Projet de loi sur la création d'une couverture maladie universelle
DESCOURS (Charles)
RAPPORT 376 (98-99), Tome 1 - Commission des Affaires sociales
Table des matières
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TRAVAUX DE LA COMMISSION
- I. AUDITION DE MME AUBRY, MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITÉ
- II. EXAMEN DU RAPPORT
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III. SÉANCE DU MERCREDI 7 AVRIL 1999
- A. AUDITION DE MM. MICHEL HERMANT, PRÉSIDENT, GILLES MARCHANDON, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL, ET PHILIPPE DELEMARRE, SECRÉTAIRE NATIONAL, DE LA FÉDÉRATION NATIONALE INTERPROFESSIONNELLE DES MUTUELLES (FNIM)
- B. AUDITION DE M. CLAUDE MAFFIOLI, PRÉSIDENT DU CENTRE NATIONAL DES PROFESSIONS DE SANTÉ (CNPS)
- C. AUDITION DE M. MARC ZAMICHIEI, MEMBRE DU BUREAU FÉDÉRAL, CHARGÉ DU SECTEUR SANITAIRE ET SANTÉ, DE LA FÉDÉRATION DES MUTUELLES DE FRANCE (FMF)
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IV. SÉANCE DU MERCREDI 28 AVRIL 1999
- A. AUDITION DE M. HUGUES FELTESSE, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'UNION NATIONALE INTERFÉDÉRALE DES OEUVRES ET ORGANISMES PRIVÉS SANITAIRES ET SOCIAUX (UNIOPSS) ET DES MEMBRES DU GROUPE DE TRAVAIL " SANTÉ PRÉCARITÉ "
- B. AUDITION DE M. MARCEL RAVOUX, PRÉSIDENT DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE MALADIE ET MATERNITÉ DES TRAVAILLEURS NON SALARIÉS DES PROFESSIONS NON AGRICOLES (CANAM), ET DE M. DANIEL POSTEL-VINAY, DIRECTEUR GÉNÉRAL AINSI QUE DE M. DANIEL LENOIR, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE (MSA).
- C. AUDITION DE M. JEAN-LOUIS FAURE, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL DU CENTRE TECHNIQUE DES INSTITUTIONS DE PRÉVOYANCE (CTIP)
- D. AUDITION DE M. JEAN-MARIE SPAETH, PRÉSIDENT DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE MALADIE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS (CNAMTS)
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V. SÉANCE DU MERCREDI 4 MAI 1999
- A. AUDITION DE M. JEAN-PIERRE DAVANT, PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION NATIONALE DE LA MUTUALITÉ FRANÇAISE (FNMF)
- B. AUDITION DE MME DOMINIQUE POLTON, DIRECTEUR DU CENTRE DE RECHERCHE D'ÉTUDE ET DE DOCUMENTATION EN ÉCONOMIE DE LA SANTÉ (CREDES), ET DE M. MICHEL GRIGNON, DIRECTEUR DE RECHERCHE
- C. AUDITION DE M. MICHEL DOLLÉ, RAPPORTEUR GÉNÉRAL AU CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'EMPLOI, DES REVENUS ET DES COÛTS (CSERC)
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VI. SÉANCE DU MERCREDI 19 MAI 1999
- A. AUDITION DE M. MICHEL MERCIER, PRÉSIDENT, ET M. BERNARD CAZEAU, VICE-PRÉSIDENT, DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES DE L'ASSEMBLÉE DES DÉPARTEMENTS DE FRANCE (ADF)
- B. AUDITION DE M. DENIS KESSLER, PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION FRANÇAISE DES SOCIÉTÉS D'ASSURANCE (FFSA), ACCOMPAGNÉ DE M. ANDRÉ RENAUDIN, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL DU GROUPEMENT DES ASSURANCES DE PERSONNES
- AVANT-PROPOS
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PREMIÈRE PARTIE
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LE PROJET PRÉSENTÉ PAR LE GOUVERNEMENT-
I. UN PROJET GÉNÉREUX, FONDÉ SUR UN DOUBLE CONSTAT ET UN
DOUBLE OUBLI
- A. UN DOUBLE CONSTAT
- B. UN DOUBLE OUBLI : LES AVANCÉES PERMISES PAR L'ASSURANCE PERSONNELLE ET L'AIDE SOCIALE
-
II. UN PROJET DE LOI QUI COMPORTE QUATRE DÉFAUTS MAJEURS
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A. IL PROPOSE DES SOLUTIONS QUI RÉVÈLENT UNE DOUBLE ERREUR
D'ANALYSE
- 1. Il place hors de notre système de protection sociale, au lieu de les y intégrer, un ensemble de 6 millions de personnes, alors qu'elles ne constituent pas un groupe homogène de personnes " à part "
- 2. En raisonnant d'une manière statique, les auteurs du projet de loi estiment que la CMU comblera les carences de notre système de protection sociale, alors qu'elle contribuera à emballer le cercle vicieux qui la mine
- B. IL S'ATTAQUE DOUBLEMENT AUX PRINCIPES FONDATEURS DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
- C. IL EST INÉGALITAIRE ET DÉRESPONSABILISANT
- D. IL N'EST MAÎTRISÉ NI DANS SON COÛT NI DANS SES CONSÉQUENCES
-
A. IL PROPOSE DES SOLUTIONS QUI RÉVÈLENT UNE DOUBLE ERREUR
D'ANALYSE
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I. UN PROJET GÉNÉREUX, FONDÉ SUR UN DOUBLE CONSTAT ET UN
DOUBLE OUBLI
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DEUXIÈME PARTIE
-
LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION- I. L'ALLOCATION PERSONNALISÉE À LA SANTÉ : INTÉGRER, EN LES SOLVABILISANT, PLUS DE SIX MILLIONS DE PERSONNES DANS LE SYSTÈME DE PROTECTION SOCIALE PLUTÔT QUE LES EXCLURE
- II. UN PROJET RESPONSABILISANT, QUI EFFACE LES EFFETS DE SEUIL
- III. UN PROJET QUI PREND EN CONSIDÉRATION LES DIFFICULTÉS SPÉCIFIQUES RENCONTRÉES PAR LES PLUS DÉMUNIS
- IV. UN PROJET VÉRITABLEMENT PARTENARIAL
- EXAMEN DES ARTICLES
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TITRE PRÉLIMINAIRE
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DE LA COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE -
TITRE PREMIER
-
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RÉGIMES OBLIGATOIRES -
CHAPITRE PREMIER
-
Dispositions générales -
CHAPITRE 2
-
Dispositions financières -
Section 1
-
Transferts financiers -
Section 2
-
Recouvrement des cotisations -
CHAPITRE 3
-
Dispositions diverses -
TITRE II
-
DISPOSITIONS RELATIVES À LA PROTECTION COMPLÉMENTAIRE EN MATIÈRE DE SANTÉ -
CHAPITRE PREMIER
-
Dispositions générales -
CHAPITRE 2
-
Dispositions financières -
CHAPITRE 3
-
Dispositions transitoires -
CHAPITRE 4
-
Dispositions diverses -
TITRE III
-
RÉFORME DE L'AIDE MÉDICALE -
Section additionnelle après l'article 31
Contrôle et évaluation de la loi -
TITRE V
-
ENTRÉE EN VIGUEUR - ANNEXES
N°
376
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 26 mai 1999
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, portant création d'une couverture maladie universelle ,
Par M.
Charles DESCOURS,
Sénateur.
Tome I
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Jean Delaneau,
président
; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine
Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet,
vice-présidents
; Mme Annick Bocandé, MM. Charles
Descours, Alain Gournac, Roland Huguet,
secrétaires
; Henri
d'Attilio, François Autain, Paul Blanc, Mme Nicole Borvo, MM.
Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux,
Philippe Darniche, Christian Demuynck, Claude Domeizel, Jacques Dominati,
Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Claude Huriet,
André Jourdain, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, Dominique Larifla,
Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Simon Loueckhote, Jacques
Machet, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM.
Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de
Raincourt, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul
Vergès, André Vezinhet, Guy Vissac.
Voir les numéros :
Assemblée nationale (11
ème
législ.) :
1419
,
1518
et T.A.
288
.
Sénat
:
338
et
382
(1998-1999).
Assurance maladie maternité. |
TRAVAUX DE LA COMMISSION
I. AUDITION DE MME AUBRY, MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITÉ
Réunie le
mardi 18 mai 1999
, sous la
présidence de
M. Jean Delaneau, président,
la commission a
procédé à
l'audition de Mme Martine Aubry, ministre de
l'emploi et de la solidarité, sur le projet de loi n° 338
(1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, après
déclaration d'urgence,
portant
création d'une
couverture maladie universelle
(CMU)
.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
rappelé que la loi d'orientation relative à la lutte contre les
exclusions, par certaines de ses dispositions (programmes régionaux
d'accès aux soins, permanences d'accès aux soins de
santé), avait annoncé le projet de loi portant création
d'une couverture maladie universelle. Elle a souligné que l'apport
essentiel de la CMU consistait à mettre un terme à l'inadmissible
injustice que représentait l'inégalité devant la
prévention et les soins, le niveau de revenu ne devant plus introduire
de discrimination dans le domaine de la santé. Elle a indiqué
qu'un Français sur quatre renonçait à se soigner pour des
raisons financières et que l'espérance de vie variait
considérablement en fonction des critères socioprofessionnels,
l'écart ayant tendance à s'accroître à nouveau,
tandis que des pathologies, comme la tuberculose, réapparaissaient.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
indiqué que le projet de loi comprenait deux parties distinctes. La
première partie correspondait au projet d'assurance maladie universelle
sur lequel avait travaillé le précédent Gouvernement. Elle
a indiqué que le projet de loi disposait ainsi que tout résident
stable et régulier qui n'aurait pas de droits ouverts auprès d'un
régime de sécurité sociale bénéficierait,
sur la seule justification de sa résidence régulière, des
prestations du régime général. Elle a
précisé que les personnes au revenu supérieur à
3.500 francs par mois, pour un célibataire, s'acquitteraient d'une
cotisation proportionnelle au revenu au-delà de ce seuil. Elle a
expliqué que l'affiliation serait à la fois immédiate -la
caisse concernée recherchant ensuite si la personne ne peut
bénéficier de droits à un autre titre- et automatique, sur
présentation de la carte d'identité, ou, s'il s'agit d'un
étranger, de la carte de séjour. Elle a souligné que les
droits aux prestations en nature seraient ouverts dès le
dépôt de la demande et que leur continuité serait garantie,
le paiement de cotisations ne constituant plus un préliminaire à
l'accès aux soins. Elle a observé que 700.000 personnes n'avaient
pas accès actuellement à un régime de base obligatoire,
550.000 d'entre elles étant affiliées au régime de
l'assurance personnelle (dont 50.000 cotisants), régime complexe
qui laisse subsister une population de 150.000 personnes ne
bénéficiant d'aucune couverture maladie.
Elle a observé que la seconde partie du projet de loi visait à
ouvrir un droit à la couverture complémentaire pour les 10 % de
personnes les plus modestes de la population. Elle a constaté que
l'assurance maladie laissait 25 % des dépenses de santé
à la charge des ménages, alors que de nombreux pays
européens garantissent un accès gratuit. Précisant que
84 % de la population disposent d'une couverture complémentaire
prenant en charge le forfait hospitalier et le ticket modérateur, elle a
observé que cette proportion tombait à 45 % dans la tranche
des revenus inférieurs à 2.000 francs par mois. Elle a
indiqué que l'aide médicale gérée par les
départements n'avait pas résolu ces problèmes
d'accès aux soins, en raison de barèmes de ressources trop
restrictifs dans certains départements, certains se limitant à
l'obligation légale de prise en charge des bénéficiaires
du RMI. Elle a précisé que la couverture maladie universelle
permettrait à 6 millions de personnes de bénéficier
d'une couverture complémentaire, définie de manière
égale sur tout le territoire. Elle a souligné que les soins,
comme le forfait hospitalier, seraient pris en charge à 100 % et
que des remboursements adaptés seraient mis en place pour les
prothèses dentaires et l'optique. S'agissant du problème de
l'avance de frais, elle a observé que les personnes aux revenus les plus
modiques bénéficieraient du tiers payant tant sur les prestations
obligatoires qu'au titre de la couverture complémentaire.
Abordant la question de l'effet de seuil, induit par la fixation d'un plafond
de revenus par unité de consommation fixé à 3.500 francs
pour une personne seule, elle a constaté qu'il était
particulièrement difficile de l'éviter. Elle a observé que
les départements avaient, à l'heure actuelle, recours au
même système. Elle a expliqué qu'un certain nombre de
mécanismes serait mis en place pour en atténuer au maximum les
effets :
- les droits à la couverture complémentaire seront ouverts
pendant un an, quelle que soit l'évolution du revenu des
bénéficiaires pendant la période de
référence ;
- les bénéficiaires de la couverture maladie universelle (CMU)
qui viendraient à dépasser le seuil de revenus et qui auront
choisi une mutuelle ou une assurance, verront leurs droits à la
couverture complémentaire prolongés d'un an à un tarif
préférentiel ;
- les fonds d'action sociale des caisses, soulagés par la mise en place
de la CMU, pourront intervenir pour les personnes dont les ressources sont
supérieures au barème, mais qui rencontreraient des
problèmes particuliers.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
évoqué les critiques des députés de l'opposition,
qu'elle a jugées contradictoires. Elle a constaté qu'il
n'était pas possible simultanément de dénoncer un
système d'assistance généralisé et demander le
relèvement du plafond de ressources de 3.500 francs à 3.800
francs, ce qui concernerait 2,5 millions de personnes
supplémentaires, pour un coût de 2,5 à 3 milliards de
francs.
Présentant le financement du dispositif, elle a constaté que la
mise en oeuvre de la couverture maladie universelle n'aggravait pas le
déficit de la sécurité sociale, le coût de la
couverture complémentaire étant pris en charge, au sein d'un
fonds spécifique, par l'Etat et par une contribution des organismes de
protection complémentaire, portant sur 1,75 % de leur chiffre
d'affaires consacré à la santé. Elle a
précisé que les sommes consacrées par les
départements au titre de la couverture complémentaire seraient
transférées à l'Etat à hauteur de 95 %, les
5 % restants, conservés par les départements, pouvant
être consacrés à l'action sociale. Elle a reconnu que les
départements qui avaient consacré des efforts importants en
matière d'aide médicale étaient pénalisés.
Elle a observé que ces départements disposaient de ressources
plus importantes que les autres. Elle a précisé que ce
système -dont le principal mérite est la simplicité- avait
reçu l'aval de l'Association des départements de France.
Evoquant le chiffre de 1.500 francs retenu pour l'évaluation
financière de la couverture santé d'un ressortissant de la CMU,
elle a précisé que ce montant avait été retenu en
concertation avec les mutuelles et les compagnies d'assurance. Elle a
observé que les études réalisées au sein des
départements montraient que la consommation médicale des plus
défavorisés restait inférieure de 10 % à la
consommation moyenne. Elle a reconnu qu'un phénomène de
rattrapage pouvait exister, mais qu'il restait tout à fait temporaire.
S'agissant de la gestion de la prestation, elle a observé que le choix
d'un système mixte était justifié par plusieurs
considérations, au premier rang desquelles l'intérêt des
bénéficiaires. Elle a constaté qu'il était apparu
plus efficace de permettre leur inscription aussi bien auprès de la
caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) que des sociétés
d'assurance, des mutuelles et des institutions de prévoyance afin de ne
pas courir le risque d'une carence dans l'application de la loi en cas
d'engagement insuffisant de ces dernières ou d'une rupture
d'adhésion. Elle a considéré que cette formule mixte
était à la fois la plus simple et la plus souple, la CPAM pouvant
compenser, le cas échéant, la défaillance des autres
acteurs de la protection complémentaire.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité
, a
souhaité, en conclusion, que la réforme fondamentale que
proposait le projet de loi puisse recevoir une large adhésion.
A titre préliminaire,
M. Charles Descours, rapporteur,
a
indiqué au ministre que le dépôt de contre-propositions au
projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle, par
des membres de la majorité comme de l'opposition, ne signifiait pas que
les parlementaires ne considéraient pas que l'accès aux soins
pour tous constituait une base de la démocratie.
Il a demandé à Mme Martine Aubry ce qu'elle pensait des
protocoles d'accord conclus entre l'assurance maladie et les
représentants des assureurs et des mutuelles, si elle estimait que les
6 millions de personnes concernées par la CMU constituaient une
catégorie homogène de la population devant se voir proposer une
solution unique. Il l'a également interrogée sur la
compatibilité des dispositions du projet de loi avec le droit
européen et il lui a demandé selon quels moyens elle s'en
était assurée.
Il a rappelé que M. Jean-Pierre Davant, président de la
Fédération nationale de la mutualité française
(FNMF), avait affirmé devant la commission que l'estimation du
coût de la couverture complémentaire à 1.500 francs
par personne était sous-évaluée.
Il a demandé au ministre comment elle comptait éviter que les
étudiants issus des classes moyennes décident de sortir du foyer
fiscal de leurs parents afin de bénéficier de l'allocation
logement et de la CMU.
Rappelant les propos du ministre selon lesquels ce sont les réticences
du monde mutualiste à assurer la couverture complémentaire des
populations bénéficiaires de la CMU qui ont conduit le
Gouvernement à proposer qu'elles puissent s'adresser aussi aux caisses
primaires,
M. Charles Descours, rapporteur,
s'est demandé si les
réticences prises en compte n'avaient pas été celles des
associations.
Il lui a enfin demandé à quelle date serait réunie la
commission des comptes de la sécurité sociale.
Répondant aux questions du rapporteur,
Mme Martine Aubry, ministre de
l'emploi et de la solidarité,
a rappelé qu'à
l'Assemblée nationale, pas un des députés membres de
l'opposition n'avait affirmé de désaccord avec l'ambition
poursuivie par le projet de loi, mais que pas un non plus n'avait voté
en faveur du texte.
Elle a affirmé qu'elle ne pouvait accepter que le protocole conclu entre
l'assurance maladie et les représentants des assureurs et des mutuelles
ne prévoie l'intervention des caisses primaires d'assurance maladie pour
assurer la couverture complémentaire des bénéficiaires de
la CMU que sous des conditions restrictives.
Rappelant que les associations étaient au départ favorables au
scénario partenarial proposé par M. Jean-Claude Boulard,
parlementaire en mission,
Mme Martine Aubry
a déclaré
qu'elles avaient ensuite exprimé des craintes face aux réactions
des mutuelles et avaient finalement affirmé leur
préférence pour la possibilité d'une gestion de la
couverture complémentaire par les CPAM.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
indiqué que la Fédération nationale de la mutualité
française (FNMF) était à l'origine du chiffrage des
1.500 francs par personne et par an du coût de la couverture
complémentaire et que ce chiffrage avait été
vérifié à l'aide des statistiques des
départements : cette vérification avait d'ailleurs permis de
constater que le coût réel s'établissait à un niveau
inférieur de 10 % à ces 1.500 francs.
Constatant que personne n'avait intérêt à
sous-évaluer ce coût, elle s'est déclarée favorable
à l'établissement d'un bilan d'application de la loi, qui
pourrait conduire à une réévaluation, si celle-ci se
révélait nécessaire.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
jugé importante la question posée par M. Charles Descours,
rapporteur
,
sur l'homogénéité du groupe
constitué par les bénéficiaires potentiels de la CMU et
elle a rappelé qu'elle s'était interrogée sur la
légitimité d'un droit à des soins gratuits sans aucune
contribution de leur part. Elle a toutefois observé que l'institution
d'une cotisation d'un montant peu élevé, de 30 à
50 francs, se heurterait aux difficultés financières de
beaucoup de bénéficiaires de la CMU et se traduirait par un
coût de recouvrement important. Elle a affirmé qu'elle
préférait proposer une loi dont les dispositions seraient, en
pratique, applicables, quitte à ne pas prévoir de contribution.
Evoquant la compatibilité des dispositions du projet de loi avec le
droit communautaire,
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la
solidarité,
a indiqué que le secrétariat
général du Gouvernement, comme le Conseil d'Etat, n'avaient
formulé aucune observation à cet égard. Elle a
également répondu à M. Charles Descours, rapporteur, que
seuls pourraient bénéficier de la CMU les étudiants qui
n'habitent pas chez leurs parents et ne sont plus inclus dans leur foyer
fiscal. Elle a enfin déclaré que la réunion de la
commission des comptes de la sécurité sociale se tiendrait le 31
mai prochain.
M. Jacques Oudin, rapporteur pour avis de la commission des finances,
a
particulièrement insisté sur les dérives
financières susceptibles d'être entraînées par
l'application du projet de loi et affirmé que le budget de l'Etat
n'était pas extensible. Il a rappelé la croissance
considérable des dépenses publiques consacrées au revenu
minimum d'insertion et, dans une moindre mesure, à l'allocation aux
adultes handicapés. Il a fait part de sa crainte que l'adoption, par la
France, de dispositions aussi généreuses que celle de la
création de la CMU donne à notre pays une
" attractivité sociale " certaine pour des populations de
nationalité étrangère, qui pourraient ainsi être
tentées de séjourner sur le territoire français. Prenant
acte de la convocation de la commission des comptes de la
sécurité sociale pour le 31 mai, il a regretté que le
secrétaire général de cette commission ne dispose que
d'une dizaine de jours pour rédiger son rapport.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
rappelé que, déjà, compte tenu du droit en vigueur,
2,5 millions de personnes bénéficiaient de prestations
maladie sans payer de cotisation. Répondant à la crainte
exprimée par M. Jacques Oudin, elle a affirmé que la CMU ne
comportait que des prestations en nature, qui n'étaient pas susceptibles
de connaître des dérives comparables à celles qui
pourraient être constatées pour des prestations en espèces.
Elle a également estimé qu'au-delà des premiers mois
d'application de la loi au cours desquels se manifesteraient des effets de
rattrapage dans l'accès aux soins, la règle selon laquelle les
personnes défavorisées consommaient généralement
moins de soins que la moyenne se trouverait à nouveau confirmée.
Elle a enfin considéré que la CMU permettrait à ces
personnes de bénéficier de soins préventifs,
évitant ainsi de coûteuses hospitalisations.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
rappelé que les délais impartis pour la rédaction du
rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale
avaient toujours été très brefs.
M. Jean Chérioux
a pris acte de la reconnaissance, par le
ministre, du rôle des départements, ainsi que de ses propos sur la
solidarité financière entre départements que devrait
traduire le mécanisme de récupération prévu par le
projet de loi. Il a demandé si, dans les départements qui
s'étaient dotés de mécanismes plus favorables que celui de
la CMU, cette solidarité serait à la charge des
bénéficiaires de la carte santé dont les droits seraient
réduits ou à celle des contribuables de ces départements.
Il a rappelé que le système de l'aide médicale ne
comportait pas de cotisation à la charge de ses
bénéficiaires, mais prévoyait l'application du principe de
l'obligation alimentaire, ce qui le différenciait fondamentalement de la
couverture maladie universelle.
M. Alain Vasselle
a estimé que le ministre faisait un mauvais
procès aux députés de l'opposition, ceux-ci approuvant le
principe de l'amélioration de l'accès aux soins mais ayant
exprimé leur désaccord sur les modalités prévues
par le projet de loi. Il a fait siennes les craintes exprimées par
M. Jacques Oudin sur " l'attractivité sociale " de la
France en cas d'adoption du projet de loi sur la CMU. Il a exprimé le
souhait que les communes puissent continuer à donner leur avis dans la
procédure d'attribution de la CMU et rappelé que, dans le
département de l'Oise, les titulaires du minimum vieillesse
étaient aujourd'hui éligibles à l'aide médicale,
mais ne bénéficieraient pas de la CMU demain. Il s'est enfin
interrogé sur l'avenir des personnels départementaux
chargés de l'aide médicale.
M. Gilbert Chabroux
a affirmé que le Sénat s'honorerait
s'il votait en faveur du projet de loi de la CMU. Evoquant les contingents
communaux d'aide sociale et rappelant que la moyenne nationale de ces
contingents s'élevait à 201 francs pour l'ensemble des
communes mais à 332 francs dans les grandes villes, il s'est
interrogé sur la possibilité de profiter du débat sur le
projet de loi tendant à la création d'une couverture maladie
universelle pour plafonner la contribution des communes à un taux proche
de celui de la moyenne nationale, classer les communes en fonction d'un indice
synthétique et répartir ensuite la contribution en fonction des
résultats de ce classement.
Mme Nicole Borvo
, constatant que la majorité sénatoriale
s'étonnait d'une inégalité entre des Français qui
cotisaient et d'autres qui ne cotisaient pas, a estimé encore plus
choquant que certains aient accès aux soins et d'autres, pas. Elle a
rappelé la nécessité d'améliorer les remboursements
de la sécurité sociale pour tous les assurés sociaux,
notamment en matière d'optique et de soins dentaires et a
également évoqué les difficultés rencontrées
par certaines personnes pour acquitter le montant du forfait hospitalier.
Constatant qu'une trentaine de départements avait prévu un
dispositif plus favorable que celui de la CMU, elle a demandé au
ministre si elle s'était entretenue de cette question avec eux.
Mme Nicole Borvo
a enfin affirmé qu'elle souhaitait que le
critère d'affiliation à l'assurance de base soit celui d'une
résidence " stable ", mais pas nécessairement d'une
résidence régulière.
M. Guy Fischer
a souhaité que le ministre donne des informations
complémentaires sur la réforme des contingents communaux d'aide
sociale qui était envisagée.
M. Bernard Seillier
a d'abord rappelé qu'il avait
regretté, en tant que rapporteur du projet de loi d'orientation relative
à la lutte contre les exclusions, que ce texte ne comporte pas la
création d'une assurance maladie universelle. Comparant les logiques
respectives de cette première loi et du projet de loi portant
création d'une couverture maladie universelle, il a regretté que
l'approche très personnalisée et très concrète qui
avait été retenue l'an dernier n'ait pas été
choisie cette fois-ci.
Observant que la gestion d'une couverture complémentaire ne constituait
pas la vocation principale des caisses primaires d'assurance maladie,
M.
François Autain
s'est inquiété de
l'inégalité de traitement que semblait entériner le projet
de loi entre les bénéficiaires de la CMU qui choisissaient les
caisses primaires et ceux qui préféraient s'assurer auprès
d'organismes de protection sociale complémentaire, notamment en
matière de maintien des droits.
Mme Gisèle Printz et M. Louis Boyer
se sont
inquiétés de la situation des gens du voyage par rapport aux
dispositions du projet de loi créant une couverture maladie universelle.
Se référant aux propos de M. Alain Vasselle,
M. Roland
Huguet
a affirmé qu'il avait déjà étudié
la reconversion, dans d'autres services sociaux, des personnels
départementaux qui s'occupent aujourd'hui d'aide médicale. Il a
également déclaré que les représentants de la
mutualité devaient, dans leur discours, revenir aux sources qui avaient
inspiré la création de ce mouvement. Il a manifesté le
souhait qu'aucun des bénéficiaires actuels de l'aide
médicale ne soit perdant à la suite de l'institution de la CMU.
Citant enfin l'exemple de son département, qui consacrait
205 millions de francs à l'aide médicale légale et
15 millions de francs à des remboursements additionnels
résultant de conventions conclues avec les chirurgiens-dentistes et les
opticiens, il a demandé au ministre si l'Etat allait prendre à ce
département 205 ou 220 millions de francs.
Répondant aux intervenants,
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi
et de la solidarité,
a rappelé que, dans la
préparation du projet de loi, elle avait été
confrontée à la question des remontées financières
des départements et que celle-ci n'avait trouvé aucune
réponse simple, évidente et parfaite. Constatant que les
départements au dispositif d'aide médicale plus favorable que
celui du projet de loi se verraient demander la contribution la plus forte,
mais observant également qu'ils se caractérisaient souvent par un
potentiel fiscal élevé, elle a estimé que cette
différence de contribution entre départements constituait
l'expression d'une certaine solidarité financière.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
estimant que les diverses propositions des députés de
l'opposition pour remédier à l'effet de seuil étaient
difficilement compatibles entre elles, a rappelé qu'environ
2 milliards de francs, sur le terrain, demeuraient disponibles dans les
centres communaux d'action sociale, les fonds d'action sociale des caisses et
les départements pour aider les personnes dont le revenu se situait
au-dessus du seuil retenu par le projet de loi à
bénéficier d'une couverture complémentaire. Elle n'a pas
souhaité modifier la définition du critère de
résidence stable et régulière pour l'affiliation à
l'assurance maladie, rappelant toutefois que les personnes de
nationalité étrangère en situation
irrégulière continueraient à bénéficier,
dans les mêmes conditions qu'aujourd'hui, de l'aide médicale.
Au terme d'une discussion avec
M. Alain Vasselle,
s'appuyant sur le
barème d'aide sociale du département de l'Oise qui inclut les
bénéficiaires du minimum vieillesse,
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité,
a estimé que la
situation des personnes âgées était différente en
fonction de leur lieu de résidence.
Evoquant la réforme des contingents communaux d'aide sociale, elle a
indiqué que plusieurs tables rondes réunissant toutes les
institutions intéressées avaient été
réunies, mais que les conclusions de leurs discussions n'étaient
pas encore connues.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
s'est déclarée favorable à une amélioration de la
prise en charge des dépenses de soins au-delà du tarif de
responsabilité actuel pour l'optique et les soins dentaires et a
affirmé que le Gouvernement comptait s'appuyer sur les changements
introduits par la création de la CMU pour améliorer ce niveau de
prise en charge pour tous les assurés sociaux. Elle a enfin
précisé que la situation des gens du voyage au regard du projet
de loi était identique à celle des personnes sans domicile fixe.
M. Charles Descours, rapporteur,
ayant évoqué les
questions posées par l'article 14 du projet de loi,
Mme Martine
Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a estimé que
les dispositions qu'il comportait étaient particulièrement
protectrices.
II. EXAMEN DU RAPPORT
Réunie le
mercredi 26 mai 1999
, sous la
présidence de
M. Jean Delaneau, président,
la commission a
procédé à
l'examen du rapport
de
MM. Charles
Descours
et
Claude Huriet
sur le
projet de loi n° 338
(1998-1999), adopté par l'Assemblée nationale, après
déclaration d'urgence, portant
création d'une couverture
maladie universelle (CMU).
M. Charles Descours, rapporteur,
a présenté les grandes
lignes de son rapport (cf. exposé général, tome I).
M. Jean Chérioux
a souligné que le rapporteur se
référait aux travaux de M. Jean-Claude Boulard en tant que
parlementaire en mission, qui présentait un autre système que
celui proposé par le projet de loi. Il a considéré que le
dispositif de l'article 13 de ce projet pénaliserait les
départements ayant réalisé un effort supplémentaire
en faveur des plus démunis et a fait part de sa volonté d'amender
cet article.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
a estimé que le projet de loi
était très satisfaisant et que les propositions d'amendements
qu'elle ferait veilleraient à ne pas toucher au coeur du texte,
contrairement aux orientations présentées par le rapporteur. Elle
a rappelé que l'ensemble des institutions et des associations
souscrivaient aux objectifs fixés par le projet de loi et a
estimé qu'il n'avait certainement pas été facile, pour le
rapporteur, d'écrire un nouveau projet.
M. Louis Souvet
a observé que l'objectif n'était pas de
critiquer le Gouvernement ou l'Assemblée nationale, mais
d'améliorer le projet de loi. Il a expliqué que les travaux du
rapporteur lui semblaient aller dans une excellente direction, en
évitant l'aspect inégalitaire et déresponsabilisant du
dispositif proposé par le texte.
M. Alain Vasselle
a considéré que deux philosophies
s'affrontaient, et que les propositions du rapporteur répondaient aux
objectifs de solidarité et de responsabilité. Revenant sur les
déclarations de Mme Martine Aubry sur la diminution de la dotation
globale de décentralisation, il a rappelé que les
départements qui avaient réalisé des efforts
supplémentaires n'étaient pas forcément les
départements les plus riches. Il s'est interrogé sur le devenir
des contingents communaux d'aide sociale et sur la formation du personnel des
collectivités locales gérant actuellement l'aide médicale.
M. Guy Fischer
a salué l'effort d'imagination du rapporteur, tout
en précisant que la philosophie de cette contre proposition reposait sur
une analyse radicalement différente de la sienne. Il a observé
que le rapporteur était resté, en termes de financement, aux
dispositions du texte, montrant ainsi l'étroitesse de la marge de
manoeuvre. Il a rappelé que la CMU était l'aboutissement du
débat de la loi sur les exclusions. Il a reconnu que le projet de loi
était perfectible et que des problèmes restaient
posés : effet de seuil, droit de recours, définition de la
résidence stable et régulière. Regrettant la
procédure d'urgence, il s'est déclaré inquiet qu'un
amendement ne mette fin au système des contingents communaux d'action
sociale.
M. Serge Franchis
a observé que le principal grief fait au
système de l'aide médicale était d'en stigmatiser les
bénéficiaires. Il a considéré que le projet de loi
faisait passer de 2,5 à 6 millions de personnes le nombre de
bénéficiaires de la couverture complémentaire, sans pour
autant mettre fin à cette stigmatisation. Il a noté que la
proposition du rapporteur d'une allocation personnalisée à la
santé permettrait de résoudre cette situation d'exclusion.
M. Claude Huriet, rapporteur du titre IV du projet de loi,
a
rappelé que des départements avaient réalisé,
à partir des années quatre-vingts, d'importants efforts, en
instituant des cartes santé. Il a considéré qu'il
était nécessaire de partir de cette expérience. Il a
observé que, selon les associations, cinq objectifs devaient être
atteints : faciliter l'accès à la couverture maladie
grâce à un guichet unique, tenir des délais courts,
simplifier les formalités administratives, éviter les effets
pervers des seuils et maintenir, le cas échéant, le principe
d'une contribution des bénéficiaires. Il a estimé que si
ces objectifs n'étaient pas tous atteints, la CMU ne
représenterait pas un grand progrès. A cet égard, il a
souscrit pleinement au principe d'une allocation personnalisée à
la santé.
M. Charles Descours, rapporteur,
a rappelé que ses propositions
reposaient sur les conclusions du rapport Boulard et que Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité, avait elle-même
évoqué la question d'une contribution des
bénéficiaires de la CMU. Il a estimé que même si ces
propositions n'étaient pas retenues par l'Assemblée nationale, il
était important de prendre date. Il a insisté sur
l'évaluation nécessaire du coût de la CMU pour les finances
de l'Etat et de la sécurité sociale, qui n'apparaîtra que
de manière fragmentaire en loi de financement et en loi de finances.
En réponse à M. Jean Chérioux, il a expliqué qu'il
n'avait pas voulu modifier l'article 13 et toucher au système des
contingents communaux d'action sociale, estimant que le sujet était
davantage lié aux finances locales qu'aux finances sociales.
Répondant à M. Alain Vasselle, il a précisé que le
système qui pourrait être envisagé est une suppression des
contingents communaux compensée pour les départements. S'agissant
de la formation des personnels des collectivités locales, il a
indiqué qu'il serait difficile d'apprécier ces coûts de
reconversion.
Il a remarqué, en réponse à M. Guy Fischer, que certaines
analyses qu'il avait faites sur l'effet de seuil était les mêmes
que les siennes. Répondant à M. Claude Huriet, il a estimé
que le mécanisme de l'APS semblait répondre aux cinq objectifs
fixés, principalement concernant l'effet de seuil.
Puis la commission a abordé l'examen des articles. Elle a examiné
tout d'abord les articles des titres préliminaires, I à III et V
et les amendements proposés à ces articles par M. Charles
Descours, rapporteur.
A l'article premier
(création d'une couverture maladie
universelle et d'une protection complémentaire avec dispense d'avance de
frais pour les plus démunis), la commission a adopté un
amendement tendant à préciser, conformément au dispositif
proposé par M. Charles Descours, rapporteur, dans son exposé
général, que la protection complémentaire prévue
par le projet de loi est assurée par la création d'une allocation
personnalisée à la santé.
La commission a adopté
l'article 2
(principe de l'affiliation et
du rattachement aux nouveaux régimes obligatoires et suppression du
régime de l'assurance personnelle) sans modification.
A l'article 3
(nouveaux critères d'affiliation au nouveau
régime et cotisation), elle a adopté un amendement permettant aux
personnes résidant en France qui sont affiliées à la
caisse des Français de l'étranger de rester affiliées
à cette caisse.
A l'article 4
(immédiateté et automaticité du droit
à l'accès aux soins), la commission a adopté un amendement
tendant à prévoir que le régime général
pourra obtenir le remboursement des prestations servies aux personnes qui
relèvent, après examen, d'un autre régime.
La commission a adopté
l'article 5
(continuité du droit
à l'accès aux soins) sans modification.
A l'article 6
(accès aux soins sans restriction
financière), elle a adopté un amendement tendant à
étendre à l'ensemble des régimes, et non pas seulement au
régime de résidence, la possibilité de suspendre les
prestations en cas de mauvaise foi des assurés qui ne paieraient pas les
cotisations dont ils sont redevables.
Elle a adopté un amendement de précision
à l'article
7
(régime applicable aux ayants droit des personnes affiliées
au régime général).
La commission a adopté
l'article 8
(dispositions applicables aux
personnes qui, bien que résidant ou séjournant en France, ne sont
pas concernées par le régime), sans modification.
A l'article 9
(incidences financières sur le fonds de
solidarité vieillesse), elle a adopté un amendement tendant
à supprimer l'affectation, proposée par cet article, d'une part
des droits sur les alcools actuellement perçus par le fonds de
solidarité vieillesse (FSV).
A l'article 10
(incidences financières de la mise en place de la
couverture obligatoire sur la branche famille), la commission a adopté
un amendement tendant à supprimer l'affectation à la caisse
nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) de
28 % du produit du prélèvement social sur les revenus du
patrimoine et des produits de placement et à rétablir le
financement par la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF), à
hauteur de 60 %, de l'allocation de parent isolé (API).
A l'article 11
(énumération des ressources
complémentaires des régimes obligatoires de base), elle a
adopté un amendement de conséquence visant à supprimer les
nouvelles ressources affectées par le projet de loi à la CNAMTS
qui bénéficiera d'une part supplémentaire des droits de
consommation sur les tabacs.
A l'article 12
(modification de l'affectation de la cotisation due par
les personnes assurant des véhicules terrestres à moteur), la
commission a adopté un amendement de précision visant à
tirer la conséquence de l'affectation intégrale à la
CNAMTS de la cotisation sur les véhicules terrestres à moteur, en
supprimant la mention de cette ressource dans les recettes de la caisse
nationale d'assurance maladie maternité des professions
indépendantes (CANAM) et en précisant que
l'intégralité de cette ressource sera versée à la
CNAMTS.
Puis, la commission a adopté
l'article 13
(transferts financiers
entre l'Etat et les département) sans modification ;
M. Jean
Chérioux
a indiqué qu'il déposerait un amendement
à cet article qu'il ne pouvait donc voter en l'état.
A l'article 14
(exécution des recouvrements forcés de
cotisations dues par les non-salariés non agricoles et les
agriculteurs), la commission a adopté un amendement tendant à
préciser que la contrainte décernée au titre de l'article
L. 244-9 du code de la sécurité sociale sera obligatoirement
signifiée par acte d'huissier de justice.
La commission a adopté sans modification les
articles 15
(durée de maintien des droits selon qu'il s'agit des prestations en
nature ou des prestations en espèces),
16
(maintien des
régimes actuellement applicables aux étudiants et aux ministres
des cultes),
17
(régime applicable aux pupilles de l'Etat),
18
(résiliation de certains contrats d'assurance privée)
et
19
(possibilité de maintien de certaines personnes dans le
régime général à titre temporaire et dans le
régime agricole à titre définitif).
A l'article 20
(définition de la couverture complémentaire
en matière de santé attribuée aux
bénéficiaires de la CMU), la commission a adopté dix-neuf
amendements qui substituent à la couverture complémentaire
maladie gratuite proposée par cet article, une allocation
personnalisée à la santé (APS). Ces amendements tendent
respectivement :
- à introduire à l'article L. 861-1 du code de la
sécurité sociale, la notion d'allocation personnalisée
à la santé dégressive en fonction des revenus ;
- au même article, à harmoniser avec le droit des prestations
familiales la notion de personnes à charge ;
- à préciser, à l'article L. 861-2, que les
titulaires du revenu minimum d'insertion (RMI) bénéficient du
montant maximal de l'APS et à supprimer le dernier alinéa de cet
article ;
- à décrire à l'article L. 861-3 le contenu de la
couverture complémentaire dont bénéficieront les
titulaires de l'APS ;
- à compléter cet article L. 861-3 pour autoriser les
régimes obligatoires d'assurance maladie et les organismes de protection
complémentaire à établir ensemble une définition
d'un panier de soins éligible à la couverture
complémentaire santé ;
- à supprimer dans cet article L. 861-3 une disposition consistant
en réalité à valider un élément de la
convention des médecins généralistes annulé par le
Conseil d'Etat ;
- à permettre, à l'article L. 861-4, aux personnes
bénéficiaires de l'APS d'obtenir une couverture
complémentaire dans des conditions de droit commun mais à prendre
également en considération la spécificité de la
situation des bénéficiaires du RMI qui resteront
gérés par les caisses d'assurance maladie ;
- à préciser, à l'article L. 861-5, que les demandes
d'attribution de l'APS sont faites auprès de l'organisme d'affiliation
du demandeur, et à prévoir que les organismes de protection
complémentaire peuvent aider les bénéficiaires potentiels
de l'APS à accomplir les démarches nécessaires ;
- à limiter, au même article, à deux mois le droit
immédiat à une protection complémentaire avant
vérification des ressources du demandeur ;
- à exonérer, dans un nouvel article L. 861-5-1, l'APS de
contribution sociale généralisée et autres
impôts ;
- à prévoir, à l'article L. 861-6, que l'APS n'est
due qu'en contrepartie du versement des cotisations et primes qu'elle finance
et la possibilité d'un versement direct de l'APS aux organismes de
protection complémentaire ;
- à mettre en cohérence avec les précédents
amendements le texte de l'article L. 861-7 ;
- à prévoir, à l'article L. 861-8, que les
bénéficiaires de l'APS ont droit à une couverture
complémentaire dans les délais de droit commun et qu'une
procédure simplifiée s'applique aux titulaires du RMI ;
- à prévoir, à l'article L. 861-9, la
possibilité de concours des administrations fiscales pour le
contrôle des ressources des demandeurs.
A l'article 20 bis
(obligation de négociation annuelle des
modalités d'établissement d'un régime de prévoyance
maladie pour les salariés non couverts), elle a adopté un
amendement de suppression.
A l'article 20 ter
(modalités d'extension des conventions de
branche et régime de prévoyance maladie), la commission a
également adopté un amendement de suppression, le rapporteur
ayant estimé que par ces deux articles, il était en quelque sorte
demandé aux entreprises de pallier les imperfections du dispositif
proposé par le Gouvernement.
A l'article 21
(prolongation de la couverture des
bénéficiaires de la CMU couverts par un organisme
complémentaire), elle a adopté trois amendements ; le
premier dispose que lorsqu'une personne perd le bénéfice de l'APS
elle se voit maintenir pendant un an les mêmes tarifs et
prestations ; le second prévoit le maintien des droits pendant un
an aux anciens bénéficiaires du RMI ; le troisième
est de coordination.
Par cohérence avec les amendements adoptés à l'article 20,
la commission a adopté des amendements de suppression des
articles
22
(tarifs pratiqués par les médecins conventionnés en
faveur des bénéficiaires de la CMU),
23
(accords entre les
organismes d'assurance maladie, les organismes complémentaires et les
distributeurs de dispositifs médicaux à usage individuel) et
24
(tarifs pratiqués par les chirurgiens-dentistes
conventionnés en faveur des bénéficiaires de la CMU).
A l'article 25
(création du fonds de financement de la protection
complémentaire), la commission a adopté dix amendements
tendant :
- à harmoniser, à l'article L. 861-10 du code de la
sécurité sociale, l'intitulé du fonds de financement
prévu par cet article avec le dispositif précédemment
adopté tendant à créer une APS ; à
prévoir la participation de tous les partenaires de la protection
complémentaire au conseil d'administration de ce fonds et à
supprimer en conséquence son conseil de surveillance et à
supprimer le nouveau fonds introduit par l'Assemblée nationale,
chargé d'atténuer l'effet de seuil figurant dans le projet de
loi, dès lors que les amendements précédemment
adoptés suppriment cet effet de seuil ;
- à harmoniser à l'article L. 861-11 les dispositions relatives
aux dépenses du fonds de financement ;
- à prévoir, à l'article L. 861-13, en coordination avec
l'article 20 amendé, l'intervention des sections d'assurance
complémentaire de la Mutualité sociale agricole ; à
préciser l'assiette de la taxe dont sont redevables les organismes de
protection complémentaire ; à éviter une imposition
en cascade des sociétés passibles de la taxe sur les conventions
d'assurance ; à prévoir, enfin, le remboursement
intégral des dépenses des organismes complémentaires non
couvertes par les cotisations et primes versées par les
bénéficiaires de l'APS ;
- à coordonner la rédaction de l'article L. 861-15 ainsi que
celle de l'article L. 861-16.
La commission a adopté sans modification les
articles 26
(régime transitoire pour les titulaires actuels de l'aide
médicale),
27
(habilitation des caisses d'assurance maladie
à la mise en place d'un fichier informatisé de données
nominatives),
28
(dispositions réglementaires pour l'application
du titre II),
29
(abrogation de certaines dispositions relatives
à l'aide sociale),
30
(transfert de compétences des
départements à l'Etat en matière d'aide médicale)
et
31
(dispositions de coordination).
Après le titre III, la commission a adopté un amendement tendant
à insérer
une section et un intitulé nouveaux
ainsi
qu'un
article additionnel après l'article 31
tendant à
prévoir un rapport d'application de la loi et une identification au sein
des comptes du régime général des recettes et des
dépenses relatives à la CMU.
Abordant le titre V, la commission, sur proposition de M. Charles Descours,
rapporteur, a adopté, à
l'article 38
(entrée en
vigueur de la loi), un amendement tirant la conséquence des amendements
adoptés aux articles 9, 10 et 11.
La commission a alors
adopté le projet de loi ainsi
amendé
.
III. SÉANCE DU MERCREDI 7 AVRIL 1999
A. AUDITION DE MM. MICHEL HERMANT, PRÉSIDENT, GILLES MARCHANDON, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL, ET PHILIPPE DELEMARRE, SECRÉTAIRE NATIONAL, DE LA FÉDÉRATION NATIONALE INTERPROFESSIONNELLE DES MUTUELLES (FNIM)
Sous
la présidence de
M. Jean Delaneau, président
,
M. Michel
Hermant
a d'abord présenté la FNIM et indiqué que
cette structure, créée il y a neuf ans, regroupait une centaine
de mutuelles sur l'ensemble du territoire. Il a indiqué que, selon les
critères utilisés, elle constituait la deuxième ou la
troisième fédération de mutuelles en France.
Avant d'aborder la question de la couverture maladie universelle (CMU),
M. Philippe Delemarre
a évoqué la transposition des
directives européennes sur les assurances et a affirmé que, si
certains aspects de ces directives, comme leur volet financier,
n'étaient pas contestés, il convenait de mieux définir
l'objet social de la mutualité. A cet égard, il s'est
interrogé sur le point de savoir s'il était possible de comparer
un contrat d'assurance classique à l'adhésion à des
statuts mutualistes.
M. Gilles Marchandon
a affirmé que la FNIM ne faisait aucune
objection au principe de la couverture maladie universelle de base, mais il a
estimé que certaines critiques adressées à l'aide
médicale étaient excessives. Il s'est en revanche
déclaré déçu et inquiet par le volet de la CMU
instituant une couverture complémentaire, estimant que le projet de loi
instituait, non une couverture complémentaire pour les plus
démunis, mais une prestation de base modulée selon les revenus.
Il a ainsi critiqué à la fois la gratuité totale de la
couverture pour les bénéficiaires, la gestion de la couverture
complémentaire par les caisses primaires d'assurance maladie, le
caractère obligatoire de la contribution demandée aux organismes
complémentaires et les effets de seuil qui ne manqueront pas
d'apparaître, créant une division sociale regrettable au sein
d'une même population. Il a estimé que l'institution de la CMU
remettait en cause l'équilibre général de la protection
sociale façonné depuis la Libération et il a
constaté que, dans sa rédaction actuelle, le projet de loi
était susceptible d'engendrer d'importantes difficultés
juridiques au regard du droit européen.
M. Gilles Marchandon
a affirmé que le projet de loi ne mettait
pas en place les conditions d'une véritable concurrence entre assureurs
sur le marché de la couverture maladie complémentaire des
Français disposant des plus bas revenus. Il a ainsi observé que
les caisses primaires d'assurance maladie, qui pourront assurer cette
couverture complémentaire au même titre que les mutuelles, les
compagnies d'assurance ou les institutions de prévoyance, ne seraient
pas soumises à la taxe qu'institue le projet sur le chiffre d'affaires
réalisé par les organismes de protection sociale
complémentaire. De même, il a regretté que les mutuelles et
les compagnies d'assurance ne soient remboursées que pour une partie
forfaitaire des dépenses engagées alors que les caisses primaires
bénéficiaient d'un remboursement intégral. Evoquant le
remboursement forfaitaire annuel de 1.500 francs par personne couverte, il a
estimé qu'il était très inférieur au coût
moyen réel, qui avoisinerait plutôt 3.000 francs par an.
M. Gilles Marchandon
a regretté que les auteurs du projet de loi
semblent avoir pris pour hypothèse que les 6 millions de
bénéficiaires de la CMU ne disposent pas d'une couverture
complémentaire. En effet, environ 20 à 30 % des
adhérents actuels des mutuelles disposent d'un niveau de revenus qui les
feront entrer dans le périmètre des bénéficiaires
de la CMU. Enfin, il a affirmé que, si la plupart des compagnies
d'assurance pouvaient se permettre des pertes techniques sur leur branche
santé, ce n'était pas le cas des mutuelles, qui n'intervenaient
que dans le secteur sanitaire et social et qui étaient le plus au
contact des populations en difficulté.
M. Gilles Marchandon
a affirmé que la FNIM aurait
préféré que le projet de loi institue une couverture
complémentaire volontaire, rendue possible par la solvabilisation des
bénéficiaires et complétant une couverture de base d'un
niveau suffisant.
M. Jean Delaneau, président,
a regretté que le
Gouvernement ait choisi d'imposer au Parlement une procédure d'urgence
pour l'examen d'un texte aussi important et à l'architecture aussi
contestée.
M. Charles Descours, rapporteur,
s'est étonné que les
nombreuses critiques adressées par plusieurs fédérations
mutualistes au contenu du projet de loi ne rencontrent pas plus d'écho,
alors que la France compte environ 30 millions de mutualistes. Il a
demandé aux représentants de la FNIM s'ils n'avaient pas le
sentiment d'avoir participé à une négociation de dupes,
englobant non seulement la CMU, mais aussi la transposition des directives sur
les assurances, à moins que les organismes complémentaires
acceptent tacitement l'intrusion de l'assurance maladie dans le domaine de la
couverture complémentaire, dans la mesure où elle permettra de
légitimer celle des organismes complémentaires dans la couverture
de base. Il leur a demandé de préciser les informations selon
lesquelles 20 à 30 % des adhérents des mutuelles pourraient,
demain, devenir bénéficiaires de la CMU. Enfin,
M. Charles Descours, rapporteur,
s'est vigoureusement
élevé contre la dérive, amorcée par le
Gouvernement, qui allait transformer le projet de loi sur la CMU en un projet
portant diverses mesures d'ordre social.
M. Michel Hermant
a confirmé que 20 à 30 % des
adhérents des mutuelles étaient concernés par l'effet de
seuil induit par le projet de loi et qu'il s'agissait en majorité de
personnes actives soumises à des statuts précaires.
M. Philippe Delemarre
a complété cette réponse en
évoquant la situation des jeunes et s'est demandé s'il entrait
dans les intentions du Gouvernement que près de 2 millions
d'étudiants deviennent bénéficiaires de la CMU. Il a
indiqué que jamais le Gouvernement n'avait proposé à la
FNIM de discuter de la transposition des directives dans le cadre de la
concertation sur la CMU.
M. François Autain
a demandé aux représentants de
la FNIM s'ils avaient des propositions pour éviter les effets de seuil
susceptibles d'être induits par le projet de loi et si les assurances
privées ne seraient pas conduites à revendiquer une entrée
sur le marché de la couverture de base.
Mme Nicole Borvo
leur a demandé ce qu'ils attendaient d'une
participation à la mise en oeuvre de la CMU.
M. Gilles Marchandon
a répondu à Mme Nicole Borvo que la
FNIM avait pour ambition de participer à cette mise en oeuvre dans des
conditions réelles de concurrence. Il a indiqué à
M. François Autain que des propositions avaient été
faites, soit pour généraliser le système du tiers payant,
soit pour instituer une aide à la cotisation complémentaire
dégressive en fonction des revenus. Il a nié toute intention
spontanée de revendiquer une entrée sur le marché de la
couverture de base mais a observé qu'elle ne serait pas illogique en cas
d'intrusion de l'assurance maladie sur le territoire des organismes
complémentaires.
M. Philippe Delemarre
a affirmé en conclusion que la FNIM
était favorable au monopole de la sécurité sociale, mais
pas à celui de sa gestion.
B. AUDITION DE M. CLAUDE MAFFIOLI, PRÉSIDENT DU CENTRE NATIONAL DES PROFESSIONS DE SANTÉ (CNPS)
En
préalable,
M. Claude Maffioli
a regretté qu'après
son passage devant la commission des affaires culturelles, familiales et
sociales de l'Assemblée nationale, le projet de loi portant
création d'une couverture maladie universelle, qui comportait
déjà dans sa version initiale des articles ayant un objet
étranger à la CMU, se transforme en un projet de loi portant
diverses dispositions d'ordre social.
Tout en se déclarant très favorable à toute mesure tendant
à améliorer l'accès aux soins,
M. Claude Maffioli
s'est inquiété du risque prévisible d'une inflation des
dépenses incompatible avec une politique de maîtrise fondée
sur le respect d'enveloppes financières par les professionnels de
santé. Il a déclaré son opposition au tiers payant tel
qu'il était conçu par le projet de loi, car il rendait les
professionnels de santé directement tributaires du bon vouloir de
l'assurance maladie qui les rémunérait et il induisait une
déresponsabilisation complète des assurés sociaux, elle
aussi incompatible avec une politique de maîtrise des dépenses
d'assurance maladie. Il s'est en revanche déclaré tout à
fait favorable à des techniques de paiement différé
grâce à la monétique ou l'intervention d'organismes
intermédiaires entre les professionnels de santé et l'assurance
maladie.
Rappelant son attachement à la décentralisation de la gestion de
la protection sociale,
M. Claude Maffioli
a estimé que le
projet de loi mettait en place un système étatique et
centralisateur. Evoquant l'activité des chirurgiens-dentistes, il a
souligné la contradiction existant entre les dispositions des articles
20 et 24 du projet de loi, rappelé l'attachement du CNPS à la
politique contractuelle et a regretté que l'article 20 mette en place
une double nomenclature. Il a souhaité que, contrairement aux
dispositions du projet de loi initial, les professionnels de santé
soient représentés au sein des conseils de surveillance du fonds
de financement de la protection complémentaire de la couverture
universelle du risque maladie. Evoquant enfin les dispositions diverses du
projet de loi, il a souhaité, à l'article 32, que le secteur
libéral soit intégré au dispositif de consultation de
dépistage anonyme et gratuit et que l'article 37 mentionne les
unions régionales des médecins libéraux. Il a
regretté la complexité des dispositions de l'article 33 relatives
au volet de santé de la carte d'assuré social et formé le
voeu que les syndicats médicaux, comme le Conseil national de l'ordre
des médecins, soient appelés à donner leur avis sur le
décret qu'elles prévoient. Il a regretté les dispositions
de l'article 36 validant les effets des actes pris en application de la
convention nationale des médecins généralistes. Il s'est
enfin déclaré favorable à l'adoption d'une mesure
législative en faveur des aides opératoires non titulaires du
diplôme d'infirmier.
M. Charles Descours, rapporteur,
a demandé à M. Claude
Maffioli s'il n'estimait pas que, les caisses primaires d'assurance maladie
gérant des prestations complémentaires, les organismes de
protection sociale complémentaire ne seraient pas, tôt ou tard,
fondés à intervenir dans la couverture de base. Faisant siennes
les craintes exprimées par M. Claude Maffioli concernant une
dérive des dépenses, il lui a demandé s'il estimait que
l'inclusion des bénéficiaires de la CMU dans des filières
de soins permettrait de l'éviter. Evoquant l'utilisation de la
monétique pour instituer un paiement différé des
professionnels de santé,
M. Charles Descours, rapporteur
, a
affirmé qu'un tel projet ne serait crédible que si le CNPS
soutenait activement la mise en place de l'informatique médicale.
M. François Autain
a interrogé M. Claude Maffioli sur un
amendement adopté par la commission des affaires culturelles, familiales
et sociales de l'Assemblée nationale concernant les médecins
à diplôme non européen.
M. Claude Maffioli
a estimé que le texte du projet de loi ouvrait
la porte à une concurrence de tous les financeurs pour la couverture
maladie de base. A cet égard, il ne s'est pas déclaré
favorable à l'entrée des compagnies d'assurance privées
dans le champ de cette couverture, mais a souhaité une réflexion
sur les modalités d'une concurrence de gestion qui pourrait être
introduite, peut-être dans un premier temps, entre caisses primaires
d'assurance maladie. Il a observé qu'une telle concurrence
nécessitait la définition d'un cahier des charges et supposait
que l'on réfléchisse à la notion de " panier de
soins ".
M. Claude Maffioli
s'est déclaré défavorable
à la mise en place de filières de soins, même pour une
partie de la population, et a affirmé que son organisation militait pour
une mise en réseau, c'est-à-dire une coordination horizontale des
soins au service du patient et non d'une discipline.
M. Claude Maffioli
a affirmé son attachement à
l'informatisation des cabinets médicaux, à condition qu'elle se
traduise par un vrai partage de l'information médicale, qu'elle soit
favorisée par l'octroi d'une aide d'un montant suffisant aux
professionnels de santé qui transmettaient les feuilles de soins
électroniques et qu'elle ne soit pas organisée pour servir des
intérêts commerciaux d'aucune sorte. Evoquant la situation des
médecins à diplôme non européen, il a observé
que la régularisation de la situation de ces médecins allait
poser des problèmes en termes de démographie médicale,
alors que se développait parallèlement un discours selon lequel
l'offre de soins libéraux était trop importante.
A
M. Bernard Cazeau
qui se félicitait de l'évolution du
discours du président du CNPS sur l'informatique médicale,
M.
Claude Maffioli
a répondu que son discours n'avait pas changé
depuis 1985 et qu'il maintenait la revendication d'un réel partage de
l'information médicale entre l'assurance maladie et les professionnels.
Mme Nicole Borvo
a demandé à M. Claude Maffioli de
préciser ses propos sur la nécessaire mise en réseau des
professionnels de santé et lui a demandé qui en serait le pivot.
M. Claude Maffioli
a critiqué la filière de soins, avec un
passage obligé par le médecin généraliste, qui
traduit une vision économique du système de santé. Il a
confirmé son attachement à un système dont le patient
serait le pivot et autour duquel se mettrait en place une coordination en
fonction de thèmes spécifiques, notamment des pathologies ou des
catégories de populations concernées. Dans un tel système,
le patient garderait sa liberté mais bénéficierait des
dispositions d'une charte de fonctionnement conclue au préalable entre
les professionnels de santé. Il a affirmé que, si la mise en
réseau comportait des avantages en matière de maîtrise des
dépenses de santé, elle ne procédait pas d'une vision
économique du système de santé.
M. Claude Huriet,
citant l'exemple d'un réseau de
cancérologie en Lorraine, a affirmé qu'il était
fondé sur la définition collective de stratégies
thérapeutiques dont le patient était l'unique
bénéficiaire.
C. AUDITION DE M. MARC ZAMICHIEI, MEMBRE DU BUREAU FÉDÉRAL, CHARGÉ DU SECTEUR SANITAIRE ET SANTÉ, DE LA FÉDÉRATION DES MUTUELLES DE FRANCE (FMF)
M.
Marc Zamichiei
a d'abord indiqué que sa
fédération regroupait environ 600 mutuelles et 300
réalisations sanitaires et sociales. Avant d'aborder directement la
question de la couverture maladie universelle, il a évoqué celle
de la transposition des directives sur les assurances et estimé que, si
les organismes de protection sociale complémentaire exerçaient
leur activité dans un champ concurrentiel, cette dernière
concernait le risque très spécifique de la maladie. Il a
affirmé que celui-ci méritait la définition de principes,
comme l'absence de sélection des assurés et la participation de
ces derniers à la gestion. Il a estimé que l'institution d'une
couverture maladie universelle pouvait ouvrir la voie à une meilleure
reconnaissance de la spécificité du risque santé et
était de nature à faire reculer des inégalités
inacceptables devant les soins. Il a également indiqué qu'elle
permettrait à la mutualité de mieux remplir sa mission solidaire
et de renouveler ses propres pratiques. Affirmant sa préférence
pour un système dans lequel la gestion de la couverture
complémentaire serait réservée aux organismes de
protection sociale complémentaire, il a toutefois déclaré
comprendre les raisons qui avaient conduit le Gouvernement à proposer le
projet de loi dans son équilibre général actuel.
M. Marc Zamichiei
a toutefois regretté les effets de seuil
susceptibles d'être engendrés par le projet de loi, estimé
que la CMU devait demeurer un mécanisme bénéficiant aux
plus défavorisés et qu'elle ne réglerait pas tous les
problèmes d'accès aux soins. Il a déclaré que la
FMF était favorable à l'institution d'un tiers payant
généralisé, à l'amélioration de certaines
prestations de sécurité sociale dans des domaines où les
renoncements aux soins étaient importants et à la mise en place
d'une aide accordée par les employeurs aux salariés dont le
revenu était inférieur ou égal au SMIC afin de leur
permettre un accès à la couverture complémentaire.
Observant que des institutions qui gèrent actuellement des fonds
sanitaires et sociaux vont être déchargées de leur mission
par l'institution de la CMU, il a souhaité qu'elles réorientent
leur action en direction des personnes dont les revenus se situent au-dessus du
seuil prévu par la loi. Il a estimé que le forfait de 1.500
francs par personne couverte qui serait remboursé aux organismes de
protection complémentaire correspondait à un coût moyen
masquant de fortes disparités selon les lieux et les personnes couvertes
et qu'il serait probablement inférieur, au moins à court terme,
aux dépenses réellement engagées en raison des effets de
rattrapage dans l'accès aux soins des personnes démunies. Il a
souhaité que ce coût fasse l'objet d'une évaluation
continue et que l'on tienne compte de la réalité du coût du
risque afin de sécuriser l'engagement des organismes de protection
sociale complémentaire.
M. Marc Zamichiei
a regretté que le projet de loi ne
prévoie pas la participation de ces organismes, ni celle de l'assurance
maladie, dans le conseil d'administration du fonds de financement de la
protection complémentaire de la couverture universelle du risque
maladie. Il a souhaité que ce fonds soit le lieu institutionnel
d'évaluation de la mise en oeuvre de la CMU.
M. Charles Descours, rapporteur,
a interrogé le
représentant de la FMF sur la transposition des directives sur les
assurances, la maîtrise des dépenses d'assurance maladie, les
perspectives d'une privatisation de l'assurance maladie et les modalités
d'une compensation d'une éventuelle dérive des dépenses
pour les organismes de protection sociale complémentaire.
M. Marc Zamichiei
s'est interrogé, en réponse, sur
l'opportunité de banaliser l'intervention d'un acteur comme la
mutualité à travers la transposition des directives sur les
assurances au moment où, en créant la CMU, l'on s'orientait vers
une meilleure prise en compte de la réalité sanitaire et sociale.
Il a estimé que le projet de loi n'induisait pas de risque de
privatisation de l'assurance maladie, la gestion de la protection sociale
complémentaire par les caisses primaires susceptibles de
légitimer des revendications des compagnies d'assurance n'étant
prévue que par délégation de l'Etat. Il s'est
déclaré favorable à une politique de maîtrise des
dépenses d'assurance maladie mise en oeuvre en coordination avec les
organismes de sécurité sociale. Evoquant le coût
réel de la protection complémentaire maladie, il a
indiqué, par référence à celle qui était
engagée par l'union mutualiste des Bouches-du-Rhône,
déjà très active en ce domaine à travers l'aide
médicale, qu'il avoisinait une moyenne de 1.900 francs. Observant que ce
montant ne reflétait qu'une moyenne, il a souhaité la mise en
place, au niveau de tous les groupements mutualistes, de mécanismes de
péréquation du risque.
M. François Autain
a demandé à M. Marc Zamichiei
quelle était sa réponse à l'argument selon lequel la
généralisation du tiers payant était inflationniste.
Mme Nicole Borvo
lui a demandé s'il n'estimait pas illusoire
l'instauration de la définition de principes tels que l'absence de
sélection des assurés ou de refus d'assurance pour le risque
maladie, ces principes pouvant être détournés grâce
aux stratégies commerciales des compagnies d'assurance et à la
publicité.
M. Marc Zamichiei
a affirmé que l'expérience de la FMF,
comme des études réalisées en la matière,
montraient qu'après un effet de rattrapage dans l'accès aux
soins, l'effet inflationniste du tiers payant disparaissait très vite.
Il a observé que les lois de 1989 et de 1990 qui avaient banni la
discrimination en matière de risque santé excluaient de leur
champ d'application les contrats individuels ou les compagnies
d'assurance.
IV. SÉANCE DU MERCREDI 28 AVRIL 1999
A. AUDITION DE M. HUGUES FELTESSE, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'UNION NATIONALE INTERFÉDÉRALE DES OEUVRES ET ORGANISMES PRIVÉS SANITAIRES ET SOCIAUX (UNIOPSS) ET DES MEMBRES DU GROUPE DE TRAVAIL " SANTÉ PRÉCARITÉ "
Sous
la présidence de
M. Jean Delaneau, président, M. Hugues
Feltesse
, directeur général de l'Union nationale
interfédérale des oeuvres et organismes privés sanitaires
et sociaux (UNIOPSS) et des membres du groupe de travail " santé
précarité " constitué en son sein a tout d'abord
rappelé que de nombreuses personnes ne bénéficiaient pas
encore d'une couverture maladie. Il a observé que notre niveau de prise
en charge collective des dépenses de soins n'était pas le
meilleur d'Europe et que le ticket modérateur était devenu pour
beaucoup un " ticket d'exclusion ". Il a souligné que les
jeunes étaient particulièrement concernés par les
difficultés d'accès aux soins. Il a par ailleurs estimé
que la complexité des procédures applicables avait rendu
théorique ce qui devrait être considéré comme un
droit universel.
Dans ces conditions,
M. Hugues Feltesse
a considéré que le
projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle
s'inscrivait dans la continuité des grandes lois sociales relatives aux
handicapés, à la création du revenu minimum d'insertion
(RMI) et au droit au logement. Il a souhaité que ce texte puisse
redéfinir les missions des caisses, des organismes de protection sociale
complémentaire et des organismes sociaux pour réorienter leur
action autour de l'accueil de ce nouveau public.
Mme Michèle Mézart
, représentante d'ATD-Quart
Monde, a considéré que le seuil de revenus de 3.500 francs retenu
par le Gouvernement pour accéder à la CMU était
insuffisant, notamment au regard du seuil de pauvreté qui avait
été fixé à 3.800 francs. Elle a observé que
ce seuil de 3.500 francs excluait, de fait, du nouveau dispositif les
bénéficiaires du minimum vieillesse ou de l'allocation adulte
handicapé (AAH). Elle a donc souhaité que le seuil retenu soit au
minimum de 3.800 francs.
Pour limiter les effets de seuil, elle a également demandé
l'institution d'une aide dégressive à la souscription d'une
couverture complémentaire. Elle a considéré que le
système du tiers payant pourrait être utile pour accompagner un
tel dispositif.
M. Bernard Michel
, représentant de Médecins du monde, a
observé que la formation des personnels des caisses primaires
d'assurance maladie et des organismes de protection complémentaire
devait être adaptée à l'accueil de ce nouveau public.
Il a estimé qu'il était indispensable que la continuité
des soins soit assurée en dépit des changements de
résidence ou de situation personnelle et a donc souhaité que le
bénéfice de la couverture maladie universelle soit en principe
maintenu au-delà d'un an, de manière à éviter aux
bénéficiaires d'avoir à accomplir des formalités
administratives complexes.
M. Bernard Michel
a déclaré que le droit à la CMU
devrait être accordé immédiatement sur la base d'une
présomption de droit, les justificatifs n'étant fournis que dans
un second temps. Il a estimé que les obstacles administratifs
étaient souvent incontournables et excluaient, de fait, du
bénéfice de la protection sociale une partie importante des
populations les plus fragiles. Il a rappelé que six millions de
personnes étaient concernées par le projet de CMU, et huit
millions si l'on retenait un seuil à 3.800 francs.
Il a considéré que les bénéficiaires devaient
pouvoir exercer un droit d'option pour choisir leur interlocuteur, qu'il
s'agisse du régime général, d'une entreprise d'assurance,
d'une mutuelle ou d'un organisme de prévoyance. Il a par ailleurs
jugé indispensable le maintien de l'engagement de l'Etat afin
d'éviter tout risque de discrimination.
Mme Chantal Gueneau
, représentante du Secours catholique, s'est
déclarée opposée à la participation des organismes
privés à la gestion du fonds assurant le financement de la CMU.
Elle a par ailleurs estimé que l'accès aux soins ne devait pas
être conditionné à une participation financière de
la part des bénéficiaires de la CMU.
M. Charles Descours, rapporteur
, a observé que la fixation du
seuil au niveau de 3.800 francs conduirait à inclure dans le
nouveau dispositif la majorité des retraités du milieu agricole
et du commerce. Il a estimé que cette perspective n'était pas
sans soulever des difficultés, ces derniers ne pouvant être
considérés comme non insérés et acquittant d'ores
et déjà, le plus souvent, une cotisation mutualiste. Il a
considéré qu'il était difficile de proposer des solutions
uniformes pour huit millions de personnes.
En réponse aux remarques de M. Charles Descours, rapporteur,
MM. Hugues Feltesse et Bernard Michel
ont observé que nombre
de retraités n'avaient pas les moyens de souscrire à une mutuelle
et que, de façon plus générale, 23 % des
Français renonçaient à des soins pour des raisons
financières.
Citant l'exemple de la carte Paris-santé,
M. Jean Chérioux
a rappelé que les départements avaient entrepris des actions
ambitieuses pour assurer une couverture maladie aux plus démunis.
M. Guy Fischer
a regretté que des amendements
déposés à l'Assemblée nationale prévoient
d'associer les mutuelles et les organismes d'assurance à la gestion de
la protection maladie complémentaire.
M. Paul Blanc
a jugé que le fonctionnement de l'aide
médicale était satisfaisant.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
a évoqué la notion de
" reste à vivre ", qui devrait être prise en compte pour
calculer les revenus des personnes endettées ou qui doivent payer une
pension alimentaire.
M. Philippe Nogrix
s'est interrogé sur les modalités du
contrôle des ressources des bénéficiaires dans le cas
où les droits seraient accordés immédiatement. Il a
rappelé que l'action des départements et des centres communaux
d'action sociale s'inscrivait dans une logique de solidarité, et non de
charité.
M. Hugues Feltesse
a souhaité que le fonds chargé de
financer le volet " complémentaire " de la CMU soit
géré par l'Etat. Il a estimé que la carte
Paris-santé constituait un instrument très intéressant,
mais qu'il rencontrait des limites pour les personnes qui
déménagent dans un autre département d'Ile-de-France ou
qui sont confrontées à un changement de situation familiale. Il a
renouvelé son attachement à la reconnaissance de
l'immédiateté des droits.
M. Bernard Michel
a souligné que l'aide médicale gratuite
n'était pas uniforme dans tous les départements et a
souhaité qu'un délai de quinze jours à un mois
après l'ouverture immédiate des droits soit accordé pour
apporter les pièces nécessaires à la constitution des
dossiers d'admission à la CMU.
B. AUDITION DE M. MARCEL RAVOUX, PRÉSIDENT DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE MALADIE ET MATERNITÉ DES TRAVAILLEURS NON SALARIÉS DES PROFESSIONS NON AGRICOLES (CANAM), ET DE M. DANIEL POSTEL-VINAY, DIRECTEUR GÉNÉRAL AINSI QUE DE M. DANIEL LENOIR, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE (MSA).
M.
Marcel Ravoux
a exprimé les inquiétudes que soulevait
le projet de loi de la part de la CANAM.
S'agissant de la couverture de base, il a souligné tout d'abord que le
principe de la déconnexion entre le paiement des cotisations et le
versement des prestations dans le cadre de la CMU allait à l'encontre du
principe appliqué aux personnes assujetties au régime de base de
la sécurité sociale qui subordonne le droit aux prestations en
nature des assurances maladie et maternité au paiement de cotisations.
Il a considéré que la déconnexion susciterait une
contestation croissante du monopole des régimes obligatoires
d'adhésion à la sécurité sociale, contestation qui
était déjà à l'oeuvre dans le secteur professionnel
des artisans. Il a craint une baisse du taux de recouvrement des cotisations.
Il a émis des réserves sur la rénovation de la
procédure d'opposition à tiers détenteur applicable pour
le recouvrement des cotisations de sécurité sociale dues par les
travailleurs indépendants, en soulignant les risques d'un allongement
des délais de procédure et d'un accroissement des contentieux.
Concernant le régime de protection complémentaire, M. Marcel
Ravoux a rappelé que, dans la mesure où la CANAM connaissait les
revenus professionnels des travailleurs non salariés non agricoles, mais
qu'elle ne disposait pas d'informations sur les autres sources de revenus,
l'évaluation du nombre d'assujettis au régime de l'assurance
maladie des professions indépendantes susceptibles de
bénéficier de la nouvelle protection complémentaire
était très approximative.
Il a estimé toutefois que 390.000 ressortissants de la CANAM
faisant état de revenus professionnels inférieurs à
67.000 francs par an étaient susceptibles de
bénéficier de la couverture complémentaire.
Il a noté, par ailleurs, que la CANAM ne connaissait ni les revenus des
assurés qui étaient en début d'activité, ni ceux
des assurés qui présentaient un déficit d'exploitation.
Il a rappelé que, si le régime d'assurance maladie des
professions indépendantes ne gérait pas l'assurance personnelle,
il existait néanmoins environ 700 personnes qui avaient
adhéré volontairement à ce régime en vertu de
l'ordonnance du 21 août 1967 et pour lesquelles le projet de loi ne
contenait aucune disposition. Il a souhaité le maintien du statu quo
pour ces personnes.
Il a observé, par ailleurs, que la CMU était de nature à
remettre en cause le principe de la cotisation minimale due actuellement par
les travailleurs indépendants.
La cotisation minimale, calculée en fonction du taux de cotisation et du
plafond de l'assiette de calcul des cotisations de sécurité
sociale, s'élève à 4.098 francs par an pour les
commerçants et les professions libérales et à
4.445 francs pour les artisans et concerne environ
400.000 travailleurs indépendants.
M. Marcel Ravoux
a considéré que, dès lors que, au
titre de la CMU, il n'était pas prévu de cotisation minimale et
qu'en outre les personnes concernées étaient
exonérées du paiement de cotisation en dessous d'un certain
plafond, des ajustements seraient nécessaires, qui auraient un
coût pour la CANAM.
S'agissant de la protection complémentaire, M. Marcel Ravoux s'est
inquiété de l'effet de seuil important qui apparaîtrait
entre les personnes qui seraient en dessous du seuil de revenus ouvrant droit
à la CMU et celles qui se situeraient à peine au-dessus du seuil
et devraient acquitter une assurance complémentaire de droit commun.
Il a rappelé que le coût minimal d'une telle protection
complémentaire était de l'ordre de 6.000 francs par an pour
un ménage de travailleurs indépendants d'âge actif sans
enfant et de 9.000 francs à 10.000 francs environ par an pour
un couple de retraités.
Il a estimé que les prélèvements pesant sur les
ménages actifs seraient une incitation forte au développement du
" travail au noir ".
Abordant les amendements proposés par la CANAM, M. Marcel Ravoux a
souhaité tout d'abord la possibilité de prélever le
montant des cotisations non acquittées sur le paiement des prestations
dans l'hypothèse où le principe de la déconnexion serait
maintenu.
Il a demandé, par ailleurs, que le dispositif actuellement en vigueur de
cotisation minimale soit remplacé par un régime de cotisation
proportionnelle au revenu.
Concernant la couverture complémentaire, il s'est prononcé en
faveur du maintien du principe de la gratuité pour les personnes
titulaires du RMI, pour le versement d'une cotisation symbolique par les
personnes dont les ressources seraient comprises entre celles ouvrant droit au
RMI et le seuil de revenu prévu par la CMU, et pour le versement d'une
cotisation proportionnelle au revenu, assortie d'une aide dégressive
jusqu'à un niveau de ressources correspondant à deux fois le
plafond de la sécurité sociale, pour les autres assurés.
Il a souhaité que la date de mise en oeuvre de la réforme soit
reportée du 1er janvier au 1er avril 2000 pour tenir compte
des délais nécessaires à l'adaptation des applications
informatiques des caisses.
M. Daniel Lenoir
a indiqué que la MSA partageait de nombreux
éléments d'analyse de la CANAM.
Tout en faisant part de son adhésion de principe à l'objectif
d'amélioration de l'accès aux soins poursuivie par le projet de
loi, il s'est déclaré hostile au système de l'affiliation
automatique à une caisse primaire d'assurance maladie en rappelant que
certaines personnes en difficulté étaient déjà
actuellement affiliées à une caisse primaire de la MSA.
Il a souligné l'importance de la question de la déconnexion entre
le versement des prestations et le paiement des cotisations. Il s'est
demandé si, dans la pratique, la CMU aurait bien un caractère
subsidiaire par rapport au système d'assurance professionnelle et si des
mesures de sanction ne devraient pas être envisagées à
l'encontre des personnes relevant d'un régime obligatoire qui
choisiraient abusivement de s'affilier à la CMU.
Il a regretté que le projet de loi supprime une disposition du code
rural qui permettait à la MSA de recouvrer les cotisations
impayées par opposition à tiers détenteur sans
l'intervention d'un huissier qui avait parfois des effets négatifs.
Il a souligné que le principe de la cotisation minimale actuellement
exigible dans le régime de la MSA devrait être modifié
dès lors que la CMU entrerait en vigueur, en raison des effets de seuil.
S'agissant de la couverture complémentaire, il a constaté que le
dispositif de la CMU créait d'importants effets de seuil, tout en
remarquant que l'évaluation du nombre des assujettis à la MSA qui
pourraient bénéficier de cette protection complémentaire
était difficile en raison des insuffisances dans la connaissance des
revenus.
Il a estimé que 800.000 personnes seraient concernées par
l'assurance complémentaire de la CMU au sein de la MSA. Il a
souhaité également un dispositif de lissage des effets de seuil.
Il a considéré que la CMU remettrait en cause les dispositifs de
couverture complémentaire mis en place par la section sociale de la MSA
sur la base de l'article 1049 du code rural. Il a rappelé que
40 % à 60 % des adhérents de la MSA
bénéficiaient de la gratuité des soins grâce
à ce mécanisme de couverture complémentaire.
M. Charles Descours
s'est demandé comment les caisses primaires
d'assurance maladie (CPAM) contrôleraient les informations sur les
revenus non professionnels des personnes demandant à
bénéficier de la CMU. Il a estimé normal que les
règles de droit commun soient respectées en matière de
recouvrement des créances de sécurité sociale. Il s'est
interrogé sur la disparité de traitement entre, d'une part, un
travailleur indépendant ou un agriculteur qui paierait des cotisations
pour sa couverture de base et, d'autre part, une personne ayant les mêmes
revenus mais affiliée à la CMU.
En réponse,
M. Marcel Ravoux
et
M. Daniel Lenoir
ont
souligné que cette disparité de traitement prévisible
était à l'origine de leur demande de la suppression du principe
du versement d'une cotisation minimale dans les régimes obligatoires.
M. Guy Fischer
s'est demandé sur quelle base la CANAM et la MSA
estimaient que 40 à 60 % de leurs ressortissants se trouvaient en
dessous du seuil de revenu prévu pour la CMU.
M. Marcel Ravoux
a indiqué que cette statistique était
fondée sur les déclarations des revenus professionnels des
affiliés. Il a précisé que, compte tenu des ayants droit,
un million de personnes déjà affiliées seraient
concernées par la CMU et insisté sur le risque d'une
déstabilisation du régime d'assurance complémentaire.
M. Daniel Lenoir
a souligné en effet le niveau relativement
faible des retraites agricoles et il a fait état du risque de
déstabilisation des régimes complémentaires mis en place
soit dans le cadre d'accords interprofessionnels, soit dans les sections
sociales de la MSA.
M. Jean Delaneau, président
, a souligné que la notion de
seuil de pauvreté était variable dans le temps et qu'elle ne
permettait pas de prendre en compte les ressources non monétaires ainsi
que les effets de solidarité familiale.
M. Daniel Lenoir
a indiqué que la MSA avait souhaité
qu'une réflexion soit engagée pour mettre en place un indicateur
statistique de précarité des personnes.
M. Marcel Ravoux
a souligné qu'il conviendrait, au regard du
dispositif mis en place dans le cadre de la CMU, d'examiner attentivement les
modalités de remboursement des prothèses, notamment en
matière dentaire ou optique, consenties actuellement aux assujettis des
régimes obligatoires.
Il a souhaité que la discussion du projet de loi aboutisse à
l'adoption d'une disposition urgente afin de permettre que les modifications du
régime des indemnités journalières versées par la
CANAM puissent être décidées par le vote des seuls membres
élus de la section professionnelle intéressée du conseil
d'administration de la CANAM, et non plus par l'assemblée des
administrateurs des caisses régionales de la CANAM représentant
le groupe professionnel intéressé, comme prévu
actuellement par l'article L. 615-20 du code de la
sécurité sociale.
M. Bernard Seillier
a estimé, en effet, que des simplifications
pouvaient être apportées en matière de procédure
dès lors que le régime des indemnités journalières
avait été institué en assemblée
générale.
C. AUDITION DE M. JEAN-LOUIS FAURE, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL DU CENTRE TECHNIQUE DES INSTITUTIONS DE PRÉVOYANCE (CTIP)
M.
Jean-Louis Faure
a indiqué que le CTIP représentait
74 institutions et unions adhérentes, soit 97 % des
institutions de prévoyance. Exposant l'histoire et présentant les
missions des institutions de prévoyance, il a rappelé que
l'ordonnance du 4 octobre 1945, instituant le régime
général de la sécurité sociale, avait prévu
la création d'organismes de prévoyance à gestion paritaire
" en vue d'accorder des avantages s'ajoutant à ceux qui
résultent de la sécurité sociale ".
M. Jean-Louis Faure
a précisé que l'apparition des
régimes de prévoyance datait de la convention collective
nationale du 14 mars 1947 portant création du régime de
retraite complémentaire des cadres (AGIRC). Par la suite, le
bénéfice des garanties de prévoyance avait
été étendu à l'ensemble des salariés,
notamment à l'occasion de la signature d'autres accords de retraite.
Avec le développement des accords de prévoyance
complémentaire, les années soixante avaient vu la création
d'entités distinctes des caisses de retraite, professionnelles ou
interprofessionnelles.
M. Jean-Louis Faure
a souligné que les activités de
prévoyance et de retraite devaient, depuis la loi du 8 août
1994, être obligatoirement gérées par des personnes morales
différentes : institutions de retraite complémentaire pour
la retraite et institutions de prévoyance pour la prévoyance.
Il a ajouté que les institutions de prévoyance, entreprises
d'assurance au sens des troisièmes directives européennes sur
l'assurance, avaient une double originalité : elles pouvaient
couvrir tous les risques liés à la personne humaine, et
uniquement ceux-ci ; elles ne pouvaient couvrir que des salariés et
des anciens salariés des entreprises adhérentes. Il a
précisé que les institutions de prévoyance étaient
des sociétés de personnes à but non lucratif,
gérées paritairement.
M. Jean-Louis Faure
a indiqué que les institutions de
prévoyance avaient couvert en 1997, à travers 1,6 million
d'entreprises adhérentes, plus de 11 millions de participants
salariés et anciens salariés, soit environ 20 millions de
personnes avec les ayants droit. Il a précisé qu'elles avaient
perçu 37 milliards de francs de cotisations.
Evoquant l'activité des institutions de prévoyance en
matière de couverture complémentaire santé, M. Jean-Louis
Faure a indiqué que les 51 institutions concernées avaient
couvert à ce titre plus de 4,3 millions de salariés et d'anciens
salariés, soit plus 10 millions de personnes avec les ayants droit,
à travers près de 290.000 entreprises adhérentes, et
encaissé 17 milliards de francs de cotisations.
Il a souligné que les institutions de prévoyance menaient en
outre une action sociale importante en direction des personnes privées
d'emploi, des jeunes en recherche d'emploi, des veufs et des retraités.
M. Charles Descours, rapporteur
, a souhaité connaître la
position des institutions de prévoyance sur le projet de loi portant
création d'une couverture maladie universelle. Il a demandé
à M. Jean-Louis Faure si le chiffrage du coût du dispositif
-9 milliards de francs par an- lui paraissait raisonnable. Après
l'avoir interrogé sur l'appréciation qu'il portait concernant le
financement du dispositif, il s'est demandé si un financement par
l'impôt n'aurait pas été préférable à
une contribution des assureurs complémentaires qui risquait de
renchérir le coût des contrats et être facteur d'exclusion.
M. Charles Descours, rapporteur
, a rappelé que le projet de loi
définissait l'assiette de la contribution des organismes
complémentaires comme " le montant hors taxes des cotisations et
primes afférentes à la protection complémentaire en
matière de santé ". Il a souhaité savoir si cela
incluait les cotisations et primes destinées à financer des
indemnités journalières maladie, voire des indemnisations de
l'invalidité.
En réponse à M. Charles Descours,
M. Jean-Louis Faure
a
indiqué que le CTIP avait participé, dès l'origine, aux
différentes consultations menées par M. Jean-Claude Boulard,
ainsi qu'à l'élaboration d'un protocole d'accord avec les autres
régimes complémentaires pour la mise en oeuvre de la CMU.
M. Jean-Louis Faure
a souligné que le CTIP avait toujours
manifesté son accord sur le principe d'un dispositif partenarial tout en
souhaitant que les effets pervers que pouvait engendrer un tel dispositif
soient les plus réduits possibles.
M. Jean-Louis Faure
a mis l'accent sur les difficultés que
pouvait susciter la disparité des bénéficiaires potentiels
de la CMU. Il a estimé qu'une couverture de 1.500 francs ne
constituait qu'une moyenne et que le coût de la couverture réelle
était susceptible d'évoluer selon un rapport de un à trois
en fonction de l'âge du bénéficiaire : de
800 francs à 20 ans à 2.400 francs au-delà
de 60 ans. Il a, par conséquent, jugé indispensable que les
charges réelles pesant sur les organismes complémentaires soient
intégralement compensées par le Fonds de financement de la
protection complémentaire prévu à l'article 25 du projet
de loi. Il a suggéré que le remboursement au profit des
organismes complémentaires soit effectué selon un coefficient
actuariel qui tienne compte de l'âge des bénéficiaires.
M. Jean-Louis Faure
a estimé qu'une autre difficulté
résidait dans le fait que les caisses primaires d'assurance maladie
seraient remboursées par le Fonds de la totalité des sommes
effectivement dépensées tandis que les organismes
complémentaires assureraient la couverture du risque et assumeraient,
par conséquent, les déficits éventuels.
M. Jean-Louis Faure
a souligné que la CMU allait également
compliquer la gestion des contrats collectifs dans la mesure où ceux-ci
offraient généralement des garanties inférieures à
la CMU. Certains salariés bénéficieraient de la CMU et
d'autres, non. Il s'est demandé comment s'effectuerait le remboursement
de la part salariale des cotisations de couverture complémentaire aux
bénéficiaires de la CMU si l'entreprise n'était pas en
mesure de connaître le revenu de ses salariés. Il a
considéré que la CMU risquait par conséquent de
gêner le développement des contrats collectifs, alors même
que ceux-ci favorisaient la généralisation et la mutualisation de
la couverture complémentaire et la non-sélection des risques.
M. Jean-Louis Faure
a mis l'accent sur les risques de
désynchronisation que pouvait entraîner la CMU pour les jeunes. Il
a expliqué que ces derniers occupaient souvent des emplois
précaires et connaissaient des variations de revenus importantes selon
les années. Un jeune pouvait, par conséquent, se voir refuser le
bénéfice de la CMU au moment où il en avait besoin, parce
que ses revenus de l'année précédente s'avéraient
trop élevés.
M. Jean-Louis Faure
a souhaité que la charge financière
résultant du maintien pendant un an du bénéfice de la CMU
pour les personnes qui ne remplissaient plus les conditions de son obtention
soit mutualisée plus largement.
Evoquant le coût du dispositif,
M. Jean-Louis Faure
a
souligné que celui-ci dépendait de deux
éléments : le montant du plafond -une légère
augmentation de ce plafond provoquerait l'entrée des
800.000 personnes âgées bénéficiant du minimum
vieillesse- et de l'état sanitaire de la population qui avait vocation
à bénéficier de la CMU. Il a considéré que
cet état sanitaire était inconnu et que la CMU pouvait
entraîner, en solvabilisant les besoins, un effet de rattrapage
susceptible d'augmenter fortement le coût du dispositif.
S'agissant du financement de la CMU, a estimé que la contribution des
organismes complémentaires risquait de se traduire par une augmentation
du coût de la couverture complémentaire pour les assurés.
Il a craint des effets de sortie des dispositifs de couverture
complémentaire : les personnes aux revenus élevés
pouvaient être amenées à effectuer des arbitrages les
conduisant à renoncer à leur couverture complémentaire.
M. Jean-Louis Faure
a également rappelé que les
institutions de prévoyance étaient désormais soumises aux
directives européennes qui leur imposaient une marge de
solvabilité au moins égale à 25 % des prestations.
M. Jean-Louis Faure
a considéré que la définition
de l'assiette de la contribution des organismes complémentaires
n'était pas suffisamment précise et a suggéré que
l'on remplace les mots : " afférentes à la protection
complémentaire en matière de santé " par les
mots : " relatives à l'indemnisation ou au remboursement des
frais complémentaires de soins de santé ".
M. Charles Descours, rapporteur
, a jugé que le chiffre de
1.500 francs par personne pour les dépenses annuelles de couverture
complémentaire était probablement sous-évalué. Il a
considéré que les dépenses pouvaient s'avérer en
réalité bien plus élevées, ce qui menacerait la
situation financière de la CNAMTS et des organismes
complémentaires.
M. Jean-Louis Faure
a souligné que tout dépendait de la
définition du " panier de soins " associé à ce
montant moyen de 1.500 francs.
M. Charles Descours, rapporteur
, s'est interrogé sur la
façon dont la répartition allait se faire entre la CNAMTS et les
organismes complémentaires dans la prise en charge des
bénéficiaires de la CMU.
M. Jean-Louis Faure
a considéré que, seules, les personnes
les plus marginalisées devaient relever des CPAM pour leur couverture
complémentaire. Pour les autres, en revanche, il convenait de faire en
sorte qu'elles entrent dans le droit commun, c'est-à-dire qu'elles
adhèrent à un organisme complémentaire. Il a
souligné que la CNAMTS et les organismes complémentaires avaient
signé la semaine précédente un protocole d'accord visant
à organiser la répartition des rôles entre les
différents acteurs en matière de couverture
complémentaire.
D. AUDITION DE M. JEAN-MARIE SPAETH, PRÉSIDENT DE LA CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE MALADIE DES TRAVAILLEURS SALARIÉS (CNAMTS)
M.
Jean-Marie Spaeth
a affirmé au préalable que
l'institution d'une couverture maladie universelle constituait une
réforme importante pour favoriser l'accès aux soins pour tous. Il
a estimé que le moment était venu, pour des raisons de
solidarité, de créer un droit personnel à l'assurance
maladie. Compte tenu du progressif désengagement de la
sécurité sociale dans la couverture des dépenses de
santé, il lui a semblé fondé que le projet de loi traite
également de la question de l'accès à une protection
sociale complémentaire.
Examinant le dispositif proposé par ce texte, il a affirmé qu'il
n'existait pas, en France, six millions de personnes exclues ou
désocialisées et qu'il ne convenait donc pas de traiter
différemment du reste de la population les 10 % de résidents
éligibles à la CMU. Il a affirmé qu'il convenait de
favoriser l'accès des personnes économiquement faibles à
la couverture complémentaire et ne s'est donc pas déclaré
favorable à ce que la sécurité sociale intervienne dans le
domaine de compétence des organismes de protection sociale
complémentaire. En effet, le financement de la sécurité
sociale étant assuré par des contributions proportionnelles aux
revenus, il n'est ni légitime, ni souhaitable que la
sécurité sociale offre des prestations soumises à
conditions de ressources. La sécurité sociale doit demeurer un
système assuranciel qui rembourse en fonction des pathologies et non des
revenus.
M. Jean-Marie Spaeth
a souhaité que le bénéfice de
la CMU corresponde à une période transitoire dans la vie des
personnes qui y sont éligibles et estimé en conséquence
qu'elles ne devraient pas basculer, à cette occasion, dans un
système de protection sociale s'éloignant du droit commun.
M. Charles Descours, rapporteur
, a affirmé son plein accord avec
les propos du président de la CNAMTS. Il lui a demandé si une
réforme préalable de l'assurance maladie n'aurait pas
été nécessaire avant l'adoption d'une loi instituant une
couverture maladie universelle. Il l'a également interrogé sur la
nature de la concurrence instituée par le projet de loi entre le
régime général de sécurité sociale et les
organismes de protection sociale complémentaire. Il s'est
inquiété de la mise en place, par le projet de loi, d'une sorte
de " nomenclature bis " pour les bénéficiaires de la
CMU. Il a demandé au président de la CNAMTS des informations sur
le protocole d'accord conclu entre l'assurance maladie et les
représentants des mutuelles et des compagnies d'assurances. Compte tenu
du nombre très élevé d'organismes de protection sociale
complémentaire, il s'est enfin inquiété des
modalités selon lesquelles les médecins délivrant des
soins aux bénéficiaires de la CMU pourraient être
payés par ces derniers sans accomplir des démarches complexes.
M. Jean-Marie Spaeth
a estimé qu'il ne fallait pas attendre une
nouvelle réforme de l'assurance maladie avant d'instituer une couverture
maladie universelle, mais a rappelé que la réforme engagée
par les ordonnances du 24 avril 1996 n'était pas aboutie. Il a
affirmé que toute nouvelle réforme devrait prendre en
considération à la fois le système d'assurance maladie et
l'offre de soins disponible, à partir d'une analyse des besoins de
chaque assuré social. Il s'est déclaré opposé
à la définition d'un panier de soins remboursables
spécifique pour les bénéficiaires de la CMU. Il a
toutefois indiqué que la question était posée de
l'établissement d'une liste de prothèses et de lunettes à
des tarifs opposables pour les bénéficiaires de la CMU, mais
aussi pour l'ensemble des assurés sociaux. Il a déclaré
que l'on ne pouvait se contenter d'un système dans lequel le Parlement
votait des objectifs de dépenses et a affirmé que l'Etat devait
définir en parallèle une politique de santé et le panier
de soins remboursables correspondants.
Evoquant l'accord conclu avec les organismes de protection sociale
complémentaire, M. Jean-Marie Spaeth a observé qu'il ratifiait un
état de fait, celui de la complémentarité existant entre
ces derniers et les organismes de sécurité sociale. Il a aussi
affirmé que cet accord avait pour objet d'organiser une
coopération des politiques suivies par les différents
partenaires, dans une logique de donnant-donnant élaborée dans
l'intérêt des Français. Il a en effet souligné les
effets pervers entraînés, dans le passé, par une absence de
coopération entre ces organismes, toute mesure appliquée par la
sécurité sociale pouvant être contrecarrée
immédiatement par les organismes de protection sociale
complémentaire. Il a enfin déclaré que l'accord conclu
avec ces derniers avait une portée plus générale que la
seule mise en oeuvre de la couverture maladie universelle et qu'il devait
être analysé comme l'organisation de tous les intervenants
financiers en matière de couverture maladie pour faire évoluer
l'offre de soins.
M. Jean Delaneau, président
, s'est interrogé sur les
calculs effectués par le Gouvernement dans le cadre de la
préparation du projet de loi. Il s'est ainsi demandé si l'on
avait multiplié six millions de personnes bénéficiaires
par un coût de 1.500 francs pour arriver à 9 milliards
de francs, ou bien si la somme de 1.500 francs avait été obtenue
en divisant un coût financier jugé comme acceptable de
9 milliards de francs par le nombre de six millions de personnes
bénéficiaires.
M. Jean-Marie Spaeth
lui a répondu que les organismes de
protection sociale complémentaire étaient mieux placés que
lui pour évaluer le coût réel de la couverture
complémentaire des bénéficiaires de la CMU. Il a toutefois
souligné la difficulté d'un tel exercice et cité l'exemple
des personnes âgées, dont les dépenses de soins sont
élevées, mais dont une partie bénéficie de
remboursements à 100 % par la sécurité sociale.
Répondant à M. Charles Descours, rapporteur, il a affirmé
qu'allait être mis en oeuvre un système informatisé qui
permette aux médecins d'être payés simplement, sur la base
d'un décompte unique où apparaissent clairement les
remboursements du régime de base et des régimes
complémentaires.
Mme Gisèle Printz
s'est interrogée sur les
modalités de mise en oeuvre de la CMU dans les départements
soumis au droit local.
M. Jean-Marie Spaeth
lui a répondu qu'une difficulté
pourrait surgir en raison des textes législatifs qui disposent que le
régime local ne peut pas rembourser les dépenses de santé
à 100 %.
M. Guy Fischer
a fait part de son inquiétude quant à une
possible immixtion des régimes complémentaires dans la gestion du
système de soins.
M. Jean-Marie Spaeth
lui a répondu que les organismes
complémentaires participaient déjà au système de
soins et que cette participation était d'autant plus grande que la
sécurité sociale se désengageait du remboursement des
dépenses de santé. Il a estimé que régimes de base
et organismes complémentaires devaient s'unir pour agir ensemble sur
l'offre de soins, sauf à prendre le risque que l'offre de soins organise
elle-même la concurrence entre les financeurs.
M. François Autain
s'est inquiété de la
disparité des dispositifs prévus par le projet de loi pour les
bénéficiaires de la CMU qui auront choisi, pour leur couverture
complémentaire, les caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) et ceux
qui auront choisi les organismes complémentaires. En effet, seuls ces
derniers bénéficieront d'une période de maintien des
droits à la sortie du dispositif CMU.
M. Jean-Marie Spaeth
s'est interrogé sur les modalités de
financement d'une telle prise en charge si elle était instituée
par la loi au profit des bénéficiaires de la CMU ayant choisi de
confier aux caisses primaires la gestion de leur couverture
complémentaire.
M. Charles Descours, rapporteur
, constatant que l'Etat compensait trop
rarement les charges nouvelles qu'il imposait aux organismes de
sécurité sociale, a déclaré partager les craintes
exprimées par le président de la CNAMTS.
V. SÉANCE DU MERCREDI 4 MAI 1999
A. AUDITION DE M. JEAN-PIERRE DAVANT, PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION NATIONALE DE LA MUTUALITÉ FRANÇAISE (FNMF)
Sous
la présidence de
M. Jean Delaneau
,
président,
la
commission a poursuivi ses
auditions sur le projet de loi n° 338
(1998-1999)
portant
création d'une couverture maladie
universelle
(CMU).
Elle a tout d'abord entendu
M. Jean-Pierre Davant, président de la
fédération nationale de la mutualité française
(FNMF).
M. Charles Descours, rapporteur,
a souhaité connaître la
position générale de la FNMF sur le projet de loi portant
création d'une couverture maladie universelle. Il lui a aussi
successivement demandé combien les mutuelles allaient-elles perdre
d'adhérents avec la mise en oeuvre de ce dispositif, s'il estimait qu'il
était réaliste d'affirmer, comme le faisait le Gouvernement, que
la CMU aurait un coût annuel de 9 milliards de francs et si la FNMF
était à l'origine du chiffrage du coût de la couverture
complémentaire individuelle à 1.500 francs par an. Il l'a
interrogé sur le financement du dispositif et sur la
légitimité de la participation des représentants des
organismes complémentaires au Conseil d'administration du fonds
chargé de financer la CMU. Il lui a demandé de porter une
appréciation sur la pertinence du système imaginé par
l'Assemblée nationale pour limiter les effets de seuil qui
résulteraient de l'application du projet de loi. Il l'a enfin
interrogé sur la définition de l'assiette de la contribution des
organismes complémentaires instituée par ce projet de loi.
M. Jean-Pierre Davant
a affirmé qu'il n'était pas
acceptable que des personnes n'aient pas accès au système de
soins, surtout dans un contexte où la collectivité nationale
consacrait des ressources aussi importantes pour le financer. S'il a
estimé que la CMU pouvait constituer une réponse à ce
problème pour les citoyens qui en seraient bénéficiaires,
il a déclaré qu'il aurait été possible de
construire un autre dispositif que celui qui avait été
prévu par le projet de loi. Il a notamment critiqué le fait que
les organismes de protection sociale complémentaire soient
appelés à financer la couverture maladie universelle et soient
parallèlement opposés aux caisses primaires d'assurance maladie
pour la mettre en oeuvre. Il a également observé que le projet de
loi mettait les mutuelles en concurrence avec les compagnies d'assurance alors
que ces deux types d'institutions n'incarnent pas la même éthique
à l'égard de leurs assurés.
M. Jean-Pierre Davant
a indiqué que 10 à 15 % des
adhérents actuels des mutuelles interprofessionnelles seraient demain
bénéficiaires de la CMU et que ce taux était beaucoup plus
élevé pour les mutuelles qui assuraient la couverture
complémentaire maladie des personnes non salariées. Soulignant le
paradoxe de l'institution d'une couverture maladie universelle avant celle
d'une assurance maladie universelle et les difficultés
rencontrées pour obtenir une bonne connaissance des revenus des
indépendants, il a estimé qu'au moins 20 % des personnes
adhérant à des mutuelles de non salariés auraient
désormais la possibilité de ne plus acquitter la cotisation pour
leur couverture complémentaire.
M. Jean-Pierre Davant
a estimé que l'évaluation d'un
coût de 9 milliards de francs pour la mise en place de la CMU
était probablement correcte pour la première année
d'application du dispositif, mais a fait part d'une beaucoup plus grande
incertitude pour les années qui suivraient. Evoquant l'estimation de
1.500 francs par personne et par an, il a apporté plusieurs
précisions de nature à en relativiser la pertinence. Il a ainsi
indiqué qu'elle avait été obtenue sur une base
correspondant aux dépenses réalisées en 1995, et qu'il
faudrait donc ajouter 15 % de cette somme pour obtenir un chiffrage
réaliste au 1
er
janvier 2000. Il a aussi
affirmé que l'estimation avait été réalisée
sur la base des dépenses engagées pour des personnes
âgées de moins de 65 ans et indiqué que le coût de la
couverture complémentaire des personnes plus âgées
s'élevait en moyenne à 2.500 francs. Enfin, il a
estimé que le coût de la couverture complémentaire
dépendrait de la nature des accords qui pourraient être conclus
entre les régimes obligatoires, les organismes de protection sociale
complémentaire et les professionnels, craignant une explosion
financière du coût de la CMU si les pouvoirs publics
cédaient à la pression de ces derniers, notamment en
matière dentaire et optique.
M. Jean-Pierre Davant
a déclaré prendre acte de
l'institution d'une contribution à la charge des organismes de
protection sociale complémentaire, observant à cet égard
que la mutualité en acquitterait l'essentiel en raison de sa position
sur le marché de la protection complémentaire maladie.
Répondant à l'argument selon lequel les mutuelles disposaient de
réserves financières importantes qui pourraient être
utilisées pour acquitter la nouvelle contribution, il a affirmé
que ces réserves devraient être accrues plutôt que
réduites dans le cadre de l'évolution européenne et qu'en
dernier ressort les véritables contributeurs seraient les
adhérents des mutuelles. Il a estimé légitime que les
organismes de protection sociale complémentaire participent au conseil
d'administration du fonds chargé du financement de la CMU.
Répondant à la question du rapporteur sur la création, par
l'Assemblée nationale, d'un nouveau fonds dont les dépenses
permettraient de limiter des effets de seuil
, M. Jean-Pierre Davant
a fait part de ses plus grandes réserves sur ce dispositif et il a
estimé que seul un système faisant appel à une cotisation
des bénéficiaires serait de nature à satisfaire cet
objectif. Il a rappelé que la mutualité avait mis en place des
systèmes solidaires permettant aux personnes titulaires de faibles
revenus d'accéder à la protection complémentaire. Il a
exprimé le voeu que l'institution de la CMU soit une mesure temporaire,
dans l'attente d'une meilleure gestion du système de soins permettant
à tous d'y accéder.
Evoquant enfin la définition de l'assiette de la contribution des
organismes de protection sociale complémentaire,
M. Jean-Pierre
Davant
a affiché sa préférence pour une
référence au montant des prestations versées en
matière de santé.
M. Charles Descours, rapporteur,
a interrogé le président
de la FNMF sur la prise de position d'une mutuelle de la fonction publique,
selon laquelle l'institution de la couverture médicale universelle telle
qu'elle était prévue par le projet de loi portait en germe une
privatisation de la sécurité sociale. Il s'est demandé si
les caisses primaires d'assurance maladie auraient les moyens de
contrôler effectivement le niveau des ressources des personnes qui
sollicitaient le bénéfice de la CMU.
Il a enfin demandé à M. Jean-Pierre Davant quelles institutions
seraient chargées de déterminer le panier de soins remboursables
et si la perte de 20 % d'adhérents entraînée par
l'institution de la CMU pouvait menacer l'existence de certaines mutuelles.
M. Jean-Pierre Davant
a estimé que la mise en concurrence des
caisses primaires et des organismes de protection sociale complémentaire
constituait un réel danger politique.
Il a émis des doutes sur l'importance des moyens dont disposaient les
caisses primaires pour appréhender de manière efficace l'ensemble
des ressources des personnes sollicitant le bénéfice de la CMU.
M. Jean-Pierre Davant
a affirmé que l'accord qui venait
d'être conclu entre la caisse nationale d'assurance maladie des
travailleurs salariés (CNAM) et les représentants des mutuelles
et des compagnies d'assurance ne concernait pas seulement les
bénéficiaires de la CMU, mais l'ensemble des assurés
sociaux. Il a indiqué que les organismes de protection sociale
complémentaire avaient le choix, soit d'acquitter une contribution
représentant 1,75 % de leur chiffre d'affaires, soit d'entrer
véritablement dans la gestion du dispositif de la CMU. Affirmant sa
préférence pour un scénario partenarial avec la CNAM, il a
affirmé que si les organismes de protection sociale
complémentaire n'étaient pas associés à la
maîtrise du dispositif, ils se contenteraient de payer la taxe, l'Etat
étant alors invité à assumer ses responsabilités.
M. Jean-Pierre Davant
a confirmé que l'avenir de certaines
mutuelles de petite dimension pourrait être menacé par
l'institution de la CMU.
Interrogé par
M. Jean Delaneau, président,
il a
précisé que de grandes mutuelles avaient maintenu un
système de solidarité se traduisant par des cotisations
proportionnelles aux salaires des adhérents et que d'autres avaient mis
en place des cotisations en fonction de l'âge, afin de permettre au plus
grand nombre d'accéder à une couverture complémentaire.
M. François Autain
a demandé à M. Jean-Pierre
Davant s'il accordait sa préférence à un système
où les caisses primaires d'assurance maladie continuent d'assumer la
mission qui est la leur plutôt que d'entrer dans le champ de la
protection sociale complémentaire.
M. Jean-Pierre Davant
lui a répondu par
l'affirmative.
B. AUDITION DE MME DOMINIQUE POLTON, DIRECTEUR DU CENTRE DE RECHERCHE D'ÉTUDE ET DE DOCUMENTATION EN ÉCONOMIE DE LA SANTÉ (CREDES), ET DE M. MICHEL GRIGNON, DIRECTEUR DE RECHERCHE
La
commission a ensuite procédé à l'audition de
Mme
Dominique Polton, directrice du Centre de recherche d'étude et de
documentation en économie de la santé (CREDES),
et de
M.
Michel Grignon, directeur de recherche
.
M. Charles Descours, rapporteur,
a demandé quelle était la
part de la population concernée par la CMU disposant déjà
d'une couverture complémentaire, notamment dans le cadre de leur
entreprise. Il s'est interrogé sur le niveau de la couverture maladie
complémentaire de ces personnes et sur
l'homogénéité existant entre les branches
professionnelles. Citant l'évaluation faite par le Gouvernement d'un
coût de 1.500 francs par personne, il a demandé si elle
était raisonnable et si l'institution d'une couverture maladie
universelle n'allait pas se traduire par un effet de " rattrapage ".
Répondant à la question du rapporteur sur la part de la
population concernée par la couverture maladie universelle disposant
déjà d'une couverture complémentaire
,
Mme Dominique Polton
a détaillé les résultats
d'une enquête réalisée en 1996 auprès d'un
échantillon de bénéficiaires dépendant des trois
principaux régimes d'assurance maladie.
M. Michel Grignon
a
précisé que cette enquête se fonde sur une échelle
d'équivalence, dite " échelle d'Oxford " (1 pour le
chef de ménage, 0,7 pour le deuxième adulte et 0,5 pour les moins
de quatorze ans), qui est différente de celle retenue par le projet de
loi (1 pour le chef de ménage, 0,5 pour le deuxième adulte et 0,3
pour les moins de quatorze ans). Sur 8,5 millions de personnes ayant moins
de 3.000 francs de revenu par unité de consommation (au lieu de 6
millions de personnes dans le cadre de l'échelle retenue par la CMU),
6,3 millions disposeraient déjà d'une couverture
complémentaire, dont 2,7 millions via leur entreprise. Plus le
revenu par unité de consommation est élevé, plus la part
des personnes dont l'entreprise assure cette couverture est importante.
Mme
Dominique Polton
a toutefois souligné que le pourcentage de
personnes couvertes était probablement surestimé, du fait du mode
d'enquête qui ne permet d'appréhender que des personnes disposant
d'un logement et plus généralement celles qui sont le mieux
insérées socialement.
En réponse à une observation de
M. Charles Descours,
rapporteur
,
Mme Dominique Polton
a confirmé que la
couverture maladie universelle aurait pour conséquence une perte de
cotisations pour les organismes de protection complémentaire.
Concernant le niveau de couverture,
Mme Dominique Polton
a reconnu que
cette question était effectivement essentielle. Elle a
précisé qu'il n'existait malheureusement pas, pour l'instant, de
données objectives sur la qualité de la couverture et que les
seules informations connues étaient subjectives, fondées sur
l'opinion des personnes interrogées sur le niveau de remboursement. Elle
a observé que cette enquête faisait apparaître que le
pourcentage de personnes jugeant que leur couverture prend en charge
" intégralement ", ou " bien ", leurs
dépenses n'était pas différent chez les personnes ayant
des revenus inférieurs à 3.000 francs par rapport au reste
de la population. Elle a toutefois précisé qu'il lui semblait
probable que les couvertures collectives (d'entreprise) offrent un meilleur
niveau de protection et un meilleur rapport qualité/prix, par rapport
aux contrats souscrits individuellement.
M. Michel Grignon
a remarqué que le niveau de revenus
n'était pas un facteur déterminant de renoncement aux soins,
contrairement au fait d'être couvert ou non par une assurance
complémentaire.
Mme Dominique Polton
a indiqué qu'elle ne disposait pas
d'informations sur la question de l'homogénéité entre les
différentes branches professionnelles.
Concernant l'évaluation d'un coût de 1.500 francs par
personne retenu par le Gouvernement,
Mme Dominique Polton
a
observé que trois types d'éléments devaient être
pris en compte : les dépenses moyennes restant à charge des
bénéficiaires, après couverture obligatoire, les
caractéristiques de la population ciblée par la CMU et
l'étendue de la couverture. Pour les dépenses moyennes restant
à charge (ticket modérateur, forfait journalier,
dépassements), l'évaluation est de 1.775 à
1.915 francs selon les sources et les méthodes d'estimation.
M.
Michel Grignon
a expliqué que la population ciblée par la CMU
présentait deux caractéristiques : sa structure d'âge,
nettement plus jeune que la population totale, ce qui en fait un public moins
dépensier, et ses comportements spécifiques de consommation, dont
on ne sait s'ils vont s'aligner sur ceux de la moyenne générale,
ou s'ils vont rester inférieurs pour des raisons socioculturelles. Les
données recueillies auprès des départements ayant mis en
place une carte santé semblent montrer la persistance de comportements
spécifiques de recours aux soins. Enfin, le dispositif retenu pour la
CMU peut conduire à ce que les dépassements pris en charge soient
inférieurs au dépassement total.
Concernant un éventuel effet de " rattrapage " lié
à la mise en place de la couverture maladie universelle,
Mme
Dominique Polton
, après avoir précisé que le CREDES
n'avait pas mené d'étude spécifique sur cette question, a
remarqué que les données obtenues dans les départements
montraient un phénomène de croissance de la consommation
médicale, mais qu'il n'existait pas de " système
d'investissement préalable ".
M. Jean Chérioux
s'est interrogé, au-delà d'une
bénéfique uniformisation, sur les modifications réelles
apportées par la couverture maladie universelle, à partir du
moment où les départements avaient mis en place des
systèmes de couverture complémentaire, trop souvent
méconnus.
Mme Dominique Polton
a rappelé que le CREDES travaillait sur des
sources fournies par les régimes d'assurance maladie, et non sur les
données des conseils généraux.
Répondant à une interrogation de
Mme Marie-Madeleine
Dieulangard
sur " l'échelle d'Oxford " et les
systèmes définis pour apprécier le niveau des ressources,
Mme Dominique Polton
a observé qu'il s'agissait
d'enquêtes sur des revenus déclarés et que l'échelle
d'Oxford avait été très utilisée, avant le recours
à l'échelle retenue pour le revenu minimum d'insertion (RMI) qui
sert pour le projet de loi CMU.
M. Michel Grignon
a
précisé qu'au-delà de la pertinence des échelles
utilisées, il était particulièrement audacieux de garder
la même échelle pour des personnes à faible revenu comme
pour des personnes plus aisées.
M. Dominique Leclerc
, établissant un parallèle entre les
chiffres utilisés dans le cadre de l'objectif national d'assurance
maladie (ONDAM) et les chiffres utilisés par le CREDES, a fait observer
que les différentes enquêtes menées dépendaient de
la fiabilité des chiffres fournis par l'assurance maladie.
Mme Nicole Borvo
s'est interrogée sur le nombre de personnes
(2,7 millions) disposant d'un revenu inférieur à
3.000 francs par unité de consommation et actuellement
concernées par une couverture complémentaire dans le cadre de
leur entreprise.
M. Michel Grignon
a expliqué qu'une famille composée d'un
salarié au SMIC, d'un adulte ne travaillant pas et de deux enfants,
disposait d'un revenu inférieur à 3.000 francs par
unité de consommation.
C. AUDITION DE M. MICHEL DOLLÉ, RAPPORTEUR GÉNÉRAL AU CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'EMPLOI, DES REVENUS ET DES COÛTS (CSERC)
La
commission a alors entendu
M. Michel Dollé, rapporteur
général au Conseil supérieur de l'emploi, des revenus et
des coûts
(CSERC).
M. Jean Delaneau, président,
a rappelé que le CSERC
s'était intéressé aux phénomènes de
" désincitation " et que la couverture maladie universelle
pouvait présenter le risque de ne pas favoriser la recherche d'emploi.
M. Michel Dollé
a tout d'abord précisé qu'il
n'était un spécialiste ni de l'économie de la
santé, ni de la sécurité sociale. Il a observé
qu'un accord général existait sur la nécessité de
reconnaître le droit à l'accès aux soins comme un droit
fondamental, alors que la gratuité n'est pas assurée par le mode
de fonctionnement du système de santé. Il a indiqué que
l'existence d'une " zone de passage " entre la prise en charge totale
des frais de santé et la prise en charge partielle posait
problème. Citant l'exemple de l'allocation parent isolé (API),
où le passage de l'API (revenu non imposable) à un salaire
(revenu imposable) entraînait une diminution de l'allocation logement,
alors que les revenus sont identiques, il a observé qu'un tel
" effet de trappe " pouvait à la fois constituer une
désincitation au travail et être condamnable au regard de la
justice sociale. Citant un rapport relativement récent du CSERC, il a
toutefois ajouté qu'il ne fallait pas surestimer ce facteur
désincitatif, les personnes en recherche d'emploi espérant un
gain futur plus important et, en tout état de cause, une
réinsertion dans la société. Il a observé que les
différentes enquêtes de l'INSEE sur les personnes touchant le RMI
faisaient apparaître le frein important que représentent les
problèmes de santé à la possibilité de trouver un
emploi. Il a estimé que la généralisation de la couverture
maladie pourrait, de ce fait, avoir un effet incitatif sur la recherche de
travail.
M. Michel Dollé
a estimé que le projet de loi portant
création d'une couverture maladie universelle comportait deux effets de
seuil. Il a observé que le premier effet de seuil, se situant au niveau
de la couverture de base, ne se posait que pour les seules personnes prenant un
emploi non salarié, ces personnes devant cotiser sur la totalité
de leurs revenus. Il a indiqué que la seule solution pour supprimer cet
effet de seuil était d'instituer une franchise, en remontant le taux
moyen. En ce qui concerne le second effet de seuil, relatif à
l'assurance complémentaire, il a observé que la difficulté
tenait au caractère facultatif de cette assurance. Il a noté
qu'il était de toute façon nécessaire d'atténuer
cet effet de seuil, en adoptant un mécanisme similaire à celui
prévu pour le revenu minimum d'insertion, à savoir une phase
transitoire d'un an, ce qui est prévu par le projet de loi pour les
bénéficiaires de la CMU ayant choisi les organismes de protection
complémentaire. Il a remarqué que cette disposition ne valait que
pour les personnes effectuant un passage temporaire au sein du dispositif,
avant de disposer de revenus plus importants. Pour les personnes qui restent
dans la zone proche du seuil de la CMU, la technique d'une année de
transition n'est pas suffisante. M. Michel Dollé a estimé que la
seule solution était d'attribuer une aide dégressive par rapport
au revenu, et non pas par rapport à la date d'entrée du
dispositif.
M. Jean Delaneau, président,
a estimé qu'il convenait
d'être d'une grande prudence concernant les phénomènes
d'incitation ou de désincitation.
Répondant à une interrogation de
M. Jean Chérioux
sur
la définition des ressources nécessaires,
M.
Michel Dollé
a déclaré qu'il était essentiel,
à partir du moment où le travail est considéré dans
la société contemporaine comme la base de l'autonomie de la
personne, qu'une situation de travail appelle des revenus plus
élevés qu'une situation de non-travail.
VI. SÉANCE DU MERCREDI 19 MAI 1999
A. AUDITION DE M. MICHEL MERCIER, PRÉSIDENT, ET M. BERNARD CAZEAU, VICE-PRÉSIDENT, DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES DE L'ASSEMBLÉE DES DÉPARTEMENTS DE FRANCE (ADF)
Elle
a d'abord entendu
M. Michel Mercier, président, et M. Bernard Cazeau,
vice-président,
de la commission des affaires sociales de
l'Assemblée des départements de France (ADF).
M. Michel Mercier
a tout d'abord évoqué la position
générale de l'Assemblée des départements de France
(ADF) concernant la couverture maladie universelle (CMU).
Il a tout d'abord rappelé que s'agissant de la couverture de base, les
départements étaient essentiellement cantonnés à un
rôle passif d'organisme payeur au vu des demandes d'aide médicale
gratuite qui étaient transmises par les caisses d'allocations familiales.
Il a souligné en outre que les droits à l'assurance maladie
étaient difficiles à établir, ce qui rendait
particulièrement complexe la gestion administrative de cette
compétence.
S'agissant de la couverture complémentaire,
M. Michel Mercier
a
souligné que les départements avaient pris un certain nombre
d'initiatives positives qui devaient être conservées. Il a
évoqué également l'aspect positif du traitement
personnalisé des demandes d'aide médicale.
D'une manière générale, il a souligné que l'ADF
était favorable au principe de la CMU prévue par le projet de loi
dans la mesure où les conseils généraux regrettaient la
fracture entre la protection médico-sociale accordée aux
travailleurs cotisant à la sécurité sociale et la
situation de précarité des personnes qui n'était pas
intégrées au monde du travail et ne remplissaient pas les
conditions légales pour bénéficier de la
sécurité sociale.
Il a tenu à rappeler que le projet de loi " ne partait pas de
rien " et bénéficiait de l'expérience et des
initiatives prises par les collectivités locales, notamment par les
départements, afin d'assurer l'accès aux soins des personnes en
difficulté.
Sur le plan financier, il a rappelé que la mise en oeuvre de la CMU
soulevait divers problèmes relatifs à l'évaluation du
coût actuel de l'aide médicale gratuite, aux transferts financiers
consécutifs aux transferts de compétences en matière
d'aide médicale et aux relations financières entre les diverses
catégories de collectivités territoriales.
Soulignant qu'il convenait de ne pas opposer artificiellement les communes et
les départements sur la question du contingent communal d'aide sociale,
il a rappelé que l'ADF souhaitait la suppression de ce contingent tout
en demandant que soit préservée la neutralité
financière indispensable à l'exercice des compétences
d'action sociale.
M. Charles Descours
s'est interrogé sur la situation des
départements qui avaient adopté des barèmes d'aide
médicale plus avantageux que le minimum légal, sur le
bien-fondé de l'imputation des dépenses facultatives d'aide
médicale financée par les départements en diminution de la
dotation générale de décentralisation (DGD), sur les
conséquences pour les départements de l'effet de seuil pour les
personnes dépassant le plafond de ressources de 3.500 francs
fixé au titre de la CMU, sur l'évaluation du coût unitaire
de la prise en charge à 100 % des personnes en difficulté,
et sur les modalités concrètes de la réforme des
contingents communaux d'aide sociale.
M. Michel Mercier
, concernant le transfert financier consécutif
au transfert de compétence en matière d'aide médicale, a
tout d'abord rappelé que pour de nombreux départements, la mise
en oeuvre de la CMU aboutirait à un calcul de DGD
" négative ", c'est-à-dire à des reversements au
profit du budget de l'Etat.
Après avoir rappelé qu'une dizaine de départements avaient
mis en oeuvre une couverture complémentaire pour des niveaux de
ressources plus élevés que le seuil de 3.500 francs retenu
pour la CMU, il a estimé que l'ADF n'avait pas vocation à revenir
sur des décisions prises au niveau local et qu'il lui appartenait, dans
le cadre de son avis sur la compensation financière, de respecter le
contenu des délibérations prises par chacun des
départements.
En revanche, il a considéré que, dès lors que la
réforme serait entrée en application, il n'incomberait pas aux
départements de créer un barème spécifique d'aide
médicale pour les personnes dépassant le niveau de ressources de
3.500 francs par mois et qui ne bénéficieront pas de la CMU.
Il a souligné néanmoins que les départements
conserveraient une capacité d'intervention au titre de l'action sociale
générale qui relève de leur compétence.
S'agissant de l'effet de seuil au-delà du plafond de ressources, il a
rappelé que celui-ci avait toujours existé, même s'il
était variable selon les départements, et il a observé que
l'effet de seuil était amplifié par l'objectif même du
projet de loi, qui est d'instituer une couverture complémentaire au
niveau national.
Il a considéré que si le seuil de 3.500 francs paraissait
trop bas, il appartiendrait à l'Etat de prendre les mesures
nécessaires pour relever le niveau du plafond de ressources, mais que
les départements n'avaient pas pour rôle de pallier les
insuffisances du dispositif d'Etat.
Concernant le coût réel de la prise en charge de la couverture
complémentaire des personnes, relevant actuellement de l'aide
médicale, il a indiqué tout d'abord que le montant de
5,5 millions de francs retenus au titre des dépenses
départementales devait être manié avec prudence dans la
mesure où il s'agissait de dépenses brutes qui
n'intégraient pas certaines compensations. En outre, prenant l'exemple
du département du Rhône, il a rappelé que les
bénéficiaires de l'aide médicale gratuite
présentaient un profil de consommation médicale et pharmaceutique
inférieur à la moyenne. Il a estimé toutefois que le
montant de 1.500 francs retenu pour estimer le coût de la couverture
complémentaire au titre de la CMU était sans doute
sous-évalué, sans même prendre en compte l'effet induit par
la mise en place d'une couverture généralisée sur le plan
national.
S'agissant des relations entre les départements et les communes, il a
rappelé que l'aide médicale devait représenter globalement
en moyenne un peu plus de 10 % de l'assiette du contingent communal d'aide
sociale et il a souligné que les conseils généraux ne
pourraient pas durablement continuer à demander aux communes de
participer à des dépenses liées à une
compétence que les départements n'exerceraient plus.
Constatant par ailleurs qu'il était impossible de déterminer pour
chaque commune quelle était la part du contingent communal imputable
à l'aide médicale, il a estimé inévitable de
supprimer le dispositif des contingents communaux d'aide sociale, qui
apparaissait comme une source potentielle de conflit entre les communes et les
départements.
Il a considéré que l'argument selon lequel le dispositif des
contingents communaux jouerait le rôle d'un " ticket
modérateur des dépenses communales " ne correspondait plus
à la réalité en raison du caractère quasi
automatique des admissions à l'aide sociale.
Il a regretté que l'opacité des modalités de calcul des
contingents ouvre la voie aux critiques de la part des communes.
Il a donc estimé que l'Etat devait organiser la suppression des
contingents communaux d'aide sociale, en assurant une compensation au travers
de la DGD et de la dotation globale de fonctionnement (DGF), afin
d'éviter le risque d'une augmentation de la pression fiscale locale.
M. Bernard Cazeau
a apporté une nuance sur la question de la mise
en place d'aide médicale complémentaire sur l'initiative des
départements, en rappelant que certains conseils généraux
considéraient qu'il ne leur était pas interdit de prendre en
compte l'effet de seuil pour les personnes dont les ressources
excéderaient 3.500 francs de ressources et de traiter sur le
terrain, au cas par cas, ce type de problème.
Concernant le contingent communal d'aide sociale, il a souligné que
cette question devait être traitée rapidement, en même temps
que la mise en oeuvre de la CMU, tout en soulignant qu'il était
impossible de distinguer à l'intérieur du contingent versé
par chaque commune la part relevant de l'aide médicale.
M. Jean Delaneau, président,
a rappelé qu'à la
suite de la délibération du comité des finances locales du
17 mars dernier, un groupe de travail avait été constitué
entre la direction générale des collectivités locales et
les associations d'élus locaux. Il a estimé nécessaire de
se référer aux résultats de ces travaux de concertation.
M. Jean Chérioux
a souligné que le mode de calcul retenu
pour compenser financièrement les transferts de compétence
résultant de la CMU pénalisait les départements qui
avaient mis en place des dispositifs de " carte-santé " en
faveur des personnes à faibles revenus au-delà du montant de
ressources prévu pour l'attribution du RMI. Il a souligné que
l'application de la CMU risquait de défavoriser les personnes qui
entraient dans le champ des dispositifs départementaux actuels mais dont
le niveau de ressources excédait le plafond mis en place par la CMU.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
, après avoir constaté que
la majorité des départements s'était
déclarée favorable à la recentralisation de l'aide
médicale, s'est demandé si la décentralisation de cette
compétence en 1983 avait été, dès l'origine, une
erreur ou si le dispositif décentralisé avait été
fragilisé par l'aggravation de la pauvreté dans notre pays. Elle
s'est interrogée sur la mise en place de fonds locaux d'aide sociale
adossés à des crédits versés par les communes, les
départements et les caisses de sécurité sociale, qui
permettraient de gommer les effets de seuil.
Elle a noté que la prise en compte d'un coefficient de réduction
de 5 % sur le montant des dépenses nettes d'aide médicale
pour le calcul du transfert au titre de la DGD permettrait aux
départements de disposer de crédits pour renforcer les mesures
d'action sociale générale. Elle s'est interrogée sur le
coût de la mise en oeuvre d'un troisième niveau d'aide en faveur
des personnes, au-dessus du seuil de ressources de 3.500 francs.
En réponse,
M. Michel Mercier
a tout d'abord noté que si
l'action des départements au titre de l'aide médicale avait
parfois pu faire l'objet de critiques en raison d'une certaine disparité
des niveaux de prise en charge, la mise en oeuvre de la CMU montrait
aujourd'hui qu'un système d'aide au niveau national soulevait
également des problèmes. A cet égard, il a souligné
que les départements avaient réalisé un effort important
pour assurer un traitement personnalisé des demandeurs de l'aide
médicale et il s'est demandé si l'administration de la
sécurité sociale était aujourd'hui apte à
opérer le " changement culturel " qui serait nécessaire
pour accompagner efficacement les personnes en difficulté qui
demanderaient la CMU.
Concernant le coefficient de réduction de 5 % sur le
prélèvement au titre de la DGD, il a rappelé que la somme
correspondante n'était pas un " gain " pour les
départements mais qu'elle compensait le coût des
dysfonctionnements du dispositif actuel qui aboutissait à ce que les
départements prennent en charge les cotisations d'assurance personnelle
de personnes qui avaient en réalité un droit à prestation
de la sécurité sociale, mais qui avaient dû renoncer
à obtenir l'application de ce droit, du fait de sa complexité
administrative.
De ce point de vue, il a estimé que la mise en place de la CMU pourrait
provoquer des économies si la sécurité sociale effectuait
bien les rapprochements nécessaires pour éviter les doubles
prises en charge.
S'agissant de l'hypothèse de la mise en place de fonds locaux pour
pallier les effets de seuil, il a considéré qu'instaurer de tels
dispositifs reviendrait à contester implicitement le projet de loi et
à souligner ses insuffisances.
M. Charles Descours
s'est demandé si le personnel des caisses de
la sécurité sociale serait motivé pour prendre en charge
dans de bonnes conditions les futurs titulaires de la couverture maladie
universelle.
M. Jean Delaneau, président,
s'est interrogé sur le risque
d'une " sécurité sociale à deux vitesses ", plus
défavorable pour les couches moyennes que pour les personnes
bénéficiant des effets de seuil induits par le RMI ou par la CMU.
M. Bernard Cazeau
a souligné que le mécanisme de la CMU
connaîtrait une période de rodage et qu'il fallait éviter
une approche caricaturale de l'action des services de la sécurité
sociale.
M. Jean Delaneau, président,
a rappelé que la CMU
n'était pas un dispositif expérimental, et qu'il serait
intégralement appliqué au 1
er
janvier 2000.
M. Gilbert Chabroux
a rappelé que l'objectif de la loi
était positif, même si ses modalités étaient
perfectibles. Il a rappelé que la réforme des contingents
communaux d'action sociale devait impérativement éviter
d'entériner les disparités actuelles en matière de calcul
des contingents communaux entre départements et communes.
Prenant l'exemple du département du Rhône où une politique
généreuse en matière d'aide sociale avait produit ses
effets au cours des deux dernières années, il s'est
demandé si le choix de l'année de 1997, pour l'année de
référence d'évaluation des dépenses d'aide
médicale, était la plus réaliste.
M. Alain Vasselle
s'est interrogé sur les conditions dans
lesquelles l'ADF avait pris sa délibération à propos de la
CMU et a rappelé que dans le département de l'Oise, 10 % des
bénéficiaires de l'aide médicale devrait être exclu
du champ de la CMU du fait du seuil de ressources. Il a évoqué le
problème du maintien du personnel administratif à la charge des
départements en soulignant les difficultés de reconversion. Il a
insisté sur la nécessité d'une instruction communale des
dossiers afin de maintenir une analyse personnalisée des demandes.
M. Alain Gournac
a souligné l'importance d'une approche de
proximité pour les plus démunis tout en faisant valoir les effets
pervers du texte pour les personnes au-dessus du seuil de ressources de
3.500 francs. Il a rappelé que les Français devaient
continuer à être conscients du rôle important qui
était joué par les départements en matière d'aide
sociale.
M. Michel Mercier
a rappelé que la concertation au sein des
groupes de travail mis en place par la direction générale des
collectivités locales (DGCL) du ministère de l'intérieur
se poursuivait, en souhaitant que ces travaux puissent déboucher sur une
traduction concrète dans l'actuel projet de loi. Il a souligné
l'avantage que retireraient progressivement les communes, dès lors que
la suppression des contingents communaux serait gagée par une diminution
de la DGF dont le taux d'évolution était beaucoup plus
modéré que celui des dépenses sociales.
Concernant la position de l'ADF, il a rappelé qu'il serait impossible de
demander aux départements, qui avaient respecté les obligations
légales, de supporter une baisse de leur DGD qui serait
supérieure au niveau réel de leurs dépenses d'aide
médicale. Il a donc estimé qu'il était raisonnable de s'en
tenir au respect des décisions qui avaient été prises au
niveau de chaque département.
Il a souligné qu'il serait important que les départements
continuent à jouer un rôle d'action sociale de proximité en
travaillant en amont de la demande de couverture au titre de la CMU.
Il a rappelé, en outre, que l'ADF était très
attachée à l'article 37 novodecies du projet de loi tendant
à imposer un taux directeur opposable aux dépenses des
établissements sociaux médico-sociaux financés par les
départements.
B. AUDITION DE M. DENIS KESSLER, PRÉSIDENT DE LA FÉDÉRATION FRANÇAISE DES SOCIÉTÉS D'ASSURANCE (FFSA), ACCOMPAGNÉ DE M. ANDRÉ RENAUDIN, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL DU GROUPEMENT DES ASSURANCES DE PERSONNES
Puis,
la commission a entendu
M. Denis Kessler, président de la
Fédération française des sociétés
d'assurance
(FFSA), accompagné de
M. André Renaudin,
délégué général du groupement des assurances
de personnes
.
M. Charles Descours, rapporteur,
a souhaité connaître la
position de la FFSA sur le projet de loi portant création d'une
couverture maladie universelle. Il s'est interrogé sur les raisons qui
avaient incité la FFSA à participer à ce dispositif.
Il a demandé à M. Denis Kessler quelle appréciation
la FFSA portait sur le financement du dispositif et a souhaité savoir si
l'évaluation d'un coût de 1.500 francs par
bénéficiaire de la CMU paraissait raisonnable.
Il a souhaité connaître la position de la FFSA sur le fonds
inséré dans le texte par l'Assemblée nationale et
destiné à atténuer les effets de seuil de la CMU ainsi que
sur la définition de l'assiette de la contribution des organismes
complémentaires prévue par le projet de loi. Il a
interrogé M. Denis Kessler sur le protocole d'accord conclu entre
la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés
(CNAMTS), la FFSA et les représentants des mutuelles.
En réponse à M. Charles Descours,
M. Denis Kessler
a
estimé que le projet de loi répondait à une intention
louable, mais reposait sur des modalités qui n'étaient pas
satisfaisantes.
M. Denis Kessler
a observé tout d'abord que la CMU symbolisait
l'échec du revenu minimum d'insertion (RMI), considéré
comme le revenu minimum nécessaire pour répondre aux
dépenses de première nécessité. En créant la
CMU, on reconnaissait implicitement que le RMI était insuffisant pour
assurer le minimum vital.
M. Denis Kessler
a regretté que le Gouvernement ait finalement
choisi, après six mois de concertation avec les organismes de
couverture complémentaire, un dispositif différent de celui sur
lequel les organismes d'assurance et les mutuelles s'étaient
engagés. Il a jugé que l'on ne pouvait, comme le faisait le
Gouvernement, à la fois prôner la concertation et renoncer
à un scénario véritablement partenarial.
Il a considéré que le dispositif du projet de loi se
caractérisait par une confusion des rôles entre les régimes
de base et les organismes de couverture complémentaire. Il a jugé
que cet aspect soulevait un réel problème de conformité au
droit européen.
M. Denis Kessler
a ajouté que le projet de loi allait
entraîner de nombreux autres effets pervers tels que des effets de seuil,
des effets d'aubaine, des effets d'éviction.
Evoquant l'estimation du coût par bénéficiaire de la
protection complémentaire, il a jugé sous-évalué le
montant choisi de 1.500 francs. Il a rappelé que les taux de
remboursement n'étaient pas les mêmes dans tous les régimes
de base de sécurité sociale. Il a jugé indispensable que
soit institué un mécanisme d'évaluation des coûts
réels et que la détermination des taux de prise en charge
complémentaire se fasse en fonction du régime d'affiliation.
Il a indiqué que les organismes d'assurance avaient fait le choix de
participer à la CMU, car l'assurance complémentaire était
précisément leur métier. Il a rappelé que la
couverture de base était prise en charge par la sécurité
sociale et, par conséquent, interdite aux organismes d'assurance. En
revanche, la couverture complémentaire, qu'elle soit
réalisée par des mutuelles ou des sociétés
d'assurance, relevait d'une logique de marché.
Il a souligné que la solution au problème réel que
constituait l'accès aux soins d'une partie de la population aurait
été de solvabiliser cette population afin de lui permettre de
s'adresser à l'organisme complémentaire de son choix.
Evoquant le fonds de financement de la protection complémentaire,
M.
Denis Kessler
a estimé que la présence des
représentants des organismes complémentaires au conseil
d'administration de ce fonds aurait été légitime. Il a
regretté que l'amendement en ce sens présenté par la
commission des affaires culturelles, familiales et sociales de
l'Assemblée nationale ait finalement été rejeté par
cette Assemblée. Il a souligné que les organismes
complémentaires, qui constituaient les financeurs de ce fonds,
demandaient simplement à être représentés au conseil
d'administration de ce fonds, sans y être naturellement majoritaires.
S'agissant du système imaginé par l'Assemblée nationale
pour limiter les effets de seuil,
M. Denis Kessler
a jugé qu'il
s'apparentait à une boutade.
Après avoir estimé que la multiplication des seuils dans la
législation fiscale et sociale semblait une spécialité
française,
M. Denis Kessler
a constaté que toute tentative
pour supprimer un seuil aboutissait inéluctablement à la
création d'un nouveau seuil. Il a indiqué que les
sociétés d'assurance auraient préféré un
mécanisme dégressif de solvabilisation de la demande, grâce
à une aide personnalisée à la santé versée
par les caisses d'allocations familiales, lesquelles connaissaient
déjà les revenus d'une grande partie de la population.
M. Denis Kessler
a souligné que les sociétés
d'assurance n'étaient pas satisfaites de la définition de
l'assiette de la contribution des organismes complémentaires
prévue par le projet de loi, qui comprenait les frais de soins, mais
également les indemnités journalières et
d'invalidité qui ne devraient pas y figurer. Il a rappelé que les
sociétés d'assurance devaient acquitter une taxe de 7 % sur
leurs contrats d'assurance santé et a souhaité que cette taxe ne
s'applique pas à la cotisation de 1,75 % destinée à
financer la couverture complémentaire.
Evoquant la nécessité de préserver la répartition
des rôles entre les différents acteurs de la protection sociale,
M. Denis Kessler
a indiqué que les sociétés
d'assurance, les mutuelles et la CNAMTS avaient signé un protocole
prévoyant que les caisses primaires d'assurance maladie
n'interviendraient pour la couverture complémentaire qu'en cas de
carence des organismes complémentaires.
En réponse à
M. Charles Descours
qui s'interrogeait sur le
coût réel de la couverture complémentaire,
M.
André Renaudin, délégué général du
groupement des assurances de personnes,
a indiqué que le montant de
1.500 francs devait être réévalué. Il a
expliqué que ce chiffre avait été établi à
partir d'un profil de population différent de celui choisi pour la
CMU ; il a également rappelé que les différences
entre la Caisse nationale d'assurance maladie maternité des professions
indépendantes (CANAM) et la CNAMTS en matière de prestations de
base se traduisaient par un coût moyen plus élevé de
500 francs pour les bénéficiaires de la CMU qui
ressortissent de la CANAM.
M. Charles Descours, rapporteur,
a considéré que la
sous-estimation du coût de la couverture complémentaire pouvait
entraîner un désengagement des organismes complémentaires,
qui ne seraient guère incités à accueillir les
bénéficiaires de la CMU. Il a jugé qu'une telle situation
risquait de provoquer un afflux de demandeurs de la CMU dans les caisses
primaires d'assurance maladie (CPAM) et, par conséquent, une
dérive des dépenses de la branche maladie. Il a craint que cette
augmentation des dépenses ne soit pas compensée par l'Etat et
soit constatée dès l'examen du projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 2001.
M. Denis Kessler
a souligné que le projet de loi risquait de
susciter un effet d'éviction : un certain nombre de personnes
cotisant jusqu'ici pour une couverture complémentaire pourraient en
effet bénéficier d'une couverture complémentaire gratuite.
Il a considéré que les conséquences de cet effet
d'éviction seraient particulièrement lourdes pour certaines
sociétés d'assurance et certaines mutuelles.
M. André Renaudin
a confirmé que les petites structures
mutualistes risquaient de rencontrer, de ce fait, de graves difficultés
financières.
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est appelé à débattre d'un projet de loi
portant création d'une couverture maladie universelle dont la
moitié des articles... ne concerne pas la couverture maladie universelle.
Le Gouvernement a en effet choisi, en complétant le texte de son projet
de loi initial par un titre IV intitulé "
Modernisation
sanitaire et sociale
" et comportant six articles, de donner une
légitimité aux multiples amendements relevant de la
catégorie des "
diverses dispositions d'ordre sanitaire et
social
" qui seraient ensuite déposés au Parlement.
Le projet de loi est de surcroît soumis à déclaration
d'urgence qui empêche toute navette avant la réunion d'une
commission mixte paritaire.
Votre rapporteur reviendra sur ce point avec son collègue M. Claude
Huriet, rapporteur des dispositions du titre IV du projet de loi, dans le
tome 2 du présent rapport.
Mais il a souhaité le rappeler ici, les conditions d'examen des deux
volets du projet de loi, la création d'une couverture maladie
universelle et les diverses dispositions d'ordre sanitaire et social
étant affectées par la procédure qu'a cru devoir retenir
le Gouvernement.
Votre commission a procédé, malgré cela, à de
nombreuses auditions et à un travail sérieux qui lui ont permis
d'élaborer un scénario alternatif au projet de loi qui lui est
présenté, d'ambition généreuse mais " mal
ficelé " et porteur de graves dérives, tant sur le plan
financier que pour l'avenir de la sécurité sociale.
A cet égard, elle souhaite que le projet comporte un véritable
dispositif d'évaluation sous la forme d'un bilan annuel de son
application et d'un suivi précis, au sein des comptes sociaux, des
recettes et des dépenses tant de la couverture de base prévue au
titre I du projet de loi que de la couverture complémentaire mise en
place par son titre II.
Votre commission tient à affirmer son attachement au projet de loi tel
qu'il avait été envisagé par M. Jean-Claude Boulard,
parlementaire en mission, dans son rapport publié au mois d'août
1998, plutôt qu'à celui qui a été accepté par
le même M. Jean-Claude Boulard, rapporteur de la commission des Affaires
culturelles, familiales et sociales à l'Assemblée nationale.
Votre commission tient à souligner le paradoxe existant entre, d'un
côté, un projet de loi très généreux, devant
bénéficier à 10 % de la population française
et remédier aux difficultés d'accès aux soins et qui
aurait dû emporter l'adhésion enthousiaste de tous, et les
réactions unanimement réservées ou hostiles de tous les
interlocuteurs et partenaires rencontrés par votre commission, qu'il
s'agisse des associations oeuvrant en faveur des personnes
défavorisées, des représentants des organismes de
protection sociale complémentaire qui avaient initialement
accepté de participer au projet et de le financer, ou des
représentants des régimes de base de l'assurance maladie.
Sans rien enlever à la générosité du projet,
votre commission vous propose de le modifier très sensiblement de telle
sorte que, dépourvu de ses possibles dérives, il puisse
recueillir l'accord de tous.
PREMIÈRE PARTIE
-
LE PROJET
PRÉSENTÉ PAR LE GOUVERNEMENT
Votre
commission estime tout d'abord que le projet généreux du
Gouvernement, fondé sur un double constat, procède aussi d'un
double oubli.
Elle souhaite ensuite évoquer quatre défauts majeurs du projet de
loi, qui ne peuvent être acceptés : il repose sur des erreurs
d'analyse, s'attaque aux fondements de la protection sociale, est
inégalitaire et déresponsabilisant, et porte en germe, à
très court terme, de graves dérives financières.
I. UN PROJET GÉNÉREUX, FONDÉ SUR UN DOUBLE CONSTAT ET UN DOUBLE OUBLI
Le projet de loi du Gouvernement est un projet de loi ambitieux et généreux : il vise à restaurer l'égalité d'accès aux soins, garantie par les principes constitutionnels, en donnant à tous les résidents réguliers l'accès à une couverture de base et à ceux dont les revenus sont les plus faibles une couverture complémentaire gratuite couvrant 100 % des dépenses engagées.
A. UN DOUBLE CONSTAT
1. Environ 150.000 personnes ne bénéficient pas, en pratique, de la sécurité sociale et celle-ci rembourse de plus en plus mal les dépenses de soins
a) 150.000 personnes exclues : une question d'accès aux droits plus que de droits
La
sécurité sociale a été fondée, à la
Libération, sur une logique professionnelle qui était
demandée par tous les acteurs. Le besoin d'universalisation s'est
traduit, au fil des ans, par de nombreuses améliorations
législatives qui ont conduit au rattachement aux régimes
existants de professions non couvertes, à l'élargissement de la
notion d'ayant droit, à l'extension des périodes de maintien des
droits mais aussi à la prise en charge de cotisations d'assurance
maladie pour les bénéficiaires de certaines prestations, à
la définition de droits à l'assurance maladie pour les personnes
au chômage et à l'assouplissement des conditions d'affiliation aux
régimes professionnels.
L'assurance personnelle, pour toutes les personnes ne relevant à aucun
autre titre d'un régime professionnel, et l'aide médicale, pour
celles qui sont dans le besoin, étaient de nature à
" boucler " le dispositif pour assurer, en pratique,
l'universalité de la couverture de base dans des régimes
demeurés professionnels.
Pourtant, quelque 150.000 personnes, aujourd'hui, demeurent dépourvues
de toute couverture de base. Est-ce à dire pour autant qu'elles n'ont
droit à rien ?
Certes, non. Elles doivent pouvoir, si elles ont suffisamment de revenus,
adhérer à l'assurance personnelle et, si elles n'en n'ont pas,
bénéficier de l'aide médicale.
La question est, dès lors, moins une question de droit que
d'accès au droit :
il convient, notamment pour les personnes
défavorisées, voire désocialisées, de
prévoir des mécanismes simples, rapides d'affiliation et des
mécanismes continus d'accès aux droits.
C'est ce qu'ambitionne le projet de loi, dans son titre premier consacré
à l'assurance de base. Supprimant le régime de l'assurance
personnelle pour le transformer en régime de résidence, il
prévoit l'affiliation immédiate et l'immédiateté du
versement des prestations. En dissociant paiement des cotisations et versement
des prestations, il assure en outre la continuité de ces droits.
Le projet de loi procède donc à la simplification des
procédures plutôt qu'à la création d'une
" assurance maladie universelle ".
C'est pourtant à la mise en place d'une telle " assurance maladie
universelle " qu'avait aspiré le précédent
Gouvernement en travaillant à la définition d'une assurance
maladie ouverte à tous et dont les caractéristiques auraient
été harmonisées entre les différents régimes.
Simplification de l'accès au droit, dans le cadre du présent
projet de loi, contre assurance maladie universelle assortie d'une
harmonisation des droits : votre commission aurait, bien entendu,
préféré la seconde solution.
Elle ne critiquera cependant pas le contenu de la première, qui
constitue un moyen utile pour rendre effectifs les droits à l'assurance
maladie.
b) L'assurance maladie n'assure plus, comme le prévoit le premier article du code de la sécurité sociale " la couverture des charges de maladie " : elle devient elle-même un facteur d'exclusion
Selon
une étude réalisée par le service des statistiques, des
études et des systèmes d'information du ministère de
l'emploi et de la solidarité consacrée aux revenus sociaux de
1981 à 1996, la part des revenus sociaux dans le revenu des
ménages a progressé de 3 % par an au cours de cette
période mais la couverture des dépenses de soins par la
sécurité sociale a été ramenée de
76,5 % à 73,6 %.
Cette proportion moyenne cache en outre de profondes disparités :
si l'hospitalisation est globalement très bien prise en charge par la
sécurité sociales, les soins ambulatoires et les biens
médicaux sont très mal remboursés.
|
Total |
Hôpital |
Soins ambulatoires |
Biens médicaux |
Financement socialisé |
81,4 |
92,2 |
69,3 |
71,5 |
Sécurité sociale |
73,5 |
88,9 |
57,5 |
57,8 |
Etat et collectivités locales |
0,9 |
1,0 |
0,7 |
0,7 |
Mutuelles |
7,0 |
2,3 |
11,1 |
13,0 |
Assurances et institutions de prévoyance |
4,7 |
1,4 |
8,2 |
8,4 |
Ménages |
13,8 |
6,4 |
22,6 |
20,1 |
Source : SESI, chiffres 1996
Ce tableau permet de dresser trois conclusions :
1/ Il est aujourd'hui indispensable, en France, d'être couvert par
une mutuelle, une société d'assurance ou une institution de
prévoyance,
non seulement si l'on considère l'ensemble
des dépenses de santé, prises en charge à hauteur de
11,7 % par ces trois types d'organismes, mais aussi, en leur sein :
- pour les soins ambulatoires et les biens médicaux : la prise en
charge par les organismes de protection sociale complémentaire
s'élève, en effet, respectivement à 19,3 % et
à 21,4 % ;
- mais également, pour les soins hospitaliers. En effet, si la prise en
charge des dépenses y afférentes par la sécurité
sociale est plus élevée, les 10,1 % de frais qui demeurent
à la charge des ménages représentent des sommes
très élevées, en valeur absolue. De fait, les organismes
de protection sociale complémentaire interviennent pour 3,7 %,
laissant 6,4 % des dépenses à la charge des ménages.
2/ Même après l'intervention des organismes de protection
sociale complémentaire, 13,8 % des dépenses de santé
demeurent à la charge des ménages.
Ainsi, sur une moyenne
de 12.015 francs dépensés annuellement, malgré
l'intervention de la sécurité sociale et des mutuelles et
assurances pour l'intervention desquelles les Français paient des
cotisations, des impôts et des primes, environ 1.700 francs demeurent
à leur charge.
3/ La sécurité sociale, paradoxalement, devient facteur
d'exclusion et d'inégalité.
Ainsi, beaucoup de
résidents acquittent, en tant que salariés ou
indépendants, des cotisations et la CSG mais, dépourvus de
couverture complémentaire, ils ne peuvent en pratique accéder
à tous les soins ou acquérir tous les biens médicaux dont
ils auraient besoin.
Ils paient donc en pure perte ces contributions, ne pouvant accéder aux
soins pour lesquels ils ne bénéficient que d'une couverture
très partielle.
Pour justifier les dispositions du projet de loi, le Gouvernement a
cité, dans l'étude d'impact, des chiffres selon lesquels
17 % de la population française déclarent avoir
renoncé à des soins pour des raisons financières au cours
de l'année précédente. Ces chiffres doivent être
avancés avec prudence : il conviendrait plutôt en effet de
connaître la proportion de Français ayant renoncé pendant
longtemps à des soins utiles, proportion qui n'est certainement pas
négligeable mais qui ne peut être chiffrée avec
précision.
De même, les autres chiffres cités par le Gouvernement selon
lesquels la consommation médicale de ville des plus démunis est
inférieure à la moyenne ne veut pas dire grand chose dans
l'absolu. Il conviendrait plutôt de démontrer que la consommation
médicale moyenne des plus démunis est inférieure à
celle qui serait nécessaire pour satisfaire les besoins utiles de
prévention et de soins.
2. Tous les résidents ne bénéficient pas encore d'une couverture complémentaire
a) Le taux de couverture est inégal
Si la
part des résidents couverts par une assurance complémentaire
santé a très sensiblement augmenté depuis 20 ans,
parallèlement à l'élévation du niveau de vie
-notamment des retraités- et surtout du désengagement de la
sécurité sociale dans la prise en charge des dépenses de
santé, ce taux de couverture est très inégal en fonction
des statuts (salarié ou non, contrat à durée
indéterminée ou non) et des niveaux de revenus.
Ainsi, si l'on considère les professions, 90 % des cadres
supérieurs bénéficient d'une couverture
complémentaire, contre 82 % environ des ouvriers qualifiés
et des artisans commerçants, et 70 % pour les ouvriers non
qualifiés.
Toutefois, sur 100 personnes ne bénéficiant pas d'un contrat
complémentaire, 13 % bénéficient de l'aide
médicale gratuite, 10 % d'une prise en charge à 100 %
par la sécurité sociale pour les dépenses liées
à une affection de longue durée, et 2 %
bénéficient à la fois des " 100 %
sécurité sociale " et de l'aide médicale gratuite.
Les difficultés d'accès aux soins ne se rencontrent donc pas chez
tous les résidents dépourvus d'une couverture
complémentaire mais, ce qui est déjà beaucoup trop, chez
les trois quarts d'entre eux.
Si l'on s'intéresse aux inégalités de couverture en
fonction des revenus, des enquêtes du CREDES ont montré que sont
couverts :
- 47 % des personnes disposant de revenus par unité de
consommation inférieurs à 2.000 francs par mois ;
- 72 % pour un revenu mensuel compris entre 2.000 et 3.000 francs par
unité de consommation ;
- et 91 % pour des revenus supérieurs à 3.000 francs.
Il est intéressant d'observer que, dans la première
catégorie (revenus inférieurs à 2.000 francs), la
couverture complémentaire résulte d'une initiative personnelle,
et non pas de celle d'une entreprise.
b) Beaucoup de personnes, dépourvues de couverture complémentaire, ne peuvent accéder aux soins
Les
chiffres fournis par des associations comme Médecins du monde sont,
à cet égard, édifiants : ils montrent que des
personnes qui ne sont, a priori, pas désocialisées peuvent,
à la suite d'un accident de la vie ou parce qu'elles ne disposent pas de
couverture complémentaire, accéder aux soins dans des conditions
de droit commun. Ainsi, 40.000 patients ont fréquenté, en 1996,
les dispensaires ouverts en France à l'initiative de cette association,
soit 30 % de plus qu'en 1995.
Si l'on examine de près les caractéristiques sociales de ces
personnes, on observe que :
- 20 % ont fait des études jusqu'au collège ;
- plus de 12 % ont fait des études supérieures ;
- un quart d'entre eux bénéficient d'une couverture maladie de
base, mais ne peuvent faire face à l'avance de frais ou à
l'absence de remboursements complémentaires.
Il est ainsi particulièrement injuste et choquant, à l'aube du
troisième millénaire et compte tenu de l'ampleur des
prélèvements sociaux en France, que la protection sociale soit
aussi peu efficace et laisse autant de personnes au bord du
chemin.
B. UN DOUBLE OUBLI : LES AVANCÉES PERMISES PAR L'ASSURANCE PERSONNELLE ET L'AIDE SOCIALE
" Nous ne voulons pas non plus d'un système de
type
" féodal ", comme les associations appellent l'aide
médicale, qui conduit à traiter les cas à la tête du
client et qui impose au demandeur d'expliquer sa situation dans le
détail, de se mettre à nu et parfois à plusieurs reprises
pour obtenir satisfaction "
(Martine Aubry, ministre de l'emploi et de
la solidarité, JO Débats AN, mercredi 28 avril 1999, p. 3651)
" Le mécanisme d'affiliation à l'assurance personnelle
avec prise en charge des cotisations par un tiers est stigmatisant "
Dossier de presse du ministère.
Afin de mieux souligner les progrès que devrait entraîner
l'adoption du projet de loi, les documents fournis par le ministère
(dossier de presse, étude d'impact), comme le discours du ministre,
dénoncent à loisir les défauts du système existant,
sans d'ailleurs toujours apporter la preuve que le nouveau dispositif sera plus
efficace pour ses bénéficiaires. Cette critique
ministérielle concerne à la fois l'assurance personnelle et
l'aide médicale.
1. L'assurance personnelle
a) Un dispositif dont le défaut essentiel tient au taux de cotisation exigé ; mais ce défaut ne concerne que cinq pour cent de ses bénéficiaires
Depuis
1978, date de la généralisation de l'assurance maladie,
" toute personne résidant en France et n'ayant pas droit
à un titre quelconque aux prestations en nature d'un régime
obligatoire d'assurance maladie et maternité relève du
régime de l'assurance personnelle. (...) L'adhésion peut
intervenir à tout moment. "
(art. L. 741-1 du code de la
sécurité sociale).
Ce régime a été conçu comme devant, non seulement
assurer le " bouclage " de l'universalisation d'une
sécurité sociale, fondée sur des régimes
professionnels, mais aussi la " continuité " entre ces
différents régimes.
Ainsi, l'article L. 741-3 du code de la sécurité sociale dispose
que
" lorsqu'une personne cesse de remplir les conditions
exigées pour être assujettie à l'assurance maladie et
maternité d'un régime obligatoire, l'organisme auquel elle
était affiliée en dernier lieu en informe immédiatement la
personne concernée et le régime de l'assurance personnelle qui,
sauf refus de l'intéressé, exprimé dans un délai
déterminé, procède à son affiliation ".
L'adhésion à l'assurance personnelle qui est obligatoire (art.
L. 741-3-1) pour les personnes concernées, entraîne
l'assujettissement à des cotisations fixées en pourcentage du
revenu imposable.
Les taux de cotisations au 1
er
janvier 1999 s'établissent
à :
- 3,35 % dans la limite du plafond de la sécurité sociale,
- 11,70 % dans la limite de cinq fois le plafond.
Pour un revenu inférieur au plafond de la sécurité
sociale, cette cotisation représentera donc 15,05 % du revenu, ce
qui est un taux élevé.
Cette critique est d'autant plus justifiée que la cotisation annuelle ne
peut être inférieure à un minimum fixé à
12.723 francs au 1
er
janvier 1999.
Cependant, cette critique porte sur un défaut qui ne concerne, en
pratique, que très peu de bénéficiaires de l'assurance
personnelle. En effet, sur environ 640.000 affiliés :
- 590.000, soit 91 %, voient leurs cotisations prises en charge par des
tiers, c'est-à-dire :
. par les conseils généraux ou l'Etat pour les
bénéficiaires de l'aide médicale (400.000 personnes) ;
. par les caisses d'allocations familiales pour les titulaires de prestations
familiales (140.000 personnes) ;
. par le fonds de solidarité vieillesse pour les titulaires du minimum
vieillesse (50.000 personnes).
Votre commission ne comprend pas, à cet égard, en quoi cette
prise en charge des cotisations par des tiers est " stigmatisante "
pour ses bénéficiaires, comme l'affirme le dossier de presse...
- 25.000 personnes sont soumises à une cotisation forfaitaire qui
s'élève, pour les élèves d'établissements
d'enseignement secondaire âgés de moins de 26 ans, à
1.050 francs et, pour les jeunes de moins de 27 ans, à
1.300 francs. Ces cotisations forfaitaires s'apparentent, par leur
montant, à la cotisation au régime étudiant.
En fait, si l'on excepte les 3.000 personnes redevables de la cotisation
maximale de 104.576 francs, dont on ne peut pas penser qu'elles sont les
plus défavorisées, les personnes acquittant une cotisation, soit
proportionnelle au revenu, soit une cotisation minimale, sont un peu moins de
30.000, représentant ainsi 5 % des bénéficiaires du
régime d'assurance personnelle.
b) Le nouveau " régime de résidence " créé par le projet de loi présente beaucoup de similitudes avec celui de l'assurance personnelle
Le
nouveau régime institué par le projet de loi présente bien
des similarités avec celui de l'assurance personnelle. Ainsi, l'article
L. 380-1 nouveau institué par le projet de loi est quasiment identique
à l'article L. 741-1, relatif à l'assurance personnelle,
supprimé par le projet de loi.
La véritable nouveauté introduite dans le nouveau régime
de résidence est l'existence d'un plafond de ressources en
deçà duquel il ne sera pas demandé de cotisation, et
l'abattement, d'une valeur égale au plafond, auquel il sera
procédé pour calculer le revenu auquel sera appliqué le
taux de cotisation proportionnel prévu par le projet de loi.
Votre commission approuve cette disposition, favorable aux personnes disposant
des revenus les plus faibles, avec toutefois deux critiques :
- la première est la situation d'inégalité dans laquelle
seront placées les personnes affiliées à titre
professionnel à d'autres régimes que le régime de
résidence : ces dernières seront appelées à
verser une cotisation au premier franc, alors que celles qui relèvent du
régime de résidence en seront exonérées ;
- la seconde concerne le plafond de ressources retenu et, surtout le taux de
cotisation qui sera fixé. Si le Gouvernement a annoncé que ce
plafond, et donc aussi l'abattement, qui sera fixé par décret,
sera égal à 3.500 francs (il ne s'agit pas ici d'un revenu
" par unité de consommation ", mais du revenu de la personne
qui souhaite être affiliée au titre de la résidence). Les
documents transmis au Parlement ne mentionnent pas le taux de cotisation qui
sera fixé.
En réponse à une question de votre rapporteur, le ministre a
toutefois indiqué que le taux de cotisation retenu serait voisin de
10 %. Même avec un abattement de 3.500 francs sur les ressources
prises en compte, ce taux demeure élevé pour les personnes
titulaires de faibles revenus.
2. L'aide médicale des départements
Le
dossier de presse et les propos du ministre laissent à penser que le
projet de loi assurerait désormais la couverture de 6 millions de
personnes, alors que 2,5 millions de personnes seulement en
bénéficieraient aujourd'hui au titre de l'aide médicale.
Sans vouloir minorer la portée de la CMU, ce chiffre de 2,5 millions de
personnes doit être pourtant apprécié avec prudence.
D'une part, en effet, il résulte d'une enquête, à laquelle
20 départements n'ont pas répondu en ce qui concerne les
bénéficiaires du RMI et 68 départements n'ont pas
répondu en ce qui concerne les autres bénéficiaires.
D'autre part, ce nombre de 2,5 millions de personnes correspond à
celles qui sont prises en charge à 100 % par l'aide médicale.
Le bilan de l'aide médicale, à laquelle les départements
consacraient, en 1997, plus de 9 milliards de francs (l'aide médicale
d'Etat représentant, à la même date, 800 millions de
francs) est globalement très satisfaisant, si l'on excepte la
réserve, importante, de l'insuffisante homogénéité
de la couverture inhérente à un système
décentralisé. Il faut toutefois atténuer la portée
de cette réserve, des départements où le coût de la
vie est élevé prenant en charge les bénéficiaires
jusqu'à des niveaux de revenus supérieurs à ceux
acceptés dans d'autres départements où la vie est moins
chère.
Les procédures d'admission à l'aide médicale ont
été réformées par les titres II et III de la loi
n° 92-722 du 29 juillet 1992.
Les innovations de la réforme de l'aide médicale se sont
traduites par :
* un accès élargi à l'aide médicale, en raison
de :
- l'admission de plein droit, pour la prise en charge, au titre de l'aide
médicale, des cotisations d'assurance personnelle pour les
bénéficiaires du RMI, de l'allocation de veuvage, et pour les
jeunes de 17 à 25 ans qui répondent aux conditions de revenu
prévues pour l'octroi du RMI,
- l'admission de plein droit des bénéficiaires du RMI et de
l'allocation de veuvage pour la prise en charge du ticket modérateur et
du forfait journalier,
- l'instauration d'un barème de revenu pour l'admission de plein droit
à l'aide médicale totale,
- la prise en compte des charges dans l'admission de droit commun,
* l'extension du droit à l'aide médicale, avec la suppression de
la distinction antérieure (sauf pour les personnes de nationalité
étrangère en situation irrégulière) entre aide
médicale à domicile et aide médicale hospitalière,
l'instauration d'une durée d'un an et la prise en charge étendue,
outre le demandeur, aux personnes qui sont à sa charge et à son
conjoint ;
* une simplification de la procédure d'admission, par la
réduction des délais d'instruction résultant du transfert
du pouvoir de décision du préfet au président du conseil
général et la possibilité de déposer son dossier,
soit au conseil général, soit dans les centres communaux d'aide
sociale, soit dans les CPAM ou dans des organismes agréés.
Une enquête effectuée par l'ODAS publiée le 1
er
décembre 1998, a effectué un bilan de l'aide médicale.
Il en ressort une progression considérable du nombre des
bénéficiaires de l'assurance personnelle qui est passé de
160.000 ménages en 1989 à 255.000 en 1997 et aussi du nombre de
bénéficiaires du RMI qui est passé de
422.000 ménages en 1990 à 957.0000 ménages en 1997.
Ce bilan a aussi montré que les délais d'admission sont, en
règle générale, relativement brefs :
- 60 % des départements prononcent l'admission dans les huit
jours ;
- et 75 % la prononcent dans les quinze jours pour les
bénéficiaires de plein droit.
Pour les autres bénéficiaires, l'ODAS indique que les
délais sont plus inégaux mais que, dans 60 % des cas, la
délivrance d'un titre provisoire est prévue pour éviter
l'avance de frais.
L'étude montre ensuite que le titre d'accès aux soins est une
" carte santé " dans 70 % des départements,
l'accès à l'aide médicale étant mentionné
sur la carte d'assuré social dans les autres départements.
En ce qui concerne la durée d'admission, l'ODAS indique qu'elle est
supérieure à un an dans neuf départements. Enfin, plus
d'un département sur deux effectue une prise en charge au-delà
des tarifs de la sécurité sociale, notamment en matière de
prothèses dentaires et d'optique.
L'ODAS conclut ainsi cette étude:
" Sous la double influence d'une volonté de modernisation de
l'aide sociale et d'une meilleure protection des droits des plus
démunis, l'aide médicale a profondément
évolué dans notre pays depuis dix ans. N'échappent
théoriquement aujourd'hui au bénéfice du dispositif
d'accès aux soins que des personnes en situation
irrégulière au regard des lois sur l'immigration, des personnes
refusant explicitement ou implicitement l'instruction de leur droit, et des
jeunes de moins de 25 ans.
" Et même si certains départements paraissent moins
engagés que d'autres sur l'aide médicale, il faut relever
qu'aucun d'entre eux ne cumule l'ensemble des dysfonctionnements.
" En outre, les arguments ne manquent pas pour promouvoir une
évolution sur le plan, notamment, du développement de la
protection sociale au détriment de l'aide sociale, de la simplification
gestionnaire, et du renforcement de la citoyenneté.
" Si les propositions du rapport Boulard rencontrent un accueil
plutôt favorable, il reste cependant à vérifier la
capacité des caisses de sécurité sociale à prendre
en charge les difficultés spécifiques aux familles
précarisées. "
II. UN PROJET DE LOI QUI COMPORTE QUATRE DÉFAUTS MAJEURS
Le
projet de loi présenté par le Gouvernement, et que
l'Assemblée nationale n'a modifié qu'à la marge,
présente quatre défaut majeurs :
- il propose des solutions qui révèlent une erreur
d'analyse ;
- il s'attaque aux fondements de la sécurité sociale ;
- il induit inégalités et déresponsabilisation ;
- il n'est maîtrisé ni dans son coût ni dans ses
conséquences.
A. IL PROPOSE DES SOLUTIONS QUI RÉVÈLENT UNE DOUBLE ERREUR D'ANALYSE
1. Il place hors de notre système de protection sociale, au lieu de les y intégrer, un ensemble de 6 millions de personnes, alors qu'elles ne constituent pas un groupe homogène de personnes " à part "
Le
projet de loi propose de placer 10 % de la population dans un
système de protection sociale " bis ", dont tous les
éléments sont dérogatoires au droit commun.
Il s'agit d'un système de couverture complémentaire :
- entièrement gratuit,
- mis en oeuvre, au choix du bénéficiaire, par les organismes de
protection sociale complémentaire ou par les organismes de base (CPAM,
organismes de la CANAM, MSA) ;
- qui rembourse à 100 %, non seulement le ticket modérateur,
le forfait journalier sans aucune limitation de durée, et des biens
médicaux sélectionnés par l'Etat, qui seront
proposés aux bénéficiaires de la CMU ;
- qui contraint les producteurs de biens et services médicaux à
proposer des tarifs en fonction du revenu de leur client ;
- qui prévoit la résiliation de plein droit des contrats
souscrits par des personnes qui, avant de bénéficier de la
protection complémentaire en matière de santé, avaient
fait le choix d'adhérer ou de souscrire à une protection
complémentaire de droit commun.
Cette couverture complémentaire bénéficiera, selon le
Gouvernement, à 6 millions de personnes, soit 10 % de la
population.
Cette estimation repose sur l'exploitation de l'enquête " Panel
européen " de l'INSEE, qui évalue à 5,7 millions
le nombre de personnes qui disposent, aujourd'hui, d'un revenu par unité
de consommation inférieur à 3.500 francs, et
l'intégration d'une estimation du nombre de personnes dans cette
situation qui résident dans les DOM.
Ces 10 % de la population ne constituent pas, pour votre commission, un
groupe homogène de personnes " accidentées de la vie "
qu'un souci de justice sociale justifierait qu'on les plaçât dans
un régime hors du droit commun.
Ainsi, parmi ces six millions de personnes, on trouve les personnes
rémunérées au-delà du SMIC (jusqu'à 6.300
francs net) avec un enfant, des ménages dont les deux personnes qui le
constituent travaillent à temps partiel (le plafond retenu par le
Gouvernement est de 5.250 francs pour deux personnes), des
retraités agricoles ou de l'artisanat...
C'est aussi bien sûr dans ces six millions de personnes que se trouvent
les bénéficiaires du RMI et les personnes les plus pauvres, les
plus désocialisées, auxquelles il faut apporter des solutions
spécifiques.
Mais en aucun cas, ces six millions de personnes ne sont placées dans
une situation qui justifierait qu'on leur propose une solution hors du droit
commun : l'immense majorité de ce groupe ne demande qu'une chose,
l'intégration au droit commun, avec une solvabilisation leur permettant
d'être " comme les autres ", y compris dans le domaine de la
protection sociale.
2. En raisonnant d'une manière statique, les auteurs du projet de loi estiment que la CMU comblera les carences de notre système de protection sociale, alors qu'elle contribuera à emballer le cercle vicieux qui la mine
Depuis
des années, faute de réformes structurelles suffisantes, à
l'exception des ordonnances d'avril 1996 dont la mise en oeuvre
mériterait d'être accélérée, notre protection
sociale est minée par un cercle vicieux qui n'a pas, pour l'instant,
été stoppé : l'augmentation continue des
dépenses et le tassement des recettes dus au chômage concourent
à l'aggravation des déficits de la sécurité
sociale, qui se traduit par des déremboursements et donc des
difficultés accrues d'accès aux soins ainsi que par des
augmentations de cotisations qui contribuent à aggraver le
chômage, et donc les déficits...
La sécurité sociale devient de plus en plus
dépensière et de plus en plus chère, donc de moins en
moins efficace, tout en contribuant à dégrader la situation de
l'environnement économique extérieur à la protection
sociale.
En raisonnant de manière statique, on pourrait penser qu'il suffit,
à la date " t ", de proposer une solution à tous les
exclus de l'assurance maladie et de la couverture complémentaire pour
apporter une solution au problème posé.
Or, la solution que dessine le présent projet de loi doit être
intégrée dans un raisonnement dynamique. Celui-ci montre que, non
seulement la CMU n'apportera pas de réponse satisfaisante au
problème posé, mais qu'elle contribuera à aggraver le
cercle vicieux qui marque l'évolution de la sécurité
sociale depuis de nombreuses années.
D'une part, en effet, la création de la CMU et donc, l'existence d'une
solution pour toutes les personnes qui ne peuvent pas s'offrir de protection
complémentaire, amoindrira les scrupules des gouvernements lorsqu'ils
seront tentés, en raison de la persistance des déficits, à
décider des " déremboursements " ou des diminutions des
taux de remboursement de la sécurité sociale, ce qui rendra, non
seulement de plus en plus nécessaire de bénéficier d'une
couverture complémentaire, mais aussi de plus en plus onéreux les
contrats de couverture complémentaire.
Deux autres facteurs contribueront au renchérissement de ces
contrats : la taxe instituée par le projet de loi sur les
organismes complémentaires, fixée pour l'instant à
1,75 % de leur chiffre d'affaires santé, et l'éventuel
surcoût de la couverture complémentaire CMU par rapport au forfait
de 1.500 francs par personne et par an que le projet de loi prévoit de
rembourser aux organismes de protection sociale complémentaire. De plus
en plus de personnes seront, en pratique, exclues de la couverture
complémentaire.
Il ne faut pas négliger non plus les effets désincitatifs au
travail, et au travail déclaré, induits par l'effet de seuil
massif que provoquera la création de la CMU : en deçà
d'un revenu de 3.500 francs par unité de consommation, la santé
sera gratuite sans cotisation alors qu'au-delà, elle sera
" payante " avec cotisation. Cet effet désincitatif aura un
impact sur la situation du chômage, et aussi sur celui des recettes de
l'assurance maladie, renforçant ainsi le cercle vicieux qui conduit
à des cotisations de plus en plus élevées et des
remboursements de plus en plus faibles...
En proposant une mauvaise solution au problème posé, le projet de
loi va aggraver les défauts de notre système et créer un
besoin de " toujours plus de CMU ".
B. IL S'ATTAQUE DOUBLEMENT AUX PRINCIPES FONDATEURS DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
D'une part, en mettant un terme au monopole des organismes de protection complémentaire pour la couverture complémentaire, il conduit à s'interroger sur la justification du monopole des organismes d'assurance maladie pour la couverture de base. D'autre part, il institue une couverture maladie " sous condition de ressources ", contraire au principe assurantiel et au caractère d'universalité affirmés sans discontinuer depuis la création de la sécurité sociale.
1. Supprimant le monopole de la couverture complémentaire, il conduit à s'interroger tôt ou tard sur la légitimité du monopole de l'assurance de base
Renonçant au scénario dit
" partenarial "
proposé par M. Jean-Claude Boulard, parlementaire en mission, qui
était également unanimement souhaité par les organismes de
sécurité sociale de base, les mutuelles, les institutions de
prévoyance et les sociétés d'assurance, le projet de loi
propose une solution qui fait intervenir les régimes de base dans la
couverture complémentaire de 10 % de la population française.
Désormais, les CPAM comme les organismes de protection sociale
complémentaire qui le souhaitent -ou qui n'ont pas d'autre choix, si la
création de la CMU conduisait à leur faire perdre un nombre
significatif de cotisants désormais susceptibles d'en
bénéficier- proposeront un produit identique, se
caractérisant par des prestations gratuites financées par un
fonds alimenté par des subventions de l'Etat c'est-à-dire par
l'impôt.
Quelle sera donc, demain, la différence de nature entre, d'un
côté, un régime de base servant des prestations
financées par la collectivité solidaire et un régime
complémentaire servant aux bénéficiaires de la CMU
d'autres prestations financées par la même collectivité
solidaire ?
Or, c'est bien une différence de nature entre les deux catégories
d'assurance de base et complémentaire, qui a conduit la cour de justice
des communautés européennes (arrêt Garcia, 26 mars
1999) à limiter le champ d'application du principe de la liberté
d'assurance au seul domaine de l'assurance complémentaire.
En créant la CMU, il est à craindre que le Gouvernement ait
ouvert une brèche dans le monopole des régimes obligatoires pour
l'assurance maladie de base.
C'est probablement les conséquences d'un tel " mélange des
genres " que craignent aujourd'hui les représentants des
régimes de base en émettant des réserves sur les
modalités de gestion de la CMU telle que prévue par le projet de
loi.
2. Il instaure une assurance maladie " sous condition de ressources "
Comme
l'a affirmé M. Jean-Marie Spaeth, président de la CNAMTS, devant
votre commission, les personnes bénéficiaires de la CMU qui
auront choisi, par souci de simplicité, que la CPAM assure leur
couverture complémentaire, ne se souviendront pas que celle-ci,
juridiquement, n'interviendra que par " délégation de
l'Etat " : ils constateront simplement qu'ils sont " couverts
à 100 % " par la sécurité sociale.
Cette nouveauté induit un bouleversement majeur dans les principes
fondateurs de la sécurité sociale qui, depuis la
Libération, associent assurance et universalité.
Le principe d'assurance sociale repose sur une logique d'indemnisation du
risque : plus celui-ci est élevé, plus le remboursement est
important. C'est l'application de ce principe qui a conduit à instituer
des remboursements proportionnels aux dépenses engagées. C'est ce
principe aussi qui justifie que les dépenses d'hospitalisation, qui
correspondent à un risque élevé, sont mieux
remboursées que les dépenses de ville. C'est enfin en vertu de ce
principe qu'a été institué le remboursement à
100 % des dépenses liées au traitement des affections de
longue durée.
Le principe d'universalité garantit des remboursements identiques pour
tous : les remboursements ne dépendent ni de la personne, ni de son
lieu de résidence, ni de ses revenus.
La combinaison de ces deux principes conduit, pour les maladies de longue
durée, à un " 100 % sur critère
médical ". Elle ne saurait autoriser un " 100 %
social ", comme le fait la CMU, sauf à faire de la
sécurité sociale, non plus un assureur, mais un instrument de
redistribution des revenus.
Lorsqu'en 1997, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la
solidarité, a voulu placer les allocations familiales sous condition de
ressources, de nombreux parlementaires, de nombreux gestionnaires de la
sécurité sociale, s'opposant à cette mesure, ont
lancé un avertissement, en disant que, si l'on n'y prenait garde,
l'assurance maladie aussi pourrait être placée sous condition de
ressources !
De ce point de vue, la création de la CMU remet en cause l'un des
fondements du contrat social mis en oeuvre à la Libération, ainsi
que les institutions de protection sociale qui en sont
dépositaires.
C. IL EST INÉGALITAIRE ET DÉRESPONSABILISANT
La solution proposée par le projet de loi pour répondre au grave problème posé par les difficultés de l'accès aux soins rencontrées par les personnes titulaires de faibles revenus est inégalitaire et déresponsabilisante.
1. Il induit des inégalités
Les inégalités induites par le projet de loi sont nombreuses et graves.
a) Les inégalités entre résidents liées à l'effet de seuil
Le
projet de loi crée une nouvelle inégalité entre les
personnes dont les revenus se situent en dessous du seuil et celles dont les
revenus sont également voisins du seuil, mais au-dessus.
Ces personnes, qui ne sont pas favorisées, ont les mêmes
conditions de vie : ce n'est pas, en effet, une différence de
revenus de 100, 200 ou 300 francs qui est de nature à modifier
sensiblement les conditions d'existence.
Pourtant, ces personnes seront traitées différemment par le
projet de loi : au-dessus du seuil, elles paieront des cotisations
mutualistes ou des primes d'assurance pour obtenir une couverture
complémentaire qui ne couvrira pas toutes leurs dépenses de
santé alors qu'en dessous du seuil, elles seront gratuitement prises en
charge à 100 %.
Le projet de loi crée aussi une inégalité entre les
résidents en fonction de la connaissance plus ou moins précise de
leurs revenus : avec un tel effet de seuil, il peut être assez
tentant, lorsqu'on en a la possibilité, de dissimuler des revenus
à hauteur de quelques centaines de francs...
b) Les inégalités entre organismes de protection sociale complémentaire et les CPAM
En
laissant aux bénéficiaires de la CMU le choix de s'adresser, pour
leur protection complémentaire, aux CPAM ou aux organismes de protection
sociale complémentaire, le projet de loi n'a pas pour autant
créé des conditions de concurrence égalitaires entre ces
différents organismes.
D'abord, en effet, il est probable que, par souci de simplicité, les
bénéficiaires de la CMU préféreront, en grande
majorité, s'adresser au même organisme que celui qui assure aussi
leur couverture de base : il y a là une première atteinte
à l'égalité, tous les organismes ne pouvant pas offrir les
mêmes produits.
Ensuite, le projet de loi ne prévoit pas un même système de
remboursement, par le fonds, des dépenses engagées au titre de la
couverture complémentaire des bénéficiaires de la
CMU : alors que les régimes d'assurance maladie seront
remboursés au franc le franc, les organismes de protection sociale
complémentaire recevront un forfait de 1.500 francs par personne et
par an supposé être représentatif du montant des
prestations versées.
Il faut rappeler, enfin, que seuls les organismes de protection sociale
complémentaire seront appelés à acquitter la contribution
de 1,75 % du chiffre d'affaires santé instituée par la
présente loi.
c) Les inégalités entre organismes de protection sociale complémentaire
Les
représentants des organismes de protection sociale complémentaire
entendus par votre commission ont affirmé qu'un nombre significatif de
leurs adhérents ou souscripteurs relèveront, à compter de
la promulgation de la loi, de la CMU. Cette proportion de
bénéficiaires potentiels de la CMU dans le nombre total
d'adhérents a été estimée, en moyenne, à
10 %, certains organismes devant perdre jusqu'à 20 ou 30 % de
leurs ressortissants " payants ". Il est clair que ces organismes
n'auront pas le choix, et devront s'inscrire sur la liste de ceux qui
participent au dispositif CMU, sauf à perdre le quart ou le tiers de
leurs adhérents.
Plus grave, certains organismes complémentaires sont, en pratique,
spécialisés dans la couverture complémentaire des artisans
et commerçants. Or, compte tenu du niveau de remboursement de la CANAM,
qui est plus faible que celui de la CNAMTS, la couverture complémentaire
d'un artisan ou d'un commerçant coûte plus cher que celle d'un
salarié.
Elle coûtera donc beaucoup plus cher que le forfait de 1.500 francs,
déjà sous-estimé en moyenne (cf. infra) : ces
organismes de protection complémentaire se verront donc imposer
d'importantes charges nouvelles, s'ajoutant à la contribution de
1,75 % du chiffre d'affaires instituée par le projet de loi. Le
poids de ces charges nouvelles les mettra sans nul doute en difficulté
et pourrait même menacer leur avenir.
2. Il est déresponsabilisant
" Il est vrai qu'une contribution, dans bien des
domaines,
est un moyen de faire appel à la responsabilité. "
(Mme
Martine Aubry, JO Débats AN, 2
ème
séance du 27
avril 1999, p. 3652).
Le Gouvernement a choisi, dans le présent projet de loi, d'assurer
gratuitement, sans aucune contribution de leur part, une couverture
complémentaire à 100 % à 6 millions de
Français, soit 10 % de la population.
Cette solution ne correspond pas aux propositions qui avaient été
faites au Gouvernement par M. Jean-Claude Boulard, parlementaire en mission.
Celui-ci avait en effet affirmé sa préférence, comme votre
commission le fait ici, pour une allocation personnalisée à la
santé qui "
ne doit pas nécessairement couvrir la
totalité du coût de la couverture
".
M. Jean-Claude Boulard indiquait d'ailleurs, dans son rapport, que
" l'effort contributif, même limité, est une valeur du
monde mutualiste qu'il convient de prendre en compte. Contribuer, même
faiblement, est une composante de l'insertion ".
Cette solution n'a pas été retenue par le Gouvernement, qui a
avancé, pour s'y opposer, des prétextes d'ordre technique. Le
ministre a ainsi (justement) affirmé qu'il serait très
onéreux de tenter de recouvrer 30 ou 40 francs par mois, et que
l'on ne pourrait "
refuser des soins à une famille au motif
qu'elle n'aurait pas déboursé les 30 ou 40 francs qu'elle devrait
payer par mois
".
Ces obstacles techniques ne valent, en fait, que si l'on renonce à la
création d'une allocation personnalisée à la santé
reçue par les bénéficiaires, même avec
possibilité d'affectation, et que si l'on raisonne en termes de
" droits ouverts ", sans démarche responsabilisante
d'adhésion à une couverture complémentaire, avec
simplement une facture de 30 francs à payer chaque mois.
D. IL N'EST MAÎTRISÉ NI DANS SON COÛT NI DANS SES CONSÉQUENCES
Au
printemps 1998, le Gouvernement avait annoncé que le présent
projet de loi et le projet de loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999 seraient déposés simultanément,
c'est-à-dire en octobre 1998. Puis, il s'était engagé,
dans le rapport annexé à l'article premier de cette loi de
financement, à déposer ce projet de loi au cours de l'automne
1998. La loi de financement a été promulguée le 23
décembre sans que cet engagement ait été tenu.
Les délais supplémentaires pris par le Gouvernement -le texte n'a
été déposé en définitive que le 3 mars 1999-
auraient dû lui permettre d'analyser dans le détail l'impact du
projet de loi. Force est de constater que le résultat est de ce point de
vue décevant.
1. Il est sous-estimé quant à ses coûts financiers
Le
chiffrage du projet de loi par le Gouvernement repose sur une
arithmétique simple : le produit d'un coût unitaire par un
nombre de bénéficiaires.
Ainsi, le coût de l'extension de la couverture de base est estimé
à 600 millions de francs (
4.000 francs x
150.000 bénéficiaires
) et celui de la couverture
complémentaire gratuite à 9 milliards de francs (
1.500 francs
x 6 millions de bénéficiaires
).
a) Le financement de la couverture de base repose sur des transferts financiers complexes et pèse en définitive lourdement sur l'assurance maladie
La
suppression de l'assurance personnelle et la prise en charge par la CNAMTS de
la couverture de base sur le critère de la résidence
entraîne une modification profonde des flux financiers.
Le financement de l'assurance personnelle fait en effet intervenir aujourd'hui
plusieurs acteurs :
- les
départements
prennent en charge les cotisations des
bénéficiaires de l'aide médicale gratuite (allocataires du
RMI, de l'allocation veuvage, jeunes de 17 à 25 ans remplissant les
conditions de ressources et de résidence du RMI). Cette prise en charge
peut être totale ou partielle ;
- les
caisses d'allocations familiales
prennent en charge, de
manière totale ou partielle, les cotisations des titulaires de
prestations familiales non couverts par un régime d'assurance maladie
et, de manière totale, celles des bénéficiaires de
l'allocation parent isolé et des personnes veuves ou divorcées
ayant eu au moins trois enfants à charge ;
- le
fonds de solidarité vieillesse
assure la prise en
charge des cotisations des titulaires de l'allocation spéciale,
c'est-à-dire les personnes qui ne bénéficient d'aucun
avantage versé par les régimes d'assurance vieillesse et qui, en
outre, ne sont pas affiliés, en tant qu'ayants droit, à un
régime d'assurance maladie ;
-
l'Etat
acquitte les cotisations des bénéficiaires
de l'aide médicale sans résidence stable (SDF) ;
- les
assurés, qui ne sont pas pris en charge,
s'acquittent
d'une cotisation en fonction de leur niveau de revenu ;
- enfin, le
déficit structurel de l'assurance personnelle
est pris en charge par les régimes d'assurance maladie.
L'arrêté du 10 décembre 1998
1(
*
)
, permet de mesurer l'ampleur du déficit actuel
(4,5 milliards de francs) :
Répartition 1997 du déficit de l'assurance
personnelle
(Extrait de l'arrêté du 10 décembre 1998)
Art.
1
er
. - Le solde déficitaire de la section comptable
prévue à l'article R. 741-40 du code de la sécurité
sociale s'élève pour l'exercice 1997 à 4.538.733.446,05
francs.
Art. 2. - Le solde déficitaire mentionné à l'article
précédent est réparti comme suit entre les régimes
obligatoires d'assurance maladie maternité :
1. Régime général des salariés : 3.760.700.854,80
francs ;
2. Salariés agricoles : 141.171.478,08 francs ;
3. Exploitants agricoles : 208.012.327,83 francs ;
4. Travailleurs non salariés des professions non agricoles :
233.730.045,45 francs ;
5. Société nationale des chemins de fer français :
58.302.659,30 francs ;
6. Régie autonome des transports parisiens : 9.169.621,68 francs ;
7. Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines :
32.500.559,05 francs ;
8. Etablissement national des invalides de la marine : 12.483.772,51 francs ;
9. Caisse nationale militaire de sécurité sociale : 71.029.798,48
francs ;
10. Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de
notaires : 7.189.637,88 francs ;
11. Banque de France : 3.761.840,22 francs ;
12. Chambre de commerce et d'industrie de Paris : 680.850,77 francs.
Le déficit pris en charge par la CNAMTS s'élève à
3.972 millions de francs soit 3.760 millions de francs au titre du
régime général et 212 millions de francs en raison de
l'intégration financière du régime des salariés
agricoles (141 millions de francs) et de la Caisse nationale militaire de
sécurité sociale (71 millions de francs).
Les régimes d'assurance maladie autres que le régime
général contribuent à hauteur du reliquat soit
566 millions de francs.
Les dépenses résultant de l'assurance personnelle se sont
élevées en 1997 à environ 12 milliards de francs.
Cette évaluation n'est qu'indirecte puisqu'elle est la somme des
recettes et des déficits.
L'assurance personnelle en 1997
Financement |
Millions de francs |
Public |
Nombre |
Conseils généraux |
3.766 |
Bénéficiaires de l'aide médicale |
374.078 |
Etat |
285 |
Bénéficiaires de l'aide médicale sans résidence stable |
29.618 |
CAF |
2.386 |
Titulaires de prestations familiales |
136.534 |
FSV |
610 |
Bénéficiaires de l'allocation spéciale du minimum vieillesse |
47.014 |
Personnes acquittant leurs cotisations |
440 |
personnes acquittant leurs cotisations |
57.028 |
TOTAL financement |
7.487 |
TOTAL |
644.272 |
Déficit pris en compte par la CNAMTS |
3.972 |
|
|
Déficit pris en compte par les autres régimes d'assurance maladie |
566 |
|
|
Coût total (1) |
12.025 |
|
|
(1)
Cotisations et déficits
L'article R. 741-40 du code de la sécurité sociale
dispose que
" les opérations de recettes ou de
dépenses de l'assurance personnelle, qu'elles soient effectuées
par le régime général ou par d'autres régimes, sont
suivies dans une section comptable distincte du fonds national de l'assurance
maladie géré par la caisse nationale de l'assurance
maladie ".
Les résultats 1997 de cette section comptable ont été
communiqués à votre rapporteur. Ils corroborent un déficit
de l'assurance personnelle de 4,5 milliards de francs, mais portent sur un
total de charges de 10,4 milliards de francs, ce qui apparaît
contradictoire avec les chiffres fournis par l'étude d'impact.
• Des réaffectations de recettes complexes et incertaines
Le projet de loi affecte à la CNAMTS de nouvelles recettes afin de
compenser la suppression des cotisations d'assurance personnelle aujourd'hui
prises en charge par les différentes collectivités publiques.
• Pour compenser la suppression de la prise en charge par le
Fonds de
solidarité vieillesse
(FSV) d'une partie des cotisations d'assurance
personnelle, le projet de loi prévoit de modifier la répartition
des droits de consommation sur les alcools (" droits 403 ").
Cette répartition serait désormais de :
- 55 % pour le FSV (au lieu de 60 %) ;
- 40 % pour les régimes obligatoires d'assurance maladie (situation
inchangée) ;
- 5 % pour la seule CNAMTS.
• Pour compenser la suppression de la prise en charge d'une partie des
cotisations d'assurance personnelle par les
caisses d'allocations
familiales
, le projet de loi modifie l'affectation du
prélèvement social de 2 % sur les revenus du patrimoine,
réparti aujourd'hui pour moitié entre la CNAF et la CNAVTS.
Il prévoit l'attribution d'une partie de ce prélèvement
à une troisième branche du régime général :
la CNAMTS. La répartition serait de 50 % pour la CNAVTS (situation
inchangée), 28 % pour la CNAMTS et 22 % pour la CNAF.
Le rendement estimé du prélèvement social de 2 % est de
l'ordre de 9,7 milliards de francs, soit 4,8 milliards de francs pour la
CNAF, selon le rapport de la commission des comptes de la
sécurité sociale de septembre 1998.
La perte de recettes serait pour la CNAF de 2,7 milliards de francs, pour une
moindre dépense de 2,4 milliards de francs.
• Pour compenser la suppression de la prise en charge par les
départements
et
l'Etat
d'une partie des cotisations
d'assurance personnelle, le projet de loi prévoit, dans son
exposé des motifs et dans l'étude d'impact, une
recette
virtuelle
: une modification de la clef de répartition des
droits sur les tabacs en faveur de la sécurité sociale qui
n'interviendra qu'en loi de finances pour 2000.
• Pour compenser la suppression du système de la
répartition du déficit de l'assurance personnelle
, le
projet de loi propose d'affecter l'intégralité de la cotisation
sur les véhicules à moteur -dont le produit est aujourd'hui
réparti entre les régimes d'assurance maladie- à la seule
CNAMTS. Le surcroît de recettes attendu est de 830 millions de
francs.
• Une dérive du coût qui sera supportée par
l'assurance maladie
Aux termes de cette modification des flux financiers, il ressort que la charge
supportée par la CNAMTS s'aggrave avant même que l'on s'interroge
sur la pertinence des évaluations fournies par le Gouvernement.
Le
financement de la couverture maladie de base
Projet du gouvernement
(en millions de francs)
DÉPENSES |
RECETTES |
||
Dépenses actuelles |
12.025 |
Tabacs |
3.500 |
Extension du champ |
600 |
28 % prélèvement social |
2.700 |
|
|
Droits alcools |
600 |
|
|
Cotisations assurés |
100 |
|
|
Cotisations VTAM |
830 |
TOTAL |
12.625 |
|
7.730 |
SOLDE- 4.895 |
L'Etat apparaît bénéficiaire de la mise en place du premier étage de la CMU aux dépens essentiellement de la CNAMTS mais également de la CNAF.
Conséquences sur le budget de l'Etat
(en millions de francs)
|
Dépenses |
Recettes |
Diminution DGD |
- 3.766 |
Tabacs - 3.500 |
Suppression des cotisations d'assurance personnelle |
- 285 |
|
Compensations autres régimes d'assurance maladie |
+ 200 |
|
TOTAL |
- 3.851 |
- 3.500 |
SOLDE + 351 |
La
" compensation aux autres régimes d'assurance maladie "
constitue une partie de la différence entre la perte de recettes
liée à la CVTAM (830 millions de francs) et la moindre
dépense liée à la suppression de la participation de ces
régimes au déficit de l'assurance personnelle (566 millions
de francs). Cette subvention semble être principalement affectée
au régime de protection sociale agricole, la CANAM ne recevant à
l'heure actuelle aucune subvention d'équilibre de la part de l'Etat.
Pour la CNAMTS
,
le surcoût net de la couverture de base
est estimé à
900 millions de francs,
sans prendre
en compte les coûts supplémentaires de gestion, qui ne sont pas
estimés par l'étude d'impact du projet de loi :
Conséquences sur l'équilibre de la CNAMTS
(en millions de francs)
Dépenses |
Recettes |
||
Extension du champ |
+ 600 |
Pertes
des cotisations
|
- 7.487 |
|
|
Etat |
- 285 |
Intégralité déficit assurance personnelle |
+ 566 |
Départements |
- 3.766 |
|
|
CNAF |
- 2.336 |
|
|
FSV |
- 610 |
|
|
Assurés |
- 440 |
|
|
Tabacs |
+ 3.500 |
|
|
Prélèvement social |
+ 2.700 |
|
|
Droits alcools |
+ 600 |
|
|
Cotisations assurés |
+ 100 |
|
|
Affectation intégralité CVTAM |
+ 830 |
TOTAL |
+ 1.166 |
TOTAL |
+ 243 |
SOLDE - 923 |
Au total, les transferts entraînés par la couverture maladie de base sont les suivants :
Transferts entraînés par la couverture de base
(en millions de francs)
|
Economie +
|
Recettes en plus (+)
|
Solde
|
Etat |
+ 3.851 |
- 3.500 |
+ 351 |
Départements |
+ 3.766 |
- 3.766 |
- |
CNAF |
+ 2.386 |
- 2.700 |
- 314 |
FSV |
+ 610 |
- 600 |
+ 10 |
Assurés |
+ 340 |
- |
+ 340 |
CNAMTS |
- 1.166 |
+ 243 |
- 923 |
Autres régimes assurance maladie |
+ 566 |
- 630 |
- 64 |
La
CNAMTS supportera donc,
a priori,
un déficit de près de
5 milliards de francs, soit 3,9 milliards de francs au titre du
déficit actuel de l'assurance personnelle et 0,9 milliard de francs au
titre du présent projet de loi.
Mais elle supportera également toute dérive du coût par
rapport à l'estimation du Gouvernement.
Or, un calcul simple consiste à rapprocher le nombre de personnes
couvertes aujourd'hui par l'assurance personnelle (644.000 selon l'étude
d'impact jointe au projet de loi) du coût de ce dispositif (12,02
milliards de francs -
voir supra
).
Le coût actuel de l'assurance personnelle à laquelle se substitue
le nouveau régime prévu par le titre I du projet de loi est
d'environ 18.000 francs par assuré, chiffre dont il convient de
préciser qu'il ne prend pas en compte, en sus de 644.000 assurés,
leurs ayants droit sur lesquels l'étude d'impact ne fournit aucune
indication.
Autre estimation : le coût moyen de la couverture de base
s'établit à 12.000 francs pour le régime
général.
Or, Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité, interrogée
sur cette question par votre rapporteur, a précisé que le
coût de 600 millions de francs avancé par le Gouvernement
reposait sur une double hypothèse :
" - une population à l'écart de toute couverture sociale
estimée à 150.000 personnes (source INSEE) ;
" - un coût de couverture d'environ 4.000 francs par personne
(prenant en compte le fait qu'une part de cette population était en
partie soignée dans les hôpitaux - et donc déjà
à la charge partielle de l'assurance maladie). "
Votre rapporteur ne conteste pas qu'une partie de ces 150.000 personnes
puisse, d'ores et déjà, engendrer des coûts pour
l'assurance maladie. Mais l'estimation d'un coût de 4.000 francs
apparaît pour le moins optimiste.
Ainsi, le coût de 600 millions de francs risque fort d'être
dépassé sauf si le nombre de bénéficiaires n'est
pas celui annoncé.
En résumé, les mécanismes financiers dont est assortie
l'extension de la couverture de base :
- ne règlent pas le déficit actuel supporté par la
CNAMTS de l'assurance personnelle (3,9 millions de francs) ;
- aggravent ce déficit de près de 1 milliard de francs.
En outre, cette évaluation :
- s'appuie sur des données déjà anciennes (1997) ;
- repose sur une estimation du coût de la couverture de base
accordée à 150.000 personnes supplémentaires pour le
moins optimiste ;
- fait le pari d'une évaluation des recettes affectées
à la CNAMTS parallèle et cohérente avec celles des
dépenses qu'elle prend en charge.
Or, c'est la CNAMTS, et elle seule, qui supportera les conséquences
financières des hypothèses énoncées et des
sous-évaluations alors même qu'il est d'ores et déjà
acquis qu'elle supportera une charge de près de 5 milliards de
francs.
b) Le coût de la couverture complémentaire gratuite comporte de nombreuses incertitudes
Aujourd'hui, la prise en charge de la couverture
complémentaire des plus démunis relève essentiellement de
l'aide médicale des départements qui y consacrent
5,4 milliards de francs et marginalement de l'Etat (200 millions de
francs). Le nombre de bénéficiaires serait d'environ
2,5 millions de personnes.
Le coût de la couverture maladie complémentaire gratuite mise en
place par le titre II du projet de loi est évalué à
9 milliards de francs pour 6 millions de bénéficiaires.
• Un financement net à parité entre l'Etat et les
organismes de protection complémentaire
Deux acteurs ont été retenus pour financer
" le fonds de
financement de la protection complémentaire de la couverture universelle
du risque maladie "
, prévu à l'article 25 du projet de
loi. Les organismes de protection complémentaire seront taxés
à hauteur de 1,75 % de leur chiffre d'affaires santé, ce qui
devait rapporter, sur la base d'une assiette d'environ 100 milliards de
francs, 1,8 milliard de francs.
Le
financement de la couverture complémentaire
selon le projet de loi
(en millions de francs)
Subvention au fonds de financement de la part de l'Etat |
7.200 |
Organismes complémentaires |
1.800 |
Total |
9.000 |
L'Etat
doit, au moyen d'une dotation budgétaire, équilibrer le
financement de ce fonds. Cette subvention a été
évaluée à 7,2 milliards de francs.
Il ne s'agit pas d'un coût net pour l'Etat, puisqu'il
bénéficie d'une diminution de la DGD équivalente à
l'effort que réalisaient les départements en matière de
couverture complémentaire et d'une diminution des dépenses d'aide
médicale liées à la couverture complémentaire des
SDF.
Cette diminution des dépenses constituée de l'aide
médicale d'Etat est difficile à évaluer à partir de
l'étude d'impact, mais une réponse au questionnaire
adressé par votre rapporteur à Mme la ministre de l'emploi et de
la solidarité permet de la préciser :
" La dotation budgétaire de l'aide médicale d'Etat
s'élève, en 1997, à 0,8 milliard de francs. Les
économies réalisées sur cette dotation correspondent
à la disparition des cotisations d'assurance personnelle actuellement
prises en charge par l'Etat (0,3 milliard de francs) et à la majeure
partie des autres dépenses d'aide médicale (couverture
complémentaire des SDF). Le coût futur de l'aide médicale
d'Etat -attaché à la couverture maladie universelle- est
estimé à 0,3 milliards de francs. (...) L'écart entre ces
deux coûts correspond au gain net pour l'Etat "
.
Cette réponse fait apparaître une économie pour l'Etat de
500 millions de francs, légèrement supérieure
à celle figurant dans l'étude d'impact
2(
*
)
(400 millions de francs). Par déduction,
si la prise en charge des cotisations d'assurance personnelle des SDF
s'élève à 285 millions de francs, le coût de l'aide
médicale complémentaire dont l'Etat va faire l'économie
est évalué à environ 200 millions de francs.
Conséquences du volet complémentaire
pour le
budget de l'Etat
(en millions de francs)
Subvention au fonds de financement |
7.200 |
Diminution DGD (1) |
- 4.924 |
Economie sur l'aide médicale d'Etat (1) |
- 200 |
Total |
- 2.076 |
(1)
hors prise en compte de la suppression de l'assurance personnelle (voire
couverture de base)
L'analyse des transferts liés à la mise en place d'une
couverture complémentaire permet de faire apparaître une
" parité de financement " de la couverture
complémentaire entre Etat et organismes privés.
Transferts liés à la mise en place d'une couverture
complémentaire
(en millions de francs)
|
Economie +
|
Recettes en plus (+)
|
Solde
|
Etat |
- 2.076 |
- |
- 2.076 |
Départements |
+ 5.379 (1) |
- 4.924 (2) |
+ 455 |
Organismes complémentaires |
- 1.800 |
(3) |
- 1.800 |
(1)
Suppression de l'aide
médicale
des départements (sommes consacrées en sus de la prise en charge
des cotisations à l'assurance personnelle : 9.145 MF - 3.766 MF =
5.379 MF).
(2)
Diminution de la DGD (reliquat) (8.690 MF - 3.766 MF =
4.924 MF).
(3)
Perte de recettes non chiffrée au titre des pertes
de cotisations actuellement perçues.
• Une sous-estimation manifeste du coût par
bénéficiaire
Le Gouvernement annonce un coût de 1.500 francs par
bénéficiaire de la couverture complémentaire
gratuite : ce chiffre est une
évaluation
prévisionnelle
mais également une
référence
législative
pour le remboursement forfaitaire des organismes de
protection complémentaire.
Selon une étude du CREDES, le coût moyen de la couverture
complémentaire d'un Français varie entre 1.775 et 1.915 francs
selon les sources et les méthodes d'estimation. Le Gouvernement a retenu
le chiffre de 1.500 francs en raison, d'une part, de la structure d'âge
de la population visée par la CMU, nettement plus jeune que la
population totale, et ce qui en fait un public moins dépensier, et ses
comportements spécifiques de consommation. Les analyses
réalisées dans les départements montraient une
sous-consommation de l'ordre de 10 %. Il est très difficile
d'estimer si cette sous-consommation est une donnée structurelle,
dépendant étroitement d'un comportement socio-éducatif, ou
si la CMU conduira à une banalisation de la consommation médicale
des plus démunis.
De toute évidence, le chiffre de 1.500 francs mentionné dans le
rapport Boulard a été retenu selon une méthode
contestable ; il porte sur une année déjà ancienne
(1995), sans avoir été réévalué, et sur une
population (moins de 65 ans) qui n'est finalement pas celle retenue.
Le rapport Boulard
3(
*
)
évoquait
" un coût moyen du ticket modérateur et du forfait
hospitalier de 1.150 francs et 113 francs, auxquels il faut ajouter le
coût de l'amélioration de prise en charge des soins dentaires, des
prothèses auditives et optiques "
.
Le coût de ces soins dentaires ou des prothèses auditives et
optiques est très difficile à estimer. Il apparaît
néanmoins justifié de prévoir, dans ce domaine, un
phénomène de rattrapage émanant des
bénéficiaires de la CMU.
Enfin, une référence existe aujourd'hui : 5,5 milliards
de francs sont actuellement consacrés par les départements
à la couverture complémentaire de 2,5 millions de personnes,
soit un coût unitaire de l'ordre de 2.200 francs.
Cette somme, " recyclée " pour financer la couverture
complémentaire gratuite instituée par le projet de loi, permettra
au " tarif " retenu par la CMU de financer la couverture de
3,6 millions de personnes.
" La multiplication des pains "
|
Coût
|
Nombre de personnes couvertes |
Coût unitaire apparent
|
Aujourd'hui |
5.500 |
2.500.000 |
2.200 |
Demain |
9.000 |
6.000.000 |
1.500 |
Pour résumer, le financement proposé par le Gouvernement repose sur un phénomène observé il y a deux mille ans aux noces de Cana 4( * ) , mais qui ne s'est malheureusement jamais reproduit : la multiplication des pains.
*
* *
Le Gouvernement ayant, dans les évaluations financières qu'il a fournies, fait un bloc de la couverture de base (titre I) et de la couverture complémentaire (titre II) bien que ces deux mécanismes soient pourtant très différents dans leur implication financière, on trouvera ci-dessous, pour information, le chiffrage global de la CMU.
COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE
(BASE ET
COMPLÉMENTAIRE)
(en millions de francs)
|
Economie +
|
Recettes en plus (+)
|
Solde
|
Etat |
+ 1.775 |
- 3.500 |
- 1.725 |
Départements |
+ 9.145 |
- 3.766 |
+ 455 |
CNAF |
+ 2.386 |
- 2.700 |
- 314 |
FSV |
+ 610 |
- 600 |
+ 10 |
Assurés |
+ 340 |
- |
+ 340 |
CNAMTS |
- 1.166 |
+ 243 |
- 923 |
Autres régimes assurance maladie |
+ 570 |
- 630 |
- 60 |
Organismes complémentaires |
- 1.800 |
- |
- 1.800 |
2. Il n'est pas maîtrisé dans ses conséquences
Un ensemble de phénomènes, et non des moindres, n'a pas été pris en compte pour analyser les conséquences du projet de loi et mesurer l'impact réel.
a) Des conséquences pourtant prévisibles n'ont pas été prises en compte, constituant le " coût caché " de la CMU
Ces
conséquences sont liées principalement à la suppression du
lien entre cotisations et prestations et à l'effet de seuil massif
qu'introduit le projet de loi.
• l'effet sur les recettes de la protection sociale
L'instauration d'une couverture complémentaire gratuite doit
être rapprocher de deux autres dispositions du projet de loi.
- l'exonération de cotisation consentie aux bénéficiaires
de la couverture de base sur le critère de la résidence ;
- l'interdiction qui vise l'ensemble des régimes de suspendre les
prestations en cas de non-paiement des cotisations.
Ces trois éléments cumulés constituent une
véritable " onde de choc " dans notre système
d'assurance sociale. Des difficultés sont prévisibles pour
" faire rentrer " les cotisations de ceux qui devront encore en payer
dès lors que le lien entre prestation et cotisation est si
évidemment rompu. Les difficultés seront particulièrement
graves pour les cotisations qui ne sont pas prélevées à la
source. Cette conséquence n'a pas totalement échapper aux auteurs
du projet de loi qui ont dû mettre en place à l'article 14 un
renforcement des procédures de recouvrement des cotisations.
En second lieu, les organismes de protection complémentaire qui
devront s'acquitter en espèce ou " en nature " d'un
impôt nouveau de 1,8 milliard de francs (1,73 % de leur chiffre
d'affaires santé) devront le financer d'une façon ou d'une autre
et majorer le taux des cotisations et primes de leurs adhérents au
moment où une partie d'entre eux basculeront vers la CMU et seront
dispensés de toute contribution.
Ces deux phénomènes, perte d'adhérents dispensés
par la CMU de cotisations et départ d'adhérents face aux
majorations des cotisations et primes résultant de la mise en place de
la CMU, constituent une " contribution " non chiffrée des
organismes complémentaires.
Troisième élément pesant sur les recettes de la
protection sociale : le phénomène de
" désincitation " entraîné par l'effet de seuil
massif du projet. Autour de ce seuil, les enjeux financiers seront
considérables, en termes non seulement d'économie de cotisations
mais également de prestations reçues.
Il y a fort à parier que l'on assiste à une forme de
" réimmersion " d'un certain nombre d'activités ou de
revenus dont les conséquences se mesureront sur les recettes de la
sécurité sociale.
• Le recours à l'aide sociale
Prenant conscience du caractère massif et injuste de cet effet de seuil,
l'Assemblée nationale et le Gouvernement y ont répondu en
proposant... des solutions d'assistance aux personnes des classes moyennes dont
les revenus sont au-dessus du seuil : elles sont ainsi invitées
à s'adresser, pour demander une aide financière, à pas
moins de cinq guichets différents : les départements, les
communes, les fonds d'action sociale des CPAM, les fonds d'action sociale des
CAF, et un " fonds " que pourront créer, volontairement, les
organismes complémentaires pour aider les personnes disposant d'un
revenu faible, mais au-dessus du seuil, à obtenir une couverture
complémentaire...
Ainsi Mme Martine Aubry déclarait-elle lors de son audition par la
commission compétente de l'Assemblée nationale
5(
*
)
.
"
La compensation des effets de seuils pourra en revanche être
opérée par les caisses de sécurité sociale et les
collectivités locales grâce aux sommes précédemment
affectées à des dépenses de santé qui seront prises
en charge par la CMU. En effet, la CMU allégera les charges des fonds
d'action sociale des caisses : 650 millions de francs sont
distribués par les fonds d'action
sanitaire et sociale des CPAM
et 240
millions de francs par les fonds d'action sociale des
caisses d'allocations familiales. De même, les départements vont
conserver les personnels affectés auparavant à la gestion de
l'aide médicale ainsi que 5 % des sommes qui y étaient
consacrées en 1997. S'y ajoute la part des 12 milliards de francs
des contingents communaux d'aide sociale versés au titre de l'aide
médicale, c'est-à-dire 1,5 milliard. Cette question est
cependant encore en discussion entre le ministre de l'intérieur, l'APCG
et les représentants des maires. Au total, ce seront donc trois à
quatre milliards de francs, auparavant consacrés à l'aide
médicale, qui seront disponibles et pourront être
consacrés, au moins en partie, par les caisses et les
collectivités territoriales à des dépenses d'aide sociale
en direction des personnes se situant au-dessus du seuil retenu et se trouvant
pourtant dans une situation personnelle difficile
".
Après avoir ainsi considéré que l'aide médicale
était " stigmatisante ", le Gouvernement déplace en
quelque sorte cette " stigmatisation " qui affectera désormais
les populations légèrement au-dessus d'un seuil. Alors même
qu'au-dessous de ce seuil existera un " droit " et que l'organisation
de cette aide sociale " new-look " semble bien improvisée
puisque pas moins de 5 guichets seront ouverts.
Prétendre, en outre, que les sommes sont
"
disponibles
", que le Gouvernement veut
réquisitionner pour combattre les effets de seuils qu'il crée,
mériterait sinon un examen attentif, du moins mieux qu'une affirmation
péremptoire.
En ce qui concerne les conséquences du projet de loi sur les finances
locales, votre commission sera naturellement très attentive aux analyses
et aux propositions de la commission des Finances saisie pour avis.
Les départements financeront largement la CMU par un
prélèvement sur la dotation générale de
décentralisation (DGD) à hauteur du montant des dépenses
d'aide médicale en 1997, affecté d'un coefficient de
réduction de 5 %.
Certes, la question peut être posée d'une nouvelle
répartition entre les départements du bénéfice de
la déduction forfaitaire de 5 % : le dispositif toutefois n'a
pas pour but prioritaire d'assurer une péréquation entre
collectivités locales, comme on peut le faire au sein de la DGF par
exemple. Il s'agit d'abord de tirer les conséquences financières
d'un transfert de compétences en recherchant une compensation
intégrale appréciée département par
département, au franc le franc. A enveloppe budgétaire constante,
il est difficile de définir une solution de financement qui ne
susciterait pas plus de collectivités mécontentes que de
collectivités satisfaites.
Pour autant, il appartient à votre commission de faire part de son
inquiétude sur les conséquences ultérieures de la CMU pour
les finances locales en raison des demandes qu'elle ne manquera pas de
déclencher de la part des assurés sociaux.
En premier lieu, dans les départements où avait été
institué des barèmes d'admission calculés sur des niveaux
de ressources plus élevés que le plafond prévu au titre de
la CMU, la sollicitation sera forte de la part des assurés d'obtenir le
maintien de leurs droits en matière de couverture complémentaire
grâce à une aide spécifique départementale.
Au demeurant, cette demande risque de se généraliser dans la
mesure où la CMU génère un effet de seuil massif, d'autant
plus perceptible qu'il sera national. Dans un contexte où le
Gouvernement a toujours la tentation de dénoncer les disparités
de traitement de l'action sociale locale, pourtant inhérente à un
dispositif décentralisé, on imagine assez bien les pressions qui
s'exerceront en faveur de la création d'un barème
complémentaire de CMU. En tout état de cause, dans le cadre d'une
aide, au cas par cas, les départements et les communes seront
sollicités, alors même que les sommes actuellement investies
auront été recyclées vers la CMU sous forme d'une
diminution de la DGD.
Force est de constater que le Gouvernement ne va pas au bout de sa
démarche et ne tire pas les conséquences sur le dispositif des
contingents communaux d'action sociale du transfert de la compétence
d'aide médicale aux départements. Votre commission espère
que durant le débat au Sénat, les associations d'élus
locaux, sans doute en concertation étroite avec notre commission des
finances, puissent trouver un accord avec le Gouvernement.
Enfin, il importe de souligner que si le transfert de compétences est
muet sur le devenir des personnels et des travailleurs sociaux, jusqu'alors
chargés de la gestion de l'aide médicale départementale,
ces derniers devront être reconvertis par les conseils
généraux.
Le coût de cette reconversion devra à l'évidence être
mis au débit du dispositif lors de l'évaluation finale.
b) Des effets pervers n'ont pas été mesurés : l'exemple des étudiants issus des familles aisées
De plus
en plus, avec l'augmentation continue des prélèvements sociaux et
le développement de situations dans lesquelles " ceux qui
paient " ne reçoivent rien, ou reçoivent toujours beaucoup
moins que les autres, se développent des réactions condamnables
du point de vue de la morale et de la citoyenneté, tendant à
" récupérer " ce qui a été payé.
De tels comportements sont à attendre en ce qui concerne la
création de la couverture maladie dite " universelle " en ce
qui concerne les étudiants.
S'il est légitime que les personnes disposant de faibles revenus soient
aidées par la collectivité à financer les études
supérieures de leurs enfants, il n'est pas juste que les personnes
favorisées fassent de même, au prétexte de
" récupérer " une part des impôts
élevés qu'ils sont, de plus en plus, appelés à
acquitter.
Or, le projet de loi portant création d'une couverture maladie
" universelle " ne prévoit aucun verrou en la matière.
Sur le plan fiscal, il peut être intéressant, dans une famille, de
" sortir " du foyer fiscal un enfant étudiant, la pension
alimentaire qui lui est versée étant déductible du revenu
imposable.
Une telle solution est devenue encore plus intéressante avec le
" bouclage " de l'allocation logement.
Au 30 juin 1998, on dénombrait ainsi, en France métropolitaine et
dans les DOM :
- 528.778 étudiants bénéficiaires de l'allocation de
logement sociale,
- 118.780 étudiants bénéficiaires de l'allocation
personnalisée au logement,
- 10.428 étudiants bénéficiaires de l'allocation de
logement familiale,
soit un total de 657.986 étudiants bénéficiant d'une
allocation de logement. Sans que votre commission puisse, à cet
égard, citer d'études précises, il est probable que ces
657.986 étudiants ne sont pas tous issus de familles
défavorisées, ne serait-ce qu'en raison des
inégalités sociales qui demeurent dans l'accès aux
études supérieures.
Avec la création de la CMU, il est clair qu'il deviendra
" rationnel " que l'étudiant ne soit plus inclus dans le foyer
fiscal de ses parents, bénéficiant ainsi à la fois d'une
aide au logement et d'une couverture complémentaire maladie gratuite et
couvrant 100 % des dépenses.
Ceci pose aussi la question de l'avenir des régimes mutualistes
étudiants, dont une majorité de ressources proviendra, demain, de
fonds publics et non plus d'adhésions.
DEUXIÈME PARTIE
-
LES PROPOSITIONS DE VOTRE
COMMISSION
Le
projet proposé par votre commission comporte quatre
caractéristiques majeures.
C'est un projet généreux, qui intègre, en les
solvabilisant, plus de six millions de résidents dans le système
de protection sociale, plutôt que de les exclure. Il est fondé sur
la création d'une allocation personnalisée à la
santé, définie par référence à l'allocation
personnalisée au logement.
C'est ensuite un projet responsabilisant, qui efface les effets de seuil.
C'est également un projet qui prend en considération les
difficultés rencontrées par les plus démunis et leur
propose des solutions adaptées.
C'est enfin un véritable projet partenarial.
I. L'ALLOCATION PERSONNALISÉE À LA SANTÉ : INTÉGRER, EN LES SOLVABILISANT, PLUS DE SIX MILLIONS DE PERSONNES DANS LE SYSTÈME DE PROTECTION SOCIALE PLUTÔT QUE LES EXCLURE
Le
projet proposé par votre commission n'est, ni plus, ni moins,
généreux que celui qui est soumis à votre examen par le
Gouvernement. Il fonctionne à coût constant, mais s'adresse
toutefois à un nombre plus élevé de résidents.
Il a, comme le projet du Gouvernement, pour ambition de remédier aux
difficultés d'accès aux soins rencontrées par les
personnes titulaires de faibles revenus, mais avec une différence
majeure : au lieu d'exclure ces personnes de notre système de
protection sociale, au lieu de prévoir, pour elles, un système
" bis " d'assurance maladie, il les intègre dans
l'organisation actuelle de la couverture maladie : les personnes
titulaires de faibles revenus ne demandent en effet ni plus, ni moins que
d'accéder aux mêmes biens et services, par les mêmes moyens,
que le reste de la population.
Fondé autour de la création d'une allocation personnalisée
à la santé, définie sur le modèle de l'allocation
de logement, il solvabilise ses bénéficiaires qui la
perçoivent mensuellement afin de leur permettre d'accéder
à une couverture complémentaire.
C'est bien, ici, une solution d'intégration, et non pas d'exclusion, de
la même manière que les bénéficiaires de
l'allocation logement ne sont pas placés dans une situation
différente de celle des autres locataires ou propriétaires.
Ceci n'empêche pas que, comme la législation sur l'allocation de
logement prévoit des conditions auxquelles doivent satisfaire les
logements, votre commission propose de définir une couverture
complémentaire comportant certaines caractéristiques : ces
caractéristiques sont celles du meilleur rapport qualité-prix,
notamment pour les biens médicaux, là où le Gouvernement
propose de faire bénéficier aux CMUistes les biens les moins
chers.
Point n'est donc besoin de contraindre les professionnels de santé,
comme le fait le Gouvernement, à pratiquer des tarifs différents
en fonction des revenus du patient.
L'allocation personnalisée à la santé sera
financée, selon les conditions prévues par le projet de loi pour
la CMU, par une taxe des organismes complémentaires et une subvention
d'équilibre de l'Etat.
II. UN PROJET RESPONSABILISANT, QUI EFFACE LES EFFETS DE SEUIL
Ce
projet proposé par votre commission est responsabilisant pour ses
bénéficiaires : ils percevront une allocation d'un montant
dégressif avec le revenu, à charge pour eux d'adhérer
à une mutuelle ou de souscrire un contrat d'assurance.
Bien entendu, de la même manière que pour l'allocation logement,
les amendements de votre commission prévoient que les
bénéficiaires pourront décider que l'allocation sera
directement versée à la mutuelle, à l'institution de
prévoyance ou à la société d'assurance qu'ils
auront choisie, à charge pour eux de payer le reliquat de cotisation ou
de prime éventuelle dû.
Tel qu'il est construit, le projet proposé par votre commission ne
présente pas le défaut majeur qui caractérise le projet du
Gouvernement, à savoir un effet de seuil massif.
De même qu'il n'existe pas de véritable effet de seuil pour
l'allocation logement, le caractère dégressif de l'allocation
personnalisée à la santé permet tout à la fois d'en
faire bénéficier des personnes disposant de revenus plus
élevés que le plafond qui a été retenu par le
Gouvernement et d'éviter une " trappe à la
pauvreté " au niveau de ce plafond.
Ainsi, le projet de votre commission n'est pas désincitatif à
l'emploi et n'incite pas non plus à dissimuler quelques centaines de
francs de revenus : la situation des personnes s'améliore ici avec
le revenu, et ne se détériore pas comme dans le projet du
Gouvernement.
III. UN PROJET QUI PREND EN CONSIDÉRATION LES DIFFICULTÉS SPÉCIFIQUES RENCONTRÉES PAR LES PLUS DÉMUNIS
Le
projet proposé par votre commission prévoit d'abord qu'au niveau
du RMI, l'allocation personnalisée à la santé couvrira
entièrement le coût de la couverture complémentaire qui
sera fixé par l'Etat. Et si, pour toutes les personnes autres que celles
qui bénéficient du RMI, le projet de votre commission
prévoit que la couverture complémentaire est obtenue, dans des
conditions de droit commun, auprès des organismes de protection sociale
complémentaire, il réserve le cas des titulaires du RMI qui
seront entièrement gérés par les CPAM.
Votre commission a ainsi voulu tenir compte, à la fois des
difficultés particulières d'insertion que peuvent rencontrer ces
personnes et aussi du droit existant, la couverture des titulaires du RMI
étant aujourd'hui gérée le plus souvent par les CPAM dans
le cadre de l'aide médicale.
Pour autant, votre commission a décidé d'offrir aux
bénéficiaires du RMI le choix entre deux solutions : soit
ils optent pour un versement direct de l'allocation à la CPAM, soit ils
choisissent de percevoir eux-mêmes l'allocation et de payer ensuite une
cotisation complémentaire d'un même montant à la CPAM.
Une telle solution peut ainsi être choisie, pour certaines personnes, en
vue d'aider à réapprendre à gérer un
budget.
IV. UN PROJET VÉRITABLEMENT PARTENARIAL
Le
projet proposé par votre commission répond, à cet
égard aussi, à l'ensemble des objections formulées
à l'encontre du projet de loi présenté par le Gouvernement.
Il prévoit en effet un système dans lequel chacun continue
à faire son métier, l'assurance maladie de base gérant la
couverture de base et les organismes de protection sociale
complémentaire étant chargés de la seule couverture
complémentaire.
Votre commission a retenu le principe selon lequel l'instruction des demandes
serait effectuée par les CPAM. A vrai dire, si elle avait
elle-même été à l'origine du projet, elle aurait
probablement choisi les caisses d'allocations familiales qui sont
habituées à contrôler les ressources de leurs
bénéficiaires pour l'octroi de certaines prestations.
Votre commission ne néglige pas, en effet, les difficultés
considérables que vont rencontrer les caisses d'assurance maladie pour
contrôler, dès le début de l'année prochaine, les
ressources d'environ 10 % de la population.
Si elle a choisi de retenir la solution de l'instruction par les CPAM, c'est
essentiellement pour demeurer dans le scénario partenarial qui a
été accepté par la CNAMTS, la FNMF, le CETIP et la FFSA
dans les différents protocoles d'accords qu'ils ont conclus ensemble.
Le scénario sera donc véritablement partenarial, n'impliquant
aucune concurrence ni aucune situation d'inégalité, à la
différence de celles qui sont créées par le projet de loi,
entre organismes de base et organismes complémentaires.
Au contraire, le projet de loi prévoit que ces deux catégories
d'organismes seront invitées à coopérer, en
préparant, par convention, le contenu et les caractéristiques de
la couverture complémentaire qui sera proposée aux
bénéficiaires de l'APS. Ces conventions feront, bien entendu,
l'objet d'un arrêté d'approbation qui leur donnera leur valeur
juridique.
Dans le système proposé par votre commission, c'est l'Etat qui
fixera le prix de la couverture complémentaire qui sera proposée
aux bénéficiaires de l'ALS : il convient en effet
d'empêcher que les organismes complémentaires fixent des prix trop
élevés qui compromettraient la satisfaction de l'objectif de
solvabilisation, et il est logique que la collectivité détermine
les caractéristiques d'un produit de couverture complémentaire
auquel, en quelque sorte, elle donnera un marché.
A la différence de ce qui est prévu par le projet de loi, les
organismes complémentaires seront remboursés au franc le franc,
par le fonds, des dépenses engagées au titre de la couverture
complémentaire des bénéficiaires de l'APS qui ne seraient
pas couvertes par le montant de cette allocation et des cotisations :
cette règle incitera l'Etat, à cet égard, à fixer
le " bon prix " de la couverture complémentaire et, le cas
échéant, à le réviser à la baisse si les
dépenses engagées sont inférieures à ce qui avait
été prévu.
Le projet proposé par votre commission maintient la taxe de 1,75 %
prévue par le projet de loi, en n'en modifiant que certaines
caractéristiques techniques et en évitant les impositions en
cascade : il est en effet légitime que, d'une manière ou
d'une autre, les organismes de protection complémentaire apportent une
contribution à l'Etat qui solvabilise, par l'APS, un marché
supplémentaire.
Le caractère partenarial du projet défini par votre commission se
retrouve enfin dans la composition du conseil d'administration du fonds qui
comportera, autour d'une majorité de représentants de l'Etat, des
représentants des régimes de base, des organismes de protection
sociale complémentaire et des associations oeuvrant dans le domaine
économique et social en faveur des personnes
défavorisées.
EXAMEN DES ARTICLES
TITRE PRÉLIMINAIRE
-
DE LA COUVERTURE MALADIE
UNIVERSELLE
Article premier
Création d'une couverture
maladie universelle et d'une protection complémentaire avec dispense
d'avance de frais pour les plus démunis
I -
Le texte du projet de loi
Dans le projet de loi initial, cet article comportait une première
phrase énonçant que
" la protection de la santé et
l'égal accès à la prévention et aux soins
constituent un impératif national et une priorité des politiques
sociales ".
A l'initiative du rapporteur, M. Jean-Claude Boulard, l'Assemblée
nationale a supprimé cette première phrase dépourvue de
portée juridique. Elle ne faisait rien d'autre, en effet, que
réaffirmer un des principes constitutionnels
" particulièrement nécessaires à notre temps "
en vigueur depuis 1946.
Une seconde phrase, dans le projet de loi initial, disposait qu'
" il
est créé une couverture maladie universelle qui garantit à
tous une prise en charge des soins par un régime d'assurance maladie et
aux personnes les plus défavorisées le droit à une
protection complémentaire et la dispense d'avance de frais ".
L'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur, a
également modifié cette seconde phrase.
Elle a ainsi substitué à la notion de "
personnes les
plus défavorisées
" celle de "
personnes dont
les revenus sont les plus faibles
", la commission justifiant cet
amendement dans son rapport par le fait que la notion retenue par le projet de
loi était "
trop peu précise
".
En fait, non seulement cette notion était imprécise, des
personnes pouvant être " défavorisées " pour des
raisons autres que le niveau de leurs ressources, mais elle était
inexacte. Le projet de loi, affirme le ministère, devrait en effet
concerner environ 10 % de la population : ces six millions de
personnes, à l'évidence, ne constituent pas un groupe
homogène composé des personnes " les plus
défavorisées ".
Cette inexactitude, dès l'article premier qui constitue un article de
principe, témoigne bien de l'erreur d'analyse qui sous-tend l'ensemble
du projet de loi. Il propose en effet une solution uniforme à des
personnes qui ne sont pas toutes, loin s'en faut, ni les plus
défavorisées, ni désocialisées.
Aux termes de l'article premier, la notion de " couverture maladie
universelle " comprend, à la fois :
- la garantie d'une affiliation de tous les résidents à un
régime de base d'assurance maladie ;
- une couverture complémentaire avec dispense d'avance de frais
pour les personnes ayant les revenus les plus faibles.
Il convient d'observer que cet article premier n'affirme pas le principe de la
gratuité de cette couverture complémentaire, cette
gratuité étant posée au détour de l'article 20, qui
crée l'article L. 861-3 du code de la sécurité sociale.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission vous propose de compléter cet article par une phrase
disposant que la protection complémentaire qu'il mentionne est
assurée par la création d'une allocation personnalisée
à la santé.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel
qu'amendé.
TITRE PREMIER
-
DISPOSITIONS RELATIVES AUX
RÉGIMES OBLIGATOIRES
CHAPITRE PREMIER
-
Dispositions
générales
Art. 2
(art. L. 111-1, chapitre premier du
titre IV du livre VII
et art. L. 741-11 du code de la
sécurité sociale)
Principe de l'affiliation et du
rattachement aux nouveaux régimes obligatoires et suppression du
régime de l'assurance personnelle
Avant
d'instituer, par les articles suivants, une affiliation au régime
général sous critère subsidiaire de résidence au
profit des personnes qui ne relèvent à aucun autre titre d'un
régime professionnel d'assurance maladie, le présent article
supprime, dans le code de la sécurité sociale, les dispositions
relatives à l'assurance personnelle et celles qui y font
référence.
Le
paragraphe I
de l'article modifie l'article L. 111-1 du code de
la sécurité sociale, qui constitue le premier article de ce code
et décrit les fondements de l'organisation de la sécurité
sociale.
Cet article dispose notamment que les garanties offertes par la
sécurité sociale s'exercent
" par l'affiliation des
intéressés et de leurs ayants droit à un régime
obligatoire ou, à défaut, par leur rattachement au régime
de l'assurance personnelle "
.
Le
paragraphe I
supprime cette référence au rattachement
au régime d'assurance personnelle, pour la remplacer par celle d'une
affiliation à
" un ou plusieurs régimes
obligatoires "
.
Il convient toutefois d'observer que, si le projet de loi supprime l'assurance
personnelle maladie, l'assurance volontaire vieillesse et l'assurance
volontaire invalidité, instituées par les articles L. 742-1
à L. 742-3 du code de la sécurité sociale, demeurent
en vigueur.
Le
paragraphe II
de l'article abroge le chapitre premier
("
Assurance personnelle
") du titre IV ("
Assurance
personnelle - assurance volontaire
") du Livre VII
("
Régimes divers - dispositions diverses
") du code de
la sécurité sociale, et modifie en conséquence
l'intitulé du titre IV qui ne comportera désormais que des
dispositions relatives à l'assurance volontaire.
Ce paragraphe prévoit toutefois que les dispositions de
l'article L. 741-11 demeureront en vigueur jusqu'à la
répartition du solde de l'assurance personnelle afférent à
l'exercice 1999 : cet article prévoit, en effet, que le solde (en
fait, le déficit) constaté au terme d'un exercice est
réparti entre les régimes obligatoires d'assurance maladie et
maternité compte tenu du nombre de leurs cotisants et de leurs
bénéficiaires et du montant des prestations en nature servies par
ces régimes.
Cette répartition ne pourra donc intervenir qu'après
l'entrée en vigueur du projet de loi.
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Art. 3
(titre VIII du livre III,
art. L. 380-1
à L.380-4 nouveaux
du code de la sécurité
sociale)
Nouveaux critères d'affiliation au nouveau
régime et cotisation
Cet
article prévoit les conditions dans lesquelles les résidents
peuvent être affiliés au régime général
lorsqu'ils n'ont droit à aucun autre titre aux prestations en nature
d'un régime d'assurance maladie.
Le
paragraphe I
de cet article crée, au titre VIII
(Dispositions relatives à diverses catégories de personnes
rattachées au régime général - dispositions
d'application du Livre III)
du Livre III
(Dispositions relatives aux
assurances sociales et à diverses catégories de personnes
rattachées au régime général)
du code de la
sécurité sociale, un chapitre préliminaire
intitulé : " Personnes affiliées au régime
général du fait de leur résidence ". Ce chapitre est
constitué des articles L. 380-1 à L. 380-4, les deux
premiers articles de ce chapitre étant rédigés par le
paragraphe II du présent article 3 du projet de loi.
Art. L. 380-1 du nouveau code de la
sécurité sociale
Critères d'affiliation au
régime
Cet
article définit le critère de résidence sur lequel peuvent
être affiliées les personnes qui n'ont droit, à aucun autre
titre, aux prestations en nature d'un régime d'assurance maladie.
Ce critère, qui sera précisé par un décret en
Conseil d'Etat, est :
-
un critère subsidiaire
. Il n'est retenu qu'en dernier
lieu, si la personne ne peut prétendre à une affiliation à
aucun autre titre ;
-
un critère de résidence stable
. Dans le droit en
vigueur, l'affiliation à l'assurance personnelle repose aussi sur une
condition de stabilité du séjour : elle est fixée
à trois mois, sous réserve des traités et accords
internationaux, pour les personnes de nationalité
étrangère, par l'article R. 741-1 du code de la
sécurité sociale.
Le droit de l'aide sociale prévoit également une condition de
stabilité du séjour, plus sévère mais qui ne
s'applique qu'aux personnes de nationalité étrangère en
situation irrégulière : l'article 186 du code de la
sécurité sociale prévoit, en effet, qu'elles peuvent
bénéficier de l'aide médicale à domicile
" à condition qu'elles justifient soit d'un titre exigé
des personnes de nationalité étrangère pour
séjourner régulièrement en France, soit d'une
résidence ininterrompue depuis au moins trois ans "
;
-
un critère de résidence régulière
. Le
projet de loi maintient ainsi le principe selon lequel la
sécurité sociale ne peut bénéficier qu'aux
personnes étrangères en situation régulière,
principe ancien en ce qui concerne les prestations et qui a été
affirmé, pour l'affiliation, par la loi n° 93-1027 du
24 août 1993. L'article L. 115-6 qu'elle a institué
dispose ainsi que
" les personnes de nationalité
étrangère ne peuvent être affiliées à un
régime obligatoire de sécurité sociale que si elles sont
en situation régulière au regard de la législation sur le
séjour et le travail des étrangers en France, ou si elles sont
titulaires d'un récépissé de demande de renouvellement de
titre de séjour "
.
L'article L. 380-1 créé par le présent article
ne fait référence qu'à la régularité de la
situation au regard de la législation sur le séjour : ceci
est logique, les personnes de nationalité étrangère ayant
une activité professionnelle étant affiliées à ce
titre à la sécurité sociale.
Le cumul des conditions de stabilité et de régularité du
séjour est, lui aussi, tout à fait cohérent, le droit aux
prestations maladie des personnes affiliées sur un critère
professionnel n'étant ouvert, aux termes de
l'article L. 313-1, qu'aux assurés qui justifient avoir
cotisé au cours d'une période de référence ou avoir
effectué un nombre minimum d'heures de travail salarié ou
assimilé.
L'article L. 380-1 dispose que toutes les personnes satisfaisant aux
critères qu'il énonce " relèvent " du
régime général : il s'agit donc d'une affiliation
automatique. Contrairement à ce qu'affirme l'étude
d'impact
6(
*
)
fournie par le Gouvernement, qui
critique l'assurance personnelle sur ce point, il n'y pas là de
différence avec le droit de l'assurance personnelle actuellement en
vigueur, qui dispose que
" toute personne résidant en France et
n'ayant pas droit à un titre quelconque aux prestations en nature d'un
régime obligatoire d'assurance maladie et maternité
relève
du régime de l'assurance personnelle "
. Il
n'y a donc pas, comme le sous-entend l'étude d'impact, d'un
côté, un régime facultatif d'assurance personnelle et de
l'autre, un régime de résidence obligatoire.
A la demande de M. Jean-Pierre Cantegrit, sénateur des Français
établis hors de France et président de la Caisse des
Français de l'Etranger,
votre commission vous propose
d'adopter un amendement
complétant le premier alinéa de
l'article L. 380-1 du code de la sécurité sociale par les
mots :
" ou de la caisse des Français de
l'étranger ".
Cette modification vise à permettre aux
personnes résidant en France qui sont affiliées à la
caisse des Français de l'étranger de rester affiliées
à cette caisse. Elle répond ainsi aux besoins de certaines
personnes placées dans des situations très particulières,
tels les Français travaillant sur des plates-formes
pétrolières hors des eaux territoriales d'un Etat.
Art. L. 380-2 du nouveau code de la
sécurité sociale
Cotisation et seuil d'acquittement ou
d'exonération
Cet
article prévoit les conditions financières d'affiliation au
régime général sur critère de résidence.
Il dispose qu'une cotisation proportionnelle aux revenus sera due
au-delà d'un plafond déterminé par décret,
révisé chaque année pour tenir compte de
l'évolution des prix.
Le système est donc différent du droit applicable à
l'assurance personnelle qui prévoyait une cotisation proportionnelle au
premier franc, tout en ménageant l'existence de cotisations forfaitaires.
Les informations fournies par le Gouvernement au Parlement ne permettent pas,
toutefois, d'apprécier l'importance de la différence entre le
nouveau régime de résidence et l'assurance personnelle :
tout dépendra en effet du plafond retenu... et du taux de cotisation
applicable.
Le dossier de presse (p. 15) se contente d'indiquer que " la cotisation au
régime d'assurance maladie sera au-delà du seuil de
contributivité, strictement proportionnelle au revenu et à un
taux limité ".
Le taux retenu sera également important pour déterminer l'ampleur
de l'effort que devra réaliser le régime général
pour assurer la couverture de base des quelque 600.000 personnes
concernées.
Le taux et les modalités de calcul de la cotisation, ainsi que les
obligations déclaratives des demandeurs, seront fixés par
décret.
Rien ne permet d'affirmer, comme le fait le rapport de l'Assemblée
nationale
(rapport AN n° 1518, p. 84)
, que le plafond
mentionné à l'article L. 380-2 pour la couverture de
base sera le même que celui qui est prévu à
l'article 20 du projet de loi
(cf. commentaire sous l'article 20
dans le présent rapport)
.
Il convient d'observer, pour le regretter, que la gratuité de la
couverture de base en dessous d'un certain plafond de revenus dans le
régime de résidence créera une situation
d'inégalité par rapport aux salariés et aux
indépendants : la cotisation sur les salaires est appelée au
premier franc, et il existe une cotisation minimale dans le régime des
indépendants.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
Art. 4
(art. L. 161-2-1 nouveau du code de
la
sécurité sociale)
Immédiateté et
automaticité du droit à l'accès aux soins
I -
Le texte du projet de loi
Cet article vise à faciliter l'accès à la couverture de
base pour toutes les personnes qui ne sont pas affiliées à un
régime d'assurance maladie.
Dans la même logique que celle qui avait inspirée les dispositions
de la loi du 25 juillet 1994
(loi n° 94-637 relative à la
sécurité sociale, art. 27)
l'article L. 161-2-1 nouveau
créé par cet article fait du régime général
un régime pivot pour l'accès à l'assurance maladie des
personnes qui ne bénéficient pas d'une couverture de base.
La loi du 25 juillet 1994 avait ainsi créé un article L. 161-1-1
(devenu art. L. 162-15-2 dans le droit en vigueur, cf. commentaire sous
l'article 5)
qui disposait que :
" Art. L. 161-1-1 - Toute personne pour laquelle il ne peut être
immédiatement établi qu'elle relève à un titre
quelconque d'un régime obligatoire d'assurance maladie et
maternité ou du régime de l'assurance personnelle est
affiliée provisoirement au régime de l'assurance personnelle
prévu aux articles L. 741-1 et suivants, sous réserve qu'elle
remplisse la condition de résidence prévue pour ce régime.
" Par dérogation aux dispositions de l'article L. 741-9, les
intéressés bénéficient provisoirement à
compter de la date de leur affiliation, pour eux-mêmes et pour leurs
ayants droit au sens de l'article L. 313-3 et de l'article L. 161-14, des
prestations en nature de l'assurance maladie et maternité servies par le
régime général.
" Dès que le régime d'affiliation dont relève la
personne est déterminé, il est procédé à une
régularisation de sa situation pour la période de son affiliation
provisoire à l'assurance personnelle. Dans le cas où
l'intéressé relève d'un régime distinct de
l'assurance personnelle, les prestations servies pendant la période
d'affiliation provisoire sont remboursées par ce régime au
régime de l'assurance personnelle. Dans le cas contraire, il est
maintenu au régime de l'assurance personnelle, les cotisations
correspondant à la période d'affiliation provisoire étant
dues à compter du premier jour de cette affiliation, compte tenu des
droits éventuels de l'intéressé à leur prise en
charge.
" Des dispositions réglementaires fixent les modalités
d'application du présent article et notamment les conditions de
régularisation ".
L'article L. 161-2-1 adapte ces dispositions à la création du
régime de résidence et à la suppression de celui de
l'assurance personnelle.
Il prévoit l'affiliation immédiate de toute personne sur
justification de son identité et de sa résidence stable et
régulière et le bénéfice immédiat des
prestations. La caisse d'assurance maladie procède ensuite à des
recherches en vue de déterminer si l'intéressé
relève ou non d'un autre régime que le régime
général.
Le texte proposé par le projet de loi prévoit l'obligation
d'élire domicile auprès d'un organisme agréé pour
les personnes sans domicile fixe, et tel qu'il a été
modifié par l'Assemblée nationale, le concours des associations,
des services sociaux et des établissements de santé pour aider
les personnes dans leur démarche d'affiliation.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission vous propose, comme cela est prévu par l'article
L. 161-15-2 actuellement en vigueur, que les modalités
d'application de l'article L. 161-2-1 prévoient la procédure
de régularisation applicable si la personne initialement affiliée
au titre de l'article L. 380-1 relève du fait d'un autre régime
que le régime général.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.
Art. 5
(art. L. 161-15-1 et
L. 161-15-2 du
code de la sécurité sociale)
Continuité du droit
à l'accès aux soins
Cet
article propose une nouvelle rédaction des articles L. 161-15-1 (dont le
contenu avait été abrogé par l'ordonnance
n° 96-345 du 24 avril 1996) et L.161-15-2 (ancien article L. 161-1-1,
cf. commentaire sous l'article 4). Ces deux articles affirmeront
désormais le principe de continuité du droit aux prestations
d'assurance maladie, non seulement pour le régime général
comme l'indique le rapport de l'Assemblée nationale, mais pour
l'ensemble des régimes de base.
Il s'agit en outre d'un principe s'appliquant à tous les assurés
sociaux et non pas seulement aux personnes affiliées sur critère
de résidence.
L'article L. 161-15-1 prévoit en effet qu'une personne ne peut perdre le
bénéfice des prestations d'assurance maladie et maternité
que :
- si elle cesse de remplir la condition de résidence
mentionnée à l'article L. 380-1
- ou si elle est présumée absente (au sens de l'article 112
du code civil)
Cela signifie qu'une personne est immédiatement affiliée selon le
critère de résidence au régime général si
elle perd le bénéfice d'une affiliation professionnelle, et
réciproquement.
L'article L.161-15-2 constitue le complément du précédent
en affirmant la continuité des prestations en cas de changement de
régime d'affiliation : l'" ancien " régime ne peut
interrompre le service des prestations avant l'affiliation dans le nouveau. Cet
article prévoit aussi que l'" ancien " régime garde ces
prestations à sa charge jusqu'à la nouvelle affiliation.
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Art. 6
(art. L. 161-2, L. 381-7,
L. 381-12, L. 382-9, L. 615-8, L. 722-6
du code de la
sécurité sociale et art. 1106-12 du code
rural)
Accès aux soins sans restriction financière
I -
Le texte du projet de loi
Cet article modifie tous les articles du code de la sécurité
sociale qui établissent un lien entre versement des prestations et
paiement des cotisations.
Le
paragraphe I
:
• supprime le dernier alinéa de l'article L. 161-2, en
vigueur pour l'ensemble des régimes de base, rappelant l'existence du
paiement préalable des cotisations pour percevoir des prestations ;
• supprime le dernier alinéa de l'article L. 381-7, relatif
au régime étudiant qui dispose que "
les prestations sont
fournies sur justification du versement régulier des
cotisations
" ;
• supprime dans l'article L. 381-12, pour les ministres des cultes,
la disposition qui subordonne le versement des prestations au fait d'être
"
à jour
" de sa cotisation personnelle ;
• supprime à l'article L. 382-9, pour les prestations en
nature des artistes-auteurs, le lien entre paiement des cotisations et
versement des prestations ;
• réserve, à l'article L. 615-8 qui concerne les
indépendants, aux seules prestations en espèces auxquelles, le
cas échéant (en fonction de leur profession), ils ont droit, le
lien entre règlement des prestations et paiement des cotisations ;
• procède à une même modification à
l'article L. 722-6 qui concerne les praticiens et auxiliaires médicaux
conventionnés.
Le
paragraphe II
de l'article supprime le troisième alinéa
de l'article 1106-12 du code rural : celui-ci prévoyait, pour les
personnes qui relèvent du régime agricole, que le versement des
prestations était maintenu pendant six mois, en cas de non-paiement des
cotisations, avant mise en demeure.
A l'initiative de la commission des Affaires culturelles, familiales et
sociales, l'Assemblée nationale a complété, cet article
par un
paragraphe III
réservant le cas de la mauvaise foi de
l'assuré : il est en effet légitime que la rupture du lien
entre versement des cotisations et règlement des prestations, qui ne
signifie pas que les cotisations ne sont plus dues, constitue un
prétexte pour des personnes de mauvaise foi pour ne pas payer leurs
cotisations.
Le
dispositif introduit par l'Assemblée nationale
prévoit
que les modalités selon lesquelles le non-paiement des cotisations, dans
ce cas, pourra entraîner la suspension du versement des prestations pour
l'assuré social (mais pas pour ses ayants droit).
II - Les propositions de votre commission
Votre commission approuve la réserve introduite par l'Assemblée
nationale visant les cas de mauvaise foi. Elle observe toutefois que le
paragraphe III ne vise que "
la cotisation prévue à
l'article 3 de la présente loi
", c'est-à-dire la
cotisation versée par les seules personnes affiliées au
régime général sur le critère de résidence
(article L. 380-2 nouveau du code de la sécurité sociale).
Dès lors que le projet de loi entend généraliser la
suppression du lien entre paiement des cotisations et versement des
prestations, votre commission considère qu'il n'y a guère de
raison de ne pas étendre à l'ensemble des cotisations, la
réserve introduite par l'Assemblée nationale des cas de mauvaise
foi.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.
Art. 7
(art. L. 161-14-1, L. 381-9 et
L. 615-11 du code de la sécurité
sociale)
Régime applicable aux ayants droit des
personnes
affiliées au régime général
I -
Le texte du projet de loi
Le régime général confère un caractère
familial aux prestations en nature de l'assurance maladie dans la mesure
où il garantit contre le risque non seulement l'assuré, mais
également les personnes de son foyer qui sont à sa charge,
lesquelles sont dites " ayants droit ". L'article L. 313-3 du code de
la sécurité sociale précise la portée du
caractère familial des prestations en nature en définissant les
membres de la famille. Par membre de la famille, on entend :
1° Le conjoint de l'assuré ;
2° Jusqu'à un âge limite (art. R. 313-2 : 16 ans),
les enfants non salariés, à la charge de l'assuré ou de
son conjoint, qu'ils soient légitimes, naturels, reconnus ou adoptifs,
pupilles de la Nation dont l'assuré est tuteur, ou enfants
recueillis ;
3° Jusqu'à des âges limites et dans des conditions
déterminées par décret en Conseil d'Etat (art. R.
313-12) :
a) les enfants placés en apprentissage dans des conditions
déterminées par le code du travail (art. R. 313-12 : 18
ans) ;
b) les enfants qui poursuivent leurs études (art. R. 313-12 :
20 ans) ;
c) les enfants qui, par suite d'infirmités ou de maladies
chroniques, sont dans l'impossibilité permanente de se livrer à
un travail salarié (art. R. 313-12 : 20 ans) ;
4° l'ascendant, le descendant, le collatéral jusqu'au
3
ème
degré ou l'allié au même
degré de l'assuré social, qui vit sous le toit de celui-ci et qui
se consacre exclusivement aux travaux du ménage et à
l'éducation d'enfants à la charge de l'assuré.
L'article L. 161-14 du code de la sécurité sociale a
élargi la qualité d'ayant droit en accordant le
bénéfice du droit aux prestations en nature de l'assurance
maladie-maternité à la personne qui vit maritalement avec un
assuré social et qui se trouve à sa charge effective, totale et
permanente.
Dans sa décision du 11 juillet 1989, la Cour de cassation (chambre
sociale, caisse primaire d'assurance maladie de Nantes) a jugé qu'en se
référant à la vie martiale, le législateur avait
entendu viser
" la situation de fait consistant dans la
vie commune de deux personnes ayant décidé de vivre comme des
époux sans pour autant s'unir par le mariage, ce qui ne peut concerner
qu'un couple formé d'un homme et d'une femme ".
L'ayant droit ne pouvait donc être que le concubin
hétérosexuel de l'assuré.
La loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 portant diverses mesures d'ordre
social a souhaité ouvrir au partenaire homosexuel le droit que la
jurisprudence lui refusait. Elle a complété l'article L. 161-14
du code de la sécurité sociale par deux alinéas afin de
prévoir que le droit aux prestations est ouvert à la personne
à charge qui, sans être un des ayants droit visés à
l'article L. 313-3, vit avec l'assuré depuis une durée
fixée par décret en conseil d'Etat. Le décret n°
93-678 du 27 mai 1993 précise les conditions d'application de cette
mesure et fixe à 12 mois consécutifs la durée de vie
commune ouvrant droit à prestations (art. R. 161-8-1 du code de la
sécurité sociale).
On notera que l'article 4
bis
de la proposition de loi relative au pacte
civil de solidarité, adoptée par l'Assemblée nationale en
deuxième lecture le 7 avril 1999, complète l'article L.
161-14 en attribuant la qualité d'ayant droit à la personne
liée à un assuré social par un pacte civil de
solidarité (PACS) lorsqu'elle ne peut bénéficier de la
qualité d'assuré social à un autre titre.
En pratique, ceci revient à supprimer le délai d'un an pour les
personnes liées par un PACS, les alignant ainsi sur les concubins
hétérosexuels, le concubin homosexuel n'ayant pas souscrit un
PACS se trouvant toujours obligé de justifier d'un an de vie
commune
7(
*
)
.
L'article 7 du présent projet de loi modifie le régime applicable
aux ayants droit des personnes affiliées au régime
général de l'assurance maladie et crée
un statut
d'ayant droit autonome
.
Le
paragraphe I
de cet article modifie l'article L. 161-14-1 du code de
la sécurité sociale afin de permettre à l'enfant ayant
droit d'un assuré social, qui atteint l'âge de seize ans, de
pouvoir demander à être identifié de façon autonome
au sein du régime dudit assuré social et à
bénéficier à titre personnel du remboursement des
prestations en nature de l'assurance maladie et maternité de ce
régime. Cette possibilité est aujourd'hui réservée
à l'enfant majeur, donc âgé d'au moins dix-huit ans.
En application de l'article R. 161-8-13, la demande doit être
effectuée par l'intéressé auprès de l'organisme
d'assurance maladie et maternité auquel est affilié
l'assuré social dont il est ayant droit. Le remboursement des
prestations en nature à titre personnel se poursuit aussi longtemps que
l'intéressé demeure ayant droit d'un assuré social et
qu'il n'a pas expressément renoncé à cette autonomie.
L'organisme d'assurance maladie et maternité compétent remet
à l'intéressé un document attestant de sa qualité
d'ayant droit autonome et lui permettant d'obtenir le versement des prestations
en nature.
En application de la deuxième phrase de l'article L. 161-14-1 du code de
la sécurité sociale, ce dispositif devient obligatoire dès
lors que l'enfant majeur poursuit des études dans un
établissement d'enseignement entrant dans le champ d'application du
régime de sécurité sociale des étudiants. Dans ce
cas, ce sont les sections locales universitaires mutualistes qui sont
chargées d'assurer la gestion des prestations en nature
(art. R.
161-8-14 du code de la sécurité sociale).
Le
paragraphe II
fait bénéficier du statut d'ayant droit
autonome les personnes mentionnées aux 1° et 4° de l'article
L. 313-3, c'est-à-dire le conjoint, les ascendants descendants et
collatéraux de l'assuré, et à l'article L. 161-14,
c'est-à-dire l'ensemble des personnes qui vient avec l'assuré.
Le deuxième alinéa du texte proposé par le II pour
compléter l'article L. 161-14-1 prévoit que les enfants
mineurs pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance
peuvent, à l'initiative des personnes ou des établissements qui
en assurent l'accueil ou la garde, être identifiés de façon
autonome au sein du régime de l'assuré. Ces personnes ou
établissements perçoivent alors directement, pour le compte de
l'assuré, les prestations en nature de l'assurance
maladie-maternité.
Le
paragraphe III
modifie les règles applicables aux enfants
ayants droit d'un assuré du régime d'assurance
maladie-maternité des travailleurs non salariés non agricoles,
géré par la Caisse nationale d'assurance maladie des
non-salariés (CANAM).
L'article L. 615-10 du code de la sécurité sociale
énumère les bénéficiaires des prestations de
l'assurance maladie de ce régime. Parmi ceux-ci figurent les enfants
à charge définis par les 2° et 3° de l'article
L. 313-3 du code de la sécurité sociale auquel renvoie
l'article L. 615-10 du même code. Toutefois, par dérogation
à l'article L. 615-10, l'article L. 615-11 prévoit que les
enfants qui n'ont pas atteint un âge limite
(art. R. 615-32 -
20 ans)
et qui poursuivent leurs études dans des
établissements ouvrant droit au bénéfice de l'assurance
maladie-maternité des étudiants, perdent la qualité
d'ayant droit à titre de membre de la famille.
Le
paragraphe III
du présent article abroge donc l'article
L. 615-11 et aligne par conséquent les règles applicables
aux enfants des assurés du régime des travailleurs non
salariés non agricoles sur celles applicables aux enfants des
assurés du régime général. Lorsqu'ils sont
étudiants, ces derniers bénéficient jusqu'à 20 ans
du maintien dans le régime général et ne sont donc
astreints au paiement d'une cotisation qu'au moment où ils
intègrent le régime des étudiants, à l'âge de
20 ans.
Le
paragraphe IV
tire les conséquences du paragraphe III en
prévoyant à l'article L. 381-9 du code de la
sécurité sociale que les enfants ayants droit des ressortissants
du régime des travailleurs non salariés des professions non
agricoles ne relèvent pas du régime étudiant.
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II - Les propositions de votre commission
Le statut d'ayant droit autonome ainsi créé permet aux ayants
droit de bénéficier d'une véritable indépendance
à l'égard de l'assuré dont ils relèvent en
matière de prestations en nature de l'assurance maladie-maternité.
Ces personnes seront désormais personnellement remboursées de
leurs dépenses de santé sans avoir à passer par le compte
de l'assuré social dont ils relèvent.
Dans le droit en vigueur, la possibilité d'être ayant droit
autonome était offerte à l'enfant majeur mais était
refusée au conjoint. Désormais, si l'enfant âgé de
seize ans a la possibilité de demander un statut d'ayant droit autonome,
les autres ayants droit (conjoints, concubins...) bénéficient
automatiquement de ce dernier
" sauf refus exprès de leur
part ".
Votre commission vous propose d'adopter un amendement précisant que les
prestations des assurances maladie et maternité perçues par les
ayants droit mentionnés aux 1° et 4° de l'article
L. 313-3 et à l'article L. 161-14 sont naturellement les
prestations
en nature
.
Elle vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.
Art.
8
(art. L. 380-3 nouveau du code de la sécurité
sociale)
Dispositions applicables aux personnes qui, bien que
résidant ou séjournant en France, ne sont pas concernées
par le régime
I -
Le texte du projet de loi
Cet article énumère les personnes qui n'ont pas vocation à
être affiliées au régime général sur le
critère de résidence défini à l'article
L. 380-1 (nouveau) du code de la sécurité sociale, introduit
par l'article 3 du projet de loi.
Il insère dans le code de la sécurité sociale un article
L. 380-3 qui exclut du champ d'application de l'article L. 380-1 les
personnes suivantes :
1°
Les membres du personnel diplomatique et consulaire en
poste en France, les fonctionnaires d'un Etat étranger et personnes
assimilées, ainsi que les membres de leur famille qui les accompagnent.
Cette exception vise à assurer la conformité du droit
français à la convention de Vienne.
2°
Les personnes qui sont venues en France pour suivre un
traitement médical ou une cure.
Cette référence vise les personnes qui relèvent d'un
régime de protection sociale étranger.
3°
Les personnes résidant en France qui, au titre d'une
activité professionnelle exercée par elles-mêmes ou par un
membre de leur famille sur le territoire d'un Etat étranger, ont la
faculté d'être affiliées au régime d'assurance
maladie de cet Etat, si cette affiliation leur permet d'obtenir la couverture
des soins reçus sur le territoire français.
Cette rédaction vise les travailleurs frontaliers français. A la
demande des intéressés, le projet de loi prévoit que
l'affiliation au régime général sur critère de
résidence ne concernera pas les travailleurs frontaliers qui peuvent
bénéficier, au titre de l'affiliation à un régime
étranger, de la couverture des soins reçus en France. Les
travailleurs frontaliers continueront par conséquent à relever du
régime du pays où ils exercent leur activité
professionnelle. Cette disposition permet d'éviter que ces personnes ne
soient obligées de cotiser à la fois au régime
général français et au régime étranger dont
ils relèvent.
Au regard du droit aux prestations d'assurance maladie, il convient de
distinguer la situation des frontaliers travaillant en Suisse de la situation
des frontaliers travaillant dans un pays de l'Union européenne.
La situation des frontaliers travaillant dans un pays de l'Union
européenne est explicitement prévue par le Règlement
communautaire CE n° 1408/71 du 14 juin 1971. Les prestations en
nature de l'assurance maladie-maternité sont servies aux travailleurs
frontaliers en activité et aux membres de leur famille par l'institution
compétente du lieu de leur résidence à condition que le
travailleur frontalier se fasse inscrire auprès de cette institution au
moyen du formulaire E 106 établi par l'institution compétente du
pays d'emploi. L'institution d'affiliation rembourse les dépenses ainsi
engagées à l'institution du lieu de résidence.
Le travailleur frontalier a toutefois la possibilité d'obtenir les
prestations de l'assurance maladie-maternité non seulement dans le pays
où il réside, mais encore sur le territoire du pays d'emploi.
Ces dispositions sont applicables aux membres de la famille des travailleurs
frontaliers à condition que, sauf cas d'urgence, un accord ait
été conclu entre les autorités compétentes ou
à défaut que l'institution compétente (celle du pays
d'emploi) ait donné son autorisation préalable.
La situation des travailleurs frontaliers en Suisse est en revanche plus
complexe. Il convient pour déterminer la législation nationale de
sécurité sociale qui leur est applicable de se
référer aux dispositions de la convention franco-suisse de
sécurité sociale du 3 juillet 1975, et notamment au principe
général mentionné en son article 7 qui dispose que
" les travailleurs salariés exerçant leur activité
professionnelle sur le territoire de l'un des Etats sont soumis à la
législation de cet Etat, même s'ils résident sur le
territoire de l'autre Etat ou si leur employeur ou le siège de
l'entreprise qui les occupe se trouve sur le territoire de ce dernier
Etat ".
En dépit de l'absence de dispositions de coordination pour le service
des prestations de l'assurance maladie-maternité dans la convention
franco-suisse, le principe d'application de la législation du lieu de
travail est de portée générale et s'étend
également au risque maladie-maternité.
En conséquence, les frontaliers travaillant en Suisse sont
généralement affiliés, du fait de leur emploi, à un
régime d'assurance maladie ou une société d'assurance de
ce pays, organismes qui n'assurent pas toujours la couverture des soins
reçus par l'intéressé ou ses ayants droit sur le
territoire français.
Les travailleurs frontaliers en Suisse sont donc souvent parallèlement
affiliés à l'assurance personnelle française ou couverts
par des contrats d'assurance privée en France. Aux termes de l'article
R. 741-32 du code de la sécurité sociale, l'affiliation
à un régime obligatoire dans le pays d'emploi ne fait en effet
pas obstacle à l'adhésion à l'assurance personnelle,
dès lors que les intéressés n'ont pas droit, dans le cadre
d'un accord international, au versement en France des prestations en nature de
l'assurance maladie-maternité. Dans ce cas, la cotisation à
l'assurance personnelle est assise sur une base forfaitaire annuelle
égale à la moitié du plafond des cotisations de
sécurité sociale, soit une cotisation annuelle de 12.723 francs.
Une circulaire ministérielle
(B.O. Sécurité sociale
n° 94-68 du 1
er
septembre 1994)
précise
plus particulièrement les conditions d'application du régime de
l'assurance personnelle aux travailleurs frontaliers exerçant une
activité salariée en Suisse.
S'agissant des travailleurs frontaliers en Suisse qui opteront pour
l'affiliation sur critère de résidence - parce que le
régime suisse auxquels ils sont affiliés n'assurent pas la
couverture des soins reçus en France - votre commission estime qu'il
sera justifié de prévoir, par voie réglementaire, des
conditions de cotisation plus favorables que celles prévues par le droit
commun, à l'image de la cotisation forfaitaire dont ils
bénéficiaient auparavant pour l'adhésion à
l'assurance personnelle.
Sont enfin exclus du champ d'application de l'article L. 380-1 du code de
la sécurité sociale :
4°
Les agents retraités d'une organisation
internationale qui ne sont pas également titulaires d'une pension
française, ainsi que les membres de leur famille, dès lors qu'ils
sont couverts dans des conditions analogues à celle du régime
général français d'assurance maladie et maternité
par le régime propre à l'organisation dont ils relevaient quand
ils étaient en activité.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée
nationale
L'Assemblée nationale a adopté un amendement remplaçant au
3° de l'article L. 380-3 du code de la sécurité sociale
la référence à une affiliation au régime
d'assurance maladie d'un Etat étranger par la référence
à une affiliation à titre volontaire à un régime
d'assurance maladie, conformément à la législation de cet
Etat.
Cette rédaction permet de mieux prendre en compte la situation des
travailleurs frontaliers en Suisse où il existe plusieurs régimes
d'assurance maladie auxquels l'affiliation n'est pas obligatoire.
III - Les propositions de votre commission
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans
modification.
CHAPITRE 2
-
Dispositions financières
Section 1
-
Transferts financiers
La
suppression de l'assurance personnelle en conséquence de l'institution
d'une couverture de base sur le critère de la résidence
entraîne des transferts financiers d'une rare complexité.
Les choix que traduit le projet de loi sont critiquables à trois titres
(voir également exposé général
2
ème
partie - D)
:
-
la complexité de l'affectation de certaines recettes est
accrue
alors qu'il importe de rendre plus lisibles les ressources des
différentes caisses de sécurité sociale ;
-
la compensation de moindres dépenses se fait par de moindres
recettes
, alors qu'il serait plus logique d'opérer une compensation
entre dépenses ;
-
l'Etat économise de l'argent
sur le financement de la
couverture maladie de base (351 millions de francs) mais
le solde de
ces transferts se traduit en revanche par une charge accrue pour la CNAMTS
(0,9 milliard de francs qui viennent s'ajouter au déficit actuel de
l'assurance personnelle) et un
manque à gagner pour la CNAF
(300
millions de francs) qui perd de surcroît une recette dynamique en
contrepartie de l'abandon d'une dépense relativement stable.
Aussi, votre commission vous propose-t-elle un dispositif simplifié.
•
Compenser la suppression des cotisations d'assurance
personnelle prise en charge aujourd'hui par la CNAF par l'amorce d'un retour de
l'Allocation parent isolé (API)
(
article 10
).
La charge de l'allocation parent isolé a été
transférée au budget de l'Etat par la loi de finances pour 1999.
Il s'agissait de réparer les conséquences du " pas de
clerc " du Gouvernement qui avait décidé dans la loi de
financement de la sécurité sociale pour 1998 de placer les
allocations familiales sous condition de ressources.
Un an plus tard, il y renonçait au profit d'un abaissement du quotient
familial. Il en résultait :
- une recette supplémentaire pour le budget
général ;
- un rétablissement de dépenses dans le budget de la CNAF.
Cette opération avait été neutralisée par le
transfert, de la CNAF vers budget général, de la prise en charge
de l'API.
M. Jacques Machet, rapporteur de la branche famille pour le projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 1999 commentait ainsi
cette opération :
" Pour votre rapporteur, rien ne justifie, sur le plan des principes,
le financement par l'Etat de l'API qui constitue précisément une
reconnaissance de la fonction parentale. L'API a pour objet de faciliter le
passage difficile que représente l'arrivée d'un enfant ou la
perte d'un soutien familial pour un parent démuni de revenus. Elle
comporte deux objectifs distincts : favoriser le rôle parental et
garantir un minimum de ressources durant le temps nécessaire pour
s'organiser dans la recherche d'un emploi. Le versement de l'allocation est
légitimé par la présence d'un ou de plusieurs enfants.
Elle permet aux parents d'assurer leur identité parentale et d'offrir
une image plus positive aux enfants. Une étude
réalisée par la CNAF en 1997 a montré que l'API avait,
pour ses bénéficiaires, une valeur symbolique que n'avait pas le
RMI. Selon cette étude dont l'objectif était d'analyser ce
qu'étaient devenus les anciens bénéficiaires de l'API, le
RMI est ressenti comme humiliant et stigmatisant ; il est
considéré comme le dernier maillon avant l'entrée dans la
pauvreté. Alors que l'API représentait une reconnaissance de la
fonction parentale, le RMI génère un sentiment de honte et de
culpabilité.
" Compte tenu de son caractère de prestation pour la famille,
justifié par la présence d'enfant, il semble par
conséquent logique que l'API reste gérée et
financée par la branche famille. Le choix de la prise en charge de cette
prestation par l'Etat apparaît purement circonstanciel -il fallait
trouver une prestation d'un montant équivalent au surplus de recettes
fiscales généré pour le budget de l'Etat par la diminution
du plafond du quotient familial- et ne répond à aucune raison de
fond. "
Aussi, votre commission vous propose-t-elle :
- de maintenir intégralement à la CNAF le
prélèvement de 1 % sur les revenus du patrimoine et des
produits de placement ;
- de transférer 60 % du coût de l'API du budget
général vers la CNAF, la CNAF percevrait donc du budget
général une subvention correspondant à 40 % du
coût de l'API ;
- l'Etat constatant une économie budgétaire de 2,52
milliards de francs la neutraliserait par une affectation supplémentaire
de droits sur les tabacs à la CNAMTS ;
- la CNAMTS perçoit cette affection supplémentaire du droit
sur les tabacs en remplacement de la part du prélèvement de
1 % sur les revenus du patrimoine et des produits de placement que votre
commission a maintenu intégralement à la CNAF.
•
Ne pas " éclater " une nouvelle fois les
droits sur les alcools (article 9)
La suppression des cotisations à l'assurance personnelle aujourd'hui
prise en charge par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) conduit le
projet de loi à priver le FSV, au profit de la CNAMTS, d'une partie des
droits de consommation sur les alcools prévus à l'article 403 du
code général des impôts dont il bénéficie
actuellement.
Ces droits sont répartis actuellement en deux parts : 60 %
pour le FSV, 40 % pour l'ensemble des régimes d'assurance maladie
serait éclaté en trois parts : FSV (55 %), ensemble des
régimes d'assurance maladie (40 %), CNAMTS (5 %)
Or, il existe déjà une cotisation sur les boissons alcooliques
qui bénéficie à la seule CNAMTS, instituée par
l'article 26 de la loi n° 83-25 du 19 janvier 1983 (
article L. 245-7 du
code de la sécurité sociale
). Le montant de la cotisation est
actuellement fixé à 0,84 franc par décilitre ou par
fraction de décilitre (
article L. 245-9
).
La CNAMTS bénéficierait ainsi de trois ressources liées
aux alcools : la cotisation sur les boissons alcooliques, un peu plus de
80 % de 40 % des droits 403
8(
*
)
,
5 % " en direct " de ces droits.
LES " DROITS 403 "
Ces
droits de consommation sur les alcools, dits " droits 403 ", du nom
de l'article du code général des impôts les
définissant, étaient affectés à l'origine au seul
Fonds de solidarité vieillesse. Depuis la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1997, ces droits sont répartis entre
le FSV (60 %) et les régimes d'assurance maladie (40 %).
Il s'agit de l'ensemble des droits, à l'exception de ceux perçus
dans les deux départements de la collectivité territoriale de
Corse et du prélèvement effectué au profit du BAPSA
(article 1615 bis du code général des impôts).
Les droits 403 devraient rapporter, en 1999, 4,2 milliards de francs aux
régimes d'assurance maladie et 6,3 milliards de francs au FSV.
Aussi votre commission vous propose-t-elle de laisser inchangée la
répartition des " droits 403 " (60 % FSV, 40 %
régimes d'assurance maladie).
Elle observe que le FSV n'a pas reçu de " compensation " du
fait de la suppression du droit de fabrication sur les alcools (droits 406) par
la dernière loi de finances et la dernière loi de financement
(350 millions de francs).
De sorte que l'avantage laissé au FSV est minime (250 millions de
francs) sachant de surcroît que les excédents du FSV sont
affectés depuis la loi de financement de la sécurité
sociale pour 1999 au fonds de réserve pour les retraites par
répartition.
Cette perte de recettes serait compensée pour la CNAMTS par
l'affectation du prélèvement supplémentaire des droits sur
les tabacs.
•
Maintenir l'affectation intégrale prévue par le
projet de loi de la cotisation sur les véhicules terrestres à
moteur (CVTAM) en faveur de la CNAMTS (article 12)
Votre commission a hésité un moment entre deux attitudes.
La CVTAM prévue à l'article L. 213-1 du code des assurances,
créée en 1967, était censée faire participer les
possesseurs d'automobile aux frais d'assurance maladie occasionnés par
les accidents de la circulation.
En application de l'article 12 du projet de loi, cette taxe ne serait plus
affectée à l'ensemble des régimes obligatoires d'assurance
maladie mais au seul régime des travailleurs salariés au motif
qu'il faut compenser la suppression de la contribution des autres
régimes d'assurance maladie au déficit de l'assurance personnelle.
Votre commission constate que l'affectation exclusive de cette taxe à la
CNAMTS fragilise singulièrement son bien fondé, car elle
continuera d'être acquittée par tous les possesseurs d'automobiles
quel que soit leur régime d'affiliation.
A contrario
, votre commission a été sensible à la
simplification opérée par le projet de loi qui met fin à
l'un des travers du financement de la sécurité sociale, celui
d'un éclatement des contributions entre plusieurs
bénéficiaires.
C'est ce dernier argument qui l'a emporté dans son esprit.
Mais votre commission appelle à une rationalisation de la
fiscalité sociale par l'examen systématique des " recettes
de poche " qui lui sont affectées.
•
Majorer en conséquence le prélèvement sur
les droits sur les tabacs opéré au profit de la CNAMTS (article
11)
Conséquence des propositions précédentes, le
prélèvement sur les tabacs opérés au profit de la
CNAMTS serait majoré. Ses recettes seront ainsi peu homogènes et
plus cohérentes.
Votre commission souhaite que le niveau de ce prélèvement
compense la charge supplémentaire que fait peser le projet de loi sur la
CNAMTS à hauteur de 0,9 milliard de francs qui viennent s'ajouter au
déficit de l'assurance personnelle qu'elle continuera à subir.
Il appartiendra à la loi de finances pour 2000 d'en décider ainsi.
Art.
9
(art. L. 814-5 et L. 195-3 du code de la sécurité
sociale)
Incidences financières sur le Fonds de
solidarité vieillesse
Cet
article vise à supprimer la prise en charge, par le Fonds de
solidarité vieillesse (FSV), des cotisations d'assurance personnelle des
titulaires de l'allocation spéciale et à réduire en
contrepartie de cinq points la part de droits sur les alcools affectée
au FSV.
I - Le texte du projet de loi
Le
paragraphe I
modifie l'article L. 814-5 relatif aux dépenses
supportées par le FSV. Dans l'économie générale du
projet de loi visant à remplacer plusieurs contributeurs par un
financeur unique, le FSV n'aura plus à supporter la prise en charge des
cotisations d'assurance personnelle des titulaires de l'allocation
spéciale, c'est-à-dire d'une partie des
bénéficiaires du minimum vieillesse.
L'allocation spéciale est l'une des allocations du premier niveau du
minimum vieillesse. Elle est attribuée, sous conditions de ressources et
de résidence stable et régulière en France, aux personnes
âgées de plus de 65 ans (60 ans en cas d'inaptitude au travail)
qui ne relèvent d'aucun régime d'assurance vieillesse de base.
Depuis le 1
er
janvier 1999, son montant annuel
s'élève à 17.545 francs pour une personne seule et
35.090 francs pour un ménage. Les ressources des
bénéficiaires ne doivent pas excéder le plafond de
43.512 francs pour une personne seule et 76.215 francs pour un couple.
En 1998, le montant de l'allocation spéciale s'est élevé
à 1,12 milliard de francs, versés au profit d'environ 68.400
bénéficiaires.
L'article L. 741-4 du code de la sécurité sociale
prévoit actuellement que l'aide sociale prend en charge les cotisations
d'assurance personnelle des titulaires de l'allocation spéciale.
Cette prise en charge est totale
(art. R. 741-23).
Dans les quinze
premiers jours d'un trimestre, ces cotisations sont payées d'avance par
le FSV à la caisse nationale d'assurance maladie
(art.
R. 741-24).
En application de l'article D. 814-19 du même code, ces cotisations sont
retracées en dépenses du Service de l'allocation spéciale
vieillesse (SASV), lui-même intégralement financé par le
Fonds de solidarité vieillesse
(art. L. 135-2 du code de la
sécurité sociale).
47.500 bénéficiaires du minimum vieillesse sont
concernés, ce qui représente, en 1998, une dépense de
592 millions de francs.
Le
paragraphe II
modifie la part de droits sur les alcools
affectée au FSV, qui est actuellement de 60 %, contre 40 % pour les
régimes obligatoires d'assurance maladie, depuis la loi de financement
de la sécurité sociale pour 1997. Le FSV a
bénéficié, en effet, d'une réduction de charges par
la création de la CADES qui a repris les 110 milliards de francs de
dettes transférés en 1993.
Cette part serait désormais de 55 %, soit en baisse de cinq points,
correspondant à 600 millions de francs.
L'article 38 du projet de loi, relatif à son entrée en vigueur,
précise que cette disposition est applicable aux versements
effectués au profit du FSV et de la CNAMTS à compter du
1
er
janvier 2000.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission propose de simplifier et de clarifier les transferts
financiers dont est assortie la suppression de l'assurance personnelle
(cf. ci-dessus)
.
S'agissant du présent article, elle considère qu'il est
délicat de faire varier, deux ans à peine après en avoir
fixé les principes par la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1997, la répartition des droits sur
les alcools. En effet, la nouvelle répartition -précisée
par l'article 11 du projet de loi- prévoit un troisième
bénéficiaire : la CNAMTS, qui bénéficiera de 5 % de
ces droits à titre exclusif.
Elle constate que la suppression de l'article 406 A du code
général des impôts (droit de fabrication sur les alcools),
résultant tant de la dernière loi de finances que de la
dernière loi de financement, a diminué les recettes du FSV de
350 millions de francs, sans qu'il y ait eu contrepartie.
Par ailleurs, l'article 2 de la loi de financement pour 1999 a posé le
principe d'une affectation des excédents du FSV au fonds de
réserve pour les retraites
(nouvel article L. 135-6 du code de
la sécurité sociale)
; il n'est donc pas inutile que cet
organisme voit ses dépenses diminuer, sans que ces recettes diminuent
dans des proportions strictement identiques.
Aussi, votre commission propose-t-elle de supprimer le II de cet article.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.
Art.
10
(art. L. 161-15, L. 381-2 et L. 245-16 du code de la
sécurité sociale)
Incidences financières de la
mise en place
de la couverture obligatoire sur la branche famille
Cet
article vise à supprimer la prise en charge, par les caisses
d'allocations familiales, des cotisations d'assurance personnelle, notamment
des titulaires de l'allocation parent isolé, et à diminuer en
contrepartie les ressources affectées à la CNAF.
I - Le texte du projet de loi
Le paragraphe I
supprime les dispositions du code de la
sécurité sociale qui assurent la prise en charge, par les caisses
d'allocations familiales :
- des cotisations d'assurance personnelle des ayants droit
d'assurés décédés ou des personnes
divorcées, ne bénéficient pas de l'assurance maladie et
maternité à un autre titre, lorsqu'elles ont ou ont eu au moins
trois enfants à charge
(combinaison des articles L. 161-15 et
R. 161-5-1 du code de la sécurité sociale)
;
- des cotisations d'assurance personnelle des titulaires de l'allocation
parent isolé
(art. L. 381-2 du code de la sécurité
sociale).
Le paragraphe II
prévoit que le prélèvement social
de 2 % sur les revenus du patrimoine et les produits de placement, dont le
produit est actuellement versé pour moitié à la CNAF et
pour moitié à la CNAVTS, serait réparti de la
manière suivante :
- 50 % pour la CNAVTS (inchangé) ;
- 28 % pour la CNAMTS, nouvelle branche bénéficiaire,
- 22 % pour la CNAF (au lieu de 50 %).
Affectation du prélèvement social
Droit en vigueur |
Projet de loi |
||
CNAVTS |
1 % |
CNAVTS |
1 % |
CNAF |
1 % |
CNAF |
0,44 % |
|
|
CNAMTS |
0,56 % |
Total |
2 % |
Total |
2 % |
L'article 38 du projet de loi, relatif à son
entrée en
vigueur, précise que les dispositions de l'article 10 sont applicables
aux versements effectués au profit des organismes mentionnés
à compter du 1
er
janvier 2000.
Cet article a été adopté sans modification par
l'Assemblée nationale après qu'eut été
précisé à la demande de MM. Bernard Accoyer et
Jean-Luc Préel, le maintien du bénéfice à titre
gratuit du régime général des personnes veuves et
divorcées ayant élevé plus de trois enfants.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission propose de simplifier et de clarifier les transferts
financiers dont est assortie la suppression de l'assurance personnelle
(cf. ci-dessus).
Le présent article propose de priver la CNAF d'une partie du 1 %
social en contrepartie de la diminution de ses dépenses résultant
de la suppression de la prise en charge des cotisations d'assurance personnelle.
Votre commission préfère procéder à cette
contrepartie en rétablissant à la charge de la CNAF une partie du
coût de l'Allocation de parent isolé (API).
Il est donc proposé que la CNAF reprenne à sa charge 60 % de
l'API, l'Etat n'en finançant plus que 40 %.
La diminution de charge qui en résulte pour le budget
général lui permet, à équilibre inchangé,
d'affecter à la CNAMTS une part supplémentaire des droits sur les
tabacs. Cette recette se substitue pour la CNAMTS à la partie du 1 %
CNAF que le présent article lui affectait.
En conséquence, elle vous propose le remplacement du paragraphe II du
présent article par une disposition prévoyant -par une
modification de l'article L. 524-1 du code de la sécurité
sociale- de ramener la subvention de l'Etat à la CNAF à 40 % du
coût de l'API.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.
Art.
11
(art. L. 241-2 du code de la sécurité
sociale)
Enumération des ressources complémentaires
des régimes obligatoires de base
Cet
article vise à préciser les nouvelles recettes de la CNAMTS, pour
faire face aux dépenses résultant de la couverture maladie de
base.
I - Le texte du projet de loi
Le présent article vise à remplacer le dernier alinéa de
l'article L. 241-2, relatif à l'affectation à la CNAMTS
d'une fonction du droit de consommation sur les tabacs
(art. 575 du code
général des impôts).
Ces nouvelles ressources seraient :
- une fraction supplémentaire, qui sera fixée par la loi de
finances pour 2000, du produit du droit de consommation sur les tabacs ;
cette répartition est actuellement de 9,1 % selon l'article 46 de
la loi de finances pour 1998, modifiant l'article 49 de la loi de finances
pour 1997.
- une fraction fixée à 5 % du droit de consommation sur
les alcools (article 403 du code général des impôts),
à l'exception du produit perçu dans les départements de la
collectivité territoriale de Corse et du prélèvement
perçu au profit du BAPSA
(cf. art. 9)
;
L'article 38 du projet de loi, relatif à son entrée en vigueur,
précise que cette disposition est applicable aux versements
effectués au profit de la CNAMTS à compter du 1
er
janvier 2000.
- une fraction du prélèvement social sur les revenus du
patrimoine et les produits de placement
(cf. art. 10)
.
II - Les propositions de votre commission
En conséquence des amendements qu'elle vous a proposés aux
articles 9 et 10
(cf. supra)
, votre commission vous propose un
amendement qui a pour objet de supprimer, au titre des recettes de la CNAMTS,
tant la fraction de 5 % du droit de consommation sur les alcools que la
fraction du prélèvement social sur les revenus du patrimoine et
les produits de placement.
En revanche, la CNAMTS bénéficiera d'une part accrue des droits
sur les tabacs. Ses recettes seront ainsi plus homogènes et plus
cohérentes.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.
Art.
12
(art. L. 213-1 du code des assurances)
Modification de
l'affectation de la cotisation due par les personnes assurant des
véhicules terrestres à moteur
Cet
article vise à affecter l'intégralité de la cotisation sur
les véhicules terrestres à moteur (CVTAM) la CNAMTS.
I - Le texte du projet de loi
Le présent article prévoit l'affectation intégrale de la
CVTAM à la CNAMTS, et non à l'ensemble des régimes
d'assurance maladie. Cet article tire la conséquence de la suppression
de l'assurance personnelle, prévue à l'article 2 du projet de
loi, et de la répartition de son déficit entre les régimes
d'assurance maladie.
Cette cotisation est répartie actuellement entre les régimes
d'assurance maladie selon la clef suivante
9(
*
)
:
Affectation apparente de la cotisation VTAM en 1998
(en millions de francs)
CNAMTS |
81,32 % |
4.690 |
Autres régimes |
18,18 % |
1.080 |
TOTAL |
100 % |
5.770 |
L'étude d'impact retient le chiffre d'une recette
supplémentaire pour la CNAMTS de 830 millions de francs, alors que
les autres régimes ont apparemment reçu 1,1 milliard de
francs. En effet, deux régimes sont intégrés
financièrement à la CNAMTS, le régime des salariés
agricoles (170 millions de francs de CVTAM) et la caisse nationale
militaire de sécurité sociale (80 millions de francs).
Dès lors, la CNAMTS a bénéficié réellement
de 4,94 milliards de francs et bénéficiera de 830 millions
de francs supplémentaires.
Affectation réelle de la cotisation VTAM à la CNAMTS
(en millions de francs)
CNAMTS |
4.690 |
Salariés agricoles |
170 |
Caisse militaire |
80 |
TOTAL |
4.940 |
L'article 38 du projet de loi, relatif à son
entrée en
vigueur, précise que les dispositions de l'article 12 sont applicables
aux cotisations recouvrées par l'ACOSS au titre de l'année 2001.
II - Les propositions de votre commission
Votre rapporteur estime que, dans l'immédiat, cette affectation
intégrale contribue à la simplification des recettes. En
revanche, il considère que la cotisation sur les véhicules
terrestres à moteur risque de perdre une partie de sa justification.
Cette contribution était censée, en effet, représenter
l'effort spécifique des possesseurs d'automobiles aux frais d'assurance
maladie occasionnés par les accidents de circulation.
Dès lors, un non-salarié ne verra guère de justification
à s'acquitter d'une contribution censée financer les
dépenses d'assurance maladie liés aux accidents de la
circulation, mais bénéficiant au seul régime
général. Cette cotisation fait partie des " recettes de
poche " de la sécurité sociale instituées avant la
création de la CSG. Son maintien apparaît à terme
difficilement fondé.
Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous
propose d'adopter cet article assorti d'un amendement de précision.
Art.
13
(art. 38 de la loi n° 88-1088 du 1
er
décembre
1998
relative au revenu minimum d'insertion)
Transferts financiers
entre l'Etat et les départements
Cet
article tire les conséquences du transfert de compétences
résultant de la CMU et du fait que les départements n'auront plus
à assurer la prise en charge des dépenses d'aide médicale
comme ils le font actuellement pour 9,1 milliards de francs. Il doit en
résulter une diminution de l'ordre de 8,69 milliards de francs au
titre de leur dotation générale de décentralisation (DGD)
compte tenu d'un abattement de 5 %.
I - Les principes financiers posés en matière de transfert
de compétences
Conformément à la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983, relative
à la répartition des compétences entre les communes, les
départements, les régions et l'Etat, tout transfert de
compétences doit faire l'objet d'un transfert équivalent de
ressources.
Ainsi, conformément à l'article 1614-1 du code
général des collectivités territoriales,
" tout
accroissement net de charges résultant des transferts de
compétences effectués entre l'Etat et les collectivités
territoriales est accompagné du transfert concomitant par l'Etat aux
communes, aux départements et aux régions des ressources
nécessaires à l'exercice normal de ces compétences. Ces
ressources sont équivalentes aux dépenses effectuées,
à la date du transfert, par l'Etat au titre des compétences
transférées et évoluent chaque année comme la
dotation globale de fonctionnement. Elles assurent la compensation
intégrale des charges transférées. "
De fait les transferts de charges opérés sur la base des lois de
1983 ont reposé sur des
principes simples
:
- la
simultanéité
du transfert de compétences
et du transfert de ressources : les deux opérations doivent
intervenir de manière concomitante ;
- les ressources transférées doivent être
intégralement équivalentes
aux dépenses
effectuées par la collectivité en charge de la compétence
à la date du transfert de compétences. L'évaluation des
accroissements ou diminution de charges est effectuée non seulement
globalement pour l'ensemble des collectivités concernées, mais
également collectivité par collectivité.
C'est pourquoi les transferts de charges effectués en 1983 ont
été effectués sous le contrôle de la Commission
consultative sur l'évaluation des charges résultant des
transferts de compétences. Cette dernière a néanmoins fait
l'objet de certains reproches dans la mesure où elle s'est toujours
refusée à effectuer un suivi de l'évolution réelle
des coûts liés aux charges transférées.
- la compensation financière des transferts de charges a
été effectuée par le
transfert de ressources
fiscales
et, à titre subsidiaire, par le transfert de
ressources
budgétaires
à travers la dotation générale de
décentralisation.
Ainsi, en 1983, les compétences transférées aux
régions et aux départements ont donné lieu au transfert du
produit de divers impôts d'Etat : " taxe sur les cartes
grises " pour les régions ; " vignette automobile "
et droits d'enregistrement sur les mutations d'immeuble pour les
départements.
En 1983, il avait été prévu que la moitié au moins
des transferts de charges devait être financée par le transfert
d'impôts d'Etat ; la DGD correspond, quant à elle, la
première année du transfert de compétences, au solde
destiné à compenser la fraction de l'accroissement de charge qui
n'est pas financée par l'augmentation des ressources fiscales des
collectivités locales.
Dans la mesure où la collectivité territoriale est
réputée assumer la responsabilité de la gestion de la
compétence transférée, la DGD est uniquement
indexée sur la DGF.
Cet article procède à une
opération
symétrique
de celle opérée en 1983 : la
compétence qui est transférée par les départements
doit donner lieu à un transfert de ressources à l'Etat qui
assurera en partie le financement de la CMU.
De fait, la mise en place de la CMU nécessite de procéder
à un mouvement de diminution de la DGD des départements dans la
mesure où ils cessent d'exercer une compétence.
L'exercice est néanmoins rendu moins clair que celui pratiqué
dans le cadre des lois de mars 1983 : en effet, il n'y a pas à
proprement parler transfert d'une compétence à l'Etat, mais
plutôt aux organismes d'assurance maladie chargés de gérer
la CMU qui bénéficient de l'aide financière de multiples
intervenants dont l'Etat.
II - Le texte du projet de loi
Le
paragraphe I
fixe les
règles applicables au transfert
financier
.
Le montant du transfert opéré sur la DGD de chaque
département sera égal "
au montant des dépenses
consacrées à l'aide médicale en 1997, diminué de 5
% et revalorisé en fonction du taux d'évolution de la DGF pour
1998, 1999 et 2000
. "
• La
base de calcul
de la diminution de la DGD est
constituée par l'ensemble des dépenses
" consacrées à l'aide médicale "
dans chaque
département.
Ce point est relativement important car il aboutit à faire prendre en
charge, sur la DGD des départements, à la fois des
dépenses qui résultaient du respect des obligations
légales et des dépenses découlant de la politique d'action
sociale poursuivie spécifiquement dans chaque département.
La distinction joue à la fois sur les conditions d'admission et sur la
nature des dépenses médicales prises en charge.
Sont admis de plein droit à l'aide médicale aux termes de la
loi :
- les personnes bénéficiant du RMI, les titulaires de
l'allocation de veuvage et les jeunes âgés de 17 à 25 ans
qui satisfont aux conditions de ressources et de résidence fixées
pour l'attribution du RMI.
En plus de ces bénéficiaires, le département participe aux
dépenses de soins de personnes en difficulté :
- soit en prévoyant un barème départemental de ressources
défini par le règlement départemental d'aide
sociale : celui-ci doit tenir compte du nombre de personnes à
charge, la part des frais restant à la charge du
bénéficiaire doit être définie de manière
forfaitaire ou en pourcentage, en fonction des charges dont celui-ci fait
état et des ressources dont il dispose ;
- soit à la suite d'un examen au cas par cas de la situation de
l'intéressé.
S'agissant des dépenses prises en charge, la loi mentionne, à
titre obligatoire, les frais de soins restant à la charge de
l'assuré, le forfait hospitalier journalier et les cotisations
d'assurance personnelle. Il reste que les départements ont souvent
prévu des dispositions plus favorables et, en particulier, la prise en
charge des cotisations d'un régime complémentaire d'assurance
maladie.
De fait, l'ensemble des dépenses d'aide médicale est pris en
compte au moment du transfert, ce qui appelle des observations comme on le
verra ultérieurement.
Le montant des dépenses d'aide médicale fait l'objet d'un
abattement de 5 %.
Ce point pourrait apparaître comme une atténuation du principe de
la compensation intégrale ; la réalité est
différente dans la mesure où la réduction forfaitaire de
5 % vise à tenir compte du fait que les dépenses d'aide
médicale des départements sont supérieures à ce qui
devrait résulter de l'application normale de la réglementation.
En effet, conformément à l'article 188-3 du code de la famille et
de l'aide sociale, la prise en charge est subordonnée à la
condition que l'intéressé fasse valoir ses droits aux prestations
de l'assurance maladie et maternité ainsi qu'aux garanties auxquelles il
peut prétendre d'une mutuelle, d'une entreprise d'assurances ou d'une
institution de prévoyance.
En réalité, du fait des difficultés de croisement entre
les fichiers des CPAM, des URSSAF et des départements, il apparaît
de nombreux cas où l'aide médicale est versée à des
personnes qui, soit à titre d'ayant droit, soit à titre
personnel, détiennent des droits à prestations au titre de
l'assurance maladie.
L'aide médicale est souvent financée par les départements
pour des personnes ayant travaillé au moins 30 heures sur un mois, qui
sortent de prison ou qui sont titulaires de l'API, qui devraient avoir des
droits ouverts à l'assurance maladie mais qui ont souvent des
difficultés à les faire valoir.
Pour tenir compte de ces phénomènes, il sera donc appliqué
un taux forfaitaire de réfaction de l'assiette de calcul du
prélèvement sur la DGD : il a été
appliqué à l'ensemble des départements en partant du
postulat que l'effet des doubles comptes jouait uniformément sur le
territoire national. Le mécanisme s'inscrit donc sinon dans la lettre,
du moins dans la logique, d'un transfert de compétences.
• Le choix de
l'année de référence du
calcul
du prélèvement appelle également quelque
précision.
L'année 1997 a été choisie, s'agissant d'un dispositif
applicable au 1
er
janvier 2000, afin de tenir compte des
données inscrites dans le compte administratif définitif des
budgets départementaux. Les dépenses sont actualisées en
tenant compte de l'indice d'évolution de la DGF sur les années
1998, 1999 et 2000.
Selon M. Raoul Briet, directeur de la sécurité
sociale
10(
*
)
, ce choix serait relativement
avantageux pour les collectivités locales puisque les dépenses
seront actualisées pour les trois dernières années en
fonction du taux de croissance annuel de la DGD (de l'ordre de 2 %), qui
sera un taux très inférieur à l'évolution des
dépenses d'aide médicale, qui avoisine en moyenne 10 % par
an au cours de ces dernières années.
• Le prélèvement sera opéré, s'il y a
lieu, sur le produit des recettes fiscales transférées en 1983
dans le cadre des lois portant répartition des compétences.
Deux hypothèses se présentent :
- soit, dans le département, le montant des dépenses
inscrites au titre de l'aide médicale en 1997 est inférieur au
montant de la DGD : l'imputation ne portera que sur cette dotation ;
- soit le montant desdites dépenses est supérieur à
celui de la DGD : dans ce cas, le département devra verser au
budget de l'Etat une fraction de ses ressources fiscales
transférées.
M. Michel Mercier, président de la commission sociale de l'ADF,
entendu en audition, a souligné que la deuxième hypothèse
n'était pas un cas d'école et que, dans de nombreux
départements, il apparaîtrait " optiquement " le
versement d'une contribution du département à l'Etat à la
suite de la mise en place de la CMU.
• La procédure est placée sous
le
contrôle
de la
Commission consultative sur l'évaluation des
charges résultant des transferts de compétences
.
Cette commission, composée de huit représentants des communes,
quatre représentants des conseils généraux et quatre
représentants des conseils régionaux et présidée
par un magistrat de la Cour des comptes, est chargée de donner un avis
sur l'évaluation des accroissements et diminutions de charge. Elle
examine notamment la liste et le montant des dépenses effectuées
à la date du transfert de compétences et vérifie la
concordance pour chaque collectivité
(décret n° 83-178 du
10 mars 1983)
. Il est à noter que le décret relatif à
cette commission n'envisage pas le cas d'un transfert de charges des
collectivités locales vers l'Etat et qu'il devra vraisemblablement
être modifié pour tenir compte de ce projet de loi.
Le
paragraphe II
de cet article précise la
nature comptable
des dépenses qui seront prises en compte
pour le calcul du
prélèvement de la DGD.
Il s'agit des dépenses inscrites au titre de l'aide médicale,
soit dans les chapitres relatifs à l'aide médicale en application
du code de la famille et de l'aide sociale, soit dans les chapitres relatifs
à l'insertion au titre de la prise en charge des cotisations d'assurance
personnelle des titulaires du RMI.
Il est précisé que ne sont pas prises en compte les
dépenses correspondant "
aux charges des services communs
réparties entre services utilisateurs
".
Ne sont donc prises en compte que les dépenses d'intervention
supportées par les collectivités territoriales, à
l'exclusion des dépenses de fonctionnement : il n'est pas
opéré de transfert des personnels actuellement en charge de
l'aide médicale de l'Etat dans les services des départements. Ces
derniers sont invités à redéployer leurs moyens de
personnel correspondant vers d'autres fonctions.
Enfin, le
paragraphe III
de cet article procède à un
ajustement de conséquence
concernant l'obligation pour les
départements d'inscrire dans leur budget, pour l'insertion des
bénéficiaires du RMI, un crédit au moins égal
à 20 % des sommes versées au cours de l'exercice
précédent au titre de l'allocation RMI.
Cette disposition, prévue à l'article 38 de la loi n°
88-10888 du 1
er
écembre 1988 relative au RMI, a
déjà appelé diverses objections de la part de votre
commission, dans la mesure où elle a pour effet de figer, dans les
budgets départementaux, une fraction des crédits d'intervention
qui sont donc reconduits d'année en année, sans pouvoir
être utilisés à des actions de lutte contre l'exclusion
autres que celles en faveur de l'insertion des titulaires du RMI.
L'article 38 précité prévoit un aménagement dans
la mesure où il permet que les dépenses résultant de la
prise en charge des cotisations d'assurance personnelle ou des frais
médicaux des titulaires du RMI, soient imputées sur les 20 %
de crédits préaffectés, dans la limite de 3 % de ces
crédits en métropole (3,75 % en outre mer). De fait, la mise
en oeuvre de la CMU rend cette procédure inutile.
C'est pourquoi il est procédé à un ajustement sur le
taux de crédits devant être consacrés obligatoirement
à l'insertion des bénéficiaires du RMI, qui passe de
20 % à 17 % du montant des crédits relatifs au
versement de l'allocation dans les départements (16,25 % en outre
mer).
III - Les propositions de votre commission
Votre commission a examiné avec attention le principe du
prélèvement de 8,69 milliards de francs sur la DGD des
départements mis en oeuvre à l'occasion de l'instauration de la
CMU.
Le passage d'un dispositif d'aide sociale décentralisée
à un mécanisme de protection sociale
généralisé, apparemment plus séduisant en raison de
son caractère général et universel, risque parfois de
soulever des déceptions : le nouveau dispositif risque d'être
impersonnel et moins apte qu'auparavant à assurer un véritable
accompagnement des assurés sociaux.
Il reste que le caractère automatique d'une partie des admissions
réalisées au titre de l'aide médicale de base
présentait de réels inconvénients. Il faisait des
départements une sorte de " caisse d'enregistrement "
financière des assurés sociaux, au prix de la confrontation avec
un certain nombre de lourdeurs administratives dont les départements
n'étaient pas responsables,.
Pour autant, l'action des départements en matière
d'accès aux soins de plus démunis ne doit pas être
sous-estimée
a posteriori
.
L'ODAS, dans une note récente
11(
*
)
,
soulignait qu'en 1998, huit départements sur dix avaient mis en place un
barème d'admission totale de plein droit, fixant souvent un seuil de
ressources de l'ordre du RMI majoré de 25 %.
Quatre départements sur dix ont prévu une prise en charge
totale des personnes ayant des ressources supérieures au RMI (soit 2.502
francs par mois pour une personne seule). Ce barème se conjugue souvent
avec un barème d'admission partielle pour un niveau de revenu
supérieur ou égal au minimum vieillesse (deux fois sur trois).
Un autre élément de satisfaction réside dans le fait que
75 % des départements prononçaient l'admission à
l'aide médicale de plein droit dans un
délai de 15 jours
à compter du dépôt de la demande.
Enfin, il est à noter qu'un département sur deux effectuait des
remboursements au-delà des tarifs de la sécurité sociale,
notamment pour les soins dentaires et les lunettes.
Depuis 1992, l'accès aux soins des personnes démunies ou en
difficulté, géré par les départements, n'a pas
été contre-performant ; les innovations conduites au niveau
local ont souvent permis les prises de conscience et les expériences
concrètes qui sont à l'origine du présent texte.
Au-delà des objectifs généraux et sur le plan
strictement financier, votre commission n'a pas estimé qu'il y avait
lieu de remettre en cause le dispositif de compensation financière sur
la DGD qui a été mis en place à l'issue d'une concertation
avec l'Assemblée des Départements de France et qui tient compte,
par l'intermédiaire de la mise en place du coefficient de
réduction de 5 %, du poids de diverses charges indues qui pesaient
sur les finances départementales.
Cette réduction forfaitaire prise en charge indirectement par le
budget de l'Etat, représente au total une somme de l'ordre de 450
millions de francs.
Certains ont fait valoir que plutôt que d'appliquer uniformément
le coefficient de 5 % à l'ensemble des départements, il
aurait été préférable de le répartir de
manière différenciée afin de soutenir les
départements les plus engagés par rapport à ceux qui se
sont limités à appliquer le minimum légal.
En réalité, si l'on raisonne à enveloppe constante, il
apparaît que la modulation du coefficient, si elle avantage certains
départements, en pénalisera automatiquement d'autres.
Si l'on demeure dans la logique des transferts de charges opérés
en 1983, il importe d'opérer des compensations financières qui
correspondent le plus fidèlement possible aux charges réellement
assumées au niveau local.
Les barèmes d'admission complémentaires sont le résultat
de décisions prises pour délibération des conseils
généraux.
Si l'on choisissait d'opérer un transfert en faveur de certains
départements, une contrepartie devrait être trouvée sur les
autres. Il serait très difficile de justifier que les
départements qui ont maintenu le minimum légal subissent, le cas
échéant, un prélèvement au titre de leur DGD
supérieur à la réalité de leurs dépenses
d'aide médicale. La fixation d'un coefficient de réfaction
forfaitaire nul au lieu de 5 % serait critiquable car rien ne permet de
prouver que les prises en charge indues, du fait de droits déjà
ouverts, soient spécialement plus importantes dans certains
départements et pas dans d'autres.
D'une façon plus générale, votre commission souligne que
le but prioritaire de cet article n'est pas d'opérer une
péréquation financière
entre les collectivités
locales, comme on peut le faire par exemple avec la dotation de
solidarité urbaine (DSU) ou la dotation de développement rural
(DDR) au sein de la DGF, mais d'abord de tirer les conséquences
financières d'un transfert de compétences en cherchant à
respecter le plus fidèlement possible la réalité des
dépenses constatées sur le terrain dans chaque département.
A enveloppe budgétaire constante, il apparaît difficile de
concevoir une autre solution de financement qui susciterait plus de
satisfaction que de mécontentement de la part des collectivités
locales concernées.
Les modalités de mise en oeuvre du dispositif appelle également
des précautions : dès lors que la CMU entrera en vigueur au
1
er
janvier 2000, s'ouvrira une phase transitoire au cours de
laquelle les assurés sociaux actuellement bénéficiaires de
l'aide médicale départementale devront faire valider leurs droits
par les CPAM pour l'obtention de la CMU.
Il est prévu, à l'article 26 du projet de loi, que les
titulaires de l'aide médicale à la date d'entrée en
vigueur de ce projet de loi bénéficieront du maintien de leurs
droits jusqu'à l'expiration de la période d'admission à
l'aide médicale et, en tout état de cause, jusqu'au 31 mars 2000.
Il sera important que l'information des bénéficiaires de la CMU
soit assurée pleinement afin de ne pas alourdir la tâche des
départements durant la période de transition.
Tout en comprenant la logique du transfert financier opéré,
votre commission a émis trois observations sur les risques que comporte
pour les finances locales la mise en place de la CMU.
•
Premier risque : une pression accrue sur les
décideurs locaux du fait de l'effet de seuil
La mise en place de la CMU entraînera quasi-inéluctablement des
demandes de la part des personnes qui se trouveront au-dessus du plafond de
ressources prévu pour l'obtention de la couverture complémentaire
gratuite, afin d'obtenir la mise en place d'une prise en charge par une aide
complémentaire spécifique.
Le phénomène de seuil sera le plus apparent dans les
départements -de l'ordre d'une dizaine selon les estimations minimales-
qui ont déjà institué un barème prévoyant
des prises en charge, partielle ou complète, des frais médicaux
pour des personnes dont le revenu est supérieur à 3.500 francs
par mois pour une personne seule. En toute logique, ces personnes devraient
perdre leur droit au 31 mars 2000, ce qui peut soulever d'évidentes
difficultés.
Au demeurant, la demande des assurés sociaux au-dessus du seuil ne
pourra que se généraliser dans la mesure où la CMU,
uniforme sur tout le territoire national, aura automatiquement
un effet
démultiplicateur sur la perception de l'effet de seuil
qui
n'existait pas auparavant.
Même si le Gouvernement met en avant le rôle que pourraient jouer
les Fonds d'action sociale des caisses de sécurité sociale, il
reste qu'au niveau local les départements et les centres communaux
d'action sociale financés par les communes seront naturellement
" en première ligne " pour faire face aux demandes des
assurés sociaux traversant des difficultés financières.
Certes la disposition prévue à l'article 188-2 de l'actuel code
de la famille et de l'aide sociale qui permet au règlement
départemental d'aide sociale de prévoir des dispositions plus
favorables que le minimum légal en matière d'aide médicale
est supprimée par le projet de loi.
Il reste que les départements ont une compétence
générale en matière d'action sociale et que les pressions
seront fortes en faveur de la mise en place de barèmes
complémentaires pour des raisons d'équité.
Ce risque rend d'autant plus nécessaire la mise en place d'une aide
dégressive en fonction du revenu telle que la propose votre commission.
•
Second risque : la sous-estimation de l'impact de la
réforme sur les contingents communaux d'aide sociale
Vestiges du système de financement croisé qui prévalait
avant la décentralisation, les contingents communaux d'aide sociale sont
régis par l'article 93 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative
à la répartition des compétences et par le décret
n° 87-1196 du 31 décembre 1987.
La participation des communes aux dépenses d'aide sociale des
départements est effectuée sur la base des besoins des
départements, de leur potentiel fiscal et des dépenses d'aide
sociale.
La contribution de chaque commune, au-delà d'une élément
fixe qui correspond à la contribution versée en 1984, comprend un
élément variable qui peut varier en fonction de critères
basés sur :
- la situation de la commune au regard de la DGF ou du potentiel
fiscal ;
- le nombre de bénéficiaires des prestations d'aide sociale
ou d'admissions à l'aide sociale ;
- la structure de la population par classe d'âge ou la situation de
l'emploi.
La moyenne nationale de participation des communes aux dépenses nettes
d'aide sociale obligatoire et de santé des départements est
fixée à 15,1 % mais les montants versés par chaque
commune sont très variables.
Le montant total des sommes par les communes, d'un montant de l'ordre de 12
milliards de francs (hors Paris), comprend donc une fraction, de l'ordre de
10 % à 15 % du total selon les départements, qui
correspond à la participation des communes aux dépenses des
bénéficiaires de l'aide médicale départementale.
En toute logique, compte tenu du transfert de compétences
résultant de la CMU, cette fraction aurait dû être
soustraite du montant à prélever de la DGD des
départements et déduite du montant des contingents communaux en
contrepartie d'une diminution de ressources équivalente pour chaque
commune. Cette solution n'a pas été retenue peut-être en
raison de la difficulté technique de connaître exactement la part
imputable à chaque commune au titre de l'aide médicale.
Ce faisant, le dispositif proposé fait implicitement le choix de
maintenir le versement intégral du contingent communal d'aide sociale
aux départements, alors même que le département n'assumera
plus l'intégralité de la compétence qui lui était
dévolue en 1983.
La justification du contingent communal est rendue plus fragile au moment
où celui-ci fait l'objet de diverses critiques tenant à la
complexité de sa mise en oeuvre et aux disparités de traitement
des communes suivant leur département de rattachement.
La mise en place de la CMU offrait l'occasion de simplifier les relations
financières entre départements et communes en modifiant la
formule des contingents communaux d'aide sociale.
S'agissant d'une question qui concerne directement les relations
financières entre collectivités locales, votre commission ne peut
qu'être extrêmement attentive aux observations qui seront faites et
aux propositions qui seront avancées par votre commission des finances.
Il serait utile que les travaux de concertation engagés entre la
Direction générale des collectivités locales et les
associations d'élus locaux, à la demande de M. Jean-Pierre
Fourcade, président du Comité des finances locales, lors de la
séance du 17 mars dernier, débouche sur des résultats
concrets susceptibles de recueillir un accord général avant la
fin de la discussion de ce projet de loi.
•
Troisième risque : le coût occulté de
la reconversion des personnels départementaux
Le Gouvernement a choisi le principe du maintien dans les départements
des fonctionnaires et agents publics actuellement affectés à la
gestion de l'aide médicale dans les services des conseils
généraux.
Il n'a pas été mis en place de droit d'option des personnels
à l'image de ce qui avait été prévu lors des lois
de 1983. L'exercice aurait été, il est vrai, rendu difficile par
le fait que ce n'est pas l'Etat qui gérera la nouvelle prestation mais
plutôt les CPAM.
Les effectifs des personnels concernés sont variables suivant les
départements. Mme Martine Aubry, lors de son audition devant la
commission, a estimé que les reconversions seraient aisées dans
le secteur social où la demande est forte.
Il reste que la situation sera différente selon les départements
et l'importance du public suivi. Paradoxalement, une fois encore, les
départements les plus volontaristes dans leur démarche d'aide
à l'accès aux soins des plus démunis, ou les plus
touchés par la montée de l'exclusion, sont ceux qui ont le plus
d'agents à redéployer et qui devront parfois engager des frais de
formation pour faciliter les changements de poste.
Votre rapporteur souligne qu'une évaluation mériterait
d'être engagée sur les coûts induits de la réforme.
Elle pourrait utilement figurer dans le bilan demandé par votre
commission dans un article additionnel après l'article 31.
Sous le bénéfice de ces observations,
votre commission vous
propose d'adopter cet article sans modification.
Section 2
-
Recouvrement des
cotisations
Art.
14
(art. L. 243-4, L. 652-3, L. 242-11, L. 136-5 du code de la
sécurité sociale
et L. 1143-2, L. 1143-5, L. 1143-7 du code
rural)
Exécution des recouvrements forcés de
cotisations dues
par les non-salariés non agricoles et les
agriculteurs
Cet
article vise à modifier la procédure d'opposition à tiers
détenteur, qui permet aux caisses des non salariés d'obtenir le
recouvrement forcé des cotisations non payées et des
pénalités de retard.
I - Le texte du projet de loi
Le
paragraphe I
modifie, de manière marginale, les
sûretés applicables au paiement des cotisations, définies
par l'article L. 243-4 du code de la sécurité sociale. Il
maintient la durée d'un an de la garantie de paiement des cotisations,
en étendant ces sûretés aux majorations et
pénalités de retard. Ce paragraphe réactualise une
référence relative au privilège des salariés
(loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 en lieu et place de la loi
n° 67-565 du 13 juillet 1967)
et supprime le principe de la
transformation en hypothèque légale du privilège portant
sur les immeubles.
Le
paragraphe II
prévoit une nouvelle rédaction de
l'article L. 652-3, résultant de l'article 33 de la loi n°
91-1406 du 31 décembre 1991. Les organismes d'assurance maladie et
maternité et les caisses d'assurance professionnelle des professions non
salariées non agricoles, lorsqu'elles seront munies d'un titre
exécutoire, pourront, au moyen d'une opposition, enjoindre aux tiers
dépositaires, détenteurs ou redevables de sommes appartenant ou
devant appartenir au débiteur, de leur verser -au lieu et place de
celui-ci- les fonds qu'ils détiennent. Ce versement correspondra aux
cotisations et aux majorations et pénalités de retard dues
bénéficiant du privilège prévu à l'article
L. 243-4 modifié par le paragraphe I ou qui doivent, lorsqu'elles
dépassent 80.000 francs, être inscrites à un registre
public tenu au greffe du tribunal de commerce ou du tribunal de grande
instance, quand il s'agit de
" sommes dues par un commerçant ou
une personne morale de droit privé même non
commerçante "
(art. L. 243-5 du code de la
sécurité sociale).
L'opposition sera notifiée au tiers détenteur et au
débiteur par le directeur de l'organisme de sécurité
sociale par lettre recommandée avec avis de réception. Elle
emportera un effet d'attribution immédiate. Le paiement ne sera pas pour
autant immédiat : l'opposition pourra être contestée
devant le juge de l'exécution dans le mois de sa notification au
débiteur. Les tiers seront tenus de déclarer l'ensemble de leurs
obligations à l'égard du débiteur; les banques seront
tenues de déclarer le solde du ou des comptes du débiteur
(art. 24, 44 et 47 de la loi n°91-650 du 9 juillet 1991 portant
réforme des procédures civiles d'opposition).
Enfin, cette opposition ne pourra pas s'appliquer aux sommes dues par le tiers
détenteur au titre des rémunérations, qui ne peuvent
être saisies que dans les conditions et selon la procédure
prévues par les articles L. 145-1 et suivants du code du travail.
Pour résumer, ce nouveau mécanisme nécessitera l'existence
préalable d'un titre exécutoire et permettra aux régimes
maladie et vieillesse des non-salariés une exécution
immédiate.
Le
paragraphe III
de cet article étend l'opposition à
tiers détenteur au recouvrement par les URSSAF des cotisations
d'allocations familiales des employeurs et travailleurs indépendants.
Le
paragraphe IV
rend le mécanisme applicable :
- à la CSG sur le revenu des employés et travailleurs
indépendants, recouvrée par les URSSAF
(art. L. 136-3 du code
de la sécurité sociale)
;
- à la CSG applicable aux revenus agricoles, recouvrée par
les caisses de MSA
(art. L. 136-4).
Les
paragraphes V et VIII
adaptent la rédaction du premier
alinéa de l'article 1143-2 et de l'article 1143-5 du code rural, en
étendant aux majorations et aux pénalités de retard la
compétence de recouvrement des caisses de MSA.
Le
paragraphe VI
supprime une disposition spécifique du
régime agricole, prévoyant que les pénalités ou
majorations de retard dues par le redevable à la date du jugement
sont remises en cas de redressement ou de liquidation judiciaires.
Le
paragraphe VII
supprime le troisième alinéa de
l'article 1143-2 du code rural, relatif à l'actuelle opposition à
tiers détenteur existant dans le régime agricole.
En effet, le
paragraphe IX
insère dans le code rural un
article 1143-7, qui étend au régime agricole le
mécanisme d'opposition à tiers détenteur défini au
paragraphe II.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée
nationale
L'Assemblée nationale a adopté un amendement de M. Bernard
Accoyer, sous-amendé par le rapporteur, M. Jean-Claude Boulard, visant
à préciser que l'opposition prévue au II, notifiée
au tiers détenteur et au débiteur, devra être
motivée.
Elle a adopté en outre un amendement de M. Jean-Claude Boulard assurant
explicitement au tiers détenteur et au débiteur le droit de
contester l'opposition devant le juge de l'exécution.
Par coordination, deux amendements ont été adoptés pour
aboutir à une rédaction identique de la procédure
d'opposition mise en oeuvre par les caisses de MSA et décrite au
paragraphe IX.
III - Les propositions de votre commission
Cet article, qui ne concerne que de manière indirecte la mise en place
d'une couverture maladie universelle, a été l'un des articles les
plus largement discutés et contestés à l'Assemblée
nationale, à la fois par des députés de la majorité
et de l'opposition. Il a suscité de nombreuses critiques, émanant
de la Chambre nationale des huissiers de justice, du Syndicat national des
huissiers de justice, de la Confédération nationale des avocats
et de l'Union nationale des professions libérales.
Le paragraphe II est principalement en cause tandis que le paragraphe I
n'appelle pas de remarques particulières. Les paragraphes III à
IX découlent du paragraphe II.
Votre rapporteur, conscient des interrogations que suscite cet article,
s'est penché avec attention sur la question du recouvrement des
cotisations des non-salariés.
Le lien de cette disposition avec la couverture maladie universelle n'est
ni évident, ni obligatoire
L'acquittement des cotisations sociales incombe, pour les salariés,
à l'employeur. Pour les non-salariés, et il s'agit de la
principale conséquence, en matière de sécurité
sociale, de la différence entre salariés et non-salariés,
cette obligation est de leur propre responsabilité.
Prévoir, dans le projet de loi portant création de la couverture
maladie universelle, une disposition sur le recouvrement apparaît
à première vue sans lien avec les autres dispositions du texte.
En fait, ce lien existe : en cas de non-paiement des cotisations sociales,
les régimes des non-salariés peuvent aujourd'hui suspendre le
droit à prestations. L'actuel premier alinéa de l'article L.
615-8, relatif aux droits à prestations des non-salariés,
prévoit que l'assuré doit être à jour de ses
cotisations annuelles pour bénéficier du règlement des
prestations pendant une période déterminée. Dans le cadre
de la mise en place de la couverture maladie universelle, les caisses
d'assurance maladie des non-salariés ne pourront plus recourir à
cette sanction : l'article 6 du présent projet de loi
précise que "
ce paiement des cotisations sera nécessaire
désormais pour bénéficier, le cas échéant,
du règlement des prestations en espèces
".
Pour les personnes relevant du régime agricole, l'article 1106-12 du
code rural prévoit actuellement que "
le défaut de
versement des cotisations n'exclut les assurés du bénéfice
de l'assurance qu'à l'expiration du délai de six mois à
compter de la mise en demeure faite par lettre recommandée avec
accusé de réception
". Cette disposition est
également supprimée par le paragraphe II de l'article 6 du
présent projet de loi.
Force est de constater que cette argumentation ne vaut que pour les seules
cotisations d'assurance maladie prélevées au profit de la CANAM
et de la MSA ; pour les cotisations d'assurance vieillesse,
prélevées au profit de l'ORGANIC (industriels et
commerçants), de la CANCAVA (artisans), de la MSA (agriculteurs) et de
la CNAVPL (professions libérales), il n'existe pas de lien entre la CMU
et l'article 14.
De plus, un amendement a été adopté à
l'Assemblée nationale, à l'initiative judicieuse de la commission
des Affaires culturelles, familiales et sociales, prévoyant que
l'absence de cotisation au régime de base, pour les personnes
situées au-dessus du plafond,
" peut conduire, dans des
conditions déterminées par un décret, à la
suspension du versement des prestations en nature de l'assurance
maladie "
lorsqu'elle est le fait de
" la mauvaise foi du
bénéficiaire "
. Votre rapporteur vous propose, à
l'article 6, d'étendre les effets de cet amendement à l'ensemble
des personnes s'acquittant en France de cotisations, au titre d'un
régime de résidence comme au titre d'un régime
professionnel.
Le lien est ainsi rétabli entre cotisations et
prestations : les organismes de sécurité sociale disposeront
toujours de cette sanction à l'égard de leurs ressortissants qui
contestent leur bien fondé à prélever de telles
cotisations.
Dès lors, votre rapporteur a étudié l'article 14 de la
même manière qu'il aurait étudié un article faisant
partie d'un DMOS, sans chercher à le justifier
a priori
par la
mise en place de la couverture maladie universelle.
L'état du droit est complexe
Pour les organismes de sécurité sociale, la première
étape, afin de parvenir à un recouvrement des cotisations
impayées, est celle de la
mise en demeure.
Elle constitue
une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir
à régulariser sa situation, dans le délai imparti. La mise
en demeure doit préciser, sous peine de nullité, la nature et le
montant des cotisations réclamées, ainsi que la période
à laquelle elles se rapportent (au maximum trois années). Il
résulte tant de l'article R. 244-1 (régime général)
que de l'article R. 612-9 du code de la sécurité sociale
(régime des non-salariés non agricoles) que l'envoi de la mise en
demeure est effectué par lettre recommandée avec demande d'avis
de réception.
Une fois la mise en demeure effectuée, si le débiteur n'a pas
régularisé sa situation dans un délai d'un mois et s'il
n'a pas contesté cette mise en demeure, les caisses peuvent recourir
à la
contrainte
définie par l'article L. 244-9 du code de
la sécurité sociale.
Cet article, relatif au régime général, est applicable,
dans des conditions fixées par décret, aux régimes des
non-salariés depuis l'article 6-VI de la loi n° 94-637 du
25 juillet 1994. Mais les modalités d'application
diffèrent :
cette contrainte est signifiée au
débiteur relevant du régime général
par acte
d'huissier de justice (article R. 133-3 du code de la sécurité
sociale) ; pour
les débiteurs non salariés non
agricoles
, le dernier alinéa de l'article R. 612-11 précise
que
"
la contrainte est notifiée
au débiteur par
lettre recommandée avec demande d'avis de réception
ou lui est
signifiée
par acte d'huissier de justice "
. L'intervention
d'un huissier de justice n'est pas obligatoire.
"
A défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal
des affaires sociales
" (un délai de quinze jours est
prévu), cette contrainte "
comprend tous les effets d'un
jugement et confirme notamment le bénéfice de l'hypothèque
judiciaire
", c'est-à-dire
un titre exécutoire
.
La définition d'un titre exécutoire
L'article 3 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 en
dresse une
liste limitative :
- les décisions des juridictions de l'ordre judiciaire ou de
l'ordre administratif lorsqu'elles ont force exécutoire ;
- les actes et les jugements étrangers ainsi quel es sentences
arbitrales déclarés exécutoires par une décision
non susceptible d'un recours suspensif d'exécution ;
- les extraits de procès-verbaux de conciliation signés par
le juge et les parties ;
- les actes notariés revêtus de la formule
exécutoire ;
- le titre délivré par l'huissier de justice en cas de
non-paiement d'un chèque ;
- les titres délivrés par les personnes morales de droit
public qualifiés comme tels par la loi ou les décisions
auxquelles la loi attache les effets d'un jugement.
L'organisme de sécurité sociale dispose alors, comme tout
créancier de droit commun, de la procédure de saisie-attribution,
définie par les articles 42 à 47 de la loi du 9 juillet 1991.
La
procédure de saisie-attribution de la loi n°91-650 du 31 juillet
1991
portant réforme des procédures civiles d'exécution
Art
42
. - Tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant
une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement,
saisir entre les mains d'un tiers les créances de son débiteur
portant sur une somme d' argent, sous réserve des dispositions
particulières à la saisie des rémunérations
prévue par le code du travail.
Art. 43
. - L'acte de saisie emporte, à concurrence des sommes
pour lesquelles elle est pratiquée, attribution immédiate au
profit du saisissant de la créance saisie disponible entre les mains du
tiers ainsi que de tous ses accessoires. Il rend le tiers personnellement
débiteur des causes de la saisie dans la limite de son obligation. (...)
Art. 44
. - Le tiers saisi est tenu de déclarer au
créancier l'étendue de ses obligations à l'égard du
débiteur ainsi que les modalités qui pourraient les affecter et,
s'il y a lieu, les cessions de créances, délégations ou
saisies antérieures.
Art. 45
. - Toute contestation relative à la saisie peut
être élevée dans un délai d'un mois.
En l'absence de contestation, le créancier requiert le paiement de la
créance qui lui a été attribuée par l'acte de
saisie. Toutefois, le débiteur saisi qui n'aurait pas
élevé de contestation dans le délai peut agir à ses
frais en répétition de l'indu devant le juge du fond
compétent.
Art. 46
. - En cas de contestation devant le juge de l'exécution,
le paiement est différé sauf si le juge autorise le paiement pour
la somme qu'il détermine:
Art. 47
. - Lorsque la saisie est pratiquée entre les mains d'un
établissement habilité par la loi à tenir des comptes de
dépôt, l'établissement est tenu de déclarer le solde
du ou des comptes du débiteur au jour de la saisie. (...)
Pour les organismes de sécurité sociale des non-salariés
non agricoles,
une procédure spécifique, qui ne remplace pas
mais qui s'ajoute à celle de la saisie-attribution
, a
été mise en place :
l'opposition à tiers
détenteur
. Instituée par l'article 33 de la loi
n° 91-1406 du 31 décembre 1991, portant diverses dispositions
d'ordre social, cette procédure permet à la CANAM, à
l'ORGANIC, à la CANCAVA et à la CNAVPL, de recouvrer les
cotisations, majorations de retard et pénalités dues en faisant
opposition, à concurrence de leur montant, sur les fonds détenus
pour le compte de débiteurs par tous les tiers détenteurs. La
procédure existait déjà pour le régime agricole,
par l'article 1143-2 du code rural.
L'exposé des motifs de l'article 33 de la loi n° 91-1406 du 31
décembre 1991
" Pour faire face aux agissements violents d'une minorité de
ressortissants des régimes de travailleurs non salariés non
agricoles appartenant à la confédération de défense
des commerçants et artisans (CDCA) qui conteste, par le refus de
paiement des cotisations sociales, ces régimes obligatoires de
sécurité sociale, il est proposé, outre la
procédure contentieuse de droit commun, de permettre aux caisses
assurant la gestion de ce régime de faire opposition, à
concurrence du montant des cotisations dues, sur les fonds détenus par
des tiers pour le compte des assurés débiteurs ".
Cette procédure est décrite par le décret n° 95-446
du 24 avril 1995. L'organisme créancier fait opposition entre les mains
du tiers détenteur sur les sommes détenues par lui pour le compte
du débiteur. Il informe ensuite le débiteur de cette opposition.
A défaut du paiement dans les quinze jours, et dans le délai
maximal de deux mois, l'organisme créancier obtient un titre
exécutoire. Parallèlement, il peut présenter une
requête au Tribunal des Affaires sociales pour que le tiers
détenteur lui remette les sommes dont il dispose. Le Tribunal des
Affaires sociales rend alors une injonction de remise des sommes à
l'encontre du tiers détenteur. Sur présentation de cette
injonction, le tiers détenteur paye le créancier. L'organisme
créancier donne alors quittance au tiers détenteur et au
débiteur.
Dans les faits, cette procédure est rarement appliquée,
très contestée, probablement contestable et donc peu
efficace.
Outre son caractère complexe, elle pose, en effet, un
grand nombre de problèmes juridiques, puisqu'elle ne nécessite
pas l'existence préalable d'un titre exécutoire. Le contentieux
portant sur l'assiette est ainsi inachevé.
Le nouveau dispositif
L'article 14 du présent projet de loi introduit deux importantes
innovations :
premièrement, la procédure permettra
à l'organisme de sécurité sociale de procéder
à cette opposition à tiers détenteur, sans avoir à
saisir préalablement le tribunal des Affaires sociales.
Mais,
deuxièmement, l'organisme de sécurité sociale ne pourra
recourir à cette procédure qu'une fois muni d'un titre
exécutoire
, c'est-à-dire en passant soit par l'étape
de la contrainte, si la mise en demeure n'a pas été
contestée, soit par l'intervention d'une décision de justice, si
la mise en demeure a été contestée.
L'assuré pourra contester à trois moments la décision de
l'organisme de sécurité sociale :
- il pourra contester la mise en demeure
(art. L. 244-2 - R. 244-1,
R. 612-9 et R. 612-10 du code de la sécurité sociale),
en adressant un recours devant la commission de recours amiable de l'organisme,
puis, en cas de décision défavorable de cette commission, en
saisissant le Tribunal des affaires de sécurité sociale pour
aller éventuellement en appel, voire en cassation ;
- il pourra contester la contrainte
(art. L. 244-9 - R. 133-3 et
R. 612-11 du code de la sécurité sociale),
en adressant
un recours en première instance devant le Tribunal des Affaires de
sécurité sociale, avec jugements d'appel et cassation
possibles ;
- il pourra contester l'opposition à tiers détenteur
(nouvel article L. 652-3 du code de la sécurité
sociale)
,
en adressant un recours au juge de l'exécution,
avec jugements d'appel et cassation possibles.
Il est à noter que la contrainte peut faire l'objet d'une opposition
même si la dette n'a pas été antérieurement
contestée, selon un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de
cassation du 23 février 1995
12(
*
)
. De la
même manière, l'opposition à tiers détenteur pourra
être contestée même si la contrainte n'a pas fait l'objet
d'une opposition.
Les droits de la défense apparaissent ainsi
préservés.
L'article 6 de la convention européenne des
droits de l'homme dispose que
" Toute personne a droit à ce que sa
cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai
raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par
la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et
obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute
accusation en matière pénale dirigée contre
elle. "
.
Le système proposé n'apparaît pas
contraire à ce principe.
Il est reproché toutefois à cette procédure de donner des
prérogatives exorbitantes du droit commun aux organismes de
sécurité sociale des non salariés.
Force est de constater que d'une part, elle existait déjà, selon
un mécanisme moins protecteur des droits de la défense, et que,
d'autre part,
la procédure d'opposition à tiers
détenteur " rénovée " se rapprochera de la
procédure d'avis à tiers détenteur, utilisée par
les services fiscaux pour recouvrer directement des impôts non
payés
(art. L. 262 du livre des procédures fiscales).
La
Cour européenne des droits de l'homme s'est déjà
prononcée sur cette procédure et ne l'a pas contestée.
A partir du moment où l'on considère que les cotisations sociales
sont des contributions publiques, des prélèvements au même
titre que les impôts, il est nécessaire d'assurer des
règles de recouvrement, afin que les cotisants de bonne foi ne soient
pas pénalisés.
Il n'apparaît pas injustifié que des organismes privés
chargés d'une mission de service public se voient reconnaître des
prérogatives de puissance publique, si la reconnaissance de ces
prérogatives est nécessaire à l'exercice de leur mission.
Le recouvrement des cotisations des non-salariés, qui s'est nettement
amélioré depuis quelques années, reste un sujet sensible.
Le CDCA s'est ainsi spécialisé dans la contestation
systématique des régimes de sécurité sociale.
Certains huissiers, contactés par les organismes de
sécurité sociale, refusent de saisir des biens chez les
adhérents de ce syndicat ou de recourir à la procédure de
saisie-attribution.
Il est ainsi nécessaire de prévoir un
dispositif spécifique pour les organismes des non salariés.
Mais cette procédure devra rester un recours
en cas de
défaillance
des procédures de droit commun, et non un
système se substituant
dans tous les cas
au droit commun. Les
organismes chargés du recouvrement n'ont d'ailleurs pas
intérêt à s'engager dans cette voie, l'opposition à
tiers détenteur suppose, en effet, un coût de gestion
supplémentaire.
Les dispositions d'application du principe posé par la loi
(un
décret en Conseil d'Etat)
sont, une nouvelle fois,
particulièrement importantes. Un certain flou existe sur ces
dispositions d'application.
Il apparaît ainsi essentiel que les services chargés du
recouvrement social se montrent souples et sachent distinguer entre le mauvais
payeur et le commerçant, l'artisan, la profession libérale ou
l'agriculteur confronté à des difficultés temporaires. Un
effort particulier de communication devra être réalisé
à destination des cotisants, de manière à les
prévenir de l'existence de cette procédure. Une actualisation de
la " Charte du cotisant ", guide édité par les URSSAF,
sera ainsi nécessaire. En outre, il serait opportun que cette
procédure, qui sera effective à partir du 1
er
janvier
2000, ne s'applique qu'à des conflits futurs, et non aux contestations
en cours.
Le décret d'application devra préciser que le débiteur,
aux deux moments de la mise en demeure et de la contrainte, soit parfaitement
informé de cette procédure, afin qu'il ne soit pas surpris de son
caractère immédiat.
L'étape de la contrainte
-qui devient indispensable dans le cadre
de la rénovation de la procédure d'opposition à tiers
détenteur-
est ainsi essentielle.
Or, l'état du droit
n'est pas totalement satisfaisant. Le débiteur relevant du régime
général est prévenu au moment de l'étape de la
contrainte, puisqu'à peine de nullité, "
l'acte
d'huissier doit mentionner la référence de la contrainte et son
montant, le délai dans lequel l'opposition doit être
formée, l'adresse du tribunal des affaires de sécurité
sociale compétent et les formes requises pour sa saisine
"
(art. R. 133-3 du code de la sécurité sociale).
L'intervention d'un huissier est ainsi indispensable.
Pour le débiteur relevant des régimes des non salariés non
agricoles,
" la lettre recommandée ou l'acte d'huissier
mentionne, à peine de nullité, la référence de la
contrainte et son montant, le délai dans lequel l'opposition doit
être formée, l'adresse du tribunal des affaires de
sécurité sociale compétent et les formes requises pour sa
saisine ".
Il apparaît nécessaire de préciser dans la loi que la
contrainte, qu'elle soit décernée à un débiteur
relevant du régime général ou à un débiteur
relevant du régime des non salariés, doit être
obligatoirement signifiée par acte d'huissier de justice.
La
procédure de l'opposition à tiers détenteur, telle qu'elle
est prévue, peut aboutir à une simple succession de trois lettres
recommandées avec avis de réception : mise en demeure,
contrainte, opposition à tiers détenteur. Même si les
lettres recommandées avec avis de réception ont, dans la
jurisprudence de la Cour de cassation, toute valeur juridique, il semble plus
juste de prévoir, au stade de la contrainte, l'intervention obligatoire
d'un huissier de justice pour deux raisons :
- premièrement, il est souhaitable que cette procédure soit
comporte une phase " humaine " et ne soit pas soumise aux seules
lettres types éditées automatiquement par un système
informatique ;
- deuxièmement, une harmonisation sera réalisée -au niveau
de la contrainte- entre le régime général et le
régime des non salariés non agricoles.
Votre rapporteur vous propose l'adoption d'un amendement précisant,
à l'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale, que
" la contrainte est signifiée par acte d'huissier de
justice "
.
Sous le bénéfice de ces observations,
votre commission vous
propose d'adopter cet article ainsi amendé.
CHAPITRE 3
-
Dispositions diverses
Art. 15
(art. L. 161-8 du code de la
sécurité sociale)
Durée de maintien des droits
selon qu'il s'agit des prestations en nature ou des prestations en
espèces
I -
Le texte du projet de loi
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale,
donne une base légale à la différenciation des
durées de maintien des droits selon qu'il s'agit des prestations en
nature ou des prestations en espèces.
Les personnes cessant de remplir les conditions requises pour relever du
régime général, soit en qualité d'assuré,
soit en qualité d'ayant droit, bénéficient d'un maintien
de leurs droits pour une période de 12 mois
(art. L. 161-8
et R. 161-3 du code de la sécurité sociale).
L'étendue des droits maintenus est appréciée au regard des
conditions d'ouverture des droits à la date de la perte de la
qualité d'assuré ou d'ayant droit.
Dans le cadre de la délivrance et de l'utilisation des cartes
électroniques d'assuré social (cartes Vitale), le décret
n° 98-275 du 9 avril 1998 a prévu une prolongation des droits de
trois ans, afin d'éviter le renouvellement trop fréquent de ces
cartes.
A titre transitoire, jusqu'au 31 décembre 1999, par dérogation
aux articles R. 161-3, R. 161-4 et R. 161-5 du code de la
sécurité sociale, les personnes dont le maintien du droit aux
prestations en nature de l'assurance maladie arrive à
échéance bénéficient d'un maintien
supplémentaire de ce droit pendant trois ans à compter de la date
d'échéance. Sous réserve des engagements internationaux
souscrits par la France, ce maintien supplémentaire de droit ne
bénéficie qu'aux personnes qui continuent de résider sur
le territoire métropolitain ou dans les départements d'outre-mer.
La CNAMTS, dans une circulaire du 17 septembre 1998, analyse la portée
de cette disposition et précise les règles de sa mise en oeuvre
pratique.
Les bénéficiaires de cette mesure sont :
- les personnes en situation de maintien de droits ayant perdu leur
qualité d'assuré du régime général, ou leur
qualité d'ayant droit ;
- les personnes libérées du service national, qui ne
bénéficient pas de l'assurance maladie-maternité à
un autre titre ;
- les détenus libérés ;
- les ayants droit de l'assuré décédé ou
divorcé, et par assimilation, les ayants droit de l'assuré en
rupture de vie maritale.
Sont par conséquent exclus du dispositif :
- les chômeurs créateurs d'entreprise ;
- les personnes en congé parental ou titulaires de l'allocation
parentale d'éducation ;
- les personnes affiliées à l'assurance personnelle pour
lesquelles le maintien de droit ne s'applique pas.
Pour la mise en oeuvre pratique de cette mesure, la CNAMTS a adapté le
texte réglementaire : en effet, interprété à
la lettre, il ne s'appliquerait qu'aux personnes en fin de maintien de droit,
excluant tous les assurés en situation de droit. Afin de faciliter la
gestion automatisée des droits, la CNAMTS prévoit d'ajouter
systématiquement trois ans, à l'issue de l'année qui suit
l'ouverture des droits justifiée par la production d'un document
(bulletin de salaire, acte de naissance...).
L'ensemble de ce dispositif repose aujourd'hui sur une base législative
fragile : au regard de la durée de maintien des droits, l'article
L. 161-8 du code de la sécurité sociale ne fait pas de
distinction entre les prestations en nature et les prestations en
espèces.
L'article 15 du présent projet de loi vise donc à donner une base
légale incontestable à la différenciation des
durées de maintien des droits selon qu'il s'agit de prestations en
nature ou de prestations en espèces.
Le
paragraphe I
de cet article modifie le premier alinéa de
l'article L. 161-8 du code de la sécurité sociale afin de
préciser que les personnes cessant de remplir les conditions requises
pour relever du régime général bénéficient
du maintien de leurs droits pendant des périodes qui peuvent être
différentes selon qu'il s'agit de prestations en nature ou de
prestations en espèces.
Cette période serait de trois ans pour les prestations en nature et d'un
an pour les prestations en espèces, qui présentent, pour
l'assuré, un caractère de revenu de remplacement du salaire perdu
du fait de la maladie.
Le
paragraphe II
de cet article modifie en conséquence la
rédaction du deuxième alinéa de l'article L. 161-8 du code
de la sécurité sociale.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Art. 16
(art. L. 381-4 et L. 381-12 du
code de la sécurité sociale)
Maintien des
régimes actuellement applicables aux étudiants
et aux
ministres des cultes
I -
Le texte du projet de loi
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale,
affirme le caractère subsidiaire des régimes d'assurance maladie
des étudiants et des ministres des cultes par rapport au régime
général. Il vise à préserver ces régimes
spécifiques, qui seraient susceptibles d'être menacés par
l'institution, à l'article L. 380-1 du code de la
sécurité sociale, d'une affiliation au régime
général sur critère de résidence.
En application de l'article L. 381-4 du code de la sécurité
sociale, les élèves et les étudiants des
établissements d'enseignement supérieur, des écoles
techniques supérieures, des grandes écoles et classes du second
degré préparatoires à ces écoles, qui ne sont ni
assurés sociaux, ni ayants droit d'assuré social et ne
dépassent pas un âge limite
(art. R. 381-5 : 28 ans),
sont affiliés obligatoirement au régime étudiant, auquel
ils doivent acquitter une cotisation.
Le
paragraphe I
de cet article modifie l'article L. 381-4 afin de
prévoir que les assurés sociaux affiliés au régime
général au titre de l'article L. 380-1, c'est-à-dire
sur critère de résidence, devront malgré tout être
affiliés au régime étudiant, auquel ils acquitteront donc
une cotisation.
Le
paragraphe II
complète l'article L. 381-12 afin de
préciser que les ministres des cultes et les membres des
congrégations et collectivités religieuses ne peuvent être
affiliés au régime général au titre de l'article
L. 380-1. Ils continueront donc à relever de leur régime
spécifique.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Art. 17
(art. L. 380-4 du code de la
sécurité sociale)
Régime applicable aux pupilles
de l'Etat
I -
Le texte du projet de loi
En application de l'article 61 du code de la famille et de l'aide sociale, sont
admis en qualité de pupille de l'Etat :
- les enfants dont la filiation n'est pas établie ou est
inconnue ;
- les enfants dont la filiation est établie et connue et qui ont
été expressément remis au service de l'aide sociale
à l'enfance, en vue de leur admission comme pupilles de l'Etat ;
- les enfants orphelins de père et de mère ;
- les enfants dont les parents ont fait l'objet d'un retrait total de
l'autorité parentale ;
- les enfants confiés au service en application de l'article 350 du
code civil.
Le nombre des pupilles de l'Etat diminue régulièrement : ils
étaient 63.000 en 1949, 24.000 en 1977, 15.000 en 1981, 7.700 en 1987 et
3.200 en 1997.
Les pupilles de l'Etat -dont le tuteur est le représentant de l'Etat
dans le département- relèvent aujourd'hui de l'aide
médicale départementale dans les conditions de droit commun.
Le présent article, adopté sans modification par
l'Assemblée nationale, tire les conséquences de la suppression,
à l'article 30 du projet de loi, de l'aide médicale
départementale ; il prévoit que les pupilles de l'Etat sont
affiliés au régime général au titre du chapitre
préliminaire (nouveau) du titre VIII du livre III du code de la
sécurité sociale, introduit par l'article 3 du projet de loi,
c'est-à-dire sur critère de résidence.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Art. 18
Résiliation de certains
contrats
d'assurance privée
I -
Le texte du projet de loi
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale,
est la conséquence de la création, à l'article 3 du projet
de loi, d'une affiliation au régime général sur le seul
critère de résidence
(art. L. 380-1 du code de la
sécurité sociale).
Certaines des personnes qui ont vocation à bénéficier de
ces nouvelles dispositions avaient préféré souscrire un
contrat auprès d'une société d'assurance plutôt que
de s'affilier à l'assurance personnelle.
Dans la mesure où ces personnes seront désormais obligatoirement
affiliées au régime général en application de
l'article L. 380-1, il convient de prévoir la résiliation de ces
contrats.
Le premier alinéa de cet article prévoit par conséquent la
résiliation de plein droit, à compter de la date où le
contractant est affilié au régime général en
application de l'article L. 380-1, de tous les contrats d'assurance portant sur
les risques couverts par cette affiliation. Les cotisations ou primes
afférentes à ces contrats seront remboursées par les
organismes qui les ont perçues
au prorata
de la durée du
contrat restant à courir.
Le second alinéa de cet article prévoit que si la garantie
résultant de ces contrats est supérieure à celle qu'assure
le régime général, le contrat peut être maintenu en
vigueur par un avenant et avec une réduction de prime.
On remarquera que les frontaliers français travaillant en Suisse ne sont
pas concernés par ces dispositions. Dans la mesure où l'article 8
les exclut de l'affiliation sur critère de résidence
prévue à l'article L. 380-1 du code de la
sécurité sociale, ils pourront, s'ils le souhaitent, conserver le
bénéfice de ces contrats d'assurance.
Le nombre de personnes concernées par cet article devrait donc
être faible. Sur environ 60.000 personnes aujourd'hui assurées au
premier franc par un contrat d'assurance, une majorité sont des
frontaliers.
Ne seront effectivement concernés par cet article que les rentiers,
c'est-à-dire les personnes sans activité professionnelle vivant
des revenus de leur patrimoine. Ces personnes avaient auparavant le choix, pour
la couverture de leurs dépenses de santé, entre l'adhésion
à l'assurance personnelle et la souscription d'un contrat d'assurance
privée. Elles relèveront désormais d'une affiliation
obligatoire au régime général sur critère de
résidence, en application de l'article L. 380-1 du code de la
sécurité sociale.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Art. 19
(art. 380-1 et 380-3 nouveaux du code
de la
sécurité sociale)
Possibilité de maintien de
certaines personnes dans le régime général à titre
temporaire et dans le régime agricole à titre définitif
I -
Le texte du projet de loi
Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale,
permet à certaines personnes, exclues par l'article 8 de l'affiliation
au régime général sur critère de résidence,
d'être affiliées à ce régime à titre
transitoire. Il autorise également, à titre définitif, les
personnes aujourd'hui affiliées à l'assurance personnelle
auprès du régime agricole à rester dans ce régime.
Le
paragraphe I
prévoit que les personnes visées aux
1°, 3° et 4° de l'article 8, qui sont affiliées au
régime de l'assurance personnelle à la date d'entrée en
vigueur de la présente loi, peuvent, à leur demande, être
affiliées au régime général sur critère de
résidence, en application de l'article L. 380-1 du code de la
sécurité sociale, pendant une période se terminant au plus
tard trois ans après la date de publication de la présente loi.
Rappelons que les personnes visées aux 1°, 3° et 4° de
l'article sont :
Au 1° : les membres du personnel diplomatique et consulaire en poste
en France, les fonctionnaires d'un Etat étranger et personnes
assimilées, ainsi que les membres de leur famille qui les
accompagnent ;
Au 3° : les personnes résidant en France qui, au titre d'une
activité professionnelle exercée par elles-mêmes ou par un
membre de leur famille sur le territoire d'un Etat étranger, ont la
faculté d'être affiliées à titre volontaire à
un régime d'assurance maladie, conformément à la
législation de cet Etat, si cette affiliation leur permet d'obtenir la
couverture des soins reçus sur le territoire français. Cette
rédaction vise essentiellement les frontaliers français
travaillant en Suisse ;
Au 4° : les agents retraités d'une organisation internationale
qui ne sont pas également titulaires d'une pension française,
ainsi que les membres de leur famille, dès lors qu'ils sont couverts
dans des conditions analogues à celle du régime
général français d'assurance maladie et maternité
par le régime propre à l'organisation dont ils relevaient quand
ils étaient en activité.
Parmi ces personnes, celles qui étaient affiliées à
l'assurance personnelle pourront donc demander à continuer à
bénéficier des prestations en nature de l'assurance maladie en se
faisant affilier au régime général sur critère de
résidence. Cette affiliation provisoire s'achèvera au plus tard
trois ans après la date de publication de la présente loi.
Le
paragraphe II
de cet article permet aux personnes qui sont
aujourd'hui affiliées au régime de l'assurance personnelle, et
dont les prestations d'assurance maladie et maternité sont servies par
un organisme de protection sociale agricole au titre de sa participation
à la gestion de l'assurance personnelle, de continuer à
bénéficier du service de ces prestations quand bien même
elles relèveraient désormais du régime
général en application de l'article L. 380-1 du code de la
sécurité sociale. Ce service sera assuré par l'organisme
de protection sociale agricole pour le compte du régime
général dans des conditions définies par décret en
Conseil d'Etat.
Cette disposition, qui concerne environ 10.000 personnes, a pour
finalité d'éviter que ces personnes ne soient contraintes de
quitter le régime agricole pour le régime général
afin de bénéficier du maintien de leurs droits.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans
modification.
TITRE II
-
DISPOSITIONS RELATIVES À LA
PROTECTION COMPLÉMENTAIRE EN MATIÈRE DE SANTÉ
CHAPITRE PREMIER
-
Dispositions
générales
Art.
20
(Chapitre premier nouveau du titre VI nouveau du livre VII
du code de
la sécurité sociale, art. L. 861-1 à L. 861-9
nouveaux)
Définition de la couverture complémentaire en
matière de santé
attribuée aux
bénéficiaires de la CMU
Cet
article définit le principe du droit à une couverture maladie
complémentaire gratuite pour toutes les personnes disposant de
ressources inférieures à un plafond déterminé par
décret.
Le dossier de presse fourni par le ministère, puis l'intervention du
ministre, en séance publique, à l'Assemblée nationale
donnent une indication du plafond de ressources qui devrait être retenu
et qui s'établirait à :
- 3.500 francs pour une personne seule ;
- 5.250 francs pour deux personnes ;
- 6.300 francs pour trois personnes ;
- 7.700 francs pour quatre personnes ;
- plus 1.400 francs pour toute personne supplémentaire.
La lecture de ce barème, comme les dispositions du présent
article, montrent que la couverture complémentaire maladie serait
attribuée pour les personnes constituant le foyer ainsi que celles qui
sont à leur charge.
Le présent article prévoit les conditions d'attribution de cette
couverture et notamment la définition des ressources prises en compte.
Il indique que cette couverture sera accordée, selon le choix des
bénéficiaires, par les organismes de sécurité
sociale de base ou par les mutuelles, les institutions de prévoyance et
les compagnies d'assurance.
Le principe du droit à la couverture complémentaire comme la
procédure applicable sont codifiés par le présent article
dans un titre VI nouveau du livre VIII du code de la
sécurité sociale. Ce livre comprenait jusque-là les
règles législatives relatives aux allocations aux personnes
âgées à l'allocation aux adultes handicapés,
à l'allocation de logement sociale, à l'aide à l'emploi
pour la garde d'enfants, ainsi qu'à l'aide aux associations logeant
à titre temporaire des personnes défavorisées.
Sur le fond, les dispositions du présent article n'ont été
modifiées qu'à la marge lors de l'examen du projet de loi en
séance publique à l'Assemblée nationale. Votre commission,
en revanche, vous proposera un dispositif alternatif définissant le
droit à une allocation personnalisée à la santé.
Les paragraphes I
et
II
du présent article modifient
l'intitulé du livre VIII du code de la sécurité
sociale et créent un titre IV nouveau intitulé
" Protection complémentaire en matière de
santé ".
Le paragraphe III
comporte les articles L. 861-1 à
L. 861-9 nouveaux du code de la sécurité sociale qui seront
insérés dans le titre VI du livre VIII.
Art. L. 861-1 et art. L. 861-2 du code de la sécurité sociale
I - Le texte du projet de loi
L'article L. 861-1, qui n'a pas été modifié par
l'Assemblée nationale, pose le principe du droit à la couverture
complémentaire maladie sous deux conditions.
1/ Une condition de résidence.
Elle est identique à
celle qui est retenue pour la couverture de base dans le régime de
résidence et qui est définie par l'article L. 380-1.
Cette condition est satisfaite lorsque le demandeur réside, soit en
France métropolitaine, soit dans un département d'outre-mer, de
manière stable et régulière
(cf. commentaire sous
l'article 3)
;
2/ Une condition de ressources.
Cette condition se traduit par la
définition d'un plafond, déterminé par décret et
révisé chaque année pour tenir compte de
l'évolution des prix. Ce plafond varie selon la composition du foyer et
le nombre de personnes à charge.
•
Les personnes à charge
C'est un décret en Conseil d'Etat qui, aux termes du projet de loi,
précisera les conditions d'âge, de domicile et de ressources dans
lesquelles une personne est considérée comme étant
à charge.
L'exigence posée par cet article semble moins forte que celle qui existe
dans le droit des prestations familiales actuellement en vigueur,
l'article L. 513-1 du code de la sécurité sociale
disposant en effet que
" les prestations familiales sont (...) dues
à la personne qui assume la charge effective et permanente de
l'enfant "
.
C'est pourquoi votre commission vous proposera d'harmoniser les deux
législations en retenant, dans le projet de loi, la notion de
" charge effective et permanente ".
•
La situation des mineurs de plus de 16 ans
L'article L. 861-1, dans son troisième alinéa,
complète les dispositions de l'article 7 du projet de loi qui
permet aux jeunes d'obtenir, pour leur couverture de base, le statut d'ayant
droit autonome dès l'âge de seize ans. Il autorise ainsi les
mineurs ayant atteint cet âge à bénéficier d'une
couverture maladie complémentaire à titre personnel à la
double condition :
- de satisfaire aux conditions de résidence et de ressources
posées par le premier alinéa ;
- et que les liens avec la vie familiale soient rompus.
Le texte du projet de loi n'apporte cependant aucune précision sur les
modalités d'appréciation, par l'autorité administrative,
de la rupture des liens avec la famille.
En outre, l'action en récupération, auprès des parents qui
disposent de ressources supérieures au plafond, prévue par
l'article L. 861-1, n'est qu'une faculté offerte à
l'administration. Si l'on comprend bien les raisons de telles
imprécisions, il conviendra cependant que l'autorité
administrative applique strictement les dispositions prévues par la loi,
sauf à favoriser de coûteuses dérives.
•
Le plafond de ressources
Il convient bien d'observer que le plafond de ressources applicable à la
couverture complémentaire est défini de manière distincte
de celui qui est institué pour la couverture de base dans le
régime d'affiliation sur critère de résidence par
l'article L. 380-2
(cf. supra commentaire de l'article 3).
Rien n'indique donc, à l'inverse de ce qu'affirme le rapport de
l'Assemblée nationale
(rapport AN n° 1518, p. 84),
que ces deux plafonds, définis par deux articles différents du
code, seront identiques, d'autant plus que :
- le projet de loi, avant son examen par l'Assemblée nationale, ne
prévoyait pas de procédure de révision annuelle du plafond
associé à la couverture de base pour tenir compte de
l'évolution des prix ;
- le plafond associé à la couverture de base ne varie pas
selon la composition du foyer et le nombre de personnes à charge ;
- les deux plafonds ne sont pas nécessairement
appréciés par rapport aux mêmes ressources ;
- enfin, l'article L. 861-2 introduit par le présent
article prévoit que
" les bénéficiaires des
dispositions du présent titre qui sont affiliés sur condition de
résidence au régime général sont
exonérés de la cotisation prévue à
l'article L. 380-2 "
.
En d'autres termes, les bénéficiaires de la couverture
complémentaire (qui ont donc des revenus inférieurs au plafond
associé à cette couverture) qui sont affiliés sur
critère de résidence au régime général sont
exonérés de la cotisation prévue à
l'article L. 861-2.
Si les plafonds étaient identiques, cette disposition serait inutile.
Elle ne traduit pas non plus, contrairement à ce qu'affirme le rapport
de l'Assemblée nationale, la
" rupture du lien entre cotisation
et prestation "
(rapport AN n°1518, p. 133).
Compte
tenu de cette incertitude, votre commission vous proposera, en vue d'entendre
les explications du ministre, de supprimer cette disposition de
l'article L. 380-2.
•
Les ressources prises en compte
Les ressources prises en compte pour la détermination du droit à
la couverture complémentaire, fixées par le premier alinéa
de l'article L. 861-2, sont définies d'une manière qui
s'inspire des dispositions législatives relatives au RMI. Il s'agit de
l'ensemble des ressources des membres du foyer (le droit à la couverture
complémentaire étant " familial "), à
l'exclusion de certaines prestations à objet spécialisé et
de tout ou partie des rémunérations de nature professionnelle
lorsque celles-ci ont été interrompues.
La notion de
" prestation à objet
spécialisé "
doit être appréciée par
rapport aux dispositions du livre V du code de la sécurité
sociale relatif aux
" prestations familiales et prestations
assimilées ".
Ce livre distingue en effet :
- des
prestations générales d'entretien
(allocations
familiales, complément familial, allocation de soutien familial,
allocation de parent isolé) ;
- des
prestations liées à la naissance
(allocation
pour jeune enfant, allocation parentale d'éducation, allocation
d'adoption) ;
- et des
prestations à affectation spéciale
que vise
l'article L. 861-2. Il s'agit de l'allocation d'éducation
spéciale, de l'allocation de logement familiale, des primes de
déménagement et des prêts à l'amélioration de
l'habitat, ainsi que de l'allocation de rentrée scolaire.
Ces dernières seront donc, en tout ou partie, exclues du montant des
ressources pris en compte pour la détermination des droits.
Il en est de même pour tout ou partie des rémunérations
professionnelles, si celles-ci ont été interrompues. On comprend
bien le fondement d'une telle disposition dans ce cadre, l'appréciation
du niveau des ressources, établie faute de mieux par
référence à ou aux années
précédentes, n'étant pas pertinente en cas, par exemple,
de perte de l'emploi.
L'article L. 861-2 prévoit aussi qu'un décret en
Conseil d'Etat déterminera les modalités particulières de
détermination des ressources provenant d'une activité non
salariée. De telles dispositions existent déjà dans le
droit en vigueur, pour l'allocation de logement sociale :
l'article R. 831-6 du code de la sécurité sociale
prévoit ainsi une procédure de revalorisation des
dernières ressources des non-salariés connues par le taux de
revalorisation de l'indice général des prix à la
consommation.
L'article L. 861-2 dispose enfin que les bénéficiaires
du RMI ont droit à la protection complémentaire en matière
de santé. Ce dispositif ne traduit aucun progrès de la
législation en leur faveur, les bénéficiaires du RMI
étant déjà automatiquement bénéficiaires de
l'aide médicale gratuite des départements, avec une prise en
charge des dépenses à 100 %.
II - Les propositions de votre commission
Les propositions de votre commission tendent à la création d'une
allocation personnalisée à la santé (APS),
dégressive en fonction des revenus, qui s'inspire du même principe
que celui de l'allocation personnalisée au logement. Cette allocation
permet, pour les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion, un
accès gratuit à la protection complémentaire en
matière de santé.
A la différence de la " couverture maladie universelle "
proposée par le projet de loi,
la création d'une allocation
personnalisée à la santé présente
d'indéniables avantages, tant pour les bénéficiaires de
l'allocation que pour l'avenir de la protection sociale et celui de notre
économie :
•
expression de la solidarité nationale, elle tend
à solvabiliser toutes les personnes disposant de faibles revenus afin de
leur permettre d'adhérer à une couverture complémentaire
dans des conditions de droit commun
De la même manière que les locataires titulaires de l'allocation
logement sont des locataires " comme les autres ", qui paient un
loyer dans des conditions de droit commun, les bénéficiaires de
l'allocation personnalisée à la santé adhéreront
à une mutuelle ou souscriront un contrat de couverture
complémentaire auprès d'une institution de prévoyance ou
d'une compagnie d'assurance participant au dispositif ;
•
elle rend possible le scénario
" partenarial " proposé par M. Jean-Claude Boulard dans
son rapport au Premier ministre
Si votre commission vous propose, comme dans ce rapport, que la couverture
complémentaire des bénéficiaires du RMI continue à
être gérée par le régime général, la
création de l'allocation personnalisée à la santé
s'insère dans un schéma dans lequel chacun des acteurs, les
régimes obligatoires de base comme les organismes de protection sociale
complémentaire, " reste à sa place ". Ce schéma
répond sans nul doute, à la différence de celui qui est
retenu par le projet de loi, aux exigences posées par la jurisprudence
européenne ;
•
elle permet de responsabiliser tous les
bénéficiaires
Mme Martine Aubry l'a elle-même reconnu en séance publique
à l'Assemblée nationale,
" il est vrai qu'une
contribution, dans bien des domaines, est un moyen de faire appel à la
responsabilité "
.
Cette observation se justifie d'autant plus dans le domaine de l'accès
aux soins, toute démarche sanitaire exigeant une responsabilisation du
patient, ne serait-ce que pour assurer l'observance thérapeutique.
A cet égard, votre commission propose que même les
bénéficiaires du RMI, dont l'allocation personnalisée
à la santé couvrira l'entier coût de leur couverture
complémentaire, puissent, comme les autres résidents, recevoir
l'allocation et payer leur cotisation complémentaire ;
•
elle supprime les effets de seuils, dangereux lorsqu'ils sont
nationaux, proches du SMIC et dans un système fonctionnant
" à guichets ouverts "
Il serait en effet dangereux, tant pour les bénéficiaires que
pour notre système de protection sociale et pour l'économie
française, de retenir un dispositif tel que celui du projet de loi, dans
lequel, en dessous d'un seuil de revenus qui n'est pas très
éloigné du SMIC, aucune cotisation n'est due pour un
remboursement intégral des dépenses de soins alors qu'au-dessus
du seuil, les cotisations sont dues et le remboursement est d'un moins bon
niveau.
La création d'une allocation personnalisée à la
santé, qui se caractérise par sa dégressivité par
rapport aux revenus et donc par la progressivité de l'effort contributif
des bénéficiaires, permet d'éviter cet effet de seuil.
Elle permettra aussi de contribuer à solvabiliser des personnes dont les
revenus sont situés au-dessus du seuil retenu par le Gouvernement.
Art. L. 861-3 du code de la sécurité sociale
I - Le texte du projet de loi
Cet article prévoit la liste des dépenses prises gratuitement en
charge pour les bénéficiaires du dispositif.
•
Un droit non contributif
La gratuité de la couverture complémentaire CMU est prévue
par le premier alinéa de l'article, qui dispose que le droit à la
CMU est un droit
" sans contrepartie contributive ".
Dans son rapport de parlementaire en mission, M. Jean-Claude Boulard
avait, au contraire, proposé l'institution d'une contribution minimale
des bénéficiaires ; le Gouvernement ne l'a pas suivi dans la
rédaction de son projet de loi et a préféré
dessiner un système fonctionnant gratuitement et " à
guichets ouverts ".
Conformément aux thèses qu'il avait soutenues dans son rapport de
parlementaire en mission, le rapporteur de la commission à
l'Assemblée nationale, M. Jean-Claude Boulard, a donc souhaité
supprimer cette référence à l'absence de contrepartie
contributive.
Alors que cette question est pourtant essentielle, et probablement pour ne pas
indisposer le ministre, le rapport de l'Assemblée nationale
(rapport
AN n° 1518, p. 138)
a toutefois mentionné cet
amendement de façon fort laconique, sans en préciser, ni la
portée, ni la justification :
" La commission a adopté un amendement du rapporteur supprimant
dans cet article l'absence de contrepartie contributive pour
bénéficier de la couverture complémentaire CMU "
.
En séance publique, le rapporteur M. Jean-Claude Boulard n'a pas
été plus loquace, expliquant pour exposer l'objet de l'amendement
que
" la commission considère que les mots : " sans
contrepartie contributive " sont inutiles. Cela va de soi puisque le
projet de loi affirme le droit à la CMU "
.
Le ministre ayant, sans la moindre explication, donné un avis
défavorable à son adoption, le rapporteur M. Jean-Claude
Boulard a retiré l'amendement.
•
Une prise en charge " différentielle "
Le premier alinéa de l'article L. 861-3 prévoit que la
prise en charge au titre de la CMU est différentielle. Ainsi, si le
bénéficiaire de la CMU peut prétendre, non à des
dispositions plus favorables comme l'indique le rapport de l'Assemblée
nationale, mais à des dispositions du code de la sécurité
sociale ou à des garanties collectives obligatoires professionnelles,
ces droits sont mis en oeuvre en premier lieu, la CMU n'intervenant que pour un
éventuel complément.
A titre d'exemple, les personnes atteintes d'une affection de longue
durée (ALD) continueront à bénéficier de la
couverture à 100 % des dépenses liées à cette
affection par le régime de base, la CMU n'intervenant que pour la prise
en charge à 100 % des dépenses qui n'entrent pas dans le
cadre de l'ALD.
•
Une prise en charge intégrale des dépenses, mais
pas pour tous les biens et services médicaux
L'article L. 861-3 prévoit la prise en charge, au titre de la
CMU :
1° du ticket modérateur ;
2° du forfait journalier, sans qu'il soit fixé une limitation
de durée (ceci peut se révéler très coûteux,
notamment pour les patients hospitalisés durablement en
psychiatrie) ;
3° des frais exposés au-delà des tarifs de
responsabilité pour les soins dentaires ou les dispositifs
médicaux inscrits au TIPS, dans des limites prévues par
arrêté ministériel.
Aux termes de ce 3°, le projet de loi organise donc une protection
complémentaire qui se situe au-delà du remboursement à
100 % sur la base du tarif de responsabilité de la
sécurité sociale : celui-ci est en effet
particulièrement bas en matière de soins dentaires ainsi que pour
les dispositifs à usage individuel, et notamment la lunetterie. Elle est
nécessaire pour favoriser l'accès des populations aux revenus les
plus faibles aux soins dentaires et à l'optique, la part laissée
à la charge de l'assuré avec un remboursement à 100 %
du tarif de responsabilité étant encore trop importante pour que
certaines personnes puissent se l'offrir.
Il convient toutefois d'observer que le projet de loi demeure fort
imprécis pour définir le contenu de cette prise en charge
au-delà du tarif de responsabilité, qui sera limitée par
un arrêté ministériel.
En effet, aux termes du projet de loi tel qu'il a été
adopté par l'Assemblée nationale un arrêté
interministériel
(ministère chargé de la
sécurité sociale et ministère de l'économie)
précisera notamment
" la liste des dispositifs médicaux
et la limite du montant des frais pris en charge ".
Ainsi, contrairement à ce qu'a affirmé le ministre en
séance publique (
JO Débats AN du 28 avril 1996, p. 3651
),
si les bénéficiaires de la CMU iront " se soigner où
ils voudront, quand ils voudront ", ils ne se soigneront pas pour autant
" comme tout le monde ", les prothèses, les lunettes et les
dispositifs qui leur seront proposés n'étant pas ceux de tout le
monde.
Les dispositions de l'article L. 861-3 sont d'ailleurs à examiner en
parallèle avec celles de l'article 23 du projet de loi, qui
prévoit un système d'accords entre l'assurance maladie et les
fabricants pour déterminer une liste de dispositifs
caractérisés par leur " prix maximal ".
Ainsi, non seulement les bénéficiaires de la CMU ne se verront
pas proposer les mêmes prothèses ou les mêmes lunettes que
tout le monde, mais ils se verront proposer les moins chères.
•
Le bénéfice du tiers payant
Le projet de loi prévoit que les dépenses de soins
engagées par les bénéficiaires de la CMU seront prises en
charge en tiers payant.
Cette procédure d'avance de frais constitue, pour les patients
titulaires des plus faibles revenus, un réel avantage pour favoriser
leur accès aux soins.
Il convient toutefois de regretter que les contraintes inhérentes
à ce dispositif reposeront entièrement sur les professionnels de
santé, qui assumeront la charge de trésorerie correspondante
avant d'être rémunérés par la sécurité
sociale et l'organisme complémentaire.
L'Assemblée nationale a prévu qu'un décret
déterminerait les modalités de paiement des professionnels et des
établissements de santé, permettant notamment qu'ils aient un
interlocuteur unique pour l'ensemble de la procédure.
Si ce décret ne met pas en oeuvre, dans de brefs délais, un
système simple et rapide, les professionnels de santé
répugneront probablement à accomplir les démarches
nécessaires auprès de tous les organismes complémentaires
pour recevoir la fraction correspondant à la couverture
complémentaire des bénéficiaires de la CMU. Compte tenu du
nombre d'organismes complémentaires, en effet, les médecins
tenteront-ils d'obtenir une rémunération différée
de quelques dizaines de francs si cet exercice se révèle
laborieux ? On peut penser que non.
Il est à craindre, alors, que le Gouvernement ait mis en place un
système très généreux pour ses
bénéficiaires, mais qu'il n'ait pas favorisé
l'adhésion des professionnels de santé, qui sont pourtant les
acteurs essentiels d'un accès aux soins pour tous.
Au détour de cet article, l'Assemblée nationale a adopté
un amendement qui vise, non pas comme l'a affirmé le rapporteur en
séance publique
(JO Débats AN du 29 avril 1999, p. 3843),
à
" effacer l'effet de seuil "
induit par le projet de
loi, mais à valider de manière déguisée la
convention nationale des médecins généralistes,
signée par le seul syndicat MG-France le 26 novembre 1998 et
approuvée par l'arrêté du 4 décembre 1998, qui a
été partiellement annulée par le Conseil d'Etat le 14
avril 1999.
Si la Haute Juridiction, en effet, n'a pas vu d'obstacle législatif
à ce que les patients abonnés à un médecin
référent bénéficient du tiers payant pour les actes
dispensés par celui-ci, il a en revanche annulé le
bénéfice du tiers payant pour les actes réalisés
par des médecins spécialistes qui se seraient
déclarés " correspondants " de celui-ci
(alinéa 5 de l'article 5.9)
.
En prévoyant par la loi ce qu'il n'est pas parvenu à faire
accepter, ni par les médecins spécialistes dans le cadre d'une
convention, ni par le Conseil d'Etat, le Gouvernement remet en cause la
frontière entre le domaine législatif et le domaine conventionnel
et l'autorité de la chose jugée.
Votre commission ne peut s'associer à une telle démarche et
vous proposera de supprimer cette disposition.
II - Les propositions de votre commission
En cohérence avec sa proposition de créer une allocation
personnalisée à la santé dégressive en fonction des
revenus, votre commission veut définir, dans l'article L. 861-3, le
contenu de la couverture complémentaire maladie que s'engageront
à proposer, à un tarif uniforme, les organismes de protection
complémentaire qui accepteront de participer au dispositif.
Les amendements de votre commission reprennent à leur compte les
dispositions du projet de loi sur le caractère
" différentiel " de cette couverture, qui s'appliquera sous
réserve de la réduction, de la suppression du ticket
modérateur, prévues par le code de la sécurité
sociale ou stipulées par les garanties collectives obligatoires
professionnelles.
Ils retiennent aussi le principe du tiers payant, ainsi bien entendu que le
dispositif permettant aux professionnels de santé d'obtenir un
interlocuteur unique pour se voir adresser leur rémunération dans
ce cadre.
En revanche
(cf. supra)
, il est proposé de supprimer la phrase
prévoyant la dispense d'avance de frais pour les patients inscrits
auprès d'un médecin référent lorsqu'ils consultent
un médecin spécialiste déclaré comme
" correspondant " de ce dernier, sans rapport avec l'objet du projet
de loi.
Votre commission vous propose aussi de prévoir les modalités
selon lesquelles le panier de soins retenu pour les personnes
bénéficiant de l'allocation personnalisée à la
santé pourra répondre à des critères de
qualité et de prix, plutôt que d'accepter le panier de biens
" le moins cher " proposé par le Gouvernement.
La commission veut en effet autoriser les régimes obligatoires
d'assurance maladie et les fédérations représentatives des
organismes assureurs, de prévoyance et mutualistes, à
établir ensemble une convention qui pourra :
1°) déroger aux articles L. 321-1 et L. 615-14 du
présent code en ce qu'ils concernent les frais couverts par l'assurance
maladie pour garantir la meilleure qualité des soins au meilleur
prix ;
2°) fixer la nature des frais mentionnés aux articles L.
321-1 et L. 615-14 pris en charge au titre du présent article pour
tenir compte de la qualité et du prix du service médical
rendu ;
3°) fixer les critères de qualité et de prix auxquels
doivent satisfaire les producteurs de biens et services médicaux pour
bénéficier d'un agrément délivré par les
signataires de la convention et ouvrant droit à la prise en charge des
soins au titre du présent article :
4°) déterminer les modalités suivant lesquelles
l'agrément prévu au 3°) est délivré et
porté à la connaissance des bénéficiaires de
l'allocation personnalisée à la santé, ainsi que les
modalités suivant lesquelles la nature des frais mentionnés au
1°) est portée à la connaissance des professionnels de
santé et des assurés sociaux ;
5°) fixer les conditions dans lesquelles des médecins
conventionnés pourront accepter de renoncer à tout
dépassement, sauf exigence particulière du malade pour les
bénéficiaires de l'allocation personnalisée à la
santé, les conditions dans lesquelles les chirurgiens-dentistes pourront
accepter de limiter les dépassements susceptibles d'être
autorisés par la convention nationale des chirurgiens-dentistes pour les
soins visés au 3°) de l'article L. 861-3 et celles selon
lesquelles les bénéficiaires de l'allocation personnalisée
à la santé pourront en avoir connaissance.
La convention, ses annexes et avenants n'entreront en vigueur qu'après
approbation par arrêté du ministre chargé de la
sécurité sociale pris après avis du conseil national de
l'ordre des médecins et du conseil de la concurrence.
En l'absence de convention, c'est un arrêté ministériel
pris dans les mêmes conditions qui déterminera le panier de soins
proposé aux personnes bénéficiaires de l'allocation
personnalisée à la santé.
S'il appartient en effet à l'Etat -c'est-à-dire au Gouvernement
sous le contrôle du Parlement- de déterminer le panier de soins
correspondant à une allocation qu'il institue, votre commission estime
que la voie conventionnelle préalable à la publication de
l'arrêté ministériel permettra effectivement au dispositif
de s'inscrire dans un scénario " partenarial ", et de garantir
le meilleur rapport " qualité-prix " de la couverture et des
soins pris en charge.
Votre commission proposera enfin que le tarif auquel les organismes de
protection sociale complémentaire proposeront cette couverture aux
bénéficiaires de l'allocation sera fixé annuellement par
arrêté ministériel. Cette disposition s'inscrit dans un
cadre où, à l'article 25 ci-après, votre commission
proposera que ces organismes se voient rembourser par le fonds la
différence entre le montant des cotisations ou primes reçues et
celui des prestations effectivement servies aux bénéficiaires de
l'allocation personnalisée à la santé.
Art. L. 861-4 du code de la sécurité sociale
I - Le texte du projet de loi
Le texte proposé par le projet de loi pour l'article L. 861-4,
que l'Assemblée nationale n'a modifié que par un amendement de
précision, prévoit la liste des organismes auprès desquels
les personnes éligibles à la CMU pourront obtenir leur couverture
complémentaire.
A la différence du scénario " partenarial ", qui avait
légitimement les faveurs de M. Jean-Claude Boulard, parlementaire
en mission, le Gouvernement a retenu un dispositif complexe, source de
confusion. Il ne satisfait pleinement, ni les associations oeuvrant en faveur
des plus démunis, ni les mutuelles, ni les institutions de
prévoyance, ni les assureurs, ni les régimes obligatoires
d'assurance maladie, ni, nécessairement, M. Jean-Claude Boulard,
parlementaire en mission. Le dispositif proposé par le projet de loi
prévoit en effet que les bénéficiaires de la CMU pourront
s'adresser, à leur choix, :
- aux organismes d'assurance maladie,
- ou aux organismes de protection sociale complémentaire,
c'est-à-dire aux mutuelles, aux institutions de prévoyance ou aux
compagnies d'assurance.
Si les organismes d'assurance maladie n'interviendront, au titre de la
protection complémentaire, que pour le compte de l'Etat, cette nuance de
portée strictement juridique ne sera probablement pas
intégrée dans l'esprit des bénéficiaires qui
s'adresseront aux CPAM : ils penseront, comme le reste des Français
d'ailleurs, qu'ils sont pris en charge " à 100 % " par la
sécurité sociale.
Ainsi, on aura désormais une sécurité sociale servant des
prestations différentes en fonction du revenu des assurés :
une telle réalité est incompatible avec les principes fondateurs
de la sécurité sociale, elle l'est aussi, très
probablement, avec le droit européen.
Or, ce " mélange des genres " entre assurance de base et
protection complémentaire est d'autant plus grave qu'il ne s'accompagne
pas d'un dispositif favorisant une réelle concurrence entre organismes
d'assurance maladie et organismes de protection sociale complémentaire.
En effet, non seulement les bénéficiaires de la CMU seront
nécessairement enclins à préférer la
simplicité en choisissant le même organisme pour leur couverture
de base et leur couverture complémentaire, mais le projet de loi, qui
institue à l'article 25 une taxe sur les organismes
complémentaires, ne prévoit pas au profit de ces derniers le
même système de " réassurance " que celui qui est
prévu pour les CPAM. Ainsi, alors que les CPAM seront remboursées
par le fonds à hauteur des dépenses engagées, les
organismes complémentaires ne le seront que sur une base forfaitaire, de
surcroît probablement très inférieure au coût du
service rendu.
C'est pourquoi la CNAMTS, la Fédération de la mutualité
française et la Fédération des sociétés
d'assurance ont conclu, au mois de février, un protocole d'accord aux
termes duquel la mise en oeuvre de la CMU doit être
réalisée
" dans le respect des champs de
compétence respectifs des régimes obligatoires et des
systèmes complémentaires "
.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission propose un dispositif conforme aux orientations retenues par
M. Jean-Claude Boulard, parlementaire en mission, dont ce dernier a toutefois
accepté de s'écarter, pour suivre le Gouvernement, en tant que
rapporteur du projet de loi à l'Assemblée nationale.
Ce dispositif repose sur la volonté de permettre aux
bénéficiaires de l'allocation personnalisée à la
santé dans des conditions de droit commun auprès, soit :
- d'une mutuelle ;
- d'une institution de prévoyance ;
- d'une compagnie d'assurances ;
- ou (ce n'était pas prévu par le projet de loi) d'une
section d'assurance complémentaire de la MSA.
L'amendement de la commission prend toutefois en considération la
spécificité des bénéficiaires du RMI, qui
bénéficieront d'une allocation à taux plein leur
permettant un accès gratuit à la couverture
complémentaire : leur couverture sera en effet gérée
par le régime général. Il est en effet apparu
nécessaire à votre commission de ne pas s'écarter de la
pratique actuelle, les conseils généraux confiant aujourd'hui le
plus souvent aux CPAM la gestion de la couverture des
bénéficiaires du RMI.
Art. L. 861-5 du code de la sécurité sociale
I -
Le texte du projet de loi
Cet article, qui a été amendé par l'Assemblée
nationale, prévoit la procédure à laquelle devront se
soumettre les personnes qui sollicitent le bénéfice de la CMU. Il
dispose dans son premier alinéa que la demande sera adressée
à la caisse du régime d'affiliation du demandeur, que celui-ci
soit affilié à titre professionnel ou au régime de
résidence. Le formulaire de demande sera établi par
référence à un modèle défini par
décret en Conseil d'Etat.
L'Assemblée nationale a ajouté un alinéa disposant que les
services sociaux et les associations ou organismes caritatifs ainsi que les
établissements de santé apporteront leur concours aux demandeurs.
Votre commission ne comprend pas, à cet égard, la raison qui a
motivé l'oubli des organismes de protection complémentaire
participant au dispositif dans la liste des institutions susceptibles d'aider
le demandeur à transmettre la demande et les documents correspondants
à la caisse d'assurance maladie.
Un troisième alinéa prévoit que la décision est
prise par l'autorité administrative, c'est-à-dire le
préfet. Cette compétence est logique, l'attribution de la
couverture complémentaire étant du ressort de l'Etat. L'article
L. 861-5 prévoit cependant immédiatement après que
celui-ci pourra déléguer ce pouvoir aux directeurs de caisse.
Dans ce contexte, la compétence de l'Etat demeure purement
formelle :
- la demande est déposée auprès de l'assurance
maladie
(art. L. 861-5)
;
- le contrôle des ressources est effectué, lui aussi, par
l'assurance maladie
(art. L. 861-9)
;
- la décision est prise, par délégation, par
l'assurance maladie.
Le caractère purement formel de cette compétence étatique
montre bien que le projet de loi fait des organismes d'assurance maladie les
acteurs essentiels de la couverture complémentaire de 10 % de la
population : un tel constat est de nature à tempérer les
affirmations soutenues par les députés, à
l'Assemblée nationale, selon lesquelles le dispositif du projet de loi
serait conforme au droit communautaire.
L'article L. 861-5 prévoit, à la suite d'un amendement
adopté par l'Assemblée nationale, diverses dispositions de nature
à accélérer la prise de décision par les caisses.
D'une part, en effet, la décision devra être notifiée au
demandeur dans un délai maximal, fixé par décret. D'autre
part, en l'absence de réponse, et contrairement au droit commun, le
silence de l'administration vaudra acceptation de la demande.
Si ces dispositions sont favorables aux demandeurs, il est permis de se
demander si elles sont compatibles avec un examen sérieux des
déclarations de ressources et avec leur contrôle.
Les caisses d'assurance maladie, qu'elles relèvent du régime
général, des indépendants ou de la MSA, ne sont en effet
pas habituées à contrôler des ressources, les prestations
maladie n'étant pas, à la différence de certaines
prestations familiales, servies sous condition de ressources.
Une trop forte pression, en termes de délais, mise sur des organismes
qui devront, du jour au lendemain, contrôler les ressources de 10 %
de la population française, ne peut être admise. Il conviendra
donc que le délai maximum fixé par le décret tienne compte
de la difficulté de l'exercice imposé aux caisses d'assurance
maladie.
L'article L. 861-5 prévoit aussi, dans son avant-dernier alinéa,
une procédure d'urgence qui est enclenchée " lorsque la
situation du demandeur l'exige ". Dans ce cas, le bénéfice
de la CMU est accordé dès le dépôt de la demande.
Si votre commission approuve la nécessité d'une procédure
d'urgence, elle ne peut accepter que l'article L. 861-5 ne prévoit pas
de dérogation, en ce qui la concerne, au principe selon lequel les
droits sont ouverts pour un an conformément au dernier alinéa de
cet article.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission vous propose une nouvelle rédaction de cet article L.
861-5, qui décrit la procédure de demande de l'allocation
personnalisée à la santé.
Elle prévoit que le demandeur déposera sa demande auprès
de son " organisme " d'affiliation : ce terme a paru
préférable à celui de " caisse ", retenu par le
projet de loi, qui exclut les organismes conventionnés assureurs et
mutualistes du régime d'assurance maladie des professions
indépendantes.
La rédaction proposée par votre commission prévoit aussi
d'élargir la liste des institutions habilitées à aider les
demandeurs à accomplir leurs démarches auprès des
organismes complémentaires qui ont accepté de participer au
dispositif.
Enfin, elle propose une nouvelle définition de la procédure
d'urgence, applicable " lorsque l'état de santé du demandeur
l'exige " : l'allocation est attribuée pour une période
de deux mois aux personnes présumées remplir les conditions de
ressources, le versement n'étant prolongé pour les dix mois
suivants qu'après vérification des ressources du
bénéficiaire.
Art. L. 861-5-1 (nouveau) du code de la sécurité sociale
Votre commission vous propose d'insérer, après l'article L. 861-5, un article L. 861-5-1 nouveau qui prévoit l'exonération de l'allocation personnalisée à la santé au regard de la CSG, de la CRDS et de l'impôt sur le revenu.
Art. L. 861-6 du code de la sécurité sociale
I -
Le texte du projet de loi
Cet article prévoit l'automaticité de la prise en charge
complémentaire des bénéficiaires de la CMU par les
organismes d'assurance maladie de base (CPAM, CANAM et organismes
conventionnés, MSA) dès lors que ces bénéficiaires
ont choisi ces organismes.
Il est le parallèle de l'article L. 861-8, qui prévoit que les
organismes complémentaires inscrits sur la liste prévue à
l'article L. 861-7 ne pourront refuser les bénéficiaires de la
CMU qui les auraient choisis.
Cet article L. 861-7 a été complété à
l'Assemblée nationale par une disposition prévoyant que les
prestations en nature sont dues à compter de la date de la
décision octroyant le bénéfice de la CMU.
II - Les propositions de votre commission
Le texte proposé par le projet de loi n'est pas cohérent avec
l'architecture retenue par votre commission, qui repose sur l'octroi d'une
allocation personnalisée à la santé permettant aux
bénéficiaires d'obtenir leur couverture complémentaire,
dans des conditions de droit commun, auprès des organismes de protection
sociale complémentaire.
Votre commission propose donc de substituer au texte du projet de loi des
dispositions qui prévoient :
- d'une part, que le versement de l'allocation personnalisée
à la santé est interrompu si le bénéficiaire
n'acquitte pas la cotisation ou prime à son organisme de protection
complémentaire ou, pour les bénéficiaires du RMI, à
la caisse primaire d'assurance maladie ;
- d'autre part, que, avec l'accord du bénéficiaire,
l'allocation personnalisée à la santé peut être
directement versée à l'organisme de protection
complémentaire ou, pour les bénéficiaires du RMI, à
la caisse primaire d'assurance maladie. Les assurés ne sont, dans ce
cas, redevables que du reliquat de cotisation ou de prime.
Ces deux dispositions sont inspirées de la législation en vigueur
concernant l'allocation logement, dont le versement est suspendu en cas de
non-paiement des loyers, et qui peut être directement versée au
propriétaire si le locataire le souhaite.
Elles assurent les conditions d'une responsabilisation des
bénéficiaires, y compris ceux qui perçoivent le RMI et
n'ont, en pratique, aucune contribution à leur charge. En effet, le seul
fait, s'il en est décidé ainsi, de percevoir une allocation et de
payer une cotisation, même d'un montant égal, peut être,
pour certaines personnes qui en auraient besoin, un élément
permettant de réapprendre à gérer un budget.
Art. L. 861-7 du code de la sécurité sociale
I -
Le texte du projet de loi
Cet article prévoit que les organismes de protection
complémentaire qui souhaitent participer à la couverture
complémentaire des personnes titulaires de faibles revenus doivent
établir une déclaration à l'autorité administrative.
Celle-ci enregistre les déclarations et établit une liste des
organismes participants, qui est ensuite diffusée auprès des
associations, organismes et établissements de santé
habilités, aux termes de l'article L. 861-5, à aider les
demandeurs dans leurs démarches.
L'article prévoit ainsi une procédure de radiation d'un organisme
complémentaire de cette liste, en cas de manquement aux obligations
légales concernant le contenu de la prise en charge (art. L. 861-3 du
code de la sécurité sociale) ou la non-discrimination et les
délais de prise en charge (art. L. 861-8). Un décret en
Conseil d'Etat précisera, aux termes de l'article L. 861-7, les
conditions de retrait et les délais dans lesquels l'organisme ainsi
sanctionné pourra être à nouveau inscrit sur la liste.
II - Les propositions de votre commission
Pour cet article, votre commission vous propose un amendement de
cohérence qui conduit à une nouvelle rédaction du premier
alinéa de l'article.
Art. L. 861-8 du code de la sécurité sociale
I -
Le texte du projet de loi
Cet article prévoit la procédure applicable à l'obtention
d'une couverture complémentaire pour les personnes
bénéficiaires de la CMU qui auraient décidé de
s'adresser à un organisme de protection sociale complémentaire.
Il énonce tout d'abord les conditions relatives aux délais de
prise en charge en disposant que l'adhésion ou le contrat prennent effet
à la date de la décision de l'autorité administrative
admettant le bénéficiaire à la CMU.
Il affirme ensuite un principe de non-discrimination, qui se traduit par
l'interdiction faite aux organismes de protection sociale complémentaire
de subordonner l'entrée en vigueur de l'adhésion ou du contrat
à aucune autre condition ou formalité que la réception du
document d'admission à la CMU établi par l'autorité
administrative.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission distingue, dans la nouvelle rédaction de l'article
qu'elle vous propose, la situation des titulaires du RMI et celle des autres
bénéficiaires de l'allocation personnalisée à la
santé.
Elle prévoit en premier lieu, retenant ainsi une solution très
simple et protectrice, que le bénéfice de l'allocation
personnalisée à la santé est accordé
automatiquement à la date de la décision d'octroi du revenu
minimum d'insertion.
En second lieu, la nouvelle rédaction proposée par votre
commission prévoit que, pour les personnes qui ne sont pas titulaires du
RMI, le bénéfice des prestations complémentaires est
accordé dans des conditions de droit commun à la date de
l'adhésion ou de la souscription du contrat.
Elle reprend enfin les dispositions contenues dans le texte du projet de loi
tendant à garantir l'application du principe de non-discrimination.
L'amendement proposé par votre commission est cohérent avec la
démarche qu'elle a retenue pour l'ensemble du projet de loi :
considérant que les quelque 10 % de la population concernés par
le projet de loi ne sont, à l'évidence, ni tous marginaux, ni
tous désocialisés, elle prévoit à la fois le
dispositif le plus simple et une procédure d'adhésion ou de
souscription de droit commun pour toutes les personnes solvabilisées
grâce à l'allocation personnalisée à la santé.
Art. L. 861-9 du code de la sécurité sociale
I -
Le texte du projet de loi
Cet article prévoit que, pour effectuer le contrôle des ressources
des demandeurs, les caisses d'assurance maladie pourront demander des
informations aux organismes d'assurance chômage qui seront tenus de les
leur communiquer. Il prévoit aussi que les demandeurs sont
informés de cette possibilité d'échanges d'informations.
II - Les propositions de votre commission
A plusieurs reprises dans ce rapport, votre rapporteur s'est
inquiété de la charge nouvelle imposée aux caisses
d'assurance maladie, qui devront contrôler les ressources d'environ 10 %
de la population française.
A cet égard, les dispositions contenues dans le projet de loi tendant
à faciliter la tâche des agents des caisses et à rendre
leur travail plus efficace sont très insuffisantes : les ASSEDIC ne
pourront en effet, par nature, informer les caisses que de la perception par le
bénéficiaire d'une allocation d'indemnisation du chômage.
C'est pourquoi votre commission vous propose, par référence aux
dispositions législatives en vigueur concernant l'attribution de
l'allocation de logement, de prévoir que les caisses pourront s'assurer
le concours, non seulement des ASSEDIC, mais aussi de l'ensemble des
administrations publiques, et notamment de celui de l'administration fiscale.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.
Art. 20 bis (nouveau)
(art. L. 132-27 du code du
travail)
Obligation de négociation annuelle des
modalités d'établissement d'un régime de prévoyance
maladie pour les salariés non couverts
Cet
article résulte d'un amendement présenté par
Mme Jacquaint, M. Gremetz et les membres du groupe communiste, il a
été adopté avec l'avis favorable du Gouvernement et de la
commission.
Il a pour objet de créer une obligation de négociation annuelle
des modalités d'établissement d'un régime de
prévoyance maladie lorsque les salariés d'une entreprise ne sont
pas couverts par un accord de branche ou un accord d'entreprise.
I - Le texte du projet de loi
•
L'article L. 132-27 du code du travail
impose à
l'employeur d'engager chaque année une négociation "
sur
les salaires effectifs, la durée effective et l'organisation du
travail
" dans les entreprises où sont constituées une
ou plusieurs sections syndicales d'organisations représentatives.
L'obligation d'engager la négociation est pénalement
sanctionnée comme une entrave au droit syndical
(art. L. 153-2 du
code du travail).
A défaut d'initiative de l'employeur depuis plus de douze mois suivant
la précédente négociation, la négociation peut
s'engager à la demande de l'une des organisations syndicales
représentatives.
La négociation annuelle obligatoire est une procédure lourde. A
ce titre, elle est strictement limitée
aux éléments les
plus essentiels de la relation de travail
. Elle concerne par exemple les
salaires, mais pas l'intéressement, l'organisation du travail mais pas
les conditions de travail, etc. Il existe des possibilités facultatives
de négociation sur la formation ou la réduction du temps de
travail. Dans l'intérêt même de cette procédure, il
est important de ne pas multiplier les obligations.
•
Le présent article
a pour conséquence
d'établir pour l'employeur une obligation annuelle de négocier
les modalités de création d'un régime de prévoyance
maladie lorsque les salariés ne sont pas couverts par un accord de
branche ou par un accord d'entreprise. Il aurait ainsi pour objectif de
favoriser le développement de la prévoyance collective
santé. M. Jean-Claude Boulard, rapporteur pour la commission des
Affaires culturelles, a considéré que le présent article
20 bis de même l'article 20 ter
(voir infra)
se plaçaient
"
dans une perspective d'universalité de la couverture
complémentaire
"
13(
*
)
.
De même, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la
solidarité, a estimé qu'il était "
essentiel, dans
la perspective de l'universalité, d'édicter une obligation de
négocier dans les entreprises qui ne sont pas couvertes par un accord de
branche ou d'entreprise et de faire figurer, parmi les clauses obligatoires
pour l'extension des conventions collectives, l'accès à un
régime de prévoyance maladie
"
14(
*
)
.
Elle a également indiqué que le Gouvernement présenterait
chaque année à la commission nationale de la négociation
collective un état des lieux de la situation des régimes de
prévoyance dans les différentes branches.
II - Les propositions de votre commission
Sur la forme, votre commission s'étonne que l'amendement dont est issu
cet article de même que celui dont est issu l'article 20 ter,
considérés comme " essentiels " par le rapporteur et le
Gouvernement, n'aient pas fait l'objet d'un examen en commission.
Sur le fond, votre commission estime que ces articles, qui ont fait l'objet
d'une discussion commune, mettent en évidence les limites du projet de
loi tel qu'il a été préparé par le Gouvernement et
voté par l'Assemblée nationale. Conscient probablement de l'effet
de seuil brutal qu'introduit le projet de loi en matière de couverture
maladie complémentaire le Gouvernement souhaite que les entreprises en
atténuent les conséquences pour leurs salariés en imposant
le recours à la négociation collective dans les entreprises. Il
n'est pas sûr que le moyen retenu à travers cet article soit le
plus approprié pour aboutir aux fins recherchées.
En effet, comme le soulignait le rapporteur de l'Assemblée nationale, ce
sont les salariés précaires, les salariés à
mi-temps et le secteur souvent très mal couvert des PME où se
trouvent tous les salariés qui dépassent de très peu le
seuil qui est visé par ce dispositif. Or, les PME sont les entreprises
qui comprennent le moins de délégués syndicaux. Il est
donc à craindre que cette disposition n'ait que des effets
limités, voire comporte le risque, alors qu'elle prétend
réduire la précarité de certains salariés,
d'accentuer en fait les clivages.
Par ailleurs, votre commission estime que la contrainte ne peut constituer une
méthode acceptable et efficace pour obtenir que les partenaires sociaux
avancent sur la voie d'un développement des régimes de
prévoyance maladie. Elle considère que le Gouvernement aurait
été mieux inspiré s'il avait choisi de revenir sur les
obstacles qu'il a lui-même dressés devant le développement
de ces régimes.
Elle rappelle, à cet égard, que la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1998 a augmenté de plus de 30 %
le taux de la taxe sur les contributions patronales au financement des
garanties complémentaires de prévoyance. Cette taxe avait
été créée par l'article 8 de l'ordonnance n°
96-51 du 24 janvier 1996 relative aux mesures urgentes tendant au
rétablissement de l'équilibre financier de la
sécurité sociale. Votre commission avait estimé en 1997
que le passage de 6 à 8 %
"
du taux de la taxe sur
les contrats de prévoyance avait un effet dissuasif sur le
développement des contrats, qui contribuait à améliorer la
couverture maladie de nos concitoyens "
15(
*
)
.
Votre commission constate les contradictions du Gouvernement. Celui-ci a en
effet adopté en 1997 une disposition qui a eu pour conséquence de
limiter le développement des régimes de prévoyance maladie
au nom notamment de l'équité entre les salariés. Il entend
aujourd'hui favoriser la négociation collective sur ce thème au
nom de la nécessité de favoriser le développement de ces
mêmes régimes en décidant, sans aucune concertation avec
les partenaires sociaux, que ce sujet constituerait un thème de la
négociation collective annuelle obligatoire
(art. 20 bis)
et
une clause devant figurer dans les conventions et accords collectifs pour que
ceux-ci puissent faire l'objet d'une extension
(art. 20 ter).
Votre commission considère qu'il aurait été
préférable de réexaminer des dispositions fiscales
pénalisantes plutôt que d'établir des contraintes
supplémentaires pour les entreprises. En tout état de cause, il
aurait été souhaitable que les partenaires sociaux soient
consultés. Tout ceci renforce l'impression que le Gouvernement cherche
à pallier les défauts de son projet qui, par certains aspects,
défavorise les salariés les moins rémunérés
et pourrait constituer une puissante " désincitation "
à la recherche d'un emploi.
Enfin, votre commission observe que les modifications du projet de loi qu'elle
vous a proposées, tendant à supprimer les effets de seuil
indésirables à travers la création d'une allocation
personnalisée à la santé (APS), dispensent le Sénat
d'adopter des " mesures de rattrapage " inopinées pour assurer
la viabilité d'un texte quelque peu inabouti.
Dans ses conditions, votre commission vous propose d'adopter un amendement
de suppression de cet article.
Art. 20 ter (nouveau)
(art. L. 133-5 du code du
travail)
Modalités d'extension des conventions de branche
et
régime de prévoyance maladie
Cet
article a pour objet d'ajouter une clause à l'article L. 133-5 du code
du travail qui définit les modalités d'extension des conventions
et accords collectifs.
I - Les modifications adoptées par l'Assemblée
nationale
L'amendement déposé par Mme Jacquaint, M. Gremetz et les membres
du groupe communiste, à l'origine du présent article a fait
l'objet d'une discussion commune avec l'amendement insérant l'article 20
bis
(cf. ci-dessus)
.
Ces deux articles participent d'une même logique puisqu'ils font de la
négociation sur la mise en place d'un régime de prévoyance
maladie un passage obligé, lors de la négociation collective
obligatoire dans le premier cas, avant toute extension d'une convention ou d'un
accord collectif dans le second.
L'article L. 133-5 du code du travail prévoit en effet que tout accord
ou convention doit, pour pouvoir être étendu, comporter certaines
clauses. Il s'agit notamment de dispositions relatives au droit syndical, aux
classifications, aux différents éléments de la
rémunération, aux congés payés, aux conditions
d'emplois.
Le présent article propose d'ajouter à cette liste les
"
modalités d'accès à un régime de
prévoyance maladie
".
Comme précédemment avec l'article 20 bis, l'objectif est de
favoriser le développement des régimes de prévoyance
collectifs au sein des entreprises.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission est favorable au développement des régimes de
prévoyance maladie. Elle est toutefois dubitative quant au texte
voté par l'Assemblée nationale qui a pour effet d'encadrer un peu
plus les partenaires sociaux en ajoutant une nouvelle clause aux conditions
d'extension des conventions et accords collectifs. Doit-on comprendre que
l'absence de dispositif relatif au régime prévoyance maladie
pourrait être un motif de refus, par le ministère, d'extension
d'un accord relatif à la réduction du temps de travail par
exemple ?
En voulant faire de la négociation sur la création d'un
régime de prévoyance maladie un point de passage obligé,
les auteurs de l'article prennent le risque de contraindre le
développement de la négociation collective en
général puisque cela revient à créer une cause de
conflit supplémentaire entre les parties.
Votre commission s'étonne que le Gouvernement introduise un
élément de discorde entre les partenaires sociaux à un
moment critique où les entreprises sont déjà
confrontées aux conséquences dommageables de l'application de la
loi sur la réduction du temps de travail.
En dehors du fait que la nature même du texte proposé par cet
article ne semble pas correspondre à une nécessité, le
moment retenu par le Gouvernement pour inspirer une telle disposition semble
particulièrement mal venu.
C'est pourquoi votre commission vous propose d'adopter un amendement de
suppression de cet article.
Art.
21
(art. 6-1 et 6-2 nouveaux et 9 de la loi n° 89-1009 du 31
décembre 1989)
Prolongation de la couverture des
bénéficiaires de la CMU
couverts par un organisme
complémentaire
I -
Le texte du projet de loi
Cet article complète, au profit des bénéficiaires de la
CMU, la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant
les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques.
Il offre aux bénéficiaires de la CMU qui ont opté pour une
couverture complémentaire auprès d'une mutuelle, d'une compagnie
d'assurance ou d'une institution complémentaire, une période de
" maintien des droits " d'une année à compter de leur
sortie du dispositif CMU.
Il crée ainsi une inégalité sans fondement au
détriment des bénéficiaires de la CMU qui auraient choisi
de s'assurer auprès d'un organisme d'assurance maladie.
Cette rupture d'égalité ne peut être justifiée, ni
par des raisons d'intérêt général, ni par le fait
que les bénéficiaires de la CMU qui auraient choisi les CPAM ou
les organismes complémentaires seraient placés dans des
situations différentes : le projet de loi prévoit en effet
que l'exercice d'un même droit, celui de la couverture maladie CMU, peut
s'effectuer, au choix du bénéficiaire, soit auprès des
CPAM, soit auprès des organismes de protection sociale
complémentaire.
Le nouvel article 6-1 créé par cet article prévoit que
l'ancien bénéficiaire de la CMU se voit proposer, pour un an, la
couverture correspondant à la CMU à un prix inférieur ou
égal à un tarif maximal fixé par arrêté
ministériel.
L'initiative, aux termes de l'article 6-1, appartient à l'assureur ou
à la mutuelle.
L'article 6-2 nouveau de la loi n° 89-1009 prévu par le projet de
loi énonce aussi une procédure dérogatoire du droit commun
au profit des personnes bénéficiaires de la CMU qui sont
déjà adhérentes à une mutuelle ou qui ont souscrit
une protection complémentaire auprès d'une compagnie d'assurance
ou d'une institution de prévoyance. Il met en place une procédure
automatique, à la demande du bénéficiaire :
- soit de résiliation totale de la garantie ;
- soit de modification de la garantie, seules demeurant à la charge
du bénéficiaire les garanties excédant le
périmètre de la couverture CMU.
Le nouvel article 6-2 prévoit aussi que le bénéficiaire de
la CMU se verra rembourser la différence entre le coût du contrat
initialement souscrit et celui de la garantie résiduelle.
L'article 6-2 nouveau prévoit enfin que l'initiative des
procédures de sa résiliation appartient :
- à l'assuré si l'organisme ne figure pas sur la liste
prévue à l'article L. 861-4 ;
- à l'assureur dans les autres cas.
Le projet de loi prévoit enfin que les procédures de
résiliation et de modification qu'il institue ne s'appliquent pas aux
garanties offertes dans le cadre d'un contrat collectif d'entreprise
obligatoire, en raison même du caractère obligatoire de cette
couverture.
II - Les propositions de votre commission
Pour l'article 6-1 nouveau de la loi n° 89-1009, l'amendement de votre
commission prend en considération le fait que les
bénéficiaires de l'APS obtiennent leur couverture
complémentaire dans des conditions de droit commun.
Votre commission prévoit ainsi une période de maintien des
droits, d'une durée d'un an, qui se caractérise par des
prestations et des tarifs identiques à ceux qui sont appliqués
aux bénéficiaires de l'APS.
Pour l'article 6-2 nouveau, votre commission propose un amendement de
cohérence : les procédures de résiliation ou de
modification qu'il prévoit s'adressent aux bénéficiaires
de l'ALS, et non à ceux de la CMU.
Afin de restaurer l'égalité entre bénéficiaires de
l'APS mise à mal par le projet de loi, votre commission vous propose
enfin un amendement disposant que les anciens bénéficiaires du
RMI peuvent, pendant un an, souscrire une protection complémentaire
maladie au tarif fixé par l'Etat si leurs ressources ne leur permettent
pas de prétendre au bénéfice de l'ALS.
Elle vous propose d'adopter cet article tel qu'amendé.
Art.
22
(art. L. 162-5-2 du code de la sécurité
sociale)
Tarifs pratiqués par les médecins
conventionnés
en faveur des bénéficiaires de la CMU
I -
Le texte du projet de loi
Pour la première fois dans notre droit de la sécurité
sociale, le projet de loi introduit dans la législation une disposition
prévoyant que les tarifs pratiqués par les médecins
à l'égard des assurés sociaux dépendront des
revenus de ces derniers. L'article complète en effet l'article L.
162-5-2 du code de la sécurité sociale relatif au contenu de
l'annexe à la convention ou aux conventions nationales des
médecins généralistes et spécialistes, en
prévoyant ainsi que les médecins conventionnés, et
notamment ceux qui appartiennent au secteur 2, ne pourront appliquer de
suppléments aux tarifs pratiqués, sauf en cas d'exigence
particulière du malade.
En énonçant une disposition légale, le projet de loi remet
ainsi en cause la démarche conventionnelle qui aurait pu, en pratique,
parvenir au même résultat.
II - Les propositions de votre commission
En cohérence avec l'amendement qu'elle a proposé à
l'article 20 pour l'article L. 861-3 du code de la sécurité
sociale qui prévoit qu'une convention conclue entre régimes de
base et complémentaires prévoira les modalités selon
lesquelles les médecins pourront renoncer à leur droit à
dépassement,
votre commission vous propose de supprimer cet
article.
Art.
23
(art. L. 165-1 nouveau du code de la sécurité
sociale)
Accords entre les organismes d'assurance maladie,
les
organismes complémentaires et les distributeurs
de dispositifs
médicaux à usage individuel
I -
Le texte du projet de loi
Le présent article modifie le titre du chapitre V du titre VI du
Livre I
er
du code de la sécurité sociale et
crée, en son sein, un article L. 165-1 nouveau.
Le titre actuel du chapitre V du titre VI du Livre I
er
du code de la
sécurité sociale est " Appareillage ". Le projet de loi
lui substitue celui de " Dispositifs médicaux à usage
individuel ", qui est cohérent avec les dispositions du code de la
santé publique relatives à ces biens médicaux
qualifiés, en conformité aussi avec le droit européen, de
dispositifs médicaux.
Le présent article, dans l'article L. 165-1 nouveau, édicte des
dispositions générales, et d'autres dispositions
spécifiques pour les bénéficiaires de la CMU.
Il prévoit en effet, en premier lieu, que les organismes d'assurance
maladie, les mutuelles, les sociétés d'assurance et les
institutions de prévoyance pourront conclure (séparément
ou non) des accords avec les distributeurs de dispositifs médicaux.
Ces accords, qui pourront être locaux ou nationaux, concerneront
notamment :
- les prix maximum pratiqués ;
- la qualité ;
- et les modalités d'avance de frais.
Le second alinéa de l'article L. 165-1 nouveau dispose que ces accords
comporteront obligatoirement des stipulations spécifiques aux
bénéficiaires de la CMU. Ces stipulations pourront être de
deux natures :
- soit elles prévoiront que le distributeur proposera un
dispositif, au sein de sa gamme, à un prix n'excédant pas le
tarif maximum pris en charge au titre de la CMU ;
- soit elles prévoiront le montant maximal pouvant être
facturé aux bénéficiaires de la CMU pour chacun des
dispositifs de la gamme.
En cohérence avec les dispositions de l'article 22 pour les tarifs des
médecins, les dispositions de l'article 23 visent à instituer des
tarifs spécifiques en fonction du revenu de l'acheteur final.
Le troisième alinéa de l'article prévoit qu'en l'absence
d'accord, les obligations des distributeurs en ces matières seront
fixées par arrêté ministériel.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission n'estime pas cohérentes les dispositions du
présent article. En effet, à partir du moment où il
prévoit la possibilité, pour chaque régime de base, et
pour chaque régime complémentaire, de conclure des accords locaux
ou nationaux, que signifie la notion d'" absence d'accord " qui
enclenche le recours à l'arrêté ministériel ?
Aura-t-on un arrêté concernant la prise en charge des lunettes en
Languedoc-Roussillon ou dans le Nord - Pas-de-Calais, et assistera-t-on
à l'émergence d'inégalités, non seulement entre
bénéficiaires et non-bénéficiaires de la CMU, mais
aussi entre bénéficiaires de la CMU en fonction des
circonscriptions des CPAM ?
En second lieu, votre commission s'oppose au système de double
tarification d'un même produit en fonction des revenus du patient.
Pourquoi un assuré social paierait-il ses lunettes 300 francs alors
qu'un assuré social bénéficiaire de la CMU les paierait
200 francs ?
Comment appliquer, dans ces conditions, la jurisprudence européenne
autorisant à acheter ces mêmes lunettes dans un pays de l'Union
européenne autre que la France ?
Votre commission estime plus conformes au droit national et européen les
dispositions de son amendement à l'article 20
(art. L. 861-3 du code
de la sécurité sociale)
qui prévoit, non pas des
tarifs spécifiques pour les bénéficiaires de l'ALS, mais
une procédure d'agrément délivré en fonction de
critères de qualité et de prix, qui ouvre droit à une
prise en charge complémentaire.
Aussi, votre commission vous propose de supprimer cet article.
Art.
24
(art. L. 162-9 du code de la sécurité
sociale)
Tarifs pratiqués par les chirurgiens-dentistes
conventionnés
en faveur des bénéficiaires de la CMU
I -
Le texte du projet de loi
En cohérence avec les dispositions des articles 22 et 23, cet article,
qui complète l'article L. 162-9 du code de la sécurité
sociale concernant la convention nationale des chirurgiens-dentistes,
prévoit que, si cette convention autorise des dépassements pour
les soins prothétiques ou d'orthopédie dento-faciale, ces
dépassements sont plafonnés par la même convention pour les
bénéficiaires de la CMU.
Cet article prévoit aussi, dans un second paragraphe, une disposition
prévoyant que la convention pourra fixer les conditions tendant à
instituer une dispense d'avance de frais.
II - Les propositions de votre commission
Pour les mêmes raisons que celles énoncées sous les
articles 22 et 23,
votre commission vous propose de supprimer cet
article.
CHAPITRE 2
-
Dispositions
financières
Art.
25
(art. L. 861-10 à L. 861-17 du code de la sécurité
sociale)
Création du fonds de financement de la protection
complémentaire
Le présent article institue, après le chapitre I er du titre VI du Livre VIII du code de la sécurité sociale, créé lui aussi par le projet de loi et consacré aux " Dispositions générales " relatives à la CMU, un chapitre II intitulé " Dispositions financières ". Ce chapitre comprend les articles L. 861-10 à L. 861-17 du code de la sécurité sociale.
Art. L. 861-10 du code de la sécurité sociale
I -
Le texte du projet de loi
L'article L. 861-10 du code de la sécurité sociale institue un
fonds de financement des dépenses de protection complémentaire
santé engagées au titre de la CMU. Doté du statut
d'établissement public administratif, le fonds sera géré
par un conseil d'administration, dont la composition est renvoyée
à un décret. Ce décret devrait, en pratique, donner la
répartition des membres du conseil d'administration en fonction des
différents ministères concernés. En effet, le texte du
projet de loi dispose que le conseil d'administration sera exclusivement
composé de représentants de l'Etat.
Le même décret fixera la composition du conseil de surveillance du
fonds, dont l'article L. 861-10 prévoit qu'il comprendra
" notamment " :
- des membres du Parlement,
- des représentants d'associations oeuvrant en faveur des
populations les plus démunies,
- des représentants des régimes obligatoires d'assurance
maladie,
- des représentants des organismes de protection sociale
complémentaire.
Les rôles respectifs du conseil d'administration et du conseil de
surveillance ne sont pas précisés par le texte du projet de loi,
non plus que l'existence d'une direction générale chargée
de la gestion quotidienne du fonds. L'article L. 861-10 prévoit en effet
que le décret susmentionné fixera également les conditions
de fonctionnement et de gestion du fonds.
Les rôles respectifs du conseil d'administration et du conseil de
surveillance du fonds ont été évoqués lors des
débats à l'Assemblée nationale.
En effet, en cohérence avec la logique " partenariale " qu'il
avait défendue dans son rapport de parlementaire en mission, M.
Jean-Claude Boulard, rapporteur de la commission des Affaires culturelles,
familiales et sociales, a déposé un amendement
" complétant la composition du conseil d'administration en
l'ouvrant à l'ensemble des partenaires concernés : membres
du Parlement, représentants d'associations oeuvrant dans le domaine
social, représentants des régimes obligatoires d'assurance
maladie, des mutuelles et des assurances et, de ce fait, à supprimer le
conseil de surveillance "
(rapport AN n° 1518, p. 161).
Pour justifier cet amendement, le rapporteur M. Jean-Claude Boulard a
souligné
" qu'il n'était pas conforme à la logique
partenariale que le conseil d'administration ne soit composé que de
représentants du Gouvernement "
(rapport AN n° 1518, p.
161). Evoquant le conseil de surveillance tel qu'il est défini par le
projet de loi, le rapporteur a parlé d'un
" théâtre
d'ombres ".
En séance publique, cependant, M. Jean-Claude Boulard a retiré
cet amendement, expliquant que
" les réactions des associations
qui, depuis des années, s'occupent de personnes en difficulté en
les accompagnant, notamment pour l'accès aux soins, montrent que les
relations entre le monde associatif et celui des acteurs complémentaires
devraient pour le moins s'améliorer. En tout cas, toute idée de
partenariat implique de clarifier certains malentendus (...). Dans
l'immédiat, les conditions d'un vrai dialogue au sein du fonds ne
paraissaient pas remplies. "
(JO Débats AN,
3
ème
séance du 29 avril 1999, p. 3882).
Cet amendement a toutefois reçu l'approbation de M. Alfred Recours, qui
a déclaré concevoir que,
" dans un certain microcosme
d'associations humanitaires ou caritatives implantées à Paris ou
internationales, notre vision des choses puisse n'être pas la même
que celle que nous avons dans nos départements ".
Répondant à M. Alfred Recours, le ministre de l'emploi et de la
solidarité a expliqué qu'il fallait
" un lieu pour les
débats, en l'occurrence le conseil de surveillance, et un autre, pour
l'application technique, le conseil d'administration dans lequel, sans risque
de pression, les représentants de l'Etat pourront suggérer des
modifications et au besoin les proposer au Parlement "
(JO
Débats AN, 3
ème
séance du 29 avril 1999, p.
3882).
L'amendement n° 440 rectifié de MM. Terrasse et Pontier de
même que l'amendement n° 345, déposé par MM. Jacques
Barrot, Yves Bur et Pierre Méhaignerie, n'ont pas été
adoptés.
A l'initiative de la commission, toutefois, et avec l'accord du Gouvernement,
l'Assemblée nationale a complété l'article L. 861-10 par
un alinéa dont l'application est censée remédier aux
graves effets de seuil impliqués par le projet de loi. Il prévoit
que les organismes de protection sociale complémentaire
" peuvent " créer un fonds d'accompagnement à la
protection complémentaire des personnes dont les ressources sont
supérieures au plafond et qu'ils en déterminent les
modalités d'intervention.
Pour défendre l'amendement, M. Jean-Claude Boulard a expliqué
qu'il s'agissait
" d'adresser un message aux organismes
complémentaires "
(JO Débats AN, 3
ème
séance du 29 avril 1999, p. 3883).
Comme l'a rappelé devant votre commission M. Jean-Pierre Davant,
président de la FNMF, les organismes mutualistes n'ont pas attendu ce
" message " pour instituer, en leur sein, des mécanismes de
solidarité destinés à faciliter l'adhésion du plus
grand nombre à une couverture mutualiste complémentaire. Et votre
commission n'estime pas que ce " rideau de fumée " apporte un
commencement de réponse au grave problème posé par les
effets de seuil créés par le projet de loi.
II - Les propositions de votre commission
En cohérence avec l'architecture générale qu'elle a
définie, votre commission vous propose, par un premier amendement, de
prévoir qu'un " fonds pour la protection complémentaire
maladie ", établissement public à caractère
administratif, sera chargé de servir l'allocation personnalisée
à la santé à ses bénéficiaires.
Un second amendement, conforme à la logique partenariale défendue
par M. Jean-Claude Boulard, parlementaire en mission, propose d'associer aux
représentants de l'Etat, dans le conseil d'administration du fonds, les
représentants des organismes de protection sociale
complémentaire, des régimes d'assurance maladie de base et des
associations oeuvrant en faveur des populations les plus démunies.
Votre commission ne développera pas, ici, les arguments excellemment
défendus par M. Jean-Claude Boulard, dans son rapport, et par
M. Alfred Recours, en séance publique : elle les fait siens.
Elle s'oppose en revanche à la thèse exprimée en
séance publique par M. Jean-Claude Boulard, selon laquelle la
méfiance des associations à l'égard des organismes
complémentaires empêcherait les conditions du dialogue et de
décisions partenariales au sein du fonds.
Outre que cette " méfiance " mérite d'être
démontrée, les associations ne pouvant raisonnablement se
méfier d'organismes dont elles souhaitent qu'ils contribuent de
manière importante, par une taxe et par des adhésions ou des
contrats, à la couverture complémentaire des personnes
défavorisées, elle ne pourrait disparaître, si elle
était avérée, que grâce à une collaboration
active rendue possible par une même présence au sein du conseil
d'administration du fonds.
Par un troisième amendement, votre commission vous propose de supprimer
le dernier alinéa de l'article L. 861-10 prévoyant que les
organismes de protection sociale complémentaire pourront créer un
nouveau fonds pour aider les personnes dont les revenus sont supérieurs
au plafond à disposer d'une couverture complémentaire.
D'une part, en effet, soit le fonds est véritablement créé
et son financement mettrait en péril les organismes de protection
sociale complémentaire, soit il n'est pas créé et
l'alinéa n'est pas, dans ces conditions, utile.
D'autre part et surtout, on ne peut vouloir, comme le fait le ministre, assurer
une protection complémentaire gratuite et à 100 % pour les
personnes en dessous du plafond, et dire à celles dont les revenus sont
juste au-dessus qu'elles devront se contenter de mécanismes
d'assistance, qu'elles devront aller demander de l'aide aux guichets des fonds
d'action sociale des CPAM, ceux des CAF, ceux des départements et ceux
du fonds institué par les organismes complémentaires.
La seule bonne réponse aux effets de seuil, estime votre commission, est
l'institution d'une allocation personnalisée à la santé
dégressive en fonction des revenus qui permettra de solvabiliser les
personnes les moins aisées pour qu'elles souscrivent ou adhèrent
à une couverture complémentaire dans des conditions de droit
commun.
Art. L. 861-11 du code de la sécurité sociale
I -
Le texte du projet de loi
Cet article prévoit les trois catégories de dépenses du
fonds, qui seront constituées :
- par le versement aux organismes de sécurité sociale de
base d'un montant égal aux dépenses qu'elles auront
engagées au titre de la couverture complémentaire des
bénéficiaires de la CMU qui les auront choisis ;
- par le versement aux organismes de protection complémentaire des
montants définis à l'article L. 861-15
(cf. infra)
;
- par les frais de gestion administrative du fonds.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission souligne que le projet de loi prévoit que le versement
du fonds aux organismes d'assurance maladie de base sera
" égal " aux dépenses qu'ils auront engagées au
titre de la CMU.
Selon votre commission, les dépenses ainsi remboursées doivent
correspondre, non seulement aux dépenses correspondant aux prestations
servies, mais aussi aux frais de gestion y afférents.
Elle s'inquiète des commentaires figurant dans le rapport de
l'Assemblée nationale
(rapport AN n° 1518, p. 164),
selon
lesquels le versement du fonds sera " équivalent " à la
charge que représente la CMU pour les organismes de protection
complémentaire. Le rapport indique ainsi qu'
" il s'agira donc
d'un calcul forfaitaire tenant compte du coût moyen que représente
un affilié multiplié par le nombre de personnes prises en
charge ".
S'il en était ainsi, non seulement les mesures
d'application de la loi seraient illégales, mais le " bouclage
financier " de tout dérapage des dépenses
réalisées au titre de la CMU pourrait être assuré,
non par l'Etat comme le prévoit la loi, mais par l'assurance maladie,
à travers une non-revalorisation ou une insuffisante revalorisation des
forfaits correspondants.
La logique qui inspire votre commission est toute différente. Elle vous
propose, pour cet article, un amendement qui prévoit que les
dépenses du fonds seront constituées par :
- le versement de l'allocation personnalisée à la
santé ;
- le versement aux organismes d'assurance maladie de base (gestionnaires
de la couverture des bénéficiaires du RMI) et aux organismes de
protection sociale complémentaire des montants définis à
l'article L. 861-15
(voir infra).
Art. L. 861-12 du code de la sécurité sociale
Cet
article énumère les recettes du fonds, qui seront
constituées par :
- une contribution des organismes de protection sociale
complémentaire, prévue par l'article L. 861-13 et
commentée ci-après ;
- une dotation budgétaire de l'Etat destinée à
équilibrer le fonds.
A l'initiative de la commission des Affaires culturelles, familiales et
sociales de l'Assemblée nationale, les députés ont
complété cet article par un alinéa qui dispose que
" le solde annuel des dépenses et des recettes du fonds doit
être nul ".
Comme il a été souligné plus haut, la portée de la
disposition prévoyant une subvention d'équilibre de l'Etat doit
être appréciée au regard des inquiétudes
suscitées par les commentaires du rapport de l'Assemblée
nationale sous l'article L. 861-11.
Art. L. 861-13 du code de la sécurité sociale
I -
Le texte du projet de loi
Cet article institue, à la charge de l'ensemble des organismes de
protection sociale complémentaire (mutuelles, institutions de
prévoyance régies par les codes de la sécurité
sociale ou du code rural, sociétés d'assurance), une contribution
destinée à concourir au financement de la couverture
complémentaire CMU.
Le
paragraphe I
de l'article définit l'assiette de la
contribution, qui est constituée par le montant hors taxe des
cotisations et primes afférentes à la protection
complémentaire en matière de santé au titre de leur
activité réalisée en France. Il prévoit aussi que
l'assiette est appréciée par trimestre, et que les versements
sont eux aussi trimestriels.
Le
paragraphe II
de cet article établit à 1,75 % le
taux de cette contribution.
Le
paragraphe III
dispose que les organismes de protection sociale
complémentaire déduiront du montant de la contribution ainsi
calculée une somme égale, par trimestre, au produit du nombre de
personnes couvertes au titre de la CMU par 375 francs (soit 1.500 francs par
an).
Ce forfait, a confirmé M. Jean-Pierre Davant, président de la
FNMF, lors de son audition par votre commission, a été
établi sur la base de statistiques de 1997, et devrait être
réévalué de 15 % pour mieux refléter le
coût réel d'une couverture complémentaire en l'an 2000. Il
a aussi précisé que les chiffres utilisés pour
définir ce forfait concernaient une population âgée de
moins de 65 ans. De ce fait, non seulement les organismes
complémentaires ne seront remboursés que sur une base forfaitaire
pour leurs efforts en faveur des personnes défavorisées (à
la différence des régimes de base qui -du moins en principe
(voir supra)
- seront remboursés au franc le franc aux termes de
l'article L. 861-11), mais ce forfait est très probablement
sous-estimé. Il est de surcroît fixé par la loi, ce qui
signifie qu'il ne sera pas périodiquement réévalué.
II - Les propositions de votre commission
Pour cet article, votre commission vous propose quatre amendements.
Le premier est un amendement de cohérence avec un amendement à
l'article 20 pour l'article L. 861-4 du code de la sécurité
sociale : il inclut les sections d'assurance complémentaire de la
MSA parmi les organismes contributeurs.
Le deuxième modifie la définition de l'assiette de la
contribution. En effet, votre commission estime que la définition
proposée par le projet de loi est inopportune à un double
titre :
- d'une part, elle porte sur l'ensemble des cotisations et primes
reçues en matière de santé, ce qui inclut celles qui sont
perçues pour financer des indemnités journalières maladie.
Or, la CMU ne couvre que les dépenses en nature ;
- d'autre part, il est plus simple de retenir les prestations
versées que les cotisations ou primes reçues, les cotisations ou
primes recouvrant souvent une couverture plus large que celle de la
santé.
Aussi, votre commission vous propose de retenir, pour l'assiette de la
contribution, "
le montant des prestations en nature versées en
France en matière de santé au cours d'un trimestre
civil
".
Le troisième amendement de votre commission vise à imputer la
contribution en crédit d'impôt sur la taxe sur les contrats
d'assurance de 7 %, qui est payée par les seules
sociétés d'assurance.
Un amendement identique, qui visait à établir une
égalité de traitement entre acteurs de la protection sociale
complémentaire, a reçu un avis défavorable du Gouvernement
de la commission, à l'Assemblée nationale, sans plus
d'explications.
Le quatrième amendement de votre commission prévoit, pour les
organismes de protection sociale complémentaire, un mécanisme
juste et incitatif de remboursement des efforts réalisés au titre
de la protection sociale complémentaire des bénéficiaires
de l'allocation personnalisée à la santé.
Il dispose en effet que ces organismes déduiront du montant de la
contribution une somme égale à la différence entre :
- d'une part, le montant des cotisations ou primes reçues des
bénéficiaires de l'allocation personnalisée à la
santé ;
- et, d'autre part, celui des prestations en nature versées
à ces bénéficiaires.
Art. L. 861-14 du code de la sécurité sociale
I -
Le texte du projet de loi
Cet article détermine les organismes compétents pour le
recouvrement de la contribution à la charge des organismes de protection
sociale complémentaire. Il s'agit, sauf dérogation établie
par arrêté ministériel, des organismes de recouvrement
territorialement compétents. Ceux-ci peuvent déléguer au
fonds le soin de contrôler le nombre de personnes couvertes au titre de
la CMU, comme l'article L. 861-16 lui en donne le pouvoir : le nombre
de personnes couvertes constitue en effet un élément du calcul de
la contribution réellement due.
Les URSSAF reversent au fonds les sommes collectées par leurs soins.
Art. L. 861-15 du code de la sécurité sociale
I -
Le texte du projet de loi
Cet article prévoit que, si le montant de la déduction à
laquelle ont droit les organismes de protection sociale complémentaire
au titre des personnes bénéficiaires de la CMU excède
1,75 % de leur chiffre d'affaires santé (c'est-à-dire de la
base de calcul de la contribution), les organismes de protection sociale
complémentaire demandent au fonds de leur verser la différence.
Le versement doit être effectué dans un délai d'un mois
après la demande.
II - Les propositions de votre commission
Votre commission vous propose de compléter cet article par un
alinéa disposant que, en cohérence avec son amendement à
l'article L. 861-11, les organismes de sécurité sociale
reçoivent du fonds un montant correspondant à l'excédent
éventuel des dépenses engagées au titre de la couverture
complémentaire des bénéficiaires du RMI par rapport au
montant des cotisations ou allocations personnalisées à la
santé reçues à ce titre.
Art. L. 861-16 du code de la sécurité sociale
Cet
article fixe les modalités du contrôle, par le fonds, des
dépenses réalisées par les organismes de protection
sociale complémentaire et par les organismes d'assurance maladie au
titre de la couverture complémentaire des bénéficiaires de
la CMU.
Votre commission vous propose, pour cet article, un amendement de
cohérence avec les autres amendements déposés sur le volet
du projet de loi consacré à la couverture complémentaire.
Art. L. 861-17 du code de la sécurité sociale
Cet
article fixe les modalités du contrôle, par le fonds, des
dépenses réalisées par les organismes de protection
sociale complémentaire et par les organismes d'assurance maladie au
titre de la couverture complémentaire des bénéficiaires de
la CMU.
Votre commission vous propose, pour cet article, un amendement de
cohérence avec les autres amendements déposés sur le volet
du projet de loi consacré à la couverture complémentaire.
Art. L. 861-17 du code de la sécurité sociale
Cet
article offre aux organismes de protection sociale complémentaire la
faculté de constituer des associations leur permettant de mutualiser la
charge de gestion de la contribution instituée par l'article
L. 861-13.
Leurs règles de fonctionnement et de contrôle par l'Etat seront
fixées par décret en Conseil d'Etat.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel
qu'amendé.
CHAPITRE 3
-
Dispositions transitoires
Art.
26
Régime transitoire pour les titulaires actuels de l'aide
médicale
Cet
article prévoit un régime transitoire au profit des titulaires
actuels de l'aide médicale. Au 1
er
janvier 2000, date
d'entrée en vigueur de la loi, ils bénéficieront
automatiquement de la couverture maladie universelle jusqu'à la fin de
leur période d'admission à l'aide médicale et, en tout
état de cause, jusqu'au 31 mars 2000.
Votre commission comprend les raisons qui motivent un tel régime
transitoire, les bénéficiaires de l'aide médicale ne
devant pas être pénalisés par l'entrée en vigueur du
projet de loi même s'ils ne remplissent pas les conditions d'admission
à la CMU.
Ce régime transitoire permettra aussi d'éviter, pour les caisses
d'assurance maladie, une montée en charge trop rapide sur les premiers
mois.
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Art.
27
Habilitation des caisses d'assurance maladie à la mise en
place
d'un fichier informatisé de données nominatives
Cet
article, qui confirme les craintes de votre commission quant au basculement
exclusif des bénéficiaires de l'aide médicale vers les
CPAM, habilite ces dernières à recevoir de l'Etat et des
départements les informations relatives à ces personnes et
à constituer un fichier automatisé comportant l'ensemble de ces
informations.
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans
modification.
CHAPITRE 4
-
Dispositions diverses
Art.
28
(chapitre 3 nouveau du titre VI du livre VIII du code de la
sécurité sociale, art. L. 861-18 nouveau du même
code)
Dispositions réglementaires pour l'application du titre
II
Cet
article crée, dans le titre VI nouveau du Livre VIII du code de la
sécurité sociale, un chapitre 3 nouveau comportant un seul
article. Celui-ci prévoit que les mesures d'application des articles 20
à 27 du projet de loi feront l'objet de décrets en Conseil d'Etat.
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Art.
29
(art. L. 371-8 à L. 371-11 du code de la sécurité
sociale)
Abrogation de certaines dispositions relatives à
l'aide sociale
Cet
article prévoit, en cohérence avec la suppression par le
présent projet de loi de l'aide médicale des départements,
la suppression des articles L. 371-8 à L. 371-11 du code de la
sécurité sociale qui comprenaient diverses dispositions relatives
à ses bénéficiaires.
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans
modification.
TITRE III
-
RÉFORME DE L'AIDE
MÉDICALE
Ce titre comprend deux articles visant d'une part à tirer les conséquences du transfert de compétences du département à l'Etat en matière d'aide médicale (art. 30) et d'autre part, à assurer diverses coordinations concernant la suppression de l'aide médicale départementale (art. 31).
Art.
30
(titre III bis du code de la famille et de l'aide sociale, art. 187-1
à 187-4,
188 à 190 du code de la famille et de l'aide
sociale)
Transfert de compétences des départements
à l'Etat
en matière d'aide médicale
Cet
article 30 modifie complètement le titre III bis du code de la famille
et de l'aide sociale relatif à l'aide médicale qui comprend, dans
le dispositif actuel, l'ensemble des règles légales applicables
en matière d'admission à l'aide médicale et de prise en
charge des dépenses correspondantes.
Il convient de rappeler que, le département est également tenu de
prendre en charge les dépenses afférentes aux
bénéficiaires du RMI, aux personnes âgées de 17
à 25 ans satisfaisant aux conditions de ressources et de
résidence en France fixés pour l'attribution du RMI et aux
titulaires de l'allocation de veuvage dépourvus de droit à
l'assurance maladie
16(
*
)
, l'Etat prenait
à sa charge les dépenses des personnes dépourvues de
résidence stable et ayant fait élection de domicile auprès
d'une association ou d'un organisme agréé
17(
*
)
.
Le nouveau titre III bis ne concernera dorénavant que les personnes qui
n'entrent pas dans le champ de la CMU et qui, à ce titre,
bénéficieront d'une prise en charge financée directement
sur le budget de l'Etat.
Art.
187-1 du code de la famille et de l'aide sociale
Personnes prises en
charge au titre de l'aide médicale de l'Etat
Cet
article définit les deux catégories de personnes qui
bénéficieront de l'aide médicale de l'Etat dans le cadre
de la CMU :
- les étrangers résidant en France en situation
irrégulière :
Ces étrangers bénéficient de la CMU dès lors que
leurs ressources n'excèdent pas le plafond prévu pour
l'accès à l'aide médicale gratuite
(cf. commentaire de l'article 20 supra).
La couverture concerne
également les ayants droit dans les conditions prévues par le
code de la sécurité sociale (personne vivant maritalement avec
l'assuré social et à sa charge ; conjoint de
l'assuré ; enfants à charge ; ascendant, descendant
collatéral jusqu'au 3
ème
degré ou
allié au même degré de l'assuré, vivant sous le toit
de celui-ci et se consacrant exclusivement au ménage de celui-ci).
Ce dispositif répond à l'obligation de porter secours en cas de
besoin urgent ou pour des raisons humanitaires à toute personne en
situation de détresse.
- toute personne ne résidant pas en France mais présente
sur le territoire national et dont l'état de santé le justifie
par décision du ministre chargé de l'action sociale ;
Dans cette hypothèse, aucune condition de ressources n'est
demandée ; une participation aux frais de soins peut être
demandée puisque la prise en charge peut n'être que partielle.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement du rapporteur de la
commission des affaires culturelles, familiales et sociales portant sur les
étrangers en situation irrégulière. Le texte du projet de
loi initial indiquait que celui-ci
" pouvait accéder aux
soins "
que nécessite son état. Le texte amendé
dispose qu'il
" a droit "
à ce type de soins. Cet
amendement a été justifié par le fait que l'article 186 du
code de la famille et de l'aide sociale dispose, dans sa rédaction
actuelle que les personnes de nationalité étrangère
" bénéficient " de l'aide médicale en cas de
soins dispensés par un établissement de santé ou des
prescriptions ordonnées à cette occasion, y compris en cas de
consultation externe et par ailleurs la condition de séjour
régulière n'est exigée que pour l'aide médicale
à domicile.
Par ailleurs, l'actuel article 189-7 du code de la famille et de l'aide sociale
dispose que "
sont immédiatement admis au bénéfice
de l'aide médicale, les demandeurs dont la situation l'exige
".
Art.
187-2 du code de la famille et de l'aide sociale
Dépenses
prises en charge au titre de l'aide médicale de l'Etat
Cet
article détermine les dépenses prises en charge par l'aide
médicale d'Etat en plus de la dispense d'avance des frais.
Il s'agit des frais médicaux généraux
(1° de
l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale)
, des frais
de transport
(2° de l'article L. 321-1)
, des frais afférents
à une interruption volontaire de grossesse
(4° de l'article
L. 321-1)
, des frais relatifs à l'examen prénuptial
(6° de l'article L. 321-1)
ainsi que des frais relatifs à la
grossesse, l'accouchement et ses suites
(art. L. 331-2 dudit
code)
.
La prise en charge recouvre également le forfait hospitalier
(art. L. 174-4 du code de la sécurité sociale).
Art.
187-3 du code de la famille et de l'aide sociale
Dépôt
de la demande d'aide médicale
Cet
article précise devant quels organismes sont déposés les
demandes d'aide médicale (organisme d'assurance maladie, centre communal
d'action sociale, services sociaux départementaux, associations
agréées) ainsi que les services habilités à les
instruire.
L'instruction est effectuée par les caisses d'assurance maladie pour les
demandes d'aide médicale d'étrangers en situation
irrégulière et par les services de l'Etat pour les dossiers
exceptionnels donnant lieu à décision du ministre chargé
de l'action sociale.
Art.
187-4 du code de la famille et de l'aide sociale
Election de
domicile
Cet article prévoit que les étrangers en situation irrégulière qui sont sans domicile fixe doivent préalablement s'inscrire auprès d'une association agréée pour obtenir le bénéfice de l'aide médicale de l'Etat.
Art.
188 du code de la famille et de l'aide sociale
Admission à
l'aide médicale
Cet
article précise que l'admission à l'aide médicale de
l'Etat est prononcée par le
préfet
, ou par le directeur de
la CPAM si celui-ci est titulaire d'une délégation, et que
l'admission est valable pour
une durée d'un an
.
L'admission est immédiate et sans délai si la situation
l'exige : une disposition analogue était déjà
prévue à l'actuel article 189-7 du code de la famille et de
l'aide sociale.
L'Assemblée nationale a adopté en première lecture un
amendement présenté par Mme Huguette Jacquaint et les membres du
groupe communiste afin de préciser qu'un décret définit
les conditions dans lesquelles le représentant de l'Etat dans le
département instruit la demande d'aide médicale de l'Etat.
Art.
189 du code de la famille et de l'aide sociale
Obligation
alimentaire
Cet
article prévoit que la prise en charge au titre de l'aide
médicale de l'Etat peut donner lieu à recouvrement auprès
des personnes astreintes à l'obligation alimentaire. S'agissant des
personnes étrangères et de surcroît en situation
irrégulière, il est permis de se demander si cette disposition
aura une portée pratique considérable vis-à-vis des
obligés alimentaires résidant éventuellement à
l'étranger.
L'article 144 du code de la famille et de l'aide sociale qui prévoit la
mise en jeu de l'obligation alimentaire au moment du dépôt d'une
demande d'aide sociale est rendue inapplicable. S'agissant d'une aide
médicale urgente, la mise en jeu de l'obligation alimentaire intervient
seulement
a posteriori
. Une disposition analogue est prévue au
III de l'article 182 du code de la famille et de l'aide sociale.
Art.
190 du code de la famille et de l'aide sociale
Dispositions
financières
Cet
article prévoit la prise en charge des personnes
bénéficiant du présent titre, non plus par les
départements, mais par l'Etat.
Le second alinéa permet à l'Etat de mettre en jeu la
responsabilité d'un tiers à l'origine de l'accident dont le
bénéficiaire de l'aide médicale a été la
victime.
*
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Art.
31
Dispositions de coordination
Cet
article procède à diverses coordinations consécutives
à la mise en place du nouveau dispositif d'aide médicale de
l'Etat.
Le
paragraphe I
porte sur les modifications
du code de la famille et
de l'aide sociale
:
- le président du conseil général n'est plus
habilité à attribuer les prestations d'aide médicale
(art. 124-2, deuxième alinéa)
;
- la disposition relative à la compétence des maires ayant
conservé un régime spécial d'aide médicale pour
fixer la dette alimentaire est supprimée
(art. 145, dernier
alinéa)
; il en est de même de la possibilité de
recours à l'égard du bénéficiaire revenu à
meilleure fortune, du légataire ou du donataire
(art. 146)
ainsi
que de la possibilité d'une subrogation dans les droits de
l'allocataire
(art. 149)
;
- s'agissant de l'aide médicale aux étrangers, il est
précisé que celle-ci relève de l'aide médicale de
l'Etat
(art. 186)
;
- une mise à jour de la codification est opérée
concernant la compétence de la commission centrale d'aide sociale en
matière de litiges concernant la prise en charge financière des
bénéficiaires de l'aide médicale
(art. 195).
Le
paragraphe II
procède à diverses rectifications dans le
code de la sécurité sociale
.
L'article L. 182-1 dudit code qui permet la fixation des modalités de
prise en charge des bénéficiaires de l'aide médicale dans
le cadre de conventions passées entres les organismes d'assurance
maladie et les autorités compétentes en matière d'aide
médicale est entièrement réécrit : il est
prévu uniquement une convention passée entre l'Etat et la CNAM
pour assurer la prise en charge des étrangers en situation
irrégulière ou des personnes résidant en France qui
relèveront désormais de l'aide médicale de l'Etat.
Les autres dispositions relatives aux conventions sont supprimées
(art. L. 182-2 à L. 182-5).
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans
modification.
Section additionnelle après l'article
31
Contrôle et évaluation de la loi
Compte
tenu des incertitudes qui caractérisent la mesure de l'impact du projet
de loi tant sur les finances sociales que sur les finances de l'Etat, votre
commission vous propose d'insérer après l'article 31 un titre III
bis consacré spécifiquement au contrôle et à
l'évaluation de la loi
(cf. ci-après commentaire de l'article
additionnel après l'article 31)
.
Votre commission vous propose d'adopter cette section additionnelle et son
intitulé.
Article additionnel après l'article
31
Contrôle et évaluation de la loi
Le
caractère lacunaire de l'étude d'impact au regard notamment des
prescriptions de la circulaire du Premier ministre en date du 26 janvier
1998
18(
*
)
, les estimations contestables du
projet de loi sur le coût de la couverture maladie de base, ainsi que sur
le volet " complémentaire " font craindre une dérive du
financement de la CMU. L'expérience du RMI laisse penser qu'une
explosion des dépenses est, hélas, prévisible.
La combinaison des lois de finances et des lois de financement pourrait faire
croire que le Parlement dispose de tous les moyens d'information pour
contrôler cette dépense.
M. Jean-Claude Boulard, rapporteur du projet de loi à
l'Assemblée nationale, considère ainsi que : "
le
contrôle du Parlement sera total sur le fonds du financement de la
protection complémentaire, comme il le sera sur les conditions de
perception de la cotisation et de reversement des sommes dues aux mutuelles et
aux compagnies d'assurance. En effet, outre la présence de
parlementaires dans le conseil de surveillance du fonds, l'évaluation de
son activité dans le champ de compétences de la commission des
comptes de la sécurité sociale et de la Cour des comptes, le
projet dispose que le fonds est un organisme créé pour concourir
au financement d'un régime obligatoire de base, et donc, à ce
titre, que la loi de financement doit en prévoir les
recettes
"
19(
*
)
.
Pourtant, aucune disposition du texte ne permet de confirmer qu'il s'agit d'un
"
organisme créé pour concourir au financement d'un
régime obligatoire de base
". Force est de constater que le
fonds du financement de la protection complémentaire, comme son nom
l'indique, finance une couverture complémentaire, qui ne fait pas partie
des missions des régimes de base d'assurance maladie.
Rien ne permet d'affirmer que l'activité de ce fonds sera incluse
"
dans le champ de compétences de la commission des comptes de
la sécurité sociale
". L'article L. 114-1 du code de la
sécurité sociale assigne à la commission une mission
restrictive : "
les comptes des régimes de
sécurité sociale
". La commission "
prend, en
outre, connaissance des régimes complémentaires de
retraite
". Dans l'état actuel de la législation, la
commission des comptes n'est pas compétente pour analyser les recettes
et les dépenses du fonds de financement de la protection
complémentaire.
Les réponses de Mme Martine Aubry au questionnaire de votre
rapporteur sont, à ce sujet, sans appel :
"
Le fonds de financement ne relève pas a priori du champ de la
loi de financement de la sécurité sociale : il a en effet
pour objet de financer une prestation Etat, financée à titre
principal par une subvention de l'Etat. Le dispositif est sans incidence sur
l'équilibre financier des régimes de sécurité
sociale, qui sont remboursés au franc le franc lorsqu'ils servent des
prestations au titre de la couverture maladie complémentaire
".
Les dépenses des régimes d'assurance maladie au titre de la
protection complémentaire seront traitées en loi de financement
de la même manière que les dépenses de la branche famille
relatives au RMI : elles seront absentes, sous prétexte d'une
compensation
" au franc le franc ".
Cette décision n'apparaît pas tout à fait compatible avec
le principe de sincérité des comptes. Il suffit de rappeler que
la branche famille ne reçoit aucune participation de l'Etat au titre de
la gestion du RMI pour se rendre compte que
" la prise en charge d'une
prestation Etat "
n'est jamais neutre.
Au-delà du fonds de financement de la protection complémentaire,
aucun dispositif d'évaluation n'est actuellement prévu par le
projet de loi. Il n'existe aucun dispositif technique permettant
d'apprécier l'ensemble des dépenses engendrées par la
création de la couverture maladie universelle, notamment au niveau de la
couverture de base. Le surcoût lié à l'extension du champ
est estimé par le Gouvernement à 600 millions de francs,
sans aucun moyen d'apprécier a posteriori le bien fondé de cette
estimation, et de manière générale, l'ensemble des
évaluations qui ont présidé au " montage
financier " de ce projet de loi.
Telles sont les raisons qui ont conduit votre rapporteur à vous proposer
un article additionnel :
- permettant au Parlement de prendre connaissance, avant le
15 octobre de chaque année (date limite de dépôt du
projet de loi de financement de la sécurité sociale) d'un rapport
sur l'évaluation des titres I à III du projet de loi ;
- prévoyant qu'un des deux rapports annuels de la commission des
comptes de la sécurité sociale présentera un bilan
financier de la mise en place de la CMU ;
- assurant l'existence d'une section comptable spécifique de la
CNAMTS, afin de suivre les recettes et les dépenses liées
à la CMU. La CNAMTS disposait déjà d'une telle section
pour les assurés personnels. Le coût de gestion en sera ainsi
limité.
Il apparaît essentiel que des outils soient prévus, pour
évaluer cette nouvelle dépense publique.
Votre commission vous propose d'adopter cet article
additionnel.
TITRE V
-
ENTRÉE EN VIGUEUR
Art.
38
Entrée en vigueur de la loi
L'article 38 est l'unique article du titre V, relatif à
l'entrée en vigueur de la loi.
Il est précisé que les dispositions de la présente loi
entrent en vigueur le 1
er
janvier 2000, sous certaines
réserves.
Les dispositions du III et du IV de l'article 7 entrent en vigueur le
1
er
octobre 2000. L'article 7 vise à supprimer une
disposition du code de la sécurité sociale précisant que
les enfants des non-salariés non agricoles, lorsqu'ils sont
étudiants, même âgés de moins de vingt ans, perdent
leur qualité d'ayant droit à titre de membre de la famille. La
date du 1
er
octobre a été choisie en
référence au début de l'année universitaire.
Les dispositions des articles 9 et 10 et du 2° du 11 s'appliquent aux
versements effectués au profit de la CNAMTS, du FSV (droits sur les
alcools) et de la CNAMTS et de la CNAF (prélèvement social de
2 %) à compter du 1
er
janvier 2000 ; retenir
une autre date serait contraire à la loi organique du
22 février 1996 relative aux lois de financement de la
sécurité sociale.
Les dispositions de l'article 12 (affectation intégrale de la CVTAM
à la CNAMTS) sont applicables aux cotisations recouvrées par
l'ACOSS au titre de l'année 2001.
Les polices d'assurance se rapportent à une année, mais ne sont
pas forcément appelées en début d'année. Il est
donc effectivement logique de déterminer une mise en vigueur au titre de
l'année 2001.
Les dispositions de l'article 27 (mise en oeuvre des traitements informatiques
nécessaires au basculement du système de l'aide médicale
à celui de la CMU) et du titre IV entrent en vigueur dès la
publication de la présente loi. Les CPAM devront effectivement mettre
à jour leurs applications informatiques afin de pouvoir gérer les
futurs bénéficiaires de la CMU.
De manière générale, il convient de noter que la mise en
oeuvre simultanée de chantiers informatiques importants (an 2000,
passage à l'euro) et de la prise en charge de la CMU risque d'être
pour la CNAMTS un casse-tête.
Tenant compte des modifications apportées aux articles 9, 10 et 11,
votre commission vous propose d'adopter un amendement supprimant la date
d'entrée en vigueur de la nouvelle répartition des droits sur les
alcools entre la FSV et la CNAMTS, qui n'a plus lieu d'être.
Votre commission vous propose d'adopter cet article tel
qu'amendé.
ANNEXES
•
Extraits de la circulaire du 26 janvier 1998 relative à
l'étude d'impact des projets de loi et de décret en Conseil
d'Etat.
• Projet de loi relatif à la couverture maladie universelle
- Etude d'impact
20(
*
)
.
Circulaire du 26 janvier 1998 relative à
l'étude
d'impact
des projets de loi et de décret en Conseil d'Etat
21(
*
)
Extrait
................................................................................
.........................................................
I - Champs d'application
................................................................................
.........................................................
II - Contenu
Le terme d'impact doit être entendu dans son sens le plus concret.
L'objet de l'étude d'impact est en effet d'évaluer
a
priori
les effets administratifs, juridiques
,
sociaux,
économiques et budgétaires des mesures envisagées et de
s'assurer, de manière probante, que la totalité de leurs
conséquences a été appréciée
préalablement à la décision publique.
................................................................................
.........................................................
Le degré de détail et la finesse d'analyse de l'étude
d'impact doivent être proportionnels à l'importance des mesures
proposées et à leurs conséquences sur la
société, l'économie et l'administration.
................................................................................
.........................................................
L'étude d'impact comprend deux parties : d'une part, l'analyse de
l'impact juridique et administratif, d'autre part, la présentation des
effets sociaux, économiques et budgétaires des dispositions
envisagées. Elle est illustrée, sous ces deux aspects, par la
présentation d'un bilan coûts-avantages récapitulant de
manière synthétique les principaux éléments
d'appréciation.
................................................................................
.........................................................
II- 1 - L'impact juridique et administratif
................................................................................
.........................................................
II-2 - L'impact social, économique et budgétaire
................................................................................
.........................................................
2° L'étude d'impact présente ensuite une analyse
globale des effets micro-économiques et macro-économiques des
mesures proposées.
................................................................................
.........................................................
L'étude identifie avec précision les personnes physiques ou
morales, publiques ou privées, concernées par les mesures
envisagées, non seulement celles qui vont en bénéficier,
mais toutes celles qui sont concernées, directement ou indirectement,
par les mesures.
Cette analyse des effets micro-économiques et macro-économiques
comporte un chiffrage permettant de prendre en compte le coût induit par
les projets de textes et les formalités nouvelles, spécialement
pour les entreprises.
................................................................................
.........................................................
3° L'étude d'impact doit enfin préciser les
conséquences budgétaires des nouvelles dispositions non seulement
pour l'Etat, mais également pour les collectivités locales, les
établissements publics, les entreprises publiques ou les comptes sociaux.
................................................................................
.........................................................
Les hypothèses et les modes de calcul fondant les chiffrages
budgétaires et économiques sont présentés en annexe
à l'étude d'impact. Sauf exception justifiée,les solutions
alternatives à celle qui est proposée sont chiffrées et
présentées de la même manière de façon
à prendre toute comparaison utile à la décision.
II-3 - Le bilan coûts-avantages
Le bilan coûts-avantages peut être présenté sous la
forme d'un tableau de synthèse récapitulant les principaux points
mis en lumière par l'étude d'impact et mettant en particulier en
balance les avantages et les coûts des mesures proposées d'un
point de vue quantitatif et qualitatif. Les principales solutions alternatives
sont également présentées de cette manière.
II-4 - Dispositif d'évaluation
L'étude d'impact comporte un dispositif de suivi et d'évaluation
de la mise en oeuvre du texte.
................................................................................
.........................................................
III - Procédure
................................................................................
.........................................................
III-1 - Elaboration des études d'impact
................................................................................
.........................................................
III-2 - Exploitation des études d'impact
................................................................................
.........................................................
III-3 - Diffusion des études d'impact
................................................................................
.........................................................
La version finale de l'étude d'impact des projets de loi est transmise
au Parlement avec le projet de loi. L'Assemblée nationale et le
Sénat peuvent décider de publier l'étude d'impact au titre
des documents parlementaires.
................................................................................
.........................................................
Pour atteindre les objectifs fixés par la présente circulaire,
l'étude d'impact doit être un document vivant, enrichi,
complété et précisé tout au long du processus de
préparation des textes par les apports et contributions des services qui
y sont associés.
................................................................................
.........................................................
Je souligne enfin l'importance que j'attache au respect des présentes
instructions qui sont destinées à améliorer la
qualité des décisions publiques. Leur application fera l'objet
d'une évaluation au cours du second semestre de 1999.
Lionel Jospin
PROJET
DE LOI RELATIF À LA
COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE
ÉTUDE D'IMPACT
1ère PARTIE : IMPACT SOCIAL DE LA RÉFORME
1.1. LE
CONSTAT
1.1.1. 30 % des plus démunis renoncent à des soins pour des
motifs financiers
1.1.2. La consommation médicale de ville des plus démunis est
inférieure à la moyenne
1.1.3. 62 % des individus vivant dans un ménage de revenu
inférieur à 45.000 F (6.860 euros) par an
bénéficient d'une couverture complémentaire mais cette
moyenne cache de grandes disparités
1.2. L'APPORT DE LA REFORME
2ème PARTIE : IMPACT INSTITUTIONNEL, JURIDIQUE
ET
ADMINISTRATIF DE LA REFORME
2.1. LA
LEGISLATION ACTUELLE
2.1.1. L'assurance maladie
2.1.2. L'aide médicale
2.2. L'APPORT DE LA REFORME
2.2.1. Suppression de l'assurance personnelle et création d'un
dispositif d'affiliation sur critère de résidence
2.2.2. Création d'une couverture complémentaire dans le cadre de
la couverture maladie universelle
2.2.3. La rénovation de l'aide médicale de l'Etat
3ème PARTIE : IMPACT FINANCIER
3.1. LE
CONSTAT
3.1.1. Les cotisations d'assurance personnelle
3.1.2. Les crédits d'aide médicale
3.2. LES MODIFICATIONS DANS LES CIRCUITS DE FINANCEMENT
3.2.1. La suppression des prises en charge de cotisations d'assurance
personnelle est neutralisée par l'affectation de recettes nouvelles
à la CNAMTS
3.2.2. La suppression de la prise en charge du déficit de l'assurance
personnelle est neutralisée par la suppression de la répartition
du produit de la cotisation sur les véhicules terrestres à moteur
3.2.3. Les crédits d'aide médicale des départements sont
transférés à l'Etat
3.2.4. Mise en place d'une cotisation pour les affiliés sur
critère de résidence
3.3. LE FONDS DE FINANCEMENT POUR LA PROTECTION COMPLEMENTAIRE DANS LE CADRE DE
LA COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE
3.3.1. Création d'un fonds de financement de la protection
complémentaire de la couverture maladie universelle
3.3.2. Les ressources du fonds
3.3.3. Les dépenses du fonds
3.3.4. Rôle de contrôle et de coordination du fonds
3.3.5. Création d'associations d'organismes contribuant au fonds de
financement de la protection complémentaire de la couverture maladie
universelle
3.4. L'IMPACT FINANCIER DES DIFFERENTES DISPOSITIONS
PROJET DE
LOI RELATIF À LA
COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE
ÉTUDE D'IMPACT
1ère PARTIE : IMPACT SOCIAL DE LA RÉFORME
1.1. LE
CONSTAT
1.1.1. 30 % des plus démunis renoncent à des soins pour des
motifs financiers
Même si les indicateurs sont à considérer avec prudence,
les différentes sources convergent sur deux points : tous revenus
confondus, une proportion importante de la population renonce à des
soins pour des motifs financiers, et cette proportion décroît
cependant fortement avec le revenu :
- 17 % de la population française déclarent avoir renoncé
à des soins pour des raisons financières dans l'année
précédente. Ils sont 30 % parmi les personnes dont le revenu par
unité de consommation est inférieur à 3000 F (457,35
euros) par mois, et 20 % pour des revenus compris entre 3000 et 4000 F
(457,35 et 609,80 euros)
22(
*
)
. Les restrictions
portent principalement sur les soins dentaires (43 % des cas), les lunettes (16
% des cas) et soins médicaux et les analyses (29 % des cas)
23(
*
)
.
- Parmi les personnes qui ne sont pas allées voir d'ophtalmologue depuis
trois ans, 15% de celles qui ont un revenu par unité de consommation
inférieur à 3000 F (457,35 euros) par mois avancent des motifs
financiers pour expliquer ce non recours. Cette proportion diminue avec le
revenu pour atteindre 4% dans la tranche de revenu la plus élevée
(revenu par unité de consommation supérieur à 10 000
F, soit 1 524,49 euros)
24(
*
)
.
- Parmi les personnes qui n'ont pas consulté de dentiste dans les deux
années précédentes (qui sont 42 % chez les plus bas
revenus), 20% de celles qui ont un revenu inférieur à 3 000
F (457,35 euros) par mois avancent des motifs financiers pour expliquer ce
non-recours. Elles sont encore 11% dans la tranche de revenu la plus
élevée. De même, 41% des personnes à faibles
ressources à qui il manque des dents renoncent à se les faire
remplacer pour des raisons financières
25(
*
)
.
1.1.2.La consommation médicale de ville des plus démunis est
inférieure à la moyenne
Parmi les personnes de revenu inférieur à 3 000 F (457,35
euros) par unité de consommation, 55 % ont consulté un
médecin une fois en trois mois, contre 60 % dans la population totale.
Toutefois, à structure par âge et sexe comparable à celle
de la population totale, le taux de recours au médecin parmi les bas
revenus descend à 53 %. De manière générale,
corriger les effets revenus en fonction de la structure par âge et sexe
de la population conduit à faire apparaître des écarts de
consommation plus importants que sur les données brutes.
À âge et sexe comparables, les individus dont les revenus sont
inférieurs à 3 000 F (457,35 euros) par mois ont une
probabilité mesurée sur une période de trois mois de
consommer des soins inférieure de 8 % à la moyenne (66% contre
72% en moyenne, et 78% pour la tranche des plus hauts revenus).
Tableau 1 - Probabilité de consommation en un trimestre par type
de soins et niveau de revenu (à structure par âge et sexe
identique à celle de la population française)
Type de soins |
revenus par u.c. <3000 F (457,35 euros) |
moyenne nationale |
revenu par u.c. >10 000 F (1 524,49 euros) |
quelconque |
64 % |
72 % |
78 % |
dentiste |
10 % |
13 % |
17 % |
généraliste |
45 % |
44 % |
49 % |
spécialiste |
21 % |
26 % |
36 % |
médecin |
53 % |
60 % |
62 % |
analyses ou examens |
16 % |
20 % |
24 % |
soins paramédicaux |
10 % |
12 % |
13 % |
pharmacie |
58 % |
66 % |
72 % |
hospitalisation |
2,9 % |
3,1 % |
2,7 % |
Tableau 2 -Dépenses moyennes remboursables par type de soins et niveau de revenu (à structure par âge et sexe identique à celle de la population française) 26( * )
Type de soins |
revenus par u.c. <3000 F (457,35 euros) |
moyenne nationale |
revenu par u.c. >10 000 F (1 524,49 euros) |
Dentiste |
82 F (12,50 euros) |
115 F (17,53 euros) |
214 F (32,62 euros) |
Généraliste |
99 F (15,09 euros) |
110 F (16,76 euros) |
98 F (14,94 euros) |
Spécialiste |
88 F (13,42 euros) |
101 F (15,40 euros) |
161 F (24,54 euros) |
Pharmacie |
269 F (41,01 euros) |
280 F (42,69 euros) |
279 F (42,53 euros) |
Hospitalisation |
570 F* (86,90 euros) |
555 F* (84,61 euros) |
497 F* (75,77 euros) |
* Les
données sur l'hospitalisation ont été pour l'essentiel
reconstituées par le CREDES. Elles sont fragiles et doivent être
interprétées avec prudence.
Les tableaux ci-dessus indiquent donc une sous-consommation des plus
démunis sur l'ensemble des postes, à l'exception peut-être
de l'hospitalisation. Ce dernier résultat, fragile, serait toutefois
conforme à l'idée que les plus démunis ont un recours aux
soins plus tardif, et doivent alors recevoir un traitement plus lourd, et donc
plus coûteux. Une telle situation constituerait une justification forte
d'une prestation visant à améliorer leur accès aux soins.
1.1.3. 62 % des individus vivant dans un ménage de revenu
inférieur à 45 000 f (6 860 euros) par an
bénéficient d'une couverture complémentaire mais cette
moyenne cache de grandes disparités
Le pourcentage d'individus couverts par une couverture complémentaire
varie avec le revenu. Ils ne sont que 61,5 % à posséder une
couverture complémentaire maladie dans les ménages de revenus
inférieurs à 45 000 F (6 860 euros) par an, contre 84,3 %
dans la population totale. Cette proportion décroît jusqu'à
45 % aux très bas niveaux de revenus. Cette est encore plus faible parmi
les individus en situation de précarité. Ainsi, les
chômeurs dont le ménage a un revenu inférieur à
45 000 F (6 860 euros) ne sont que 35 % à disposer d'une couverture
complémentaire
27(
*
)
.
- Couverture complémentaire et activité professionnelle
Pour interpréter ces résultats, il faut garder à l'esprit
qu'en France, la couverture complémentaire reste souvent liée
à l'emploi. Environ la moitié des couvertures
complémentaires sont souscrites par l'intermédiaire de
l'entreprise, et 40 % des couvertures obtenues par les entreprises sont
obligatoires. Parmi les individus vivant dans un ménage dont le revenu
par unité de consommation est inférieur à 2 000 F
(304 euros) par mois, et qui bénéficient d'une couverture
complémentaire (soit 45 %)
28(
*
)
:
- 10 % ont une couverture imposée par leur entreprise (24 % dans la
population totale),
- 18 % ont une couverture facultative fournie par leur entreprise (30 % dans la
population totale),
- 65 % ont souscrit une couverture complémentaire de leur propre
initiative (43 % dans la population totale).
Au final, seuls 5 % des individus dont le revenu par unité de
consommation est inférieur à 2 000 F (304,90 euros) par mois
ont une couverture complémentaire qui leur est imposée par leur
entreprise. Ils sont 10 % dans la tranche de revenu par unité de
consommation supérieure (2000-3000 F par mois, soit 304,90-457,35
euros). La part relativement importante des individus les plus démunis
qui bénéficient d'une couverture complémentaire ne
s'explique donc que très partiellement par le fait que certaines
couvertures sont obligatoires. Toutefois, le lien entre activité
professionnelle et couverture complémentaire explique le faible taux
d'assurés complémentaires parmi les chômeurs, qui
constituent sans doute une cible prioritaire d'une politique d'accès aux
soins.
- Exonération du ticket modérateur
Les personnes exonérées du paiement du ticket modérateur
sont surreprésentées parmi les plus démunis (entre 15
à 20 % des plus démunis, contre un peu plus de 10 % dans
l'ensemble de la population), et ce, même si l'on raisonne à
âge et sexe constant. Les motifs d'exonération sont la maladie
(affection de longue durée ou autre cause médicale) dans 60 % des
cas, le RMI ou l'aide médicale gratuite dans 40 % des cas.
1.2. L'APPORT DE LA RÉFORME
La protection complémentaire en matière de santé sera
accessible, outre les bénéficiaires du revenu minimum
d'insertion, aux foyers dont les ressources ne dépasseront pas
3 500 francs (553,57 euros) par unité de consommation. La
majoration familiale de ce plafond est la même que pour le revenu minimum
d'insertion : 0,5 pour la deuxième personne du foyer, 0,3 pour la
troisième et la quatrième personne, puis 0,4 pour la
cinquième et les suivantes.
Les catégories de ressources prises en compte sont les mêmes que
pour l'attribution du RMI : les revenus d'activité apparaissent pour
leurs montants nets de prélèvements sociaux, de contribution
sociale généralisée et de contribution au remboursement de
la dette sociale, les prestations familiales sont prises en compte à
l'exclusion de l'allocation de rentrée scolaire et des majorations pour
âge des allocations familiales. Les aides personnelles au logement sont
évaluées à un taux forfaitaire identique à celui
qui est prévu pour l'attribution du revenu minimum d'insertion.
Cette solution permet de couvrir :
- les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion ;
- les bénéficiaires de l'allocation de solidarité
spécifique ou de l'allocation d'insertion dès lorsqu'ils ne
cumulent pas cette allocation avec d'autres ressources ;
- les bénéficiaires de l'allocation aux parents isolés
dès lors qu'ils ne perçoivent plus l'allocation pour jeune
enfant, courte ;
- la plupart des ménages composés de plusieurs personnes, dont la
seule ressource est constituée par le minimum de l'allocation unique
dégressive à taux plein ;
- les actifs isolés sans enfant percevant au plus 60 % du SMIC ;
- les actifs isolés avec un enfant percevant au plus 87 % du SMIC ;
- les actifs isolés avec deux enfants de moins de 10 ans percevant au
plus 73 % du SMIC ;
- les actifs isolés avec deux enfants de plus de 10 ans percevant au
plus 91 % du SMIC ;
- les couples actifs sans enfants percevant au plus 87 % du SMIC ;
- les couples avec un enfant ne percevant pas d'allocation familiales et
percevant au plus 103 % du SMIC (86 % s'ils bénéficient de
l'allocation pour jeune enfant) ;
- les couples avec deux enfants de plus de 10 ans percevant au plus 110 % du
SMIC ;
- les couples avec deux enfants de moins de 10 ans percevant au plus 92 % du
SMIC.
A contrario, ce seuil exclut du champ de l'aide à la protection
complémentaire en matière de santé :
- les bénéficiaires du minimum vieillesse lorsqu'ils
perçoivent une aide au logement ;
- les personnes seules bénéficiaires de l'allocation aux adultes
handicapés dès lors qu'elles disposent du complément
autonomie.
2
ème
PARTIE : IMPACT INSTITUTIONNEL,
JURIDIQUE
ET
ADMINISTRATIF DE LA RÉFORME
2.1. LA
LEGISLATION ACTUELLE
2.1.1. L'assurance maladie
La couverture maladie de la population résidant en France est
aujourd'hui assurée par les deux dispositifs suivants :
- Les régimes obligatoires de sécurité sociale
Les personnes qui travaillent ou sont membres de la famille d'un travailleur
sont affiliées ou rattachées à ces régimes en
fonction de leur statut professionnel ou familial. Les critères
d'affiliation ou de rattachement ont été progressivement
étendus tant du point de vue professionnel (affiliation des
chômeurs aussi longtemps qu'ils sont à la recherche d'un emploi),
que familial (rattachement du concubin puis de la personne à la charge
totale et permanente d'un assuré).
- Le régime de l'assurance personnelle
En 1978 a été posé le principe de
généralisation de la sécurité sociale. Toute
personne résidant sur le territoire a droit à une couverture pour
le risque maladie. L'assurance personnelle, instituée à cette
date et dont la gestion a été confiée aux caisses du
régime général, couvre les personnes qui ne sont
susceptibles d'être prises en charge par aucun des régimes
obligatoires existants. L'entrée dans l'assurance personnelle est en
principe facultative. Elle permet à la personne qui y adhère de
bénéficier des prestations du régime
général, moyennant le paiement d'une cotisation. Une fois
entrée dans le dispositif elle ne peut théoriquement en ressortir
(sauf activité professionnelle ou situation familiale qui justifie son
affiliation ou son rattachement à un régime obligatoire dans les
conditions du droit commun, ou encore sortie du territoire). Pour les personnes
ayant des ressources insuffisantes pour payer les cotisations d'assurance
personnelle, ces cotisations peuvent être prises en charge par des tiers
: fonds de solidarité vieillesse (pour les personnes âgées
n'ayant aucune retraite contributive), caisses d'allocations familiales (pour
les personnes bénéficiaires d'une prestation familiale) et, en
dernier ressort, aide médicale de l'Etat ou des départements.
2.1.2. L'aide médicale
Elle est en principe à la charge des départements, mais pour les
personnes sans domicile fixe, c'est l' État qui intervient. Elle joue
à deux niveaux :
* Lorsqu'elle prend en charge les cotisations d'assurance personnelle, elle
permet l'affiliation à ce régime des personnes les plus
démunies qui ne bénéficient d'aucune autre prise en
charge. Cette intervention est de plein droit pour les titulaires du RMI, les
bénéficiaires de l'allocation veuvage et les jeunes de 17
à 25 ans remplissant les conditions de ressources et de résidence
du RMI. L'affiliation des titulaires du RMI à l'assurance personnelle
est automatique s'ils ne relèvent pas à un autre titre d'un
régime de sécurité sociale obligatoire. Hormis les cas
d'admission de plein droit (RMI, allocation veuvage, jeunes de 17 à 25
ans), les autres catégories de bénéficiaires sont admises
après enquête sociale et en fonction de critères propres
à chaque département.
Les barèmes de ressources utilisés ne sont pas toujours connus
et, lorsqu'ils le sont, on constate qu'ils sont variables d'un
département à un autre. La situation des
bénéficiaires est réexaminée chaque année.
* L'aide médicale assure par ailleurs le tiers payant et la prise en
charge de tout ou partie des dépenses restant à la charge des
assurés démunis qu'ils soient assurés d'un régime
professionnel ou adhérents à l'assurance personnelle. Cette prise
en charge est de plein droit pour les titulaires du RMI et de l'allocation
veuvage. Pour ceux-ci elle couvre l'intégralité du ticket
modérateur et du forfait journalier. Au-delà, les
départements ont la faculté de prendre également en charge
les dépassements des tarifs de sécurité sociale pour les
soins dentaires, l'optique ou l'appareillage. Ils le font dans des conditions
diverses. Pour les autres catégories de bénéficiaires
(dont les jeunes de 17 à 25 ans remplissant les conditions de ressources
et de résidence du RMI), les conditions d'intervention varient selon les
départements (barèmes de ressources, quantum des dépenses
prises en charge...).
Les étrangers en situation irrégulière et qui ne peuvent
donc relever d'un régime de sécurité sociale, ont
accès à l'aide médicale pour les soins hospitaliers sans
aucune condition de durée de résidence en France et à
l'aide médicale pour les soins hospitaliers et les soins de ville s'ils
résident en France de manière ininterrompue depuis au moins trois
ans.
Le
système actuel que l'on vient de décrire sommairement appelle les
observations suivantes.
* Il ne permet pas à l'ensemble de la population de disposer d'une
couverture sociale de base :
- l'assurance personnelle est un régime à caractère
facultatif (sauf pour les titulaires du revenu minimum d'insertion admis
à l'aide médicale) ; il soumet les personnes à bas revenus
à une cotisation minimale très élevée lorsqu'ils ne
peuvent bénéficier d'une prise en charge de celle-ci ;
- en dehors des salariés, les assurés qui ne sont pas à
jour de leurs cotisations voient leur droit aux prestations en nature
suspendus, alors que ce non paiement provient essentiellement de
difficultés financières des intéressés.
* Le mécanisme d'admission à l'aide médicale oblige les
demandeurs à des démarches complexes dans la mesure où
interviennent les centres communaux ou intercommunaux d'action sociale
notamment pour l'instruction des demandes, les départements pour les
décisions d'admission et les caisses primaires d'assurance maladie pour
l'exercice effectif du droit aux prestations d'assurance maladie.
* L'admission à l'aide médicale repose (en dehors des cas
d'admission de plein droit) sur l'appréciation des ressources du
demandeur, très inégale selon les départements: parmi les
départements qui ont fixé un barème départemental
d'admission à l'aide médicale, quarante l'ont fixé au
niveau du revenu minimum d'insertion, vingt-trois l'ont fixé à un
niveau supérieur pour une admission totale, cinquante (dont dix parmi
les vingt-trois précités) l'ont fixé à un niveau
supérieur pour une admission partielle (une partie des prestations ou
une fraction des dépenses de soins).
2.2. L'APPORT DE LA REFORME
La réforme envisagée procède à trois grandes
séries de modifications :
- L'assurance personnelle est supprimée et un dispositif d'affiliation
sur critère de résidence est créé.
- L'aide médicale départementale disparaît et un dispositif
nouveau, inscrit au livre VIII du code de la sécurité sociale,
est créé. Il s'agit d'une prestation de solidarité
nationale, financée par l'État et les organismes
complémentaires, par l'intermédiaire d'un fonds au statut
d'établissement public.
- L'aide médicale d'Etat est rénovée.
2.2.1. Suppression de l'assurance personnelle et création d'un
dispositif d'affiliation sur critère de résidence.
Les conséquences de la réforme pour ses
bénéficiaires réside dans l'effectivité et la
continuité du droit.
La suppression de l'assurance personnelle simplifie les démarches. Alors
qu'un salarié est affilié, grâce à des
procédures gérées par son entreprise, à un
régime de sécurité sociale, sans qu'il ait de
formalités à accomplir, l'assuré personnel devait
s'adresser à une caisse primaire d'assurance maladie pour l'affiliation
et à un centre communal ou intercommunal d'action sociale ou à
une caisse d'allocations familiales pour la prise en charge de ses cotisations.
Afin que personne ne puisse être sans droit à l'assurance maladie,
la couverture maladie, assurée par les régimes obligatoires
(régime général, régime agricole, régime des
non salariés non agricoles) devient obligatoire. Il ne pourra plus y
avoir ni refus d'affiliation, ni exclusion, ni suspension des droits aux
prestations en nature maladie.
Ainsi, toute personne qui aujourd'hui ne bénéficie pas d'une
couverture obligatoire sera affiliée selon les principes suivants :
A) Principe d'immédiateté, dès le dépôt de sa
demande.
B) Principe d'automaticité :
- elle devra fournir uniquement sa carte d'identité ou sa carte de
séjour (pour les étrangers),
- elle pourra présenter sa demande à partir des services sociaux
du départements ou de la commune ou d'une association
agréée. Elle pourra également s'adresser au guichet des
CPAM, sans avoir à rechercher préalablement de quel régime
elle relève,
- la CPAM servira les prestations en nature dès le dépôt de
la demande,
- elle fera ensuite les recherches nécessaires pour savoir de quel
régime relève le demandeur,
- si le demandeur ne remplit aucune des conditions socio-professionnelles
traditionnelles pour être affilié à un régime
obligatoire
29(
*
)
, il sera maintenu au
régime général au seul titre de sa résidence
régulière.
C) Principe de continuité des droits :
Aucun organisme ne pourra cesser de verser les prestations s'il ne s'est pas
assuré au préalable que l'assuré bénéficie
des prestations d'un autre régime ou d'un autre organisme.
Pour l'ensemble de ces démarches les assurés sociaux peuvent
confier leur dossier aux services sociaux publics, aux associations caritatives
ou aux établissements de santé, habilités à
accomplir à leur place les formalités nécessaires.
Les personnes qui n'ont pas de domicile fixe pourront élire domicile
auprès d'un organisme agréé à cet effet.
2.2.2. Création d'une couverture complémentaire dans le cadre
de la couverture maladie
universelle.
S'il appartient aux caisses d'assurance maladie de délivrer le droit
proprement dit, ce droit pourra être mis en oeuvre par ces caisses et les
trois catégories d'organismes d'assurance complémentaire, dans le
cadre de leurs législations respectives. Ces derniers offriront ainsi un
dispositif de droit commun à une population jusqu'ici régie par
des règles spécifiques.
Instruction de la demande par les caisses d'assurance maladie
Le régime d'assurance maladie dont relève l'assuré
instruira la demande de couverture complémentaire CMU, dans laquelle le
demandeur indiquera ses ressources.
En cas d'urgence sanitaire ou sociale, le directeur d'une caisse d'assurance
maladie pourra accorder sans délai le bénéfice du droit
à protection complémentaire en matière de santé.
Ce surcroît de tâches implique un effort de formation et
d'adaptation du personnel. Les organismes pourront y faire face grâce
à l'allégement des travaux liés à la saisie des
feuilles de soins, par suite de l'implantation du système informatique
SESAM.
Liberté de choix du bénéficiaire pour l'organisme
servant les prestations
Pour le service des prestations, les bénéficiaires auront le
choix entre la caisse de sécurité sociale ou l'adhésion
à une mutuelle, une institution de prévoyance ou une compagnie
d'assurance
Lors du dépôt de sa demande, une liste des organismes participant
au dispositif sera remise au bénéficiaire.
Il pourra adhérer à une mutuelle ou souscrire un contrat par
correspondance,
L'adhésion ou le contrat prendra effet dès réception.
Le bénéficiaire étant dispensé de toute avance de
frais, c'est donc le professionnel de santé qui recevra les paiements.
Garanties en faveur des bénéficiaires
Les organismes inscrits sur la liste seront tenus d'accepter la
désignation dont ils seront l'objet de la part d'un titulaire du droit
à protection complémentaire.
Les modalités d'expiration du droit à la protection
complémentaire sont aménagées pour éviter que le
bénéficiaire ne connaisse de trop grandes difficultés ;
l'organisme assureur auquel il aura été lié devra lui
proposer pour une durée d'un an un contrat analogue, à un tarif
qui sera encadré pour le rendre financièrement accessible.
Les personnes qui, avant de bénéficier de la protection
complémentaire en matière de santé, étaient
titulaires d'une protection complémentaire de droit commun peuvent
obtenir de plein droit soit la résiliation de leur garantie initiale,
soit sa transformation en une garantie conforme aux dispositions de la
présente loi.
2.2.3. La rénovation de l'aide médicale de l'État
Le périmètre d'intervention de l'aide médicale de
l'État est reconfiguré afin de permettre la prise en charge des
populations suivantes.
* Les étrangers résidents en situation irrégulière.
Les nouvelles dispositions conservent à l'identique les dispositions
issues de la loi du 29 juillet 1992 et la loi du 24 août 1993.
L'admission à l'aide médicale d'Etat est prononcée par le
Préfet. La gestion de la prestation est confiée aux organismes de
sécurité sociale, dans le cadre d'une convention État -
caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés.
* Les non résidents, principalement les Français de
l'étranger confrontés à des situations exceptionnelles.
Ils sont admis à l'aide médicale de l'État sur
décision du ministre chargé des affaires sociales : il peut
s'agir d'opérations humanitaires ou de rapatriements de Français
de l'étranger dans des situations de conflits ou de pathologies graves.
La loi donne ainsi un cadre juridique à des opérations
ponctuelles.
3 ème PARTIE : IMPACT FINANCIER
3.1. -
LE CONSTAT
Le financement de l'assurance maladie pour les personnes qui ne relèvent
pas d'un régime au titre des critères traditionnels d'affiliation
est actuellement assuré par les cotisations d'assurance personnelle, qui
sont pour l'essentiel prises en charge par des financeurs publics. Les
crédits d'aide médicale des départements et de l'Etat
financent les cotisations d'assurance personnelle prises en charge par ces
institutions, ainsi que la couverture complémentaire dans certains cas.
3.1.1. Les cotisations d'assurance personnelle
Les montants consacrés à l'assurance personnelle en 1997 sont les
suivants :
|
|
Millions F. |
Millions Euros |
Cotisations des personnes relevant de l'aide médicale |
|
|
|
|
--- à la charge des conseils généraux |
3766 |
574 |
|
--- à la charge de l'Etat(1) |
285 |
43 |
|
--- à la charge des CAF |
2386 |
364 |
|
--- à la charge du FSV |
610 |
93 |
Personnes acquittant leurs cotisations |
|
440 |
67 |
|
|
|
|
Total cotisations d'assurance personnelle |
|
7487 |
1141 |
(1) y
compris pour les bénéficiaires de l'API
3.1.1.1. La cotisation d'assurance personnelle
La cotisation d'assurance personnelle est calculée en pourcentage du
revenu passible de l'impôt, son montant ne pouvant être
inférieur à 12 723 F par an (1940 euros). Pour certaines
catégories d'assurés, la cotisation est forfaitaire, pour les
personnes âgées de moins de 27 ans, elle est de 1300 francs (198
euros).
3.1.1.2. La cotisation est, pour l'essentiel, prise en charge par des
organismes tiers.
91% des assurés personnels voient leur cotisation prise en charge, soit
environ 590 000 personnes.
Cette prise en charge, sous condition de ressources, est effectuée:
- par les conseils généraux (ou l'Etat pour les personnes sans
résidence stable) au titre des bénéficiaires de l'aide
médicale titulaires du RMI et non titulaires du RMI, soit environ 400
000 assurés; s'agissant de l'aide médicale hors RMI, le niveau du
barême de revenus pour la prise en charge varie en fonction des
départements, participant d'une disparité dans l'accès aux
soins;
- par la caisse nationale des allocations familiales (CNAF) pour les titulaires
de prestations familiales, y compris les bénéficiaires du RMI
titulaires de prestations familiales, soit environ 140 000 assurés,
- par le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) au titre de la perception
du minimum vieillesse, soit environ 50 000 personnes.
Le tableau ci-après récapitule les effectifs concernés par
nature de prise en charge
Prise en charge des cotisations d'assurance personnelle (métropole et
DOM)
Organisme compétent pour la prise en charge |
Populations concernées |
Effectif
d'assurés au
|
Conseils généraux |
Bénéficiaires de l'aide
médicale *
|
374 078 |
Etat |
Bénéficiaires de l'aide
médicale *
|
29 618 |
CNAF |
Titulaires
de PF (Rmistes et non * Rmistes)
|
136 534
|
FSV |
Bénéficiaires du minimum vieillesse* |
47 014 |
Total |
|
587 244 |
(*)
dépourvus de couverture maladie à un autre titre dans un
régime obligatoire
3.1.1.3. - Les assurés personnels acquittant eux-mêmes leur
cotisation
Cette population représente 57 000 personnes. Sur celles-ci, 23 000
s'acquittent de la cotisation minimale et 6 000 sont redevables d'une
cotisation proportionnelle à leur revenu.
Une enquête menée par la CNAMTS montre que 90 % des assurés
personnels, s'acquittant eux-mêmes de leur cotisations disposent d'un
revenu inférieur à 170 000 francs (25 916,3 euros) et que
50% se situent à un niveau de revenu inférieur à ce
montant. Les cas de personnes disposant de revenus importants sont rares.
Le tableau ci-après récapitule les effectifs concernés
selon le mode de calcul de la cotisation:
Assurés personnels acquittant eux-mêmes leur cotisation |
Effectifs au 1er semestre 1998
|
Cotisation minimale ( 12723 F/an) |
23 263 |
Cotisation calculée en fonction du revenu |
6 149 |
Cotisation maximale ( 104576 F/an) |
3 006 |
Cotisation forfaitaire
|
24 610 |
Total |
57 028 |
3.1.2. Les crédits d'aide médicale
* Les crédits d'aide médicale des départements se
montaient en 1997 à 9,145 milliards de francs, ainsi
répartis :
|
|
Millions F. |
Millions Euros |
|
|
|
|
Aide médicale générale |
|
7977 |
1216 |
Insertion des bénéficiaires du RMI |
|
724 |
110 |
Aide médicale aux malades mentaux |
|
169 |
26 |
Aide sociale aux enfants |
|
257 |
39 |
Divers |
|
18 |
3 |
|
|
|
|
Total |
|
9145 |
1394 |
Parmi
ces crédits, 3,766 milliards de francs (574 millions d'euros) financent
la prise en charge de cotisations d'assurance personnelle.
* Les crédits d'aide médicale de l'Etat se montaient en 1997
à 807 millions de francs (123 millions d'euros), dont 285 millions de
francs (43 millions d'euros) pour la prise en charge de cotisations d'assurance
personnelle.
3.2. LES MODIFICATIONS DANS LES CIRCUITS DE FINANCEMENT
La réforme envisagée modifie profondément ce dispositif de
financement.
Elle met un terme aux relations financières parfois complexes entre les
organismes de sécurité sociale et les tiers financeurs, notamment
les conseils généraux, ceux-ci considérant en effet que
bon nombre d'affiliations sont prononcées à tort et contestant
les montants facturés.
Ces difficultés, génératrices de dysfonctionnements qui,
in fine, pouvaient s'avérer préjudiciables aux
intéressés sont écartées.
3.2.1. La suppression des prises en charge de cotisations d'assurance
personnelle est neutralisée par l'affectation de recettes nouvelles
à la CNAMTS
Avec la suppression de l'assurance personnelle, la population concernée
est prise en charge par le régime général sans cotisations
en contrepartie -à l'exception de la cotisation d'une partie des
personnes affiliées sur critère de résidence, dont le
rendement devrait être faible-. La perte de recettes pour la CNAMTS est
compensée par un recyclage des sommes actuellement consacrées par
la CNAF, le FSV, l'Etat et les départements à la prise en charge
des cotisations.
Ces recyclages reposent sur les opérations suivantes :
- transfert de 28 % des prélèvements sociaux sur revenus du
patrimoine et produits de placements, pour le transfert entre la CNAF et la
CNAMTS ;
- transfert de 5 % des droits de consommation sur les alcools, pour le
transfert entre le FSV et la CNAMTS ;
- affectation d'une fraction du rendement de droits de consommation sur le
tabac, pour la compensation de la perte des cotisations à la charge des
conseils généraux et de l'Etat.
Seul reste à la charge de la CNAMTS le coût résultant du
moindre rendement de la cotisation au régime de résidence,
évalué à 270 millions de francs (41 millions d'euros).
3.2.2. La suppression de la prise en charge du déficit de l'assurance
personnelle est neutralisée par la suppression de la répartition
du produit de la cotisation sur les véhicules terrestres à
moteur
Les autres régimes d'assurance maladie prennent actuellement en charge
une fraction du déficit de la section comptable " assurance
personnelle " du régime général. La suppression de
l'assurance personnelle entraîne mécaniquement la perte de cette
ressource pour la CNAMTS. Cette perte est compensée par l'affectation de
l'ensemble du produit de la cotisation sur les véhicules terrestres
à moteur, qui était jusqu'alors réparti entre les
mêmes régimes.
La différence entre ces deux opérations se traduit par une
légère charge supplémentaire pour les autres
régimes (200 MF) et finalement par un accroissement des subventions de
l'Etat à ceux-ci.
3.2.3. Les crédits d'aide médicale des départements
sont transférés à l'Etat
Avec la suppression de l'aide médicale à la charge des
départements, l'ensemble de crédits correspondants - à
l'exception des dépenses de fonctionnement - fait l'objet d'un transfert
à l'Etat sur la base des dépenses réelles. Ces
dépenses sont évaluées sur la base des comptes
administratifs de 1997, actualisés par indexation sur la dotation
générale de fonctionnement. Elles font l'objet d'un abattement
forfaitaire de 5 %, pour tenir compte des affiliations à l'assurance
personnelle mises à tort à la charge des départements.
Le montant des sommes ainsi transférées à l'Etat est
évalué à 8,69 milliards de francs (1,32 milliard d'euros).
Ce transfert prend la forme d'une diminution de la dotation
générale de décentralisation.
Cette opération a un impact sur le montant des dépenses
d'insertion au titre du RMI. En effet, les départements sont tenus de
consacrer à l'insertion 20 % du montant des allocations RMI
versées par l'Etat mais peuvent, à concurrence de 3 % sur ces 20
%, imputer leurs dépenses d'aide médicale en faveur des
bénéficiaires du RMI sur les dépenses d'insertion. La
suppression des dépenses d'aide médicale les prive de cette
faculté. Pour prendre en compte cette situation, il est proposé
de fixer à 17% du montant des allocations RMI (au lieu de 20%) le niveau
de ces crédits.
3.2.4. Mise en place d'une cotisation pour les affiliés sur
critère de résidence
La cotisation existant au sein du régime de l'assurance personnelle doit
être reconfigurée dans le cadre de la présente
réforme.
Alors que l'affiliation au régime de l'assurance personnelle est
facultative, l'affiliation sur critère de résidence sera
obligatoire, créant un apport d'assurés, notamment des personnes
disposant de revenus modestes;
Le nouveau dispositif se devait d'autant plus de répondre aux critiques
souvent émises à l'encontre du niveau de la cotisation minimale
d'assurance personnelle, considéré comme un obstacle aux soins
pour les personnes devant s'acquitter de la cotisation.
Aussi, les règles de calcul de la cotisation sont-elles adaptées
à la situation des personnes disposant de faibles revenus pour limiter
leur niveau de contributivité :
- les titulaires de minima sociaux (RMI, API, minimum vieillesse, allocation
de veuvage) qui voient leur cotisation prise en charge par un tiers ne sont pas
redevables de cette cotisation, leurs revenus étant affranchis de
l'impôt sur le revenu en application du 9° de l'article 81 du code
général des impôts;
- les bénéficiaires de la couverture complémentaire dans
le cadre de la CMU seront exonérés de la cotisation.
- la cotisation au régime de résidence sera calculée
proportionnellement au revenu de l'assuré, après application d'un
abattement de 3500 francs (533 euros) par mois sur l'assiette de la cotisation
ainsi déterminée;
- le taux, fixé actuellement à 15,9 %, sera diminué pour
tenir compte de l'opération de substitution de la CSG à la
cotisation salariale maladie intervenue dans le cadre de la loi de financement
de la sécurité sociale pour 1998.
3.3. LE FONDS DE FINANCEMENT POUR LA PROTECTION COMPLEMENTAIRE DANS LE CADRE
DE LA COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE.
La protection complémentaire dans le cadre de la CMU, dépassant
largement le public de l'aide médicale, implique la mise en place de
nouveaux circuits financiers dans lesquels sont réinjectées les
sommes auparavant consacrées à la partie complémentaire de
l'aide médicale par l'Etat et les départements. Un fonds assure
la gestion de ce nouveau mode de financement.
3.3.1. Création d'un fonds de financement de la protection
complémentaire de la couverture maladie universelle
Afin de gérer la couverture complémentaire maladie des
populations démunies, il est créé un fonds chargé
de ses aspects financiers. Ce " fonds de financement de la protection
complémentaire de la couverture maladie universelle " est un
établissement public national. Il est placé sous l'égide
d'un conseil d'administration composé de représentants de l'Etat
et d'un conseil de surveillance constitué notamment de membres du
Parlement, de représentants d'associations oeuvrant dans le domaine
économique et social en faveur des populations les plus démunies,
des représentants des régimes obligatoires d'assurance maladie et
des représentants des organismes de protection sociale
complémentaire.
Cette organisation, comparable à celle du Fonds de solidarité
vieillesse, lui permet de gérer de façon autonome les recettes et
les dépenses destinées à la protection
complémentaire de la couverture maladie universelle.
3.3.2. les ressources du fonds
Le fonds est chargé de recueillir deux types de ressources.
Il bénéficie d'une contribution nouvelle, créée par
la loi, à la charge des assureurs complémentaires : mutuelles,
entreprises d'assurance et institutions de prévoyance. Cette
contribution, versée chaque trimestre, est assise sur le montant des
cotisations et des primes concernant les frais de santé
recouvrées au trimestre précédent. Le taux de cette
contribution est fixé à 1,75%.
Les mutuelles, les entreprises d'assurance et les institutions de
prévoyance soustraient de leur paiement trimestriel un crédit
d'impôt dans la mesure où elles ont conclu des contrats relatifs
à cette couverture complémentaire. Elles retranchent alors 375
francs (57,17 euros) par bénéficiaire, chaque trimestre. Cette
technique leur permet d'alléger immédiatement le montant de leur
contribution en fonction de leur participation active au dispositif.
Ces sommes sont recouvrées par les URSSAF pour le compte du fonds : un
arrêté définira la liste des URSSAF territorialement
compétentes et pourra éventuellement donner compétence
à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale
dans le cadre de sa mission de recouvrement direct (art. L. 225-1-1 3° du
code de la sécurité sociale). Le rendement de la contribution
sera fonction de l'engagement des assureurs complémentaires dans le
dispositif. L'assiette étant d'une centaine de milliards de francs, le
rendement maximum peut être estimé à 1,8 milliard de francs
(274,41 millions d'euros). Ce rendement est nul si les assureurs
complémentaires prennent en charge plus de 1,2 million de personnes.
Une dotation de l'Etat assure l'équilibre du fonds.
3.3.3. Les dépenses du fonds
Outre ses compétences d'organisme collecteur, le fonds assure, d'une
part, le remboursement au franc le franc, aux organismes de
sécurité sociale des sommes engagées au titre de la
couverture complémentaire et, d'autre part, le versement aux assureurs
complémentaires des sommes qui leur sont dues dans le cas où leur
crédit d'impôt est supérieur au montant de leur
contribution.
3.3.4. Rôle de contrôle et de coordination du fonds
Ses compétences d'organisme gestionnaire confèrent au fonds des
missions générales de contrôle :
- directement sur toutes les dépenses correspondant aux prises en charge
par les organismes de sécurité sociale et sur les sommes qu'il
verse aux mutuelles, aux entreprises d'assurance et aux institutions de
prévoyance. Il complète ces contrôles directs par
l'exploitation des informations que lui communiquent les organismes assureurs
sur l'état des dépenses et des recettes relatives à la
protection complémentaire de la couverture maladie universelle.
- par délégation des organismes chargés du recouvrement,
le fonds peut opérer lui-même les contrôles liés
à l'application du crédit d'impôt.
Le fonds exerce également des missions de synthèse en tant que
collecteur de toutes les informations tant financières que statistiques
sur la protection complémentaire de la couverture maladie
universelle.
Il constitue à ce titre l'organe
privilégié de pilotage de cette protection complémentaire.
3.3.5. Création d'associations d'organismes contribuant au fonds de
financement de la protection complémentaire de la couverture maladie
universelle
Les mutuelles, entreprises d'assurance et institutions de prévoyance
peuvent se constituer en associations mandataires pour le paiement de la
contribution aux URSSAF et l'éventuelle perception d'un crédit
d'impôt de la part du fonds.
Les organismes contributeurs ont, par le biais de ces associations, la
possibilité de centraliser la gestion de ces aspects afin que leur
participation au dispositif n'alourdisse pas leurs charges administratives. Si
ces associations se substituent aux organismes membres pour l'exécution
de leurs obligations, elles n'en assument pas la responsabilité. Un
organisme adhérent ne peut, par exemple, se dispenser de payer sa
contribution, si l'association s'est abstenue de le faire pour lui.
Dans l'hypothèse d'une adhésion à ce type d'association,
les services de l'URSSAF compétente doivent en être
informés. Le fonds et les URSSAF disposent de pouvoirs de contrôle
sur ces associations dans les mêmes conditions que pour un contributeur
direct.
3.4. L'IMPACT FINANCIER DES DIFFERENTES DISPOSITIONS
Les tableaux ci-dessous résument l'ensemble des transferts financiers
liés à la réforme concernant l'Etat et le régime
général.
Couverture maladie universelle : conséquences financières pour l'Etat |
|
|
|
|
|
|
|||||||||||||||||||
|
|||||||||||||||||||||||||
Recettes (ou moindres dépenses) |
milliards F |
milliards E |
Dépenses (ou moindres recettes) |
milliards F. |
milliards E. |
||||||||||||||||||||
|
|
|
|
|
|
||||||||||||||||||||
Diminution
du coût
|
0,5 |
0,08 |
Subvention au fonds de financement |
7,20 |
1,10 |
||||||||||||||||||||
Diminution de dotation générale de décentralisation |
8,69 |
1,32 |
Affectation d'une fraction des droits de consommation sur le tabac à la CNAMTS |
3,50 |
0,53 |
||||||||||||||||||||
|
|
|
Augmentation des subventions aux régimes d'assurance maladie |
0,20 |
0,03 |
||||||||||||||||||||
|
|
|
|
|
|
||||||||||||||||||||
Total |
9,19 |
1,40 |
Total |
10,90 |
1,66 |
||||||||||||||||||||
|
|
|
Solde |
-1,71 |
-0,26 |
||||||||||||||||||||
Couverture maladie de base : conséquences financières pour la CNAMTS |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||||||
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||||||
Dépenses (ou moindres recettes) |
|
|
|
milliards F. |
milliards E. |
|
Recettes CNAMTS |
milliards F. |
milliards E. |
||||||||||||||||
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
||||||||||||||||
Suppression de l'assurance personnelle |
|
|
|
|
|
|
Affectation d'une fraction des droits de consommation sur le tabac |
3,50 |
0,53 |
||||||||||||||||
|
Suppression des cotisations |
|
|
7,49 |
1,14 |
|
Affectation d'une fraction du prélèvement sur patrimoine-placements actuellement affecté à la CNAF |
2,70 |
0,41 |
||||||||||||||||
|
Suppression de la répartition du déficit |
|
|
0,57 |
0,09 |
|
Affectation d'une fraction des droits alcools actuellement affectée au FSV |
0,60 |
0,09 |
||||||||||||||||
Extension du champ des personnes couvertes |
|
|
|
0,60 |
0,09 |
|
Cotisation à la charge des assurés |
0,10 |
0,02 |
||||||||||||||||
|
|
|
|
|
|
|
Affectation à la CNAMTS de l'ensemble de la cotisation sur les véhicules terrestres à moteur |
0,83 |
0,13 |
||||||||||||||||
Total |
|
|
|
8,65 |
1,32 |
|
Total |
7,73 |
1,18 |
||||||||||||||||
|
|
|
|
|
|
|
Solde |
-0,93 |
-0,14 |
1
Paru au Journal Officiel
n° 293 du
18 décembre 1998, p. 19115.
2
Etude d'impact, tableau in fine " couverture maladie
universelle : conséquence financière pour l'Etat ".
3
" Pour une couverture maladie universelle et
complémentaire ", op.cit., p. 43
4
Jean 2, 1-12 (Bible de Jérusalem).
5
Audition du 10 mars 1999 Rapport AN tome I p. 36
6
On trouvera, en annexe du présent rapport, l'étude
d'impact déposée par le Gouvernement
.
7 Le Sénat ayant adopté la reconnaissance du concubinage
homosexuel, il a supprimé, lors de la première lecture de ce
texte, cet article devenu inutile. Les droits des concubins homosexuels
étant ainsi alignés sur ceux des concubins
hétérosexuels, ils bénéficiaient sans délai
de carence de la qualité d'ayant droit.
8
Ce qui n'est pas tout à fait exact, puisqu'il faut
défalquer les droits perçus dans les deux départements de
Corse, et la taxe prévue pour le BAPSA...
9
Arrêté du 29 mai 1998.
10
Compte rendu la réunion du Comité des finances
locales du 17 mars 1999.
11
La lettre de l'ODAS, numéro spécial, 1
er
décembre 1998.
12
Arrêt " Cattaneo c/ URSSAF de la Vienne ",
publié au Bulletin de la Cour.
13
JO Débats AN, 3
ème
séance du 29
avril 1999, p. 3867.
14
JO Débats AN, 3
ème
séance du 29
avril 1999, p. 3868.
15
Rapport n° 73 au nom de la commission des Affaires sociales
du Sénat sur le projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 1998, M. Charles Descours, rapporteur, Tome
IV, p. 98
16
Article 187-2 du code de la famille et de l'aide sociale.
17
Article 190-2 du code de la famille et de l'aide sociale.
18
Cf. les extraits de cette circulaire en annexe.
19
Rapport AN n° 1518, p. 28.
20
Etude d'impact transmise par le Gouvernement au Parlement et
reproduite
ne variatur
. On observera que le projet de loi
déposé s'intitule " portant création d'une couverture
maladie universelle ".
21
Journal officiel - Lois et Décrets 6 février
1998, p. 1912 et suivantes.
22
Exploitation de l'enquête ESPS 1996 par N. Grandfils du
CREDES, résultats cités dans l'étude `Santé et
accès aux soins'.
23
Grandfils, N. (1997) : `Santé, soins et protection sociale
1996', CREDES n°1204.
24
Cf. étude `Santé et accès aux soins',
financée en 1997 par la DSS et menée par D. Raynaud
(Université de Toulouse) à partir de l'enquête Santé
1991-92 de l'Insee.
25
Cf. étude `Santé et accès aux soins'.
26
Cf. étude `Santé et accès aux soins',
dépenses reconstituées par le CREDES sur l'enquête
Santé 1991-92.
27
Blanpain, N. et Pan Ké Shon, J. L. (1997) : `L'assurance
complémentaire maladie : une diffusion encore inégale',
Insee
Première
n°523.
28
Source : enquête ESPS 1996 (Credes, biblio n°1204).
29
condition d'activité salariée (ou assimilée)
ou indépendante, bénéfice d'une prestation sociale qui
ouvre droit aux prestations en nature d'un régime
obligatoire.