CHAPITRE 2
-
Dispositions financières
Section 1
-
Transferts financiers
La
suppression de l'assurance personnelle en conséquence de l'institution
d'une couverture de base sur le critère de la résidence
entraîne des transferts financiers d'une rare complexité.
Les choix que traduit le projet de loi sont critiquables à trois titres
(voir également exposé général
2
ème
partie - D)
:
-
la complexité de l'affectation de certaines recettes est
accrue
alors qu'il importe de rendre plus lisibles les ressources des
différentes caisses de sécurité sociale ;
-
la compensation de moindres dépenses se fait par de moindres
recettes
, alors qu'il serait plus logique d'opérer une compensation
entre dépenses ;
-
l'Etat économise de l'argent
sur le financement de la
couverture maladie de base (351 millions de francs) mais
le solde de
ces transferts se traduit en revanche par une charge accrue pour la CNAMTS
(0,9 milliard de francs qui viennent s'ajouter au déficit actuel de
l'assurance personnelle) et un
manque à gagner pour la CNAF
(300
millions de francs) qui perd de surcroît une recette dynamique en
contrepartie de l'abandon d'une dépense relativement stable.
Aussi, votre commission vous propose-t-elle un dispositif simplifié.
•
Compenser la suppression des cotisations d'assurance
personnelle prise en charge aujourd'hui par la CNAF par l'amorce d'un retour de
l'Allocation parent isolé (API)
(
article 10
).
La charge de l'allocation parent isolé a été
transférée au budget de l'Etat par la loi de finances pour 1999.
Il s'agissait de réparer les conséquences du " pas de
clerc " du Gouvernement qui avait décidé dans la loi de
financement de la sécurité sociale pour 1998 de placer les
allocations familiales sous condition de ressources.
Un an plus tard, il y renonçait au profit d'un abaissement du quotient
familial. Il en résultait :
- une recette supplémentaire pour le budget
général ;
- un rétablissement de dépenses dans le budget de la CNAF.
Cette opération avait été neutralisée par le
transfert, de la CNAF vers budget général, de la prise en charge
de l'API.
M. Jacques Machet, rapporteur de la branche famille pour le projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 1999 commentait ainsi
cette opération :
" Pour votre rapporteur, rien ne justifie, sur le plan des principes,
le financement par l'Etat de l'API qui constitue précisément une
reconnaissance de la fonction parentale. L'API a pour objet de faciliter le
passage difficile que représente l'arrivée d'un enfant ou la
perte d'un soutien familial pour un parent démuni de revenus. Elle
comporte deux objectifs distincts : favoriser le rôle parental et
garantir un minimum de ressources durant le temps nécessaire pour
s'organiser dans la recherche d'un emploi. Le versement de l'allocation est
légitimé par la présence d'un ou de plusieurs enfants.
Elle permet aux parents d'assurer leur identité parentale et d'offrir
une image plus positive aux enfants. Une étude
réalisée par la CNAF en 1997 a montré que l'API avait,
pour ses bénéficiaires, une valeur symbolique que n'avait pas le
RMI. Selon cette étude dont l'objectif était d'analyser ce
qu'étaient devenus les anciens bénéficiaires de l'API, le
RMI est ressenti comme humiliant et stigmatisant ; il est
considéré comme le dernier maillon avant l'entrée dans la
pauvreté. Alors que l'API représentait une reconnaissance de la
fonction parentale, le RMI génère un sentiment de honte et de
culpabilité.
" Compte tenu de son caractère de prestation pour la famille,
justifié par la présence d'enfant, il semble par
conséquent logique que l'API reste gérée et
financée par la branche famille. Le choix de la prise en charge de cette
prestation par l'Etat apparaît purement circonstanciel -il fallait
trouver une prestation d'un montant équivalent au surplus de recettes
fiscales généré pour le budget de l'Etat par la diminution
du plafond du quotient familial- et ne répond à aucune raison de
fond. "
Aussi, votre commission vous propose-t-elle :
- de maintenir intégralement à la CNAF le
prélèvement de 1 % sur les revenus du patrimoine et des
produits de placement ;
- de transférer 60 % du coût de l'API du budget
général vers la CNAF, la CNAF percevrait donc du budget
général une subvention correspondant à 40 % du
coût de l'API ;
- l'Etat constatant une économie budgétaire de 2,52
milliards de francs la neutraliserait par une affectation supplémentaire
de droits sur les tabacs à la CNAMTS ;
- la CNAMTS perçoit cette affection supplémentaire du droit
sur les tabacs en remplacement de la part du prélèvement de
1 % sur les revenus du patrimoine et des produits de placement que votre
commission a maintenu intégralement à la CNAF.
•
Ne pas " éclater " une nouvelle fois les
droits sur les alcools (article 9)
La suppression des cotisations à l'assurance personnelle aujourd'hui
prise en charge par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) conduit le
projet de loi à priver le FSV, au profit de la CNAMTS, d'une partie des
droits de consommation sur les alcools prévus à l'article 403 du
code général des impôts dont il bénéficie
actuellement.
Ces droits sont répartis actuellement en deux parts : 60 %
pour le FSV, 40 % pour l'ensemble des régimes d'assurance maladie
serait éclaté en trois parts : FSV (55 %), ensemble des
régimes d'assurance maladie (40 %), CNAMTS (5 %)
Or, il existe déjà une cotisation sur les boissons alcooliques
qui bénéficie à la seule CNAMTS, instituée par
l'article 26 de la loi n° 83-25 du 19 janvier 1983 (
article L. 245-7 du
code de la sécurité sociale
). Le montant de la cotisation est
actuellement fixé à 0,84 franc par décilitre ou par
fraction de décilitre (
article L. 245-9
).
La CNAMTS bénéficierait ainsi de trois ressources liées
aux alcools : la cotisation sur les boissons alcooliques, un peu plus de
80 % de 40 % des droits 403
8(
*
)
, 5 % " en direct " de
ces droits.
LES " DROITS 403 "
Ces
droits de consommation sur les alcools, dits " droits 403 ", du nom
de l'article du code général des impôts les
définissant, étaient affectés à l'origine au seul
Fonds de solidarité vieillesse. Depuis la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1997, ces droits sont répartis entre
le FSV (60 %) et les régimes d'assurance maladie (40 %).
Il s'agit de l'ensemble des droits, à l'exception de ceux perçus
dans les deux départements de la collectivité territoriale de
Corse et du prélèvement effectué au profit du BAPSA
(article 1615 bis du code général des impôts).
Les droits 403 devraient rapporter, en 1999, 4,2 milliards de francs aux
régimes d'assurance maladie et 6,3 milliards de francs au FSV.
Aussi votre commission vous propose-t-elle de laisser inchangée la
répartition des " droits 403 " (60 % FSV, 40 %
régimes d'assurance maladie).
Elle observe que le FSV n'a pas reçu de " compensation " du
fait de la suppression du droit de fabrication sur les alcools (droits 406) par
la dernière loi de finances et la dernière loi de financement
(350 millions de francs).
De sorte que l'avantage laissé au FSV est minime (250 millions de
francs) sachant de surcroît que les excédents du FSV sont
affectés depuis la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999 au fonds de réserve pour les retraites par
répartition.
Cette perte de recettes serait compensée pour la CNAMTS par
l'affectation du prélèvement supplémentaire des droits sur
les tabacs.
•
Maintenir l'affectation intégrale prévue par le
projet de loi de la cotisation sur les véhicules terrestres à
moteur (CVTAM) en faveur de la CNAMTS (article 12)
Votre commission a hésité un moment entre deux attitudes.
La CVTAM prévue à l'article L. 213-1 du code des assurances,
créée en 1967, était censée faire participer les
possesseurs d'automobile aux frais d'assurance maladie occasionnés par
les accidents de la circulation.
En application de l'article 12 du projet de loi, cette taxe ne serait plus
affectée à l'ensemble des régimes obligatoires d'assurance
maladie mais au seul régime des travailleurs salariés au motif
qu'il faut compenser la suppression de la contribution des autres
régimes d'assurance maladie au déficit de l'assurance personnelle.
Votre commission constate que l'affectation exclusive de cette taxe à la
CNAMTS fragilise singulièrement son bien fondé, car elle
continuera d'être acquittée par tous les possesseurs d'automobiles
quel que soit leur régime d'affiliation.
A contrario
, votre commission a été sensible à la
simplification opérée par le projet de loi qui met fin à
l'un des travers du financement de la sécurité sociale, celui
d'un éclatement des contributions entre plusieurs
bénéficiaires.
C'est ce dernier argument qui l'a emporté dans son esprit.
Mais votre commission appelle à une rationalisation de la
fiscalité sociale par l'examen systématique des " recettes
de poche " qui lui sont affectées.
•
Majorer en conséquence le prélèvement sur
les droits sur les tabacs opéré au profit de la CNAMTS (article
11)
Conséquence des propositions précédentes, le
prélèvement sur les tabacs opérés au profit de la
CNAMTS serait majoré. Ses recettes seront ainsi peu homogènes et
plus cohérentes.
Votre commission souhaite que le niveau de ce prélèvement
compense la charge supplémentaire que fait peser le projet de loi sur la
CNAMTS à hauteur de 0,9 milliard de francs qui viennent s'ajouter au
déficit de l'assurance personnelle qu'elle continuera à subir.
Il appartiendra à la loi de finances pour 2000 d'en décider ainsi.
Art.
9
(art. L. 814-5 et L. 195-3 du code de la sécurité
sociale)
Incidences financières sur le Fonds de
solidarité vieillesse
Cet
article vise à supprimer la prise en charge, par le Fonds de
solidarité vieillesse (FSV), des cotisations d'assurance personnelle des
titulaires de l'allocation spéciale et à réduire en
contrepartie de cinq points la part de droits sur les alcools affectée
au FSV.
I - Le texte du projet de loi
Le
paragraphe I
modifie l'article L. 814-5 relatif aux dépenses
supportées par le FSV. Dans l'économie générale du
projet de loi visant à remplacer plusieurs contributeurs par un
financeur unique, le FSV n'aura plus à supporter la prise en charge des
cotisations d'assurance personnelle des titulaires de l'allocation
spéciale, c'est-à-dire d'une partie des
bénéficiaires du minimum vieillesse.
L'allocation spéciale est l'une des allocations du premier niveau du
minimum vieillesse. Elle est attribuée, sous conditions de ressources et
de résidence stable et régulière en France, aux personnes
âgées de plus de 65 ans (60 ans en cas d'inaptitude au travail)
qui ne relèvent d'aucun régime d'assurance vieillesse de base.
Depuis le 1
er
janvier 1999, son montant annuel
s'élève à 17.545 francs pour une personne seule et
35.090 francs pour un ménage. Les ressources des
bénéficiaires ne doivent pas excéder le plafond de
43.512 francs pour une personne seule et 76.215 francs pour un couple.
En 1998, le montant de l'allocation spéciale s'est élevé
à 1,12 milliard de francs, versés au profit d'environ 68.400
bénéficiaires.
L'article L. 741-4 du code de la sécurité sociale
prévoit actuellement que l'aide sociale prend en charge les cotisations
d'assurance personnelle des titulaires de l'allocation spéciale.
Cette prise en charge est totale
(art. R. 741-23).
Dans les quinze
premiers jours d'un trimestre, ces cotisations sont payées d'avance par
le FSV à la caisse nationale d'assurance maladie
(art.
R. 741-24).
En application de l'article D. 814-19 du même code, ces cotisations sont
retracées en dépenses du Service de l'allocation spéciale
vieillesse (SASV), lui-même intégralement financé par le
Fonds de solidarité vieillesse
(art. L. 135-2 du code de la
sécurité sociale).
47.500 bénéficiaires du minimum vieillesse sont
concernés, ce qui représente, en 1998, une dépense de
592 millions de francs.
Le
paragraphe II
modifie la part de droits sur les alcools
affectée au FSV, qui est actuellement de 60 %, contre 40 % pour les
régimes obligatoires d'assurance maladie, depuis la loi de financement
de la sécurité sociale pour 1997. Le FSV a
bénéficié, en effet, d'une réduction de charges par
la création de la CADES qui a repris les 110 milliards de francs de
dettes transférés en 1993.
Cette part serait désormais de 55 %, soit en baisse de cinq points,
correspondant à 600 millions de francs.
L'article 38 du projet de loi, relatif à son entrée en vigueur,
précise que cette disposition est applicable aux versements
effectués au profit du FSV et de la CNAMTS à compter du
1
er
janvier 2000.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission propose de simplifier et de clarifier les transferts
financiers dont est assortie la suppression de l'assurance personnelle
(cf. ci-dessus)
.
S'agissant du présent article, elle considère qu'il est
délicat de faire varier, deux ans à peine après en avoir
fixé les principes par la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1997, la répartition des droits sur
les alcools. En effet, la nouvelle répartition -précisée
par l'article 11 du projet de loi- prévoit un troisième
bénéficiaire : la CNAMTS, qui bénéficiera de 5 % de
ces droits à titre exclusif.
Elle constate que la suppression de l'article 406 A du code
général des impôts (droit de fabrication sur les alcools),
résultant tant de la dernière loi de finances que de la
dernière loi de financement, a diminué les recettes du FSV de
350 millions de francs, sans qu'il y ait eu contrepartie.
Par ailleurs, l'article 2 de la loi de financement pour 1999 a posé le
principe d'une affectation des excédents du FSV au fonds de
réserve pour les retraites
(nouvel article L. 135-6 du code de
la sécurité sociale)
; il n'est donc pas inutile que cet
organisme voit ses dépenses diminuer, sans que ces recettes diminuent
dans des proportions strictement identiques.
Aussi, votre commission propose-t-elle de supprimer le II de cet article.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.
Art.
10
(art. L. 161-15, L. 381-2 et L. 245-16 du code de la
sécurité sociale)
Incidences financières de la
mise en place
de la couverture obligatoire sur la branche famille
Cet
article vise à supprimer la prise en charge, par les caisses
d'allocations familiales, des cotisations d'assurance personnelle, notamment
des titulaires de l'allocation parent isolé, et à diminuer en
contrepartie les ressources affectées à la CNAF.
I - Le texte du projet de loi
Le paragraphe I
supprime les dispositions du code de la
sécurité sociale qui assurent la prise en charge, par les caisses
d'allocations familiales :
- des cotisations d'assurance personnelle des ayants droit
d'assurés décédés ou des personnes
divorcées, ne bénéficient pas de l'assurance maladie et
maternité à un autre titre, lorsqu'elles ont ou ont eu au moins
trois enfants à charge
(combinaison des articles L. 161-15 et
R. 161-5-1 du code de la sécurité sociale)
;
- des cotisations d'assurance personnelle des titulaires de l'allocation
parent isolé
(art. L. 381-2 du code de la sécurité
sociale).
Le paragraphe II
prévoit que le prélèvement social
de 2 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placement, dont le
produit est actuellement versé pour moitié à la CNAF et
pour moitié à la CNAVTS, serait réparti de la
manière suivante :
- 50 % pour la CNAVTS (inchangé) ;
- 28 % pour la CNAMTS, nouvelle branche bénéficiaire,
- 22 % pour la CNAF (au lieu de 50 %).
Affectation du prélèvement social
Droit en vigueur |
Projet de loi |
||
CNAVTS |
1 % |
CNAVTS |
1 % |
CNAF |
1 % |
CNAF |
0,44 % |
|
|
CNAMTS |
0,56 % |
Total |
2 % |
Total |
2 % |
L'article 38 du projet de loi, relatif à son
entrée en
vigueur, précise que les dispositions de l'article 10 sont applicables
aux versements effectués au profit des organismes mentionnés
à compter du 1
er
janvier 2000.
Cet article a été adopté sans modification par
l'Assemblée nationale après qu'eut été
précisé à la demande de MM. Bernard Accoyer et
Jean-Luc Préel, le maintien du bénéfice à titre
gratuit du régime général des personnes veuves et
divorcées ayant élevé plus de trois enfants.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission propose de simplifier et de clarifier les transferts
financiers dont est assortie la suppression de l'assurance personnelle
(cf. ci-dessus).
Le présent article propose de priver la CNAF d'une partie du 1 %
social en contrepartie de la diminution de ses dépenses résultant
de la suppression de la prise en charge des cotisations d'assurance personnelle.
Votre commission préfère procéder à cette
contrepartie en rétablissant à la charge de la CNAF une partie du
coût de l'Allocation de parent isolé (API).
Il est donc proposé que la CNAF reprenne à sa charge 60 % de
l'API, l'Etat n'en finançant plus que 40 %.
La diminution de charge qui en résulte pour le budget
général lui permet, à équilibre inchangé,
d'affecter à la CNAMTS une part supplémentaire des droits sur les
tabacs. Cette recette se substitue pour la CNAMTS à la partie du 1 %
CNAF que le présent article lui affectait.
En conséquence, elle vous propose le remplacement du paragraphe II du
présent article par une disposition prévoyant -par une
modification de l'article L. 524-1 du code de la sécurité
sociale- de ramener la subvention de l'Etat à la CNAF à 40 % du
coût de l'API.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.
Art.
11
(art. L. 241-2 du code de la sécurité
sociale)
Enumération des ressources complémentaires
des régimes obligatoires de base
Cet
article vise à préciser les nouvelles recettes de la CNAMTS, pour
faire face aux dépenses résultant de la couverture maladie de
base.
I - Le texte du projet de loi
Le présent article vise à remplacer le dernier alinéa de
l'article L. 241-2, relatif à l'affectation à la CNAMTS
d'une fonction du droit de consommation sur les tabacs
(art. 575 du code
général des impôts).
Ces nouvelles ressources seraient :
- une fraction supplémentaire, qui sera fixée par la loi de
finances pour 2000, du produit du droit de consommation sur les tabacs ;
cette répartition est actuellement de 9,1 % selon l'article 46 de
la loi de finances pour 1998, modifiant l'article 49 de la loi de finances
pour 1997.
- une fraction fixée à 5 % du droit de consommation sur
les alcools (article 403 du code général des impôts),
à l'exception du produit perçu dans les départements de la
collectivité territoriale de Corse et du prélèvement
perçu au profit du BAPSA
(cf. art. 9)
;
L'article 38 du projet de loi, relatif à son entrée en vigueur,
précise que cette disposition est applicable aux versements
effectués au profit de la CNAMTS à compter du 1
er
janvier 2000.
- une fraction du prélèvement social sur les revenus du
patrimoine et les produits de placement
(cf. art. 10)
.
II - Les propositions de votre commission
En conséquence des amendements qu'elle vous a proposés aux
articles 9 et 10
(cf. supra)
, votre commission vous propose un
amendement qui a pour objet de supprimer, au titre des recettes de la CNAMTS,
tant la fraction de 5 % du droit de consommation sur les alcools que la
fraction du prélèvement social sur les revenus du patrimoine et
les produits de placement.
En revanche, la CNAMTS bénéficiera d'une part accrue des droits
sur les tabacs. Ses recettes seront ainsi plus homogènes et plus
cohérentes.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.
Art.
12
(art. L. 213-1 du code des assurances)
Modification de
l'affectation de la cotisation due par les personnes assurant des
véhicules terrestres à moteur
Cet
article vise à affecter l'intégralité de la cotisation sur
les véhicules terrestres à moteur (CVTAM) la CNAMTS.
I - Le texte du projet de loi
Le présent article prévoit l'affectation intégrale de la
CVTAM à la CNAMTS, et non à l'ensemble des régimes
d'assurance maladie. Cet article tire la conséquence de la suppression
de l'assurance personnelle, prévue à l'article 2 du projet de
loi, et de la répartition de son déficit entre les régimes
d'assurance maladie.
Cette cotisation est répartie actuellement entre les régimes
d'assurance maladie selon la clef suivante
9(
*
)
:
Affectation apparente de la cotisation VTAM en 1998
(en millions de francs)
CNAMTS |
81,32 % |
4.690 |
Autres régimes |
18,18 % |
1.080 |
TOTAL |
100 % |
5.770 |
L'étude d'impact retient le chiffre d'une recette
supplémentaire pour la CNAMTS de 830 millions de francs, alors que
les autres régimes ont apparemment reçu 1,1 milliard de
francs. En effet, deux régimes sont intégrés
financièrement à la CNAMTS, le régime des salariés
agricoles (170 millions de francs de CVTAM) et la caisse nationale
militaire de sécurité sociale (80 millions de francs).
Dès lors, la CNAMTS a bénéficié réellement
de 4,94 milliards de francs et bénéficiera de 830 millions
de francs supplémentaires.
Affectation réelle de la cotisation VTAM à la CNAMTS
(en millions de francs)
CNAMTS |
4.690 |
Salariés agricoles |
170 |
Caisse militaire |
80 |
TOTAL |
4.940 |
L'article 38 du projet de loi, relatif à son
entrée en
vigueur, précise que les dispositions de l'article 12 sont applicables
aux cotisations recouvrées par l'ACOSS au titre de l'année 2001.
II - Les propositions de votre commission
Votre rapporteur estime que, dans l'immédiat, cette affectation
intégrale contribue à la simplification des recettes. En
revanche, il considère que la cotisation sur les véhicules
terrestres à moteur risque de perdre une partie de sa justification.
Cette contribution était censée, en effet, représenter
l'effort spécifique des possesseurs d'automobiles aux frais d'assurance
maladie occasionnés par les accidents de circulation.
Dès lors, un non-salarié ne verra guère de justification
à s'acquitter d'une contribution censée financer les
dépenses d'assurance maladie liés aux accidents de la
circulation, mais bénéficiant au seul régime
général. Cette cotisation fait partie des " recettes de
poche " de la sécurité sociale instituées avant la
création de la CSG. Son maintien apparaît à terme
difficilement fondé.
Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous
propose d'adopter cet article assorti d'un amendement de précision.
Art.
13
(art. 38 de la loi n° 88-1088 du 1
er
décembre
1998
relative au revenu minimum d'insertion)
Transferts financiers
entre l'Etat et les départements
Cet
article tire les conséquences du transfert de compétences
résultant de la CMU et du fait que les départements n'auront plus
à assurer la prise en charge des dépenses d'aide médicale
comme ils le font actuellement pour 9,1 milliards de francs. Il doit en
résulter une diminution de l'ordre de 8,69 milliards de francs au
titre de leur dotation générale de décentralisation (DGD)
compte tenu d'un abattement de 5 %.
I - Les principes financiers posés en matière de transfert
de compétences
Conformément à la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983, relative
à la répartition des compétences entre les communes, les
départements, les régions et l'Etat, tout transfert de
compétences doit faire l'objet d'un transfert équivalent de
ressources.
Ainsi, conformément à l'article 1614-1 du code
général des collectivités territoriales,
" tout
accroissement net de charges résultant des transferts de
compétences effectués entre l'Etat et les collectivités
territoriales est accompagné du transfert concomitant par l'Etat aux
communes, aux départements et aux régions des ressources
nécessaires à l'exercice normal de ces compétences. Ces
ressources sont équivalentes aux dépenses effectuées,
à la date du transfert, par l'Etat au titre des compétences
transférées et évoluent chaque année comme la
dotation globale de fonctionnement. Elles assurent la compensation
intégrale des charges transférées. "
De fait les transferts de charges opérés sur la base des lois de
1983 ont reposé sur des
principes simples
:
- la
simultanéité
du transfert de compétences
et du transfert de ressources : les deux opérations doivent
intervenir de manière concomitante ;
- les ressources transférées doivent être
intégralement équivalentes
aux dépenses
effectuées par la collectivité en charge de la compétence
à la date du transfert de compétences. L'évaluation des
accroissements ou diminution de charges est effectuée non seulement
globalement pour l'ensemble des collectivités concernées, mais
également collectivité par collectivité.
C'est pourquoi les transferts de charges effectués en 1983 ont
été effectués sous le contrôle de la Commission
consultative sur l'évaluation des charges résultant des
transferts de compétences. Cette dernière a néanmoins fait
l'objet de certains reproches dans la mesure où elle s'est toujours
refusée à effectuer un suivi de l'évolution réelle
des coûts liés aux charges transférées.
- la compensation financière des transferts de charges a
été effectuée par le
transfert de ressources
fiscales
et, à titre subsidiaire, par le transfert de
ressources
budgétaires
à travers la dotation générale de
décentralisation.
Ainsi, en 1983, les compétences transférées aux
régions et aux départements ont donné lieu au transfert du
produit de divers impôts d'Etat : " taxe sur les cartes
grises " pour les régions ; " vignette automobile "
et droits d'enregistrement sur les mutations d'immeuble pour les
départements.
En 1983, il avait été prévu que la moitié au moins
des transferts de charges devait être financée par le transfert
d'impôts d'Etat ; la DGD correspond, quant à elle, la
première année du transfert de compétences, au solde
destiné à compenser la fraction de l'accroissement de charge qui
n'est pas financée par l'augmentation des ressources fiscales des
collectivités locales.
Dans la mesure où la collectivité territoriale est
réputée assumer la responsabilité de la gestion de la
compétence transférée, la DGD est uniquement
indexée sur la DGF.
Cet article procède à une
opération
symétrique
de celle opérée en 1983 : la
compétence qui est transférée par les départements
doit donner lieu à un transfert de ressources à l'Etat qui
assurera en partie le financement de la CMU.
De fait, la mise en place de la CMU nécessite de procéder
à un mouvement de diminution de la DGD des départements dans la
mesure où ils cessent d'exercer une compétence.
L'exercice est néanmoins rendu moins clair que celui pratiqué
dans le cadre des lois de mars 1983 : en effet, il n'y a pas à
proprement parler transfert d'une compétence à l'Etat, mais
plutôt aux organismes d'assurance maladie chargés de gérer
la CMU qui bénéficient de l'aide financière de multiples
intervenants dont l'Etat.
II - Le texte du projet de loi
Le
paragraphe I
fixe les
règles applicables au transfert
financier
.
Le montant du transfert opéré sur la DGD de chaque
département sera égal "
au montant des dépenses
consacrées à l'aide médicale en 1997, diminué de 5
% et revalorisé en fonction du taux d'évolution de la DGF pour
1998, 1999 et 2000
. "
• La
base de calcul
de la diminution de la DGD est
constituée par l'ensemble des dépenses
" consacrées à l'aide médicale "
dans chaque
département.
Ce point est relativement important car il aboutit à faire prendre en
charge, sur la DGD des départements, à la fois des
dépenses qui résultaient du respect des obligations
légales et des dépenses découlant de la politique d'action
sociale poursuivie spécifiquement dans chaque département.
La distinction joue à la fois sur les conditions d'admission et sur la
nature des dépenses médicales prises en charge.
Sont admis de plein droit à l'aide médicale aux termes de la
loi :
- les personnes bénéficiant du RMI, les titulaires de
l'allocation de veuvage et les jeunes âgés de 17 à 25 ans
qui satisfont aux conditions de ressources et de résidence fixées
pour l'attribution du RMI.
En plus de ces bénéficiaires, le département participe aux
dépenses de soins de personnes en difficulté :
- soit en prévoyant un barème départemental de ressources
défini par le règlement départemental d'aide
sociale : celui-ci doit tenir compte du nombre de personnes à
charge, la part des frais restant à la charge du
bénéficiaire doit être définie de manière
forfaitaire ou en pourcentage, en fonction des charges dont celui-ci fait
état et des ressources dont il dispose ;
- soit à la suite d'un examen au cas par cas de la situation de
l'intéressé.
S'agissant des dépenses prises en charge, la loi mentionne, à
titre obligatoire, les frais de soins restant à la charge de
l'assuré, le forfait hospitalier journalier et les cotisations
d'assurance personnelle. Il reste que les départements ont souvent
prévu des dispositions plus favorables et, en particulier, la prise en
charge des cotisations d'un régime complémentaire d'assurance
maladie.
De fait, l'ensemble des dépenses d'aide médicale est pris en
compte au moment du transfert, ce qui appelle des observations comme on le
verra ultérieurement.
Le montant des dépenses d'aide médicale fait l'objet d'un
abattement de 5 %.
Ce point pourrait apparaître comme une atténuation du principe de
la compensation intégrale ; la réalité est
différente dans la mesure où la réduction forfaitaire de
5 % vise à tenir compte du fait que les dépenses d'aide
médicale des départements sont supérieures à ce qui
devrait résulter de l'application normale de la réglementation.
En effet, conformément à l'article 188-3 du code de la famille et
de l'aide sociale, la prise en charge est subordonnée à la
condition que l'intéressé fasse valoir ses droits aux prestations
de l'assurance maladie et maternité ainsi qu'aux garanties auxquelles il
peut prétendre d'une mutuelle, d'une entreprise d'assurances ou d'une
institution de prévoyance.
En réalité, du fait des difficultés de croisement entre
les fichiers des CPAM, des URSSAF et des départements, il apparaît
de nombreux cas où l'aide médicale est versée à des
personnes qui, soit à titre d'ayant droit, soit à titre
personnel, détiennent des droits à prestations au titre de
l'assurance maladie.
L'aide médicale est souvent financée par les départements
pour des personnes ayant travaillé au moins 30 heures sur un mois, qui
sortent de prison ou qui sont titulaires de l'API, qui devraient avoir des
droits ouverts à l'assurance maladie mais qui ont souvent des
difficultés à les faire valoir.
Pour tenir compte de ces phénomènes, il sera donc appliqué
un taux forfaitaire de réfaction de l'assiette de calcul du
prélèvement sur la DGD : il a été
appliqué à l'ensemble des départements en partant du
postulat que l'effet des doubles comptes jouait uniformément sur le
territoire national. Le mécanisme s'inscrit donc sinon dans la lettre,
du moins dans la logique, d'un transfert de compétences.
• Le choix de
l'année de référence du
calcul
du prélèvement appelle également quelque
précision.
L'année 1997 a été choisie, s'agissant d'un dispositif
applicable au 1
er
janvier 2000, afin de tenir compte des
données inscrites dans le compte administratif définitif des
budgets départementaux. Les dépenses sont actualisées en
tenant compte de l'indice d'évolution de la DGF sur les années
1998, 1999 et 2000.
Selon M. Raoul Briet, directeur de la sécurité
sociale
10(
*
)
, ce choix serait
relativement avantageux pour les collectivités locales puisque les
dépenses seront actualisées pour les trois dernières
années en fonction du taux de croissance annuel de la DGD (de l'ordre de
2 %), qui sera un taux très inférieur à
l'évolution des dépenses d'aide médicale, qui avoisine en
moyenne 10 % par an au cours de ces dernières années.
• Le prélèvement sera opéré, s'il y a
lieu, sur le produit des recettes fiscales transférées en 1983
dans le cadre des lois portant répartition des compétences.
Deux hypothèses se présentent :
- soit, dans le département, le montant des dépenses
inscrites au titre de l'aide médicale en 1997 est inférieur au
montant de la DGD : l'imputation ne portera que sur cette dotation ;
- soit le montant desdites dépenses est supérieur à
celui de la DGD : dans ce cas, le département devra verser au
budget de l'Etat une fraction de ses ressources fiscales
transférées.
M. Michel Mercier, président de la commission sociale de l'ADF,
entendu en audition, a souligné que la deuxième hypothèse
n'était pas un cas d'école et que, dans de nombreux
départements, il apparaîtrait " optiquement " le
versement d'une contribution du département à l'Etat à la
suite de la mise en place de la CMU.
• La procédure est placée sous
le
contrôle
de la
Commission consultative sur l'évaluation des
charges résultant des transferts de compétences
.
Cette commission, composée de huit représentants des communes,
quatre représentants des conseils généraux et quatre
représentants des conseils régionaux et présidée
par un magistrat de la Cour des comptes, est chargée de donner un avis
sur l'évaluation des accroissements et diminutions de charge. Elle
examine notamment la liste et le montant des dépenses effectuées
à la date du transfert de compétences et vérifie la
concordance pour chaque collectivité
(décret n° 83-178 du
10 mars 1983)
. Il est à noter que le décret relatif à
cette commission n'envisage pas le cas d'un transfert de charges des
collectivités locales vers l'Etat et qu'il devra vraisemblablement
être modifié pour tenir compte de ce projet de loi.
Le
paragraphe II
de cet article précise la
nature comptable
des dépenses qui seront prises en compte
pour le calcul du
prélèvement de la DGD.
Il s'agit des dépenses inscrites au titre de l'aide médicale,
soit dans les chapitres relatifs à l'aide médicale en application
du code de la famille et de l'aide sociale, soit dans les chapitres relatifs
à l'insertion au titre de la prise en charge des cotisations d'assurance
personnelle des titulaires du RMI.
Il est précisé que ne sont pas prises en compte les
dépenses correspondant "
aux charges des services communs
réparties entre services utilisateurs
".
Ne sont donc prises en compte que les dépenses d'intervention
supportées par les collectivités territoriales, à
l'exclusion des dépenses de fonctionnement : il n'est pas
opéré de transfert des personnels actuellement en charge de
l'aide médicale de l'Etat dans les services des départements. Ces
derniers sont invités à redéployer leurs moyens de
personnel correspondant vers d'autres fonctions.
Enfin, le
paragraphe III
de cet article procède à un
ajustement de conséquence
concernant l'obligation pour les
départements d'inscrire dans leur budget, pour l'insertion des
bénéficiaires du RMI, un crédit au moins égal
à 20 % des sommes versées au cours de l'exercice
précédent au titre de l'allocation RMI.
Cette disposition, prévue à l'article 38 de la loi n°
88-10888 du 1
er
écembre 1988 relative au RMI, a
déjà appelé diverses objections de la part de votre
commission, dans la mesure où elle a pour effet de figer, dans les
budgets départementaux, une fraction des crédits d'intervention
qui sont donc reconduits d'année en année, sans pouvoir
être utilisés à des actions de lutte contre l'exclusion
autres que celles en faveur de l'insertion des titulaires du RMI.
L'article 38 précité prévoit un aménagement dans
la mesure où il permet que les dépenses résultant de la
prise en charge des cotisations d'assurance personnelle ou des frais
médicaux des titulaires du RMI, soient imputées sur les 20 %
de crédits préaffectés, dans la limite de 3 % de ces
crédits en métropole (3,75 % en outre mer). De fait, la mise
en oeuvre de la CMU rend cette procédure inutile.
C'est pourquoi il est procédé à un ajustement sur le
taux de crédits devant être consacrés obligatoirement
à l'insertion des bénéficiaires du RMI, qui passe de
20 % à 17 % du montant des crédits relatifs au
versement de l'allocation dans les départements (16,25 % en outre
mer).
III - Les propositions de votre commission
Votre commission a examiné avec attention le principe du
prélèvement de 8,69 milliards de francs sur la DGD des
départements mis en oeuvre à l'occasion de l'instauration de la
CMU.
Le passage d'un dispositif d'aide sociale décentralisée
à un mécanisme de protection sociale
généralisé, apparemment plus séduisant en raison de
son caractère général et universel, risque parfois de
soulever des déceptions : le nouveau dispositif risque d'être
impersonnel et moins apte qu'auparavant à assurer un véritable
accompagnement des assurés sociaux.
Il reste que le caractère automatique d'une partie des admissions
réalisées au titre de l'aide médicale de base
présentait de réels inconvénients. Il faisait des
départements une sorte de " caisse d'enregistrement "
financière des assurés sociaux, au prix de la confrontation avec
un certain nombre de lourdeurs administratives dont les départements
n'étaient pas responsables,.
Pour autant, l'action des départements en matière
d'accès aux soins de plus démunis ne doit pas être
sous-estimée
a posteriori
.
L'ODAS, dans une note récente
11(
*
)
, soulignait qu'en 1998, huit
départements sur dix avaient mis en place un barème d'admission
totale de plein droit, fixant souvent un seuil de ressources de l'ordre du RMI
majoré de 25 %.
Quatre départements sur dix ont prévu une prise en charge
totale des personnes ayant des ressources supérieures au RMI (soit 2.502
francs par mois pour une personne seule). Ce barème se conjugue souvent
avec un barème d'admission partielle pour un niveau de revenu
supérieur ou égal au minimum vieillesse (deux fois sur trois).
Un autre élément de satisfaction réside dans le fait que
75 % des départements prononçaient l'admission à
l'aide médicale de plein droit dans un
délai de 15 jours
à compter du dépôt de la demande.
Enfin, il est à noter qu'un département sur deux effectuait des
remboursements au-delà des tarifs de la sécurité sociale,
notamment pour les soins dentaires et les lunettes.
Depuis 1992, l'accès aux soins des personnes démunies ou en
difficulté, géré par les départements, n'a pas
été contre-performant ; les innovations conduites au niveau
local ont souvent permis les prises de conscience et les expériences
concrètes qui sont à l'origine du présent texte.
Au-delà des objectifs généraux et sur le plan
strictement financier, votre commission n'a pas estimé qu'il y avait
lieu de remettre en cause le dispositif de compensation financière sur
la DGD qui a été mis en place à l'issue d'une concertation
avec l'Assemblée des Départements de France et qui tient compte,
par l'intermédiaire de la mise en place du coefficient de
réduction de 5 %, du poids de diverses charges indues qui pesaient
sur les finances départementales.
Cette réduction forfaitaire prise en charge indirectement par le
budget de l'Etat, représente au total une somme de l'ordre de 450
millions de francs.
Certains ont fait valoir que plutôt que d'appliquer uniformément
le coefficient de 5 % à l'ensemble des départements, il
aurait été préférable de le répartir de
manière différenciée afin de soutenir les
départements les plus engagés par rapport à ceux qui se
sont limités à appliquer le minimum légal.
En réalité, si l'on raisonne à enveloppe constante, il
apparaît que la modulation du coefficient, si elle avantage certains
départements, en pénalisera automatiquement d'autres.
Si l'on demeure dans la logique des transferts de charges opérés
en 1983, il importe d'opérer des compensations financières qui
correspondent le plus fidèlement possible aux charges réellement
assumées au niveau local.
Les barèmes d'admission complémentaires sont le résultat
de décisions prises pour délibération des conseils
généraux.
Si l'on choisissait d'opérer un transfert en faveur de certains
départements, une contrepartie devrait être trouvée sur les
autres. Il serait très difficile de justifier que les
départements qui ont maintenu le minimum légal subissent, le cas
échéant, un prélèvement au titre de leur DGD
supérieur à la réalité de leurs dépenses
d'aide médicale. La fixation d'un coefficient de réfaction
forfaitaire nul au lieu de 5 % serait critiquable car rien ne permet de
prouver que les prises en charge indues, du fait de droits déjà
ouverts, soient spécialement plus importantes dans certains
départements et pas dans d'autres.
D'une façon plus générale, votre commission souligne que
le but prioritaire de cet article n'est pas d'opérer une
péréquation financière
entre les collectivités
locales, comme on peut le faire par exemple avec la dotation de
solidarité urbaine (DSU) ou la dotation de développement rural
(DDR) au sein de la DGF, mais d'abord de tirer les conséquences
financières d'un transfert de compétences en cherchant à
respecter le plus fidèlement possible la réalité des
dépenses constatées sur le terrain dans chaque département.
A enveloppe budgétaire constante, il apparaît difficile de
concevoir une autre solution de financement qui susciterait plus de
satisfaction que de mécontentement de la part des collectivités
locales concernées.
Les modalités de mise en oeuvre du dispositif appelle également
des précautions : dès lors que la CMU entrera en vigueur au
1
er
janvier 2000, s'ouvrira une phase transitoire au cours de
laquelle les assurés sociaux actuellement bénéficiaires de
l'aide médicale départementale devront faire valider leurs droits
par les CPAM pour l'obtention de la CMU.
Il est prévu, à l'article 26 du projet de loi, que les
titulaires de l'aide médicale à la date d'entrée en
vigueur de ce projet de loi bénéficieront du maintien de leurs
droits jusqu'à l'expiration de la période d'admission à
l'aide médicale et, en tout état de cause, jusqu'au 31 mars 2000.
Il sera important que l'information des bénéficiaires de la CMU
soit assurée pleinement afin de ne pas alourdir la tâche des
départements durant la période de transition.
Tout en comprenant la logique du transfert financier opéré,
votre commission a émis trois observations sur les risques que comporte
pour les finances locales la mise en place de la CMU.
•
Premier risque : une pression accrue sur les
décideurs locaux du fait de l'effet de seuil
La mise en place de la CMU entraînera quasi-inéluctablement des
demandes de la part des personnes qui se trouveront au-dessus du plafond de
ressources prévu pour l'obtention de la couverture complémentaire
gratuite, afin d'obtenir la mise en place d'une prise en charge par une aide
complémentaire spécifique.
Le phénomène de seuil sera le plus apparent dans les
départements -de l'ordre d'une dizaine selon les estimations minimales-
qui ont déjà institué un barème prévoyant
des prises en charge, partielle ou complète, des frais médicaux
pour des personnes dont le revenu est supérieur à 3.500 francs
par mois pour une personne seule. En toute logique, ces personnes devraient
perdre leur droit au 31 mars 2000, ce qui peut soulever d'évidentes
difficultés.
Au demeurant, la demande des assurés sociaux au-dessus du seuil ne
pourra que se généraliser dans la mesure où la CMU,
uniforme sur tout le territoire national, aura automatiquement
un effet
démultiplicateur sur la perception de l'effet de seuil
qui
n'existait pas auparavant.
Même si le Gouvernement met en avant le rôle que pourraient jouer
les Fonds d'action sociale des caisses de sécurité sociale, il
reste qu'au niveau local les départements et les centres communaux
d'action sociale financés par les communes seront naturellement
" en première ligne " pour faire face aux demandes des
assurés sociaux traversant des difficultés financières.
Certes la disposition prévue à l'article 188-2 de l'actuel code
de la famille et de l'aide sociale qui permet au règlement
départemental d'aide sociale de prévoir des dispositions plus
favorables que le minimum légal en matière d'aide médicale
est supprimée par le projet de loi.
Il reste que les départements ont une compétence
générale en matière d'action sociale et que les pressions
seront fortes en faveur de la mise en place de barèmes
complémentaires pour des raisons d'équité.
Ce risque rend d'autant plus nécessaire la mise en place d'une aide
dégressive en fonction du revenu telle que la propose votre commission.
•
Second risque : la sous-estimation de l'impact de la
réforme sur les contingents communaux d'aide sociale
Vestiges du système de financement croisé qui prévalait
avant la décentralisation, les contingents communaux d'aide sociale sont
régis par l'article 93 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative
à la répartition des compétences et par le décret
n° 87-1196 du 31 décembre 1987.
La participation des communes aux dépenses d'aide sociale des
départements est effectuée sur la base des besoins des
départements, de leur potentiel fiscal et des dépenses d'aide
sociale.
La contribution de chaque commune, au-delà d'une élément
fixe qui correspond à la contribution versée en 1984, comprend un
élément variable qui peut varier en fonction de critères
basés sur :
- la situation de la commune au regard de la DGF ou du potentiel
fiscal ;
- le nombre de bénéficiaires des prestations d'aide sociale
ou d'admissions à l'aide sociale ;
- la structure de la population par classe d'âge ou la situation de
l'emploi.
La moyenne nationale de participation des communes aux dépenses nettes
d'aide sociale obligatoire et de santé des départements est
fixée à 15,1 % mais les montants versés par chaque
commune sont très variables.
Le montant total des sommes par les communes, d'un montant de l'ordre de 12
milliards de francs (hors Paris), comprend donc une fraction, de l'ordre de
10 % à 15 % du total selon les départements, qui
correspond à la participation des communes aux dépenses des
bénéficiaires de l'aide médicale départementale.
En toute logique, compte tenu du transfert de compétences
résultant de la CMU, cette fraction aurait dû être
soustraite du montant à prélever de la DGD des
départements et déduite du montant des contingents communaux en
contrepartie d'une diminution de ressources équivalente pour chaque
commune. Cette solution n'a pas été retenue peut-être en
raison de la difficulté technique de connaître exactement la part
imputable à chaque commune au titre de l'aide médicale.
Ce faisant, le dispositif proposé fait implicitement le choix de
maintenir le versement intégral du contingent communal d'aide sociale
aux départements, alors même que le département n'assumera
plus l'intégralité de la compétence qui lui était
dévolue en 1983.
La justification du contingent communal est rendue plus fragile au moment
où celui-ci fait l'objet de diverses critiques tenant à la
complexité de sa mise en oeuvre et aux disparités de traitement
des communes suivant leur département de rattachement.
La mise en place de la CMU offrait l'occasion de simplifier les relations
financières entre départements et communes en modifiant la
formule des contingents communaux d'aide sociale.
S'agissant d'une question qui concerne directement les relations
financières entre collectivités locales, votre commission ne peut
qu'être extrêmement attentive aux observations qui seront faites et
aux propositions qui seront avancées par votre commission des finances.
Il serait utile que les travaux de concertation engagés entre la
Direction générale des collectivités locales et les
associations d'élus locaux, à la demande de M. Jean-Pierre
Fourcade, président du Comité des finances locales, lors de la
séance du 17 mars dernier, débouche sur des résultats
concrets susceptibles de recueillir un accord général avant la
fin de la discussion de ce projet de loi.
•
Troisième risque : le coût occulté de
la reconversion des personnels départementaux
Le Gouvernement a choisi le principe du maintien dans les départements
des fonctionnaires et agents publics actuellement affectés à la
gestion de l'aide médicale dans les services des conseils
généraux.
Il n'a pas été mis en place de droit d'option des personnels
à l'image de ce qui avait été prévu lors des lois
de 1983. L'exercice aurait été, il est vrai, rendu difficile par
le fait que ce n'est pas l'Etat qui gérera la nouvelle prestation mais
plutôt les CPAM.
Les effectifs des personnels concernés sont variables suivant les
départements. Mme Martine Aubry, lors de son audition devant la
commission, a estimé que les reconversions seraient aisées dans
le secteur social où la demande est forte.
Il reste que la situation sera différente selon les départements
et l'importance du public suivi. Paradoxalement, une fois encore, les
départements les plus volontaristes dans leur démarche d'aide
à l'accès aux soins des plus démunis, ou les plus
touchés par la montée de l'exclusion, sont ceux qui ont le plus
d'agents à redéployer et qui devront parfois engager des frais de
formation pour faciliter les changements de poste.
Votre rapporteur souligne qu'une évaluation mériterait
d'être engagée sur les coûts induits de la réforme.
Elle pourrait utilement figurer dans le bilan demandé par votre
commission dans un article additionnel après l'article 31.
Sous le bénéfice de ces observations,
votre commission vous
propose d'adopter cet article sans modification.