II. UNE RÉVISION CONSTITUTIONNELLE NÉCESSAIRE
Le 22 janvier 1999, le Conseil constitutionnel a décidé que la ratification du traité portant statut de la Cour pénale internationale devrait être précédée d'une révision de la Constitution 3( * ) . Cette décision était attendue et avait été précédée d'un avis du Conseil d'Etat, rendu en 1996 à propos d'un avant projet de statut, qui parvenait à la même conclusion.
A. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET LES ENGAGEMENTS INTERNATIONAUX
1. La procédure
Deux
procédures permettent au Conseil constitutionnel de se prononcer sur des
engagements internationaux.
L'article 61
de la Constitution permet
de
saisir le Conseil d'une loi autorisant la ratification ou l'approbation
d'un engagement international
. Cette procédure a été
utilisée à sept reprises jusqu'à présent et n'a
conduit à aucune déclaration d'inconstitutionnalité.
L'article 54 de la Constitution permet pour sa part au Président de
la République, au Premier ministre, au Président de l'une ou
l'autre assemblée et, depuis 1992, à soixante
députés ou soixante sénateurs de
saisir le Conseil
constitutionnel d'un engagement international
afin qu'il vérifie sa
conformité à la Constitution.
Si le Conseil déclare
qu'un engagement international comporte une clause contraire à la
Constitution, l'autorisation de le ratifier ou de l'approuver ne peut
intervenir qu'après révision de la Constitution
.
Le traité instituant la Cour pénale internationale a
été soumis au Conseil constitutionnel conjointement par le
Président de la République et le Premier ministre -comme cela
avait déjà été le cas pour le traité
d'Amsterdam- sur le fondement de cet article 54.
2. Les précédents
Avant la
décision du Conseil constitutionnel relative au traité de Rome
portant statut de la Cour pénale internationale, l'article 54 de la
Constitution n'a donné lieu qu'à six saisines :
- en 1970, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur le
traité du 22 avril 1970 portant modification de certaines
dispositions budgétaires des traités instituant les
Communautés européennes et du traité instituant un Conseil
unique et une Commission unique des Communautés européennes,
ainsi que sur la décision du Conseil des Communautés
européennes du 21 avril 1970 relative au remplacement des
contributions des Etats membres par des ressources propres aux
communautés ;
- en 1976, le Conseil s'est prononcé sur la décision du Conseil
des Communautés européennes relative à l'élection
de l'Assemblée européenne ;
- en 1985, le Conseil constitutionnel a été saisi du
protocole n° 6 additionnel à la Convention
européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales concernant l'abolition de la peine de mort ;
- en 1992, le Conseil constitutionnel s'est prononcé à deux
reprises dans le cadre de l'article 54 de la Constitution sur le
traité sur l'Union européenne signé à
Maastricht ;
- enfin, en 1997, le Conseil constitutionnel a été
interrogé sur la conformité à la Constitution du
traité d'Amsterdam.
Si l'on prend en considération la décision relative à la
Cour pénale internationale, il est intéressant de constater que
quatre des sept saisines du Conseil constitutionnel sont intervenues au cours
des sept dernières années, tandis que les trente années
précédentes n'avaient été marquées que par
trois saisines. De plus, trois des quatre dernières saisines ont eu pour
résultat une déclaration de non conformité à la
Constitution, le Conseil constatant un risque d'atteinte aux conditions
essentielles d'exercice de la souveraineté. Le Conseil constitutionnel a
ainsi décidé que la ratification des traités de Maastricht
et d'Amsterdam devait être précédée d'une
modification de la Constitution. Il est parvenu à la même
conclusion après avoir examiné le statut de la Cour pénale
internationale.
L'approfondissement des liens entre les Etats, singulièrement dans le
cadre de la construction européenne, la signature de traités ou
de conventions dans des matières régaliennes par essence, impose
donc à la France des adaptations de sa Constitution plus
fréquentes que par le passé.