire des
crédits inférieurs au plafond global dont on rappelle qu'il se
décompose désormais en deux sous-plafonds distincts, l'un
concernant les dépenses phytosanitaires et de marché, l'autre
s'appliquant aux dépenses liées au développement rural.
Le premier d'entre eux étant fixé à 37,3 milliards
d'euros, les crédits inscrits par le Conseil qui se montent à
36,9 milliards laissent une marge de 413 millions d'euros. Quant au
second sous-plafond de 4,4 milliards d'euros, les dotations
budgétaires de 3,6 milliards lui permettent de dégager une
marge de 799 millions d'euros.
Une fois intégrés les crédits du volet agricole de l'aide
de pré-adhésion -529 millions d'euros-, le projet de budget
agricole pour 2000 laisse une marge très substantielle sous la ligne
directrice agricole qui, avec 5,5 milliards d'euros, représente
près de 12 % de cette dernière.
La politique agricole commune : exécution et projet de budget 2000
(En Meuros )
|
Exécution 1996 |
Exécution 1997 |
Exécution 1998 |
Budget 1999 |
Projet budget 2000 |
Produits végétaux |
24.933 |
26.042 |
26.544 |
26.989 |
25.646 |
Produits animaux |
12.333 |
11.670 |
9.631 |
9.706 |
9.574 |
Dépenses annexes |
- 10 |
897 |
726 |
1.128 |
1.719 |
Total mesures de marché |
37.255 |
38.610 |
36.901 |
37.823 |
36.939 |
Sous-plafond des perspectives financières |
|
|
|
|
37.352 |
Marge |
|
|
|
|
413 |
Mesures d'accompagnement |
1.852 |
2.065 |
1.847 |
2.617 |
2.627 |
Transfert FEOGA-Orientation |
- |
- |
- |
- |
960 |
Total développement rural |
1.852 |
2.065 |
1.847 |
2.617 |
3.587 |
Sous-plafond des perspectives financières |
|
|
|
|
4.386 |
Marge |
|
|
|
|
799 |
Total FEOGA-Gareantie |
39.108 |
40.675 |
38.748 |
40.440 |
40.526 |
Plafond des perspectives financières |
|
|
|
|
41.738 |
Marge |
|
|
|
|
1.212 |
Rappel LDA |
40.828 |
41.805 |
43.263 |
45.188 |
46.549 |
Mesures de préadhésion (SAPARD) |
- |
- |
- |
- |
529 |
Marge sous la LDA |
1.720 |
1.130 |
4.515 |
4.748 |
5.494 |
A périmètre constant, les crédits agricoles diminuent par rapport à 1999 sous l'effet d'une réduction des dépenses de marché qui s'élève à 884 millions d'euros (- 2,3 %). Le calibrage des crédits tient en outre compte de la réforme de la politique agricole commune décidée à Berlin.
Les
principaux éléments de la réforme de la PAC définie
en mars 1999
par le Conseil européen de Berlin
La
nouvelle réforme de la PAC comporte deux volets, une réforme des
organisations communes de marché et un volet structurel avec :
-
Une baisse des prix d'intervention dans les trois principaux secteurs
concernés (céréales : - 20 % sur deux ans
à compter de la campagne 2000/2001, viande bovine :
- 30 % sur trois ans à compter de la campagne 2000/2001 et
lait : - 15 % sur trois ans à compter de la campagne
2005/2006), compensée par une
revalorisation des aides au revenu
.
-
Un renforcement de la politique de développement rural
,
consacrée 2
ème
pilier de la PAC.
-
L'instauration de deux nouveaux mécanismes de réorientation
des aides directes versées au titre de la politique de soutien des
marchés vers des actions de développement rural :
. l'écoconditionnalité
, qui impose aux Etats membres de
prendre " les mesures environnementales qu'ils considèrent
appropriés compte tenu de la situation des surfaces agricoles
utilisées ou des productions concernées " et de sanctionner
les agriculteurs qui ne respectent pas ces exigences en réduisant ou en
supprimant les aides ;
.
la modulation des aides
, qui autorise les Etats membres à
réduire les montants des aides directes versées aux agriculteurs
en fonction de trois critères : l'emploi, la richesse de
l'exploitation, et le total d'aides reçues.
Les effets de la réforme de la PAC en 2000 ne sont toutefois que
partiels et contribuent tous à réduire les besoins. Ainsi,
l'intervention en juillet 2000 de la première vague de baisses des
prix pour les céréales et la viande bovine n'entraîne pas
de compensations de revenus au cours de l'année, l'augmentation des
aides directes compensatoires n'exigeant un financement budgétaire
qu'à partir de 2001.
De la même manière, la suppression de l'avance versée au
titre de l'aide aux oléagineux entraîne une économie non
reconductible de 1.253 millions d'euros.
A ce contexte " facilitant " s'ajoute une hypothèse favorable
posée sur une variable lourde du calibrage des crédits agricoles,
la parité euro-dollar compte tenu des effets d'une éventuelle
baisse du dollar sur les dépenses d'intervention et de restitution.
En effet, même si du fait de la réforme de la PAC de 1992, le
poids de ces dépenses a été fortement réduit au
profit des aides directes versées aux agriculteurs, elles
représentent encore un volet significatif de la dépense agricole.
Or, ce volume de dépenses est sensible à la parité du
dollar.
Pour établir le projet de budget, la parité choisie a
été de 1 $ égale 0,89 euro. Or, les prévisions
économiques dégagent un consensus où le
rééquilibrage de la croissance mondiale se traduirait par une
dépréciation du dollar plus ou moins prononcée selon le
type de ralentissement de l'économie américaine qu'on envisage.
L'ampleur de l'aléa est importante. Une dépréciation de
10 % du dollar provoque 450 millions d'euros de dépenses
supplémentaires qu'il faut financer.
Il est intéressant d'observer qu'une évolution inverse se traduit
par un montant identique d'économies dont l'affectation obéit
à des règles budgétaires qui privent les Etats membres
d'un bénéfice immédiat de cet heureux aléa. En
effet, dans l'hypothèse d'une appréciation de 10 % du dollar
par rapport aux prévisions associées au budget les
économies réalisées -450 millions d'euros- sont
conservées par le Feoga-Garantie pour 200 millions d'euros et sont
versés pour 250 millions d'euros à la réserve
monétaire pour être ensuite, le cas échéant,
comptabilisées comme recettes de l'exercice suivant.