G. L'ORDONNANCE N° 98-774 DU 2 SEPTEMBRE 1998 PORTANT EXTENSION ET ADAPTATION AUX DÉPARTEMENTS, COLLECTIVITÉS TERRITORIALES ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER DE DISPOSITIONS CONCERNANT LE DROIT CIVIL, LE DROIT COMMERCIAL ET CERTAINES ACTIVITÉS LIBÉRALES
L'ordonnance n° 98-774 du 2 septembre 1998 comporte
dix-huit
articles qui ont pour objet d'étendre et d'adapter aux
départements, collectivités territoriales et territoires
d'outre-mer, des dispositions relevant des domaines cités dans le
2° de l'article 1
er
de la loi d'habilitation du 6 mars
1998 : droit commercial, droit civil et droit applicable à
certaines activités libérales. En vertu de ce champ
d'habilitation défini très largement, le Gouvernement a pu
prendre une ordonnance au
contenu très hétéroclite
.
Toutefois, la présentation de ses articles peut s'ordonner autour des
quatre grands thèmes suivants :
- la clarification du droit de la preuve et de certains contrats en
matière civile et commerciale ;
- l'amélioration des rapports locatifs et de
copropriété ;
- l'encadrement de l'utilisation des éléments et produits du
corps humain ;
- l'adaptation du droit concernant l'exercice et le statut de certaines
professions libérales.
1. La clarification du droit de la preuve et de certains contrats en matière civile et commerciale
De
nombreuses difficultés relatives au droit de la preuve testimoniale et
des actes juridiques, ainsi qu'au droit de certains contrats civils et
commerciaux aussi essentiels que la vente, le nantissement ou le
crédit-bail, sont apparues outre-mer. Les articles 1
er
,
2, 5, 8, 9, 11, 12 et 14 de l'ordonnance ont pour point commun d'apporter une
clarification dans ces matières.
Tout d'abord, le I de
l'
article 1
er
étend sans
adaptation aux
territoires d'outre-mer
et à la
collectivité territoriale de
Mayotte
les articles du code civil
relatifs aux délais de grâce pour le paiement des sommes dues,
à la preuve testimoniale, au contrat de promotion immobilière,
à la preuve des actes juridiques. Avec l'
article 2
qui
étend aux
territoires d'outre-mer
et à
Mayotte
l'article 109 du code de commerce, l'extension du régime de la
preuve
des actes de commerce
est complète.
L'extension de ces articles conduit à réviser à la hausse
le montant de l'objet du litige au-delà duquel les actes juridiques ne
peuvent être prouvés que par un écrit. Ce montant,
aujourd'hui très faible, aboutit à ce que pour la presque
totalité des transactions les preuves testimoniales ne peuvent
être accueillies. La révision de ce seuil devrait faciliter la
preuve des actes juridiques devant les tribunaux locaux qui, à ce jour,
en sont réduits à interpréter de façon très
extensive la notion de commencement de preuve par écrit.
Les II et III de l'
article 1
er
et l'
article 5
étendent avec quelques adaptations à la
Polynésie
française
les articles du code civil et du code de la construction
et de l'habitation relatifs à la
vente d'immeubles à
construire
.
Le III de l'
article
1
er
étend à la
Polynésie française
, à
Wallis-et-Futuna
, aux
Terres australes et antarctiques françaises
et à
Mayotte
l'article 1844-2 du code civil relatif aux
hypothèques
. Cet article vient compléter l'extension à
ces territoires de la législation relative à la
vente et au
nantissement des fonds de commerce
.
Sur le même sujet,
les articles 8 et 9
de l'ordonnance ont pour
objet d'étendre, à compter du 15 septembre 1999, dans les
collectivités territoriales de
Mayotte
et de
Saint-Pierre-et-Miquelon
et dans les
territoires d'outre-mer
,
l'application de la loi du 17 mars 1909 relative à
la vente et au
nantissement des fonds de commerce
et de la loi du 18 janvier 1951 relative
au
nantissement de l'outillage et du matériel
d'équipement
. L'application à droit constant de ces
dispositions législatives est accompagnée d'adaptations
terminologiques tenant aux spécificités locales des institutions
administratives et juridictionnelles. Au même titre, l'article 9 prend en
compte le particularisme fiscal de ces collectivités en supprimant les
dispositions fiscales prévues par la loi du 18 janvier 1951.
Si l'article 9 n'appelle pas d'observations particulières, l'article 8
est, en revanche, sujet à quelques imprécisions et erreurs que
votre commission des lois vous proposera de rectifier.
L'article 11
de l'ordonnance, a pour objet d'appliquer outre-mer la loi
du 20 mars 1956 relative à la
location-gérance des fonds de
commerce et des établissements artisanaux
. Jusqu'à
présent, aucune des obligations fondamentales en droit commercial
relatives au contrat de location-gérance de fonds de commerce n'a
été adaptée aux
territoires d'outre-mer et aux
collectivités territoriales de Mayotte et de
Saint-Pierre-et-Miquelon
. L'extension est réalisée avec de
nombreuses adaptations tenant compte de l'organisation particulière de
la justice dans ces différentes collectivités.
La législation relative au
crédit-bail
, régie par
la loi du 2 juillet 1966, n'était applicable dans les territoires
d'outre-mer et à Mayotte que dans la limite des extensions et
compléments apportés par la loi du 25 avril 1973. A
Saint-Pierre-et-Miquelon, la législation en vigueur comporte toutes les
modifications apportées par les lois du 1
er
mars 1984, du 6
janvier 1986 et du 31 décembre 1989. Afin d'harmoniser les
législations en vigueur,
l'article 12
de l'ordonnance abroge la
loi du 25 avril 1973 et rend applicables l'ensemble des dispositions de la loi
du 2 juillet 1966,
dans tous les territoires d'outre-mer, à Mayotte
et à Saint-Pierre-et-Miquelon
, sans autre adaptation que celle
nécessitée par le statut particulier de la Polynésie
française.
Enfin, l'
article
14
de l'ordonnance étend
l'application de l'article 1
er
de la
loi du 31 décembre
1989
relative au
développement des entreprises commerciales et
artisanales
et à l'amélioration de leur environnement
économique, juridique et social, dite loi " Doubin ". Cette
disposition apporte une sécurité juridique au
développement de la " franchise " dans les territoires
d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte qui,
jusqu'à présent, ne connaissaient pas d'obligation d'information
précontractuelle des concessionnaires exclusifs, au moyen d'un document
informatif qui leur permet de s'engager en pleine connaissance de cause dans la
conclusion des contrats de distribution.