Projet de loi relatif à l'environnement sonore aéroportuaire
LEGRAND (Jean-François)
RAPPORT 204 (98-99) - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES
Table des matières
- AVANT-PROPOS
-
EXPOSÉ GÉNÉRAL
-
I. LA MAÎTRISE DES NUISANCES SONORES : UN PRÉALABLE
INDISPENSABLE AU DÉVELOPPEMENT DU TRAFIC AÉRIEN
- A. LA POLLUTION SONORE : UN PROBLÈME LANCINANT
- B. LE TRANSPORT AÉRIEN : UNE CONTRIBUTION ESSENTIELLE À LA CROISSANCE ET À L'EMPLOI
-
C. LA MAÎTRISE DES NUISANCES SONORES EN EUROPE : DES
RÉPONSES RÉGLEMENTAIRES DIVERSES
- 1. La réglementation acoustique internationale
- 2. La réglementation européenne55 Les développements suivants sont largement inspirés du rapport du ministère de l'équipement : " La maîtrise des nuisances sonores sur les aéroports européens " paru à la Documentation française en avril 1998.
- 3. La situation française
-
II. L'AUTORITÉ INDÉPENDANTE : UN SOUHAIT PARTAGÉ
POUR AMÉLIORER LE DIALOGUE ET LA TRANSPARENCE
-
A. UN SOUHAIT TRÈS LARGEMENT PARTAGÉ.
- 1. Le constat et les propositions de la mission Douffiagues
- 2. Le rapport de la mission de concertation du préfet Carrère sur l'aéroport Charles de Gaulle
- 3. Les conclusions de la commission d'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique de l'extension de Paris-Charles de Gaulle
- 4. L'institution indépendante créée par le décret du 28 mars 1997
- 5. L'engagement pris par le ministre lors de l'annonce de l'extension de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle
- 6. Un accord de principe quasi unanime
- B. L'AUTORITÉ ADMINISTRATIVE INDÉPENDANTE : UN MODÈLE JURIDIQUE DÉSORMAIS CONSACRÉ
-
A. UN SOUHAIT TRÈS LARGEMENT PARTAGÉ.
-
III. LE PROJET DE LOI ET LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
- A. LE PROJET DE LOI
-
B. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
- 1. Un accord de principe
- 2. Une volonté d'instituer une autorité morale plus qu'un organisme coercitif
- 3. Un souci d'améliorer le fonctionnement de l'autorité et d'accroître ses garanties d'indépendance
- 4. Un impératif : la prise en compte des problèmes de santé humaine
- 5. Un souhait d'aboutir à une solution pragmatique et concertée pour le trafic d'hélicoptères
- 6. Maîtriser l'urbanisme et mieux informer les riverains
-
I. LA MAÎTRISE DES NUISANCES SONORES : UN PRÉALABLE
INDISPENSABLE AU DÉVELOPPEMENT DU TRAFIC AÉRIEN
- EXAMEN DES ARTICLES
N°
204
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 9 février 1999
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi portant création de l' autorité de contrôle technique de l' environnement sonore aéroportuaire ,
Par M.
Jean-François LE GRAND,
Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Jean François-Poncet,
président
; Philippe François, Jean Huchon,
Jean-François Le Grand, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Marc Pastor, Pierre
Lefebvre,
vice-présidents
; Georges Berchet, Jean-Paul Emorine,
Léon Fatous, Louis Moinard,
secrétaires
; Louis
Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM.
Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean
Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye,
Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland
Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Marcel
Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Xavier Dugoin, Bernard
Dussaut
,
Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain
Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard,
Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis,
MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain
Journet, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Edmond Lauret, Gérard
Le Cam, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis
Mercier, Bernard Murat, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron,
Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult,
Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Jean-Jacques
Robert, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette
Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Henri Weber.
Voir le numéro :
Sénat
:
8
(1998-1999).
Environnement. |
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Le projet de loi qui nous est soumis résulte d'un engagement pris par le
ministre chargé de l'aviation civile lors de l'annonce, le 23 septembre
1997, du lancement des travaux pour la construction des deux nouvelles pistes
sur l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle. Le Gouvernement s'engageait
à cette date dans la voie tracée par la mission Douffiagues,
à laquelle votre rapporteur a eu l'honneur d'appartenir : celle
d'une maîtrise des nuisances sonores, contrôlée par une
autorité indépendante, préalable nécessaire au
développement du trafic aérien.
EXPOSÉ GÉNÉRAL
I. LA MAÎTRISE DES NUISANCES SONORES : UN PRÉALABLE INDISPENSABLE AU DÉVELOPPEMENT DU TRAFIC AÉRIEN
A. LA POLLUTION SONORE : UN PROBLÈME LANCINANT
1. Le bruit : une des principales pollutions actuelles
a) Une agression fortement ressentie dans la vie quotidienne
Le bruit
n'est pas un phénomène nouveau. Déjà, bien avant la
révolution industrielle, les écrits d'Horace nous rappellent que,
voilà 2000 ans, retentissaient dans Rome les sabots des mules, les
aboiements des chiens, les hurlements des portefaix. A un siècle de
nous, Baudelaire nous dit "
La rue autour de moi hurlait
".
Pourtant, le bruit est devenu, depuis un quart de siècle, l'une des
premières sources de pollution, avec notamment le développement
de la
circulation routière
, qui est citée par les
enquêtes
1(
*
)
comme la première cause
de nuisance sonore.
Une prise de conscience collective récente de l'ampleur du
phénomène
Plusieurs rapports ou missions sur le bruit -et plus particulièrement
celui des transports- ont été demandés à des
experts par les gouvernements successifs ces vingt dernières
années. On citera notamment la mission initialement confiée en
1981 par notre collègue Daniel Hoeffel, alors ministre, à
M. Gilbert Batsch, puis renouvelée par Mme Huguette Bouchardeau,
qui avait conduit le conseil des ministres du 11 avril 1984 à
décider d'un " plan de rattrapage des points noirs du bruit ".
Une mission fut confiée en 1989 par M. Brice Lalonde à
M. Jean Tutenuit, à la suite de la réunion du
18 avril 1989 du comité interministériel pour la
qualité de la vie.
La loi relative à la lutte contre le bruit
, qui a, notamment,
instauré une " taxe d'atténuation des nuisances
sonores " payée par les compagnies aériennes, a
été adoptée en décembre 1992.
Depuis, le rapport du député Bernard Serrou sur la protection des
riverains contre le bruit des transports terrestres, a été remis
en 1994 au Premier ministre. Le rapport Serrou estimait à 2.600 le
nombre de sites -les " points noirs "- où les habitants sont
soumis à plus de 60 décibels plus de 8 heures par jour.
" En avril 1998, le Conseil économique et social a
présenté un rapport sur "
le bruit dans la
ville
".
Tout récemment, M. Claude Lamure a remis, en novembre 1998, un
rapport au ministre de l'environnement sur "
la résorption des
points noirs du bruit routier et ferroviaire
", qui recense 3.000
" points noirs " et évalue à 300.000 le nombre de
français qui souffrent de troubles du sommeil dus au bruit nocturne. Le
bruit subi par les riverains d'aéroports est toutefois exclu du champ de
cette étude.
Quelques chiffres sur la gêne sonore
Comme l'indique le dernier rapport de l'Institut français de
l'environnement (IFEN), depuis 1996, dans le cadre de l'enquête
permanente sur les conditions de vie des ménages, l'INSEE mesure la
perception par les ménages français de la qualité de
l'environnement. L'analyse des réponses obtenues auprès d'un
échantillon de 8.000 logements montre que le
bruit constitue une
nuisance importante.
Le bruit de la
circulation
est la nuisance sonore la plus
fréquemment ressentie. Début 1998,
33 % des
ménages se déclarent gênés par ce type de bruit
,
au moins de temps en temps, lorsqu'ils sont dans leur logement. Près de
la moitié des ménages habitant à Paris sont
régulièrement gênés par le bruit de la circulation,
contre un ménage sur cinq en zone rurale. 52 % des ménages qui
habitent à proximité d'une route sont gênés par le
bruit qu'elle engendre.
La deuxième source de nuisance sonore provient du voisinage.
Le tableau suivant retrace les résultats de cette enquête de
l'INSEE sur les conditions de vie des ménages :
LA GÊNE SONORE
|
Pourcentage des ménages gênés par le bruit de... |
||
|
Circulation |
Voisinage |
Commerces |
Statut d'occupation |
|
|
|
propriétaire |
30 |
21 |
9 |
locataire |
37 |
42 |
15 |
Catégorie professionnelle |
|
|
|
agriculteur |
17 |
7 |
5 |
artisan |
32 |
25 |
14 |
cadre |
35 |
34 |
12 |
profession intermédiaire |
36 |
32 |
13 |
employé |
36 |
40 |
15 |
ouvrier |
33 |
31 |
11 |
retraité |
32 |
23 |
10 |
Chômeur |
|
|
|
oui |
33 |
35 |
14 |
non |
33 |
29 |
11 |
Type de commune |
|
|
|
rurale |
20 |
12 |
5 |
agglomération |
36 |
33 |
13 |
banlieue de Paris |
40 |
38 |
13 |
Paris |
46 |
55 |
27 |
Type de voisinage |
|
|
|
maison individuelle |
27 |
16 |
7 |
immeuble collectif |
43 |
45 |
21 |
cité |
38 |
59 |
13 |
mixte (1) |
41 |
37 |
17 |
Route à proximité |
|||
oui |
52 |
36 |
17 |
non |
13 |
24 |
7 |
Ensemble |
33 |
30 |
12 |
Source
: enquête permanente sur les
conditions
de vie des ménages, INSEE-Ifen, 1998.
(1) (caractéristique notée par l'enquêteur)
b) Des effets nocifs sur la santé
Le bruit
peut produite deux sortes de dommages sur l'organisme : les uns sont
spécifiques
et portent sur l'audition, voire les fonctions
" psycho-acoustiques " (communication humaine par exemple) ; les
autres ne
sont pas spécifiques
. Il s'agit du
désagrément, de la gêne au sens large, de la fatigue, ainsi
que de troubles nerveux et généraux.
Les effets auditifs du bruit
Le danger du bruit pour l'appareil auditif dépend de l'intensité
du son et de sa durée. Les spécialistes estiment
qu'il y a
danger pour les capacités auditives à partir d'une ambiance
sonore de 85 dB(A)
2(
*
)
.
Plus
l'intensité sonore dépasse ce seuil, plus le délai
d'apparition du danger se raccourcit. De même, plus l'écoute est
longue et répétée, plus l'intensité sonore,
même faible, est dommageable.
Le dommage est d'autant plus imprévisible que la
douleur n'est
ressentie qu'à partir de 120 dB(A)
pour une oreille normale. La
détérioration auditive peut dont n'apparaître
qu'ultérieurement. Le plus grand traumatisme provient des sons aigus car
le réflexe de défense de l'oreille contre le bruit, le
réflexe " stapédien ", n'est relativement efficace que
pour les fréquences basses ou moyennes. Un son écouté
même quelques minutes à une intensité sonore ne
dépassant pas 90 dB(A) peut produire une fatigue auditive qui se
traduit par une élévation temporaire du seuil d'audition
(déficience passagère) éventuellement accompagnée
de bourdonnements, sifflements et tintements, ainsi que de modifications de la
sensation auditive, qui prend un caractère ouaté et
métallique.
Le tableau suivant indique la correspondance entre les sensations auditives et
le niveau de décibels de différentes sources sonores :
L'ÉCHELLE DES BRUITS
Sensation auditive |
Bruits intérieurs |
Bruits extérieurs |
Bruit des véhicules |
dB(A) |
|
Turbo-réacteur au banc d'essai |
|
|
140 |
|
Marteau-pilon |
|
Réacteur d'avion à quelques mètres |
130 |
Seuil de douleur |
Banc d'essai de moteurs |
|
|
120 |
|
Atelier de chaudronnerie |
|
|
|
|
|
|
|
110 |
|
Presse à découper |
|
|
|
Très difficilement supportable |
Raboteuse |
Marteau piqueur à 5 m |
Moto de course à 2 m |
100 |
|
Atelier de forgeage |
Rue à trafic intense |
Klaxons d'auto |
95 |
Pénible à entendre |
Radio très puissante |
Circulation intense à 1 m |
Métro en marche |
85 |
|
Atelier dactylo |
|
Métro sur pneu |
75 |
|
Restaurant bruyant |
Circulation importante |
|
70 |
Bruyant mais supportable |
Appartement bruyant |
|
|
65 |
Bruit courant |
Conversation normale, musique de chambre |
Rue résidentielle |
Bateau à moteur |
60 |
|
Restaurant tranquille, grands magasins |
rue très tranquille |
voiture silencieuse |
50 |
Assez calme |
Appartement normal |
|
Transatlantique (1 ère classe) |
45 |
|
Bureau tranquille |
|
|
40 |
Calme |
|
|
Bateau à voile |
35 |
|
Appartement calme dans quartier tranquille |
|
|
30 |
|
Conversation à voix basse |
|
|
25 |
|
Studio en radio |
|
|
20 |
Très calme |
|
Feuilles agitées par un vent doux |
|
15 |
|
Cabine prise de son |
|
|
10 |
Silence inhabituel |
Laboratoire d'acoustique |
|
|
5 |
Seuil d'audition |
|
|
|
0 |
Source
: Secrétariat d'Etat à la
santé, cité par l'Ifen.
La gêne dépend en outre du niveau sonore, non seulement absolu,
mais aussi
relatif par rapport au niveau de fond
, à la
présence ou non d'un autre bruit, à l'accumulation, à
l'aspect répétitif ou continu et à la période de la
journée.
Les effets non auditifs du bruit
Le bruit ne cantonne pas ses effets à l'audition
. En effet,
l'appareil auditif constitue une fonction de guet et d'alarme qui diffuse les
influx nerveux. Tout bruit insolite ou intense provoque un ensemble de
réflexes et d'attitudes d'investigation, d'émotion, d'attente
anxieuse, d'augmentation de la vigilance et de détérioration de
celle-ci quand le bruit est jugé alarmant.
Il
peut
entraîner des réactions sur l'ensemble de l'organisme
:
hypertension artérielle, vertiges, réduction du champ visuel,
stress, spasmes digestifs, fatigue excessive, irritabilité.
En outre, le bruit contrarie le sommeil. Il provoque des difficultés
d'endormissement, des éveils au cours de la nuit et réduit la
durée du sommeil profond, phase importante pour la
récupération. Les troubles du sommeil génèrent
eux-mêmes des effets secondaires : fatigue, baisse de vigilance,
erreurs plus fréquentes.
Les conséquences psychologiques
de l'exposition au bruit, si
elles sont moins connues, ne doivent pas êtres sous-estimées.
Votre rapporteur en est convaincu, notamment parce qu'il a rencontré ou
consulté, dans le cadre de la préparation du présent
rapport, des associations de riverains des plates-formes aéroportuaires.
Au cours de ces échanges sont revenus les mots de
" souffrance ", " calvaire ", situation
" intenable ", " insupportable ".
Le bruit nocturne est particulièrement pénible
.
Si la question des souffrances physiques et morales liées à
l'exposition au bruit est posée à l'ensemble de la
société, et dans des secteurs d'activité divers, c'est aux
nuisances sonores aériennes seulement que s'adresse le présent
projet de loi.
Votre commission souhaite toutefois préciser qu'il serait
extrêmement réducteur d'en conclure que ce type de transport porte
seul la responsabilité de la gêne sonore imposée à
nos concitoyens. Toutes les études et les différents rapports
montrent à l'évidence qu'il n'en est rien.
2. Le bruit des avions : origines, progrès et perspectives
Par rapport aux autres bruits, le bruit des avions se caractérise par de forts niveaux de crête, séparés par des moments de silence. Les progrès technologiques appliqués notamment à la motorisation ont permis une diminution du bruit des appareils, qui devrait se poursuivre. Pour autant, le problème de la gêne sonore demeure.
a) Les origines du bruit des avions
Les
bruits liés au moteur
Pour les avions à réaction en vol, on peut décomposer le
bruit des groupes motopropulseurs en bruit " de jet " lié
à l'expulsion des gaz à l'arrière du moteur et en bruits
internes, eux-mêmes liés aux parties tournantes du moteur
(soufflantes amont et aval, compresseur et turbine) ainsi qu'au bruit de la
combustion.
Le bruit de jet
est dû à la génération de
fortes turbulences dans la zone où les gaz chauds à haute
pression éjectés de la tuyère du moteur se
mélangent à l'air ambiant. Le bruit de jet est un bruit à
large bande, qui est fonction croissante du diamètre de la tuyère
et de la vitesse d'écoulement du jet. Il est plus marqué à
l'arrière. Il a été fortement réduit dans les
moteurs modernes à double flux de gaz, à grand diamètre et
à basse vitesse d'éjection.
Le bruit des parties tournantes du moteur
est caractérisé
par la présence de bruits de " raies " qui se superposent
à un bruit à large bande. Ce bruit est plus marqué
à l'avant du réacteur.
Le bruit de combustion
est attribué à des fluctuations
volumétriques du gaz en expansion, causées par une combustion non
stable du kérosène. Il est difficile à dissocier du bruit
de jet dans le spectre de bruit.
Le bruit aérodynamique
est dû aux turbulences
aérodynamiques créées autour de l'avion. Le bruit des
volets, des becs et du train d'atterrissage en sont des exemples. Compte tenu
des progrès réalisés sur les moteurs,
cette source de
bruit devient aussi importante que le bruit du moteur, notamment en phase
d'atterrissage.
b) Des progrès importants
En
30 ans, la recherche et les progrès technologiques
réalisés sur les moteurs ont permis de réduire d'un peu
plus de 20 décibels le bruit des avions à réaction.
Ainsi, un avion équipé de réacteurs conçus au
débat des années 60 produisait un bruit équivalent
à 125 Airbus A320. La zone exposée à un bruit de
85 dB(A) au décollage a été réduite par plus
de huit fois entre un avion des années 70 et un avion des
années 90.
Ces progrès ont pu être obtenus par l'augmentation du " taux
de dilution " : le flux d'air chaud et rapide dans le moteur est
doublé par un flux d'air froid et plus lent qui limite l'effet de
" déchirement " lors de l'éjection des gaz à
l'arrière du moteur.
De même, des mélangeurs mixent air froid et air chaud à
l'intérieur même de la nacelle du moteur, ce qui réduit le
bruit.
Le bruit émis à l'intérieur du moteur a pu être
" piégé " à l'aide de parois absorbantes dont on
tapisse désormais l'intérieur de la nacelle.
Les schémas suivants permettent de visualiser les progrès
effectués en termes de réduction de l'emprunte sonore au sol ces
vingt dernières années.
ÉVOLUTION DE L'EMPRUNTE SONORE DES MOTEURS
Source
: Airbus industrie
Si on transpose cette courbe à l'aéroport de Paris-Orly, on
obtient le résultat suivant :
AEROPORT DE PARIS-ORLY
Comparaison des
empreintes
au sol (85 Db(a))
A320 B 727- 200
Source
: Airbus Industrie
L'effort de recherche se poursuit pour réduire le " bruit à
la source ", notamment pendant les
phases de survol et d'approche
qui génèrent le plus de nuisances.
On distingue désormais la réduction passive du bruit de la
réduction active
, qui consiste à générer
électroniquement des " contre-bruits, " émis par des
hauts-parleurs au niveau de l'entrée d'air du moteur, sur la même
fréquence, mais en opposition de phase, afin d'aboutir à une
neutralisation acoustique. Ce contrôle acoustique " actif "
devrait permettre de poursuivre dans la voie des progrès accomplis, qui
sont rappelés par le graphique ci-après :
ÉVOLUTION DU BRUIT DES MOTEURS
Source
: Airbus Industrie
A ce sujet, votre rapporteur souhaite que l'Etat soutienne, dans le cadre
européen, comme au niveau de la politique nationale d'aide à la
recherche, la recherche en matière de réduction du bruit dans le
secteur de la construction aéronautique. Votre commission a, d'ailleurs,
sur proposition de votre rapporteur, affirmé cette position lors de
l'examen des crédits budgétaires pour 1999.
c) Une question qui reste lancinante pour les riverains
Malgré les réels progrès
réalisés
grâce notamment au changement de motorisation des avions, que personne
n'a contesté devant votre rapporteur, le problème des nuisances
sonores supportées par les riverains reste entier.
Il est difficile d'avancer une estimation du nombre de personnes
concernées.
A la demande de votre rapporteur, l'administration a
estimé que le nombre de riverains situés dans l'emprise d'un plan
de gêne sonore
3(
*
)
serait d'environ
160.000
, tandis que des associations
4(
*
)
estiment à
3.000.000
le nombre de personnes concernées, au
sens large, par le présent projet de loi et donc par les nuisances
sonores liées au transport aérien.
La croissance du trafic aérien, même si elle s'est
accompagnée d'une baisse du bruit produit par avion, a accru le nombre
et la fréquence des mouvements. Le bruit a changé de nature, mais
il n'est pas perçu comme étant moins pénible, au
contraire, la continuité du bruit diurne et parfois nocturne, en ayant
accru la pénibilité.
En outre, la croissance de l'activité des aéroports a
elle-même généré un " bruit ambiant ",
lié entre autres à la circulation routière, qui s'ajoute
à celui des avions proprement dits.
Plus largement, les riverains estiment que ce sont toutes leurs conditions de
vie qui ont été bouleversées.
Votre rapporteur a rencontré des riverains des aéroports
parisiens qui, installés dans la région parfois avant
l'aéroport lui-même, ont vécu une transformation sociale,
voire
une " paupérisation " des communes
concernées
, sans parler des conséquences sur les prix
du
marché de l'immobilier.
Les réponses que votre rapporteur a reçues de la part
d'associations de riverains d'Ile-de-France et de province, auxquelles une
contribution écrite a été demandée à
l'occasion de l'élaboration du présent rapport, reflètent
elles aussi la profondeur de leur malaise.
Une réponse doit impérativement être apportée
à cette exaspération et à cette souffrance des riverains.
Ne nous y trompons pas : il y va de l'avenir du transport aérien
dans notre pays
. Un exemple est particulièrement éclairant en
la matière : rappelons-nous qu'à Strasbourg, la
décision d'implantation de la société DHL, qui aurait
entraîné une multiplication des vols de nuit, a été
finalement abandonnée sous la pression des riverains, malgré la
perspective d'importantes créations d'emplois sur la
plate-forme.
B. LE TRANSPORT AÉRIEN : UNE CONTRIBUTION ESSENTIELLE À LA CROISSANCE ET À L'EMPLOI
1. Un secteur en mouvement
L'internationalisation de l'économie et le
développement des échanges " tirent " vivement la
croissance du trafic aérien.
Les chiffres de l'organisation internationale de l'aviation civile (OACI) pour
le trafic aérien régulier total, exprimé en
tonnes-kilomètres transportées, incluant le trafic passagers, le
fret et le trafic postal, indiquent
une augmentation de 8 % en 1997
par rapport à 1996.
Les prévisions de l'OACI estiment à respectivement 5,4 %
et 6,1 % la croissance moyenne annuelle du trafic passagers et fret d'ici
à 2001.
Cette croissance du trafic a des retombées économiques
très positives.
2. Une contribution importante à la croissance et à l'emploi
Une
étude réalisée par l'Airports Council International
Europe, intitulée "
Emploi et prospérité en
Europe
" et publiée en septembre 1998 donne une indication de
l'apport du transport aérien à la croissance et à
l'emploi
:
"
En dépit des variations dans l'impact direct sur la
création d'emplois pour chaque aéroport en fonction des
caractéristiques de son trafic et de son rôle,
cette
étude confirme le chiffre souvent cité d'au moins
1.000 emplois sur site créés par million de passagers par
an.
Les estimations de l'impact indirect et de l'impact induit sont
dérivées de cette quantification de l'impact direct au moyen de
multiplicateurs ou d'une analyse input/output.
L'impact économique
indirect
et, par conséquent, l'impact économique induit d'un
aéroport sont plus difficiles à quantifier, car la
démarche nécessite non seulement une bonne compréhension
du fonctionnement d'un aéroport, mais également de ses
interactions avec l'économie locale, régionale ou nationale. La
variabilité de ces estimations est importante en raison des
différentes méthodologies adoptées ou de la taille de la
zone d'étude.
L'étude indique que le total de l'impact direct, indirect et induit
d'un aéroport sur l'emploi peut être en moyenne de
2.200 emplois par million de passagers
Les aéroports jouent un rôle fondamental pour attirer et retenir
les industries dans les zones environnantes, situées
généralement dans un rayon de 1 ou 2 heures de route. En
dépit des fortes variations caractérisant l'impact mesuré
dans l'échantillonnage d'aéroports, l'impact sur l'emploi et sur
l'économie en général est substantiel. Ce rôle
économique plus large est connu sous les noms d'impact catalyseur ou de
retombées économiques (choix d'implantation de certaines
sociétés, amélioration de leur compétitivité
économique, attraction des visiteurs d'affaires et de loisirs).
L'étude indique que, de manière générale,
l'impact catalyseur peut multiplier l'impact d'un aéroport
1,8 fois, soit environ 4.000 emplois par million de passagers, compte
tenu de tous les facteur.
L'impact catalyseur sera supérieur dans le
cas d'aéroports disposant de réseaux bien
développés de services réguliers internationaux.
"
Votre rapporteur est prudent quant à l'applicabilité
réelle de ces ratios, notamment en raison de la difficulté
méthodologique à délimiter les effets induits, ainsi que
la particularité des situations : l'étude est fondée
sur les grandes plates-formes européennes, or il existe une grande
diversité de situations sur les aéroports français et les
effets sur l'emploi sont dépendants de la structure du trafic.
Même si l'équivalence "
un million de passagers
supplémentaires par an = 1.000 emplois directs, 2.200 emplois
directs et indirects et 4.000 emplois directs, indirects et
" catalysés
" " n'est pas une vérité
scientifique, elle donne quand même la mesure des potentialités de
ce secteur.
Votre rapporteur est convaincu que le transport aérien est essentiel
pour conforter notre économie, pour créer des emplois et pour
améliorer notre rayonnement international.
Bien plus, la France dispose, avec les possibilités d'extension de ses
capacités aéroportuaires, d'un atout unique en Europe.
Alors, sachons saisir cette chance ! De notre capacité à
comprendre, à écouter et à résoudre les
problèmes vécus par les populations qui souffrent de l'exposition
au bruit du transport aérien -et de notre volonté à
éviter que ne se reproduisent ces situations d'exposition au bruit-
dépendra l'avenir de ce secteur.
C. LA MAÎTRISE DES NUISANCES SONORES EN EUROPE : DES RÉPONSES RÉGLEMENTAIRES DIVERSES
Soucieuse à la fois de ne pas entraver le bon développement du transport aérien et de limiter la pollution sonore aéroportuaire, les autorités réglementaires ont élaboré un corpus de normes.
1. La réglementation acoustique internationale
Des
normes internationales ont, corrélativement à l'accroissement
spectaculaire du trafic aérien ces trente dernières
années,
durci les exigences acoustiques
relatives à la
certification des aéronefs.
Ces normes se fondent sur une définition commune des conditions de
mesure et de représentation du bruit. Elles sont définies par
l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), dans un document
intitulé "
Annexe 16 à la Convention relative
à l'aviation civile internationale
" (dénommée
Annexe 16).
Cette réglementation vise à éviter que l'augmentation du
trafic aérien ne conduise, à terme, à une augmentation de
la nuisance subie par les riverains d'aérodromes. A cet effet, elle
incite les constructeurs et les exploitants d'aéronefs à
l'utilisation des technologies de réduction des nuisances les plus
performantes, compatibles avec les impératifs de sécurité
et de viabilité économique.
Elle impose des contraintes à différents stades de la vie d'un
aéronef : la conception, la production, l'adjonction à la
flotte d'une compagnie et l'exploitation.
En ce qui concerne
la conception et la production
, la
réglementation définit des
niveaux de bruit maximaux en
fonction des différentes catégories d'aéronefs et de la
masse au décollage
. Pour les avions de transport à
réaction, qui constituent la source essentielle de nuisance sonore au
voisinage des aéroports, les normes établies au début des
années 1970 et énoncées dans le chapitre 2 de
l'Annexe 16 ont été remplacées en 1977 par
des
normes plus sévères, constituant le chapitre 3 de cette
Annexe.
Cette évolution amène à classer les avions de transport
à réaction en
trois générations
, dont
chacune représente une diminution par rapport à la
précédente d'au moins 50 % en niveau d'énergie
acoustique :
- les avions d'un type conçu avant la première norme OACI,
qu'on qualifie " d'
avions non certifiés "
,
- les avions d'un type conçu approximativement entre 1970 et 1977,
certifiés suivant les normes du chapitre 2, qu'on qualifie
d'
avions " chapitre 2 "
,
- les avions certifiés suivant les normes du chapitre 3, qu'on
qualifie d'
avions " chapitre 3 "
.
L'accroissement de la flotte mondiale d'avions à réaction depuis
les années 1960 s'est, en conséquence, heureusement
accompagné d'une réduction considérable du nombre des
appareils les plus bruyants, même s'il existe encore au niveau mondial un
nombre significatif d'avions bruyants en circulation.
En Europe, des normes plus contraignantes ont été mises en
place.
2. La réglementation européenne5( * )
a) Les règles communautaires
Des
normes communautaires prescrivent des conditions de constitution des flottes et
d'exploitation des avions en vue de réduire les nuisances sonores. La
Communauté européenne a posé des règles communes
pour les aéroports de l'Union européenne, avec des étapes
dans l'évolution des flottes, pour ne pas compromettre
l'équilibre économique des entreprises du transport
aérien. Ainsi,
les avions les plus anciens (non certifiés) ont
été définitivement retirés de l'exploitation en
1989. Pour les avions " chapitre 2 ", leur adjonction à
une flotte européenne a été proscrite en 1990 et la
directive n° 92-14 du 2 mars 1992 impose leur retrait progressif
d'exploitation, qui doit être achevé
6(
*
)
le 1
er
avril 2002.
Un règlement européen a autorisé le
retrait
anticipé
des avions du chapitre 2 sur les aéroports
européens en période nocturne, afin de réduire
l'exposition au bruit de la nuit.
Outre les projets de réglementation tendant à interdire
l'addition aux flottes présentes en Europe
des avions
" hushkitté
", c'est-à-dire des avions du
chapitre 2 munis d'atténuateurs de bruit pour répondre aux
normes du chapitre 3, qui demeurent bruyants par rapport aux autres avions
du chapitre 3, la Communauté européenne a prévu la
possibilité pour un Etat-membre de
limiter l'accès à un
aéroport
, suivant certaines procédures, pour faire face aux
problèmes environnementaux.
Plusieurs Etats-membres ont utilisé ces
possibilités.
b) Les solutions retenues sur les principaux aéroports européens
D'après le rapport précité
d'avril 1998
sur la maîtrise des nuisances sonores sur les aéroports
européens, les diverses mesures mises en oeuvre sur les
22 principaux aéroports s'articulent autour de
six moyens :
Restriction de trafic
En sus des règles européennes citées ci-dessus, nombreuses
sont les restrictions de trafic supplémentaires imposées sur les
aéroports européens pour limiter les nuisances sonores. Elles
prennent des formes diverses. L'interdiction du trafic sous forme d'un
couvre-feu total entre 23 h 30 et 6 h 00 sur
l'aéroport d'Orly
est un exemple unique en Europe d'après
cette étude.
Maîtrise de l'urbanisme
La maîtrise de l'urbanisme est un élément essentiel de la
politique de maîtrise des nuisances sonores en Europe. Les limitations
peuvent être de nature législative. Quand de telles
législations n'existent pas, au Royaume-Uni par exemple, des mesures de
maîtrise de l'urbanisme peuvent être mises en oeuvre sur la base
d'accords volontaristes.
En France, c'est la loi du 11 juillet 1985 sur l'urbanisme au
voisinage des aéroports
7(
*
)
qui a
instauré, autour de l'élaboration de plans d'exposition au bruit,
documents graphiques délimitant différentes zones de bruit autour
des plate-formes, des prescriptions en matière d'urbanisme. Des
dispositions existent également aux Pays-Bas.
Limitation des opérations au sol
Des restrictions à la réalisation des
essais de moteurs
ainsi qu'à l'utilisation des
inverseurs de poussée
et des
moteurs auxiliaires
(APU ou Auxiliary Power Unit) ont été
mises en place en Europe. Il existe pour ce type de mesures une certaine marge
de manoeuvre pour d'administration ou les autorités
aéroportuaires, dans la limite du respect de la sécurité.
Les restrictions sont publiées dans les manuels d'information
aéronautique ou reposent, plus rarement, sur des textes
réglementaires. Elles prennent le plus souvent la forme de
recommandations ou de restrictions.
Action sur les taxes et redevances aéroportuaires
Une des mesures fréquemment utilisée pour inciter au
renouvellement des flottes consiste
à augmenter les charges
d'exploitation des compagnies
aériennes en cas d'utilisation
d'avions bruyants (d'ancienne technologie). Cette majoration au titre du bruit
prend le plus souvent la forme d'une
modulation de la redevance
d'atterrissage
et plus rarement
d'une taxe
perçue pour le
compte de l'Etat.
Aide financière aux riverains des aérodromes
Un autre volet de la politique européenne de maîtrise des
nuisances sonores est l'aide à l'insonorisation des habitations
subissant directement les nuisances engendrées par l'activité
aéroportuaire. Toutefois, l'examen des principaux aéroports
européens montre
que ces programmes d'aide ne sont pas
systématiques
, alors que sur certaines plates-formes ils sont d'ores
et déjà achevés.
Sanctions
L'existence et l'application de
sanctions pénales ou
administratives
-sanctions opérationnelles ou financières,
voire même condamnations à l'emprisonnement-
en cas de non
respect de la réglementation relative au bruit,
dépendent des
juridictions ou des jurisprudences des différents Etats. Certains
aéroports appliquent toutefois des sanctions sans qu'aucune base
légale ne les justifie et s'exposent alors à des contentieux.
A noter que, d'après le rapport précité, le dispositif
français (décret sur les sanctions administratives
8(
*
)
portant création de la Commission nationale de
prévention des nuisances sonores) est le système le plus complet
en Europe.
Le tableau suivant récapitule les mesures prises pour limiter les
nuisances sonores sur les 22 principaux aéroports européens
étudiés dans ce rapport (une grille de lecture de ce tableau
figure ci-après) :
GRILLE DE LECTURE DU TABLEAU
- Si une
case est hachurée, c'est que le non respect de la prescription peut
faire l'objet de sanction.
- Les abréviations ont la signification suivante :
Z zone d'exposition au bruit de 0 h à 24 h
Zd zone d'exposition au bruit diurne
Zn zone d'exposition au bruit nocturne
I indicateur de bruit de 0 h à 24 h
Id indicateur de bruit diurne
In indicateur de bruit nocturne
S seuil maximal de bruit instantané de 0 h à 24 h
Sd seuil maximal de bruit instantané diurne
Sn seuil maximal de bruit instantané nocturne
déc décollage
att atterrissage
QC quota count
sa samedi de 0 h à 24 h
di dimanche de 0 h à 24 h
Rec recommandation uniquement
Res restrictions uniquement
T taxe spécifique
M modulation de la redevance d'atterrissage
td taux de dilution des moteurs
n.c. non communiqué
Source
: rapport précité sur la maîtrise des
nuisances sonores sur les aéroports européens.
3. La situation française
a) La loi n° 85-696 du 11 juillet 1985 relative à l'urbanisme au voisinage des aérodromes
Un
dispositif de maîtrise de l'urbanisme au voisinage des aérodromes
a été instauré par la loi du 11 juillet 1985,
codifiée dans le code de l'urbanisme.
D'après cette loi, la maîtrise de l'urbanisation autour des
aérodromes est directement liée à l'existence
d'un plan
d'exposition au bruit (PEB)
et repose sur un principe général
défini à l'article L.147-5 du code de l'urbanisme
"
Dans les zones définies par le plan d'exposition au bruit,
l'extension de l'urbanisation et la création ou l'extension
d'équipements publics
sont interdites
lorsqu'elles conduisent
à exposer immédiatement ou à terme de nouvelles
populations aux nuisances de bruit
".
Le PEB est un document graphique à l'échelle
1/25.000
e
, qui délimite trois zones (A, B, C) d'exposition au
bruit, définies par des
valeurs d'indice psophique
9(
*
)
. La zone A correspond à une gêne
moyenne ressentie très forte, la zone B à une gêne moyenne
ressentie forte et la zone C à une zone moyenne ressentie
modérée.
Dans ces zones,
l'utilisation des sols est réglementée
en
vue d'y interdire ou d'y limiter la construction de logements, dans
l'intérêt même des populations, ainsi que d'y prescrire des
types d'activités peu sensibles au bruit, compatibles avec le voisinage
d'un aérodrome.
Pour chaque type d'opération, différentes prescriptions
d'urbanisme sont applicables, comme le détaille le tableau suivant :
PRESCRIPTIONS D'URBANISMES APPLICABLES
DANS LES ZONES DE
BRUIT DES AÉRODROMES
CONSTRUCTIONS NOUVELLES |
ZONE A |
ZONE B |
ZONE C |
Logements nécessaires à l'activité de l'aérodrome, hôtels de voyageurs en transit |
autorisés |
autorisés |
autorisés |
Logements de fonction nécessaires aux activités industrielles ou commerciales |
autorisés dans les secteurs déjà urbanisés |
autorisés |
autorisés |
Immeubles d'habitation directement liés ou nécessaires à l'activité agricole |
autorisés dans les secteurs déjà urbanisés |
autorisés |
autorisés |
Equipements de superstructures nécessaires à l'activité aéronautique |
autorisés s'ils ne peuvent être localisés ailleurs |
autorisés |
|
Constructions à usage industriel, commercial et agricole |
autorisées si elles ne risquent pas d'entraîner l'implantation de population permanente |
||
Equipements publics |
autorisés s'ils sont indispensables aux populations existantes et s'ils ne peuvent être localisés ailleurs |
||
Maisons d'habitation individuelles non groupées |
INTERDITES |
autorisées si secteur d'accueil déjà urbanisé et desservi par équipements publics sous réserve d'un faible accroissement de la capacité d'accueil |
|
Immeubles collectifs, habitats groupés (lotissements ...) parcs résidentiels de loisirs |
INTERDITS |
||
|
|
|
|
OPERATIONS DE RENOVATION DES QUARTIERS OU DE REHABILITATION DE L'HABITAT EXISTANT |
autorisées sous réserve de ne pas accroître la capacité d'accueil |
autorisées sous réserve de ne pas accroître la capacité d'accueil et si secteur d'accueil déjà urbanisé et desservi par équipements publics sous réserve d'un faible accroissement de la capacité d'accueil |
|
|
|
|
|
AMELIORATION ET EXTENSION MESUREE OU RECONTRRUCTION DES CONSTRUCTIONS EXISTANTES |
autorisées s'il n'y a pas d'accroissement assimilable à la construction d'un nouveau logement |
autorisées s'il n'y a pas d'accroissement assimilable à la construction d'un nouveau logement et si secteur d'accueil déjà urbanisé et desservi par équipements publics sous réserve d'un faible accroissement de la capacité d'accueil |
En droit
de l'urbanisme, l'existence d'un PEB a donc des effets sur les documents
d'urbanisme et sur les autorisations d'utilisation du sol : les
schémas directeurs, les schémas de secteurs ainsi que les plans
d'aménagement de zones doivent être compatibles avec ses
prescriptions. Mais c'est par l'intermédiaire des
plans d'occupation
des sols (POS)
que sont transcrites les prescriptions réglementaires
relatives à l'urbanisation dans les zones du PEB.
Dans la pratique, les POS doivent :
- présenter le problème des nuisances sonores et leurs
conséquences sur les parties d'aménagement communal (rapport de
présentation) ;
- proposer un zonage et un règlement compatibles avec le PEB,
l'échelle du PEB (échelle 1/25.000
e
) laissant
toutefois une marge d'appréciation quant à la transcription de
ses limites sur les plans de zonages des POS
(échelle 1/2000
e
) ;
- présenter en annexe le PEB (art. L.147-3 et R.123-24 du code de
l'urbanisme).
Pour l'instruction des demandes d'utilisation du sol, et en particulier des
permis de construire, deux démarches peuvent s'appliquer :
- lorsqu'il existe un POS rendu public ou approuvé et un PEB
approuvé, l'instruction se déroule sur la base des dispositions
du POS, sous réserve de sa compatibilité avec les prescriptions
de l'article L.147-5 du code de l'urbanisme ;
- lorsqu'il n'existe pas de POS opposable mais uniquement un PEB
approuvé, les dispositions de l'article L.147-5 du code de
l'urbanisme sont directement opposables.
Votre rapporteur déplore vivement qu'il n'existe pas en droit de
l'urbanisme de procédure de " sauvegarde " permettant une
maîtrise foncière dans les zones susceptibles d'être
touchées par l'approbation d'un nouveau PEB en cours de révision
et que, dans ce cas, les demandes d'utilisation du sol soient instruites
uniquement sur la base des dispositions d'urbanisme déjà
applicables aux territoires concernés.
La très grande partie
des aéroports français sont
concernés par la réglementation relative aux plans d'exposition
au bruit. A ce jour,
environ 180 PEB sont en vigueur.
Le projet de loi propose que pour les 9 principaux aéroports
français, l'autorité indépendante soit consultée
sur les projets de PEB. Cette modification est la seule du projet de loi en
matière de maîtrise de l'urbanisme au voisinage des
aérodromes.
b) La loi du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit.
La taxe " bruit "
Si elle avait un objectif de lutte contre le bruit en général, la
loi dite " loi bruit " du 31 décembre 1992 comportait un volet
spécifiquement consacré aux transports aériens. Elle a
instauré
une taxe d'atténuation des nuisances sonores
(ou
taxe " bruit ") payée par les compagnies aériennes sur
les neuf plus grands aéroports français
10(
*
)
, désormais intégrée par la loi
de finances pour 1999, à la taxe générale sur les
activités polluantes, dont le produit est destiné, comme cela est
précisé pour le commentaire de l'article 2, à
financer
l'aide à l'insonorisation des logements des riverains des
aéroports
.
Rappelons, en outre, que les redevances aéroportuaires elles-mêmes
sont, en France, parfois modulées en fonction du bruit émis.
Le calcul de cette taxe " bruit ", perçue désormais
pour
tout décollage au départ des neuf principaux
aéroports français
(Paris-Orly, Paris-Charles de Gaulle,
Nice, Marseille, Toulouse, Lyon, Bordeaux, Strasbourg et Bâle-Mulhouse)
prend en compte la masse maximale au décollage, la qualité
acoustique de l'appareil, l'heure de décollage - son taux est
doublé pour tout décollage effectué entre 23h30 et 06h00 -
et la densité urbaine autour de l'aéroport.
Les plans de gêne sonore
La loi " bruit " a également défini des prescriptions
relatives à l'établissement des plans de gêne sonore (PGS),
documents cartographiques qui délimitent trois zones (I, II ou III),
autour des aéroports et qui permettent de définir l'ordre de
priorité des riverains pouvant bénéficier
d'une aide
à l'insonorisation de leur logement
ainsi que le plafond des aides
accordées.
A noter que, conformément à l'avis rendu par le Conseil national
du bruit le 8 janvier 1998,
une réforme du mode
d'établissement des PGS est actuellement en cours
. Cette
réforme devrait s'appuyer sur une nouvelle unité de mesure du
bruit permettant une plus juste appréciation de la gêne ressentie
par les riverains. La correspondance de ce nouvel indice avec le bruit
réellement émis par les avions sera établie par une
enquête de gêne sonore auprès d'un échantillon
représentatif des personnes concernées au voisinage des
aéroports et en particulier de celui de Roissy. Cette enquête est
couplée à une campagne de mesures
in situ
des niveaux de
bruit pour cet aéroport, actuellement en cours de réalisation.
Les premiers résultats devraient être disponibles au cours du
premier semestre 1999.
En plus de ces dispositions générales, des mesures
réglementaires spécifiques s'appliquent à certains
plates-formes aéroportuaires. Votre rapporteur évoquera celles
relatives aux deux plus grands aérodromes franciliens.
c) Les mesures spécifiques à l'aéroport de Paris-Orly
En 1994,
le ministre chargé de l'aviation
civile
avait pris des mesures, toujours en vigueur, pour limiter les nuisances sonores
sur l'aéroport d'Orly :
- limitation du nombre total de mouvements :
Le niveau de trafic maximal est exprimé aujourd'hui en termes de
créneaux horaires. Il est fixé à 250 000 créneaux
par an.
-
instauration d'un couvre feu
:
Tout mouvement d'aéronef entre 23h30 et 6h00 du matin est interdit sur
l'aéroport d'Orly. Ce couvre feu est respecté, seulement deux
mouvements toutes les trois semaines sont, en moyenne, acceptées
à titre dérogatoire.
-
définition de trajectoires de moindre bruit
:
Des trajectoires " de moindre bruit " sont publiées dans la
documentation aéronautique pour limiter les nuisances autour d'Orly lors
des procédures de décollage, en évitant les zones les plus
habitées.
Une table ronde
sur l'avenir de cet aéroport,
organisée par le ministre chargé de l'aviation civile le 14
décembre dernier, a été l'occasion d'annoncer 19 mesures
nouvelles pour le développement et la maîtrise des nuisances
sonores sur l'aéroport d'Orly.
Pour ce dernier aspect, les dispositions actuellement en cours
d'élaboration, outre la révision annoncée du PEB et du
PGS, sont les suivantes :
Plafonnement des mouvements des avions de
" chapitre 2 " :
Un plafonnement du nombre de mouvements des avions du
" chapitre 2 " sera mis en place, sur la base du nombre de
mouvements de tels appareils effectués en 1997 sur la plate-forme. Pour
les nouvelles compagnies désirant s'implanter à Orly, un quota de
vols leur sera alloué, sur la base de la moyenne constatée en
1998, soit 7,9 %. Cette mesure prendra la forme d'un arrêté
ministériel et, en cas de constat de non-respect de ces dispositions, la
procédure de sanctions instituée par le décret du 27 mai
1997, et déjà appliquée à Roissy (voir ci-dessus et
sous le commentaire de l'article L.227-3 du code de l'aviation civile), sera
mise en oeuvre (amendes pouvant atteindre 50.000 F pour une personne morale).
Sanction du non respect des procédures de moindre bruit
:
Concernant les départs, des procédures de moindre bruit au
décollage
11(
*
)
permettent de
réduire les nuisances sonores sur les zones les plus habitées. Le
respect de ces procédures fait l'objet de contrôles. Chacune des
déviations observées fait l'objet d'une enquête de la part
des services en charge de la circulation aérienne et d'un courrier de
rappel des procédures d'exploitation à la compagnie
aérienne concernée.
Ces dispositions ne sont aujourd'hui publiées uniquement dans la
documentation aéronautique. Le ministre s'est engagée à ce
qu'elles soient formalisées dans un arrêté
ministériel. Ainsi leur non respect pourra être sanctionné
en application du décret précité du 27 mai 1997.
Etablissement d'un " code de bonne conduite "
:
Comme cela a été fait à Roissy (voir ci-dessous), un
" code de bonne conduite " devrait être établi
entre tous les professionnels du transport aérien oeuvrant à
Orly.
Les engagements des différents acteurs pourront notamment porter
sur :
- l'introduction dans la formation des pilotes et des contrôleurs
d'une sensibilisation à la nécessité de réduire les
nuisances sonores ;
- l'étude et la promotion de méthodes de pilotage à
moindre bruit ;
- l'étude de nouvelles procédures.
Elaboration d'une " charte de qualité de l'environnement
sonore "
A l'image de la charte élaborée à Roissy (voir
ci-dessous), une " charte de qualité de l'environnement
sonore " pourra être élaborée entre les
différents partenaires pour fixer les objectifs pour maîtriser la
pollution sonore et les engagements de l'Etat, d'Aéroports de Paris et
des compagnies aériennes.
d) La situation à Paris-Charles de Gaulle
Conformément aux propositions de la mission sur la
desserte
aéroportuaire du grand bassin parisien, présidée par M.
Jacques Douffiagues -à laquelle votre rapporteur a eu l'honneur
d'appartenir-,
l'ouverture de deux nouvelles pistes, plus courtes
,
à Roissy (solution du " moindre rempart sonore "), et à
la suite du rapport de M. le préfet Carrère et des conclusions
que la commission d'enquête préalable à la
déclaration d'utilité publique, présidée par M.
Maurice Roy, a rendues le 14 octobre 1996, l'article 3 du décret du
27 mars 1997 a déclaré d'utilité publique les travaux
nécessaires à l'aménagement des infrastructures
aéronautiques de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle.
Le ministre chargé de l'aviation civile a, lorsqu'il a
confirmé
, le 23 septembre 1997,
la décision de
construction des deux nouvelles pistes, annoncé des mesures
d'accompagnement
dont certaines résultaient directement de la
concertation menée depuis plus de deux ans avec les riverains, en vue de
limiter les nuisances sonores sur cet aéroport :
Limitation des vols de nuit
Deux arrêtés ont été pris par le ministre
chargé de l'Equipement, des Transports et du Logement, pour
réduire les émissions de bruit la nuit à Roissy-Charles de
Gaulle (et au Bourget).
A Roissy
:
L'interdiction de vol de nuit des avions de chapitre 2,
les plus
bruyants, a été confirmée. Les avions de chapitre 3,
les moins bruyants, autorisés à voler la nuit, doivent respecter
des
procédures particulières de décollage et de
montée initiale
entre 23h 15 et 6h. Pour les avions munis
d'atténuateurs de bruit (hushkités), les plus bruyants au sein du
chapitre 3, les procédures sont en cours de modification dans un
sens plus contraignant.
Les essais moteurs
sont interdits de 22 heures
à 6 heures, sans dérogation possible de 23 heures à 5
heures.
Au Bourget
:
Les avions à hélices, d'un poids supérieur à 9
tonnes et non classés " chapitre 3 ", sont interdits de
23 heures à 6 heures 15. Les avions à réaction sont tous
interdits de décollage la nuit.
Limitation des émissions sonores des avions de
" chapitre 2 "
Un nouvel arrêté du 29 juin 1998 a imposé aux compagnies
aériennes desservant Paris-Charles de Gaulle
une diminution
progressive de l'énergie sonore des avions du chapitre 2
. En
1998, chaque compagnie devra réduire globalement de 15 % les
émissions sonores de ses avions par rapport à 1997, puis de
20 % chaque année jusqu'en 2001.
Nouvelles sanctions
Conformément au décret précité du 27 mars 1997, une
Commission nationale de prévention des nuisances s'est mise en place en
mars 1998 pour examiner les dossiers établis à la suite des
infractions constatées aux règles limitant les nuisances sonores,
et proposer des sanctions pouvant aller jusqu'à 50.000 F pour une
compagnie.
De mars à octobre 1998, 72 sanctions ont été prises
pour un montant cumulé de plus de 1,9 million de francs.
En outre, un nouveau plan de gêne sonore a été
établi, les critères d'attribution des aides aux riverains ont
été assouplis et le plan d'exposition au bruit est en cours de
révision.
Notre pays est engagé, on le voit, sur la voie de la maîtrise
des nuisances sonores aéroportuaires, même si ce n'est, au sens
des riverains, que trop timidement - comment ne pas les comprendre- ?
C'est, votre rapporteur en est persuadé, la seule solution pour
envisager sereinement l'accroissement du trafic aérien.
Pour mieux atteindre cet objectif, le présent projet de loi propose de
mettre en place un " arbitre " impartial entre les parties
concernées, sous la forme juridique d'une autorité administrative
indépendante.
II. L'AUTORITÉ INDÉPENDANTE : UN SOUHAIT PARTAGÉ POUR AMÉLIORER LE DIALOGUE ET LA TRANSPARENCE
A. UN SOUHAIT TRÈS LARGEMENT PARTAGÉ.
1. Le constat et les propositions de la mission Douffiagues
Dans son
rapport d'étape rendu public le 31 juillet 1995, la mission conduite par
M. Jacques Douffiagues sur la desserte aéroportuaire du grand bassin
parisien a fait le constat d'un "
dialogue bloqué
", de
longue date, entre les différentes parties concernées par
l'extension de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle.
La mission commençait son rapport d'étape en ces termes :
" L'opposition affichée de certaines collectivités et des
associations riveraines de l'aéroport Charles de Gaulle à
l'annonce de la décision ministérielle de réalisation
d'une troisième piste à l'aéroport Charles de Gaulle
n'était pas un accès de fièvre passagère.
Elle
était la conséquence de l'accumulation entre les riverains de
l'aéroport Charles de Gaulle et les autorités
aéronautiques, d'incompréhensions, de malentendus et parfois de
maladresses, le résultat d'une histoire dont il faut se souvenir des
enchaînements, pour en éviter la reproduction. "
La restauration de la confiance entre riverains et opérateurs
aériens est apparue à la mission Douffiagues comme une action
à entreprendre d'urgence
. Il s'agissait à ses yeux de
rétablir "
les conditions d'un dialogue franc et confiant,
à partir de questions clairement posées, de perspectives
fermement tracées, de responsabilités assumées ".
Le nécessaire développement de l'activité
aéroportuaire passait aussi, selon elle, par la conclusion concomitante
entre les partenaires concernés
d'un véritable "
pacte
refondateur
"
ou
" contrat d'objectifs "
,
accompagné des moyens d'assurer le respect de leurs engagements
respectifs. La mission Douffiagues a donc préconisé la
"
négociation d'un contrat de réduction et de
contrôle de l'évolution des nuisances, tant pour le bruit
instantané que, progressivement, pour la gêne globale "
dont le contrôle de réalisation des objectifs pourrait être
assuré
avec l'aide d'une "
autorité
indépendante
".
2. Le rapport de la mission de concertation du préfet Carrère sur l'aéroport Charles de Gaulle
Lors du
conseil des ministres du 11 octobre 1995, le Gouvernement a reconnu la justesse
de cette approche. Il a chargé le préfet Gilbert Carrère
d'
" organiser
la concertation publique "
relative au
projet de développement de l'aéroport, le premier des
thèmes en étant
" l'établissement d'un contrat de
maîtrise des nuisances sonores ".
Le rapport de cette mission de concertation, remis en mars 1996, a notamment
suggéré
qu'une institution soit chargée d'assurer le
suivi et le contrôle de la mise en oeuvre de ce contrat
. On peut
ainsi lire, à l'annexe 1 du rapport, consacrée aux
propositions :
"
Soucieuse de répondre à l'attente des riverains telle
qu'elle a été rapportée par la mission Douffiagues,
attente partagée par ADP
12(
*
)
, la mission
s'est efforcée de trouver un cadre juridique qui donne à
l'institution l'indépendance et les moyens de contrôle requis,
tout en préservant sa nécessaire dimension partenariale. C'est
ainsi que lui serait reconnue par ses membres, au premier rang desquels les
entreprises et professionnels usagers de l'aéroport, non seulement
le
droit à une information exhaustive
sur les nuisances
générées par le trafic aérien, mais plus encore
un véritable droit d'interpellation publique
en cas de
constatation de manquements aux prescriptions réglementaires ou
contractuelles liant ceux-ci, telles que " le code de
conduite " préconisé par la mission Douffiagues
. "
Le rapport Carrère préconisait toutefois la création de
l'autorité indépendante sous forme d'un groupement
d'intérêt public (GIP), voire d'un syndicat mixte, remarquant que,
si la structure juridique de l'autorité administrative
indépendante correspondait mieux à la fonction d'interpellation
qui lui serait confiée, la
"
lourdeur des
procédures
" et la difficulté d'y inscrire "
la
démarche partenariale nécessaire à la
réconciliation entre l'aéroport et son environnement
"
pas conduisait la mission à écarter cette solution.
Le rapport Carrère préservait en outre la possibilité
d'étendre la compétence de l'autorité à d'autres
aérodromes :
"
La création d'une telle structure sur Roissy Charles de Gaulle
apparaîtrait en cas de succès comme une opération pilote
exemplaire dont la transposition à d'autres sites tels qu'Orly est
d'ores et déjà suggérée. Il est vrai qu'aux termes
du présent projet, elle serait d'emblée dotée de pouvoirs
dont aucune structure de concertation sur quelque aéroport
étranger que ce soit n'est à ce jour dotée.
L'enjeu est
donc véritablement d'en faire le laboratoire d'un dialogue moderne,
rigoureux, entre le transport aérien et ceux qui en subissent les
nuisances. Le présent projet préserve donc la possibilité
d'un élargissement à d'autres
aérodromes. "
3. Les conclusions de la commission d'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique de l'extension de Paris-Charles de Gaulle
En
même temps qu'elle a émis, dans ses conclusions du 14 octobre
1996,
un avis favorable au projet d'extension de l'aéroport de
Paris-Charles de Gaulle
, la commission d'enquête
présidée par M. Maurice Roy a associé cet avis de
plusieurs conditions suspensives, parmi lesquelles figuraient, outre
l'élaboration d'une charte de maîtrise des nuisances sonores et
d'un code de bonne conduite :
" La mise en place de
l'institution indépendante
présidée par un conseiller d'Etat comprenant, à
côté d'un collège scientifique d'experts, des
représentants de l'Etat, d'Aéroports de Paris, des élus,
des associations, des partenaires économiques (chambres de commerces).
Son statut, à l'exception d'une association, sera défini par la
loi pour se rapprocher de celui d'un groupement d'intérêt public
ou de toute autre forme équivalente. "
4. L'institution indépendante créée par le décret du 28 mars 1997
S'inspirant de ces recommandations, le précédent
Gouvernement avait prévu la création, pour l'aéroport de
Paris-Charles de Gaulle,
d'une institution indépendante
, dont les
missions -très proches de celles que le présent projet de loi
confie à l'autorité administrative indépendante qu'il
propose de créer-, sont détaillées, ci-après, sous
le commentaire de l'article premier (article L 227-4 du code de l'aviation
civile).
Cette institution indépendante, bien que mise en place par décret
le 28 mars 1997, n'a jamais eu d'activité.
5. L'engagement pris par le ministre lors de l'annonce de l'extension de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle
Lors de
la conférence de presse sur l'avenir de Roissy, le 23 septembre
1997, au cours de laquelle a été annoncé le lancement des
travaux pour la construction des deux nouvelles pistes, le ministre s'est
exprimé ainsi :
" J'en arrive à la satisfaction d'une exigence unanime :
qu'une autorité réellement indépendante soit mise en
place. Les contrôleurs, si je puis dire, ne doivent pas être
liés aux contrôlés. (...)L'autorité
indépendante sera réellement indépendante de toutes le
parties en cause. Et ce n'est pas un décret qui la définira dans
ses missions et sa composition, mais la loi. "
6. Un accord de principe quasi unanime
Votre
rapporteur a pu le constater lors des entretiens qu'il a eus dans le cadre de
la préparation du présent rapport : aucune des parties
concernées (administration, gestionnaires d'aéroports,
compagnies, associations de riverains) n'a contesté le principe de la
création d'une autorité indépendante.
Tous ont souhaité l'intervention d'un " arbitre ", d'un
" tiers extérieur et objectif ", voire d'un " juge de
paix " qui permette d'améliorer l'information et le
dialogue.
B. L'AUTORITÉ ADMINISTRATIVE INDÉPENDANTE : UN MODÈLE JURIDIQUE DÉSORMAIS CONSACRÉ
1. Une catégorie qui rassemble des institutions diverses13( * )
a) Une apparition progressive
Alors
que l'organisation administrative française est fondée sur
un
principe hiérarchique
, conforté par l'article 20 de la
Constitution qui indique que le Gouvernement "
dispose de
l'administration
", sont peu à peu apparues, au sein de
l'administration publique, des institutions exerçant, en toute
indépendance, des fonctions administratives.
Dès la création, en 1967, de la Commission des opérations
de bourse (COB), puis de la Commission nationale du droit de réponse
(1975) et de la Commission des sondages (1977),
le modèle des
autorités administratives indépendantes
s'est peu à
peu dégagé, même s'il faut attendre la loi du 6 janvier
1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés pour
voir figurer dans la loi - au sujet de la Commission nationale informatique et
libertés (CNIL) le terme "
d'autorité administrative
indépendante
".
Le
Conseil Constitutionnel
n'a pas censuré le mouvement de
création de ces autorités administratives indépendantes.
Bien au contraire il lui est arrivé de suppléer au silence de la
loi, en requalifiant d'autorité administrative indépendante la
Haute Autorité de la communication audiovisuelle (décision du 26
juillet 1984), et en faisant de même pour le Conseil supérieur de
l'audiovisuel qui a succédé à la Haute Autorité
(décision du 17 janvier 1989). Plusieurs décisions du Conseil
constitutionnel ont admis que soient transférés aux
autorités administratives indépendantes des
pouvoirs de
réglementation et de sanction administratives.
Dans son rapport annuel, le
Conseil d'Etat
a, dès 1983,
estimé "
commode et légitime
", par la voix de
sa Commission du rapport et des études, de regrouper sous le vocable
d'"
autorités administratives indépendantes
"
des organismes publics situés au sein de l'exécutif, dotés
d'un pouvoir autonome de décision ou d'influence dans un secteur
déterminé.
Au contentieux, le Conseil d'Etat, compétent pour connaître, en
tant que juge administratif, des recours pour excès de pouvoir
dirigés contre les actes des " autorités
administratives " s'est aussi attaché à qualifier ces actes
d'actes administratifs. Ainsi en a-t-il été, par exemple, des
décisions du Médiateur de la République (arrêt
Retail du 10 juillet 1981).
Quant à la doctrine
, elle a depuis longtemps admis l'existence
d'une nouvelle notion de droit administratif, l'analysant dans les manuels,
dans de nombreux articles de revues et au cours de divers colloques.
b) Une réalité multiforme
La liste
de ces autorités est difficile à établir, en raison de
leur extrême diversité. Au-delà de certaines
autorités bien connues comme la COB ou le CSA existent, en effet,
d'autres commissions qui peuvent être rattachées à cette
catégorie.
Le tableau suivant tente d'en dresser une liste -sans doute non exhaustive.
LES AUTORITES ADMINISTRATIVES INDEPENDANTES
La
régulation des activités financières
- la Commission des Opérations de Bourse
- le Conseil de discipline des organismes de placement collectif en
valeurs mobilières
- la Commission bancaire
- le Conseil des marchés financiers
- la Commission de contrôle des assurances
- le Conseil de la Concurrence
- la Commission des clauses abusives
- la Commission de la sécurité des consommateurs
- le Médiateur du cinéma
La régulation de l'information et de la communication
- le Conseil supérieur de l'audiovisuel
- le Conseil supérieur de l'agence France-Presse
- La Commission paritaire des publications et des agences de presse
- la Commission des sondages
- la Commission nationale des comptes de campagne et des financements
politiques
La protection contre les excès de la bureaucratie
- la Commission nationale de l'Informatique et des Libertés
- la Commission d'accès aux documents administratifs
- la Commission nationale de contrôle des interceptions de
sécurité
- le Médiateur de la République
- la commission des infractions fiscales
L'évaluation de l'action administrative
- le Comité national d'évaluation des établissements
publics à caractère scientifique, culturel et professionnel
La régulation des services publics de réseau
- l'Autorité de régulation des
télécommunications
- la future Commission de régulation de l'électricité
(projet de loi).
Comme le fait remarquer un article de doctrine consacré à cette
question
14(
*
)
, "
on ne saurait nier les
différences évidentes qui apparaissent entre les
autorités. Aussi doit-on convenir
qu'il existe parmi ces
autorités un " noyau dur " composé d'autorités
disposant d'un pouvoir de décision qui en fait d'incontestables
autorités
(CNIL, CNCL
15(
*
)
, COB,
Conseil de la concurrence...) et
une nébuleuse
composée
d'autorités qui ne disposent pas d'un pouvoir de décision au sens
juridique classique mais qui exercent une influence déterminante en
fixant des directives de comportement... "
C'est de façon empirique, en comparant les textes relatifs à ces
diverses institutions, qu'a pu être mise à jour une
définition de l'autorité administrative
indépendante.
2. Quelques éléments de définition du régime juridique de ces autorités
a) Autorité...
Les
autorités administratives indépendantes sont investies d'une
autorité réellement coercitive ou simplement morale, qui se
manifeste par un pouvoir soit de décision, soit de recommandation, de
proposition ou même simplement d'avis
. C'est davantage leur influence,
leur capacité de persuasion, la légitimité qui leur est
reconnue
pour assurer la régulation d'un secteur ou l'application
d'une loi qui importe, plus que l'étendue de leur pouvoir normatif. Ces
autorités ont souvent été créées, comme le
fait remarquer l'ouvrage précité de M. Michel Gentot, pour
"
renouveler les modes classiques d'expression du pouvoir
d'Etat
". Cet ouvrage estime que :
" C'est donc une définition large de
" l'autorité " qu'il convient de retenir, intégrant des
organismes qui ont des responsabilités dans un processus administratif
de décision ou de contrôle, en exerçant un " pouvoir
d'influence " ou une " magistrature morale ", autant que
ceux auxquels le législateur a confié le pouvoir de prendre des
décisions réglementaires ou individuelles. "
Deux caractéristiques renforcent généralement ce
critère d'autorité :
- la respectabilité, la compétence voire l'éminence
des membres, parfois dénommés les " sages " ;
- la collégialité des délibérations et des
décisions
16(
*
)
.
b) ...administrative...
Les
autorités administratives indépendantes sont constituées
au sein de l'administration
.
Ce caractère administratif est révélé par le fait
qu'elles n'ont pas de personnalité morale distincte de l'Etat. Elles
disposent en outre de
prérogatives de puissance publique
:
il s'agit parfois de pouvoirs réglementaires, voire d'un pouvoir de
sanction administrative. Des recours peuvent être formés devant le
juge administratif contre les actes administratifs pris par elle (voire devant
le juge judiciaire).
La gamme des pouvoirs qui peuvent être confiés à ces
autorités administratives est large :
-
pouvoir d'avis
: ce pouvoir, qualifié de
" minimum vital " par certains auteurs, concrétise le pouvoir
d'influence de ces autorités. Il s'agit souvent d'une consultation,
parfois d'un avis conforme (commission des infractions fiscales ; CNIL),
plus contraignant.
-
pouvoir de recommandation
: proche de l'avis, la
recommandation émane spontanément de l'autorité. Elle est
dépourvue de force exécutive ;
-
pouvoirs d'investigation
: il peut s'agir d'une obligation
d'information, d'un droit à recueillir des renseignements (CNIL, CADA,
COB) ; d'un droit à convoquer des agents publics (Médiateur,
CNIL, Conseil de la concurrence) ; ou d'un pouvoir de saisie de documents
(Conseil de la concurrence).
-
pouvoir réglementaire
: le pouvoir de prendre des
règlements, c'est-à-dire des normes générales et
impersonnelles créant des obligations et ouvrant des droits, a
été conféré par la loi à certaines
autorités. Le Conseil Constitutionnel a admis cette
possibilité
17(
*
)
;
-
pouvoir de prendre des mesures individuelles :
certaines
autorités (CSA, ART...) ont un pouvoir d'autorisation individuelle,
voire de nomination (CSA), ainsi que de mise en cause (avertissement de la
CNIL, mise en demeure de l'ART, injonction du CSA, de la COB, de la Commission
bancaire...).
-
pouvoir de saisir un juge :
la COB ou le Conseil de la
concurrence par exemple sont titulaires de ce type de pouvoir ;
-
pouvoir de sanction :
c'est le cas du CSA, de la COB, du
Conseil de la concurrence ou de l'ART. L'octroi de pouvoirs de sanction
à une autorité administrative indépendante a
été reconnu par le Conseil Constitutionnel (pour le CSA et la COB
en 1989, pour l'ART en 1996).
-
pouvoir de médiation, voire d'arbitrage :
l'ART
dispose, en matière d'interconnexion
18(
*
)
, de pouvoirs importants d'arbitrage entre les
opérateurs, dans le cadre de la conclusion des conventions
d'interconnexion. Ces pouvoirs ont été utilisés à
plusieurs reprises, dans le cadre du litige sur la fourniture du
téléphone et d'Internet sur les réseaux du " Plan
Câble ".
c) ...indépendante.
Bien que
ce point ait pu être, par le passé, sujet à
controverse
19(
*
)
, en raison de la nomination de
certains membres par des politiques, l'indépendance est une des
caractéristiques essentielles de ces autorités.
Elle est assurée par le statut des membres :
- irrévocabilité ;
- impossibilité d'effectuer un second mandat ;
- régime d'incompatibilités strictes qui permettent de
garantir leur impartialité.
Cette indépendance s'entend tant vis-à-vis du Gouvernement que de
différents groupements d'intérêts, et même de
l'opinion. Elle est renforcée par le fait que ces autorités
disposent de services propres et d'une autonomie de gestion.
III. LE PROJET DE LOI ET LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
A. LE PROJET DE LOI
Adopté en conseil des ministres le 7 octobre dernier, le
présent projet de loi s'inscrit, comme cela a été dit,
dans le prolongement de la concertation menée à l'occasion du
projet d'extension de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle qui a
montré le souhait que le développement des infrastructures,
nécessaire à la croissance du transport aérien, soit mis
en oeuvre dans le cadre d'une
politique de transparence et de concertation
avec les riverains
, notamment pour la lutte contre les nuisances sonores.
L'article premier du projet de loi
propose de mettre en place une
haute autorité en matière de nuisances sonores
aéroportuaires
, dont l'indépendance et l'impartialité
seraient incontestables. Cette
" Autorité de contrôle
technique de l'environnement sonore aéroportuaire
" serait
composée de membres désignés par le président de
l'Assemblée nationale et par le président du Sénat, et
d'experts en matière de bruit ou d'aéronautique.
L'indépendance des membres de cette institution serait garantie par une
durée de mandat de six ans et par la mise à disposition d'un
budget. Elle serait renforcée par des clauses de non renouvellement,
d'absence de possibilité de révocation et
d'incompatibilité du mandat avec certaines fonctions.
Cette autorité serait dotée d'un pouvoir d'élaboration de
prescriptions techniques et d'un devoir d'information des riverains pour les
principaux sites aéroportuaires, c'est-à-dire Paris-Charles de
Gaulle, Paris-Orly , Nice, Marseille, Toulouse, Lyon-Satolas, Mulhouse,
Bordeaux et Strasbourg.
Il lui appartiendrait de définir des prescriptions et d'homologuer les
réseaux de mesure du bruit. Le devoir d'information serait mis en oeuvre
par la diffusion très large des mesures de bruit enregistrées, la
mise en oeuvre d'un plan de communication et la publication d'un rapport
annuel. L'autorité aurait également une mission de conseil et
d'avis, notamment lors de l'établissement des plans de gêne sonore
et des plans d'exposition au bruit
(article 4).
L'article 2 du projet de loi
renforce le rôle des
commissions
consultatives de l'environnement
en les dotant d'une instance permanente de
travail, le comité permanent, et de moyens de fonctionnement.
Pour les principaux sites aéroportuaires, le texte propose de rendre de
droit la création de cette commission et de lui confier un pouvoir de
saisine de l'autorité indépendante pour contrôler le
respect des engagements pris par les différentes parties
intéressées à l'exploitation de l'aérodrome en vue
d'assurer la maîtrise des nuisances sonores. En outre, le texte propose
que les commissions consultatives d'aide aux riverains soient
constituées en son sein.
L'article 3 du projet de loi
restreint le trafic
d'hélicoptères dans les zones à forte densité de
population.
B. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
1. Un accord de principe
Votre commission estime que la création de cette nouvelle autorité indépendante, attendue par l'ensemble des parties concernées depuis que la mission Douffiagues l'avait proposée en 1996, est nécessaire à la pérennité et à la qualité de la concertation autour des aéroports, en vue de mieux maîtriser les nuisances sonores.
2. Une volonté d'instituer une autorité morale plus qu'un organisme coercitif
Votre
commission est consciente du fait que les pouvoirs qui seront
conférés à la nouvelle autorité sont moins
étendus que ceux de certaines de ses " consoeurs " qui
disposent de pouvoirs d'autorisation individuelle pour l'attribution de
licences, d'arbitrage ou de sanction administrative.
Mais cette
" modestie " semble sage à votre commission.
En effet, les missions de la nouvelle autorité (information,
conciliation, garantie de la fiabilité des mesures du bruit)
répondent aux attentes des différents acteurs de voir mis en
place un tiers objectif, à l'autorité morale incontestable
.
Aller plus loin, au nom d'un modèle juridique -d'ailleurs contestable,
vu la diversité des autorités administratives
indépendantes décrites au chapitre II de cet exposé
général- serait inadapté.
Ainsi, votre commission n'a-t-elle pas souhaité accroître
dès aujourd'hui les pouvoirs de l'autorité par rapport à
ce que prévoit le présent texte de loi.
Pour autant, elle a entendu renforcer, dans le cadre des pouvoirs de
médiation qui lui sont dévolus, les compétences de cet
organisme en adoptant des amendements accroissant ses missions :
- d'information des riverains ;
- de recommandation aux pouvoirs publics ;
- de conciliation entre les parties en cas de désaccord sur
l'application d'engagements définis dans les chartes de maîtrise
de l'environnement sonore.
Afin d'insister sur le renforcement de ce rôle de médiation et
de conciliation, votre commission vous propose de supprimer les termes, trop
restrictifs, de " contrôle technique " dans le nom de
l'autorité, pour faire de cette dernière " l'Autorité
de régulation de l'environnement sonore aéroportuaire "
(ARESA).
3. Un souci d'améliorer le fonctionnement de l'autorité et d'accroître ses garanties d'indépendance
Pour
renforcer les
garanties d'indépendance
de l'autorité,
votre commission a adopté des amendements inscrivant dans le texte de
loi des dispositions qui existent pour certaines autres autorités
indépendantes comme le CSA, l'ART ou la CNIL :
- incompatibilité avec la détention
d'intérêts dans une entreprise aéronautique ;
- limite d'âge (65 ans) pour être nommé ;
- dispositions précisant le montant du traitement des membres ;
- statut et obligation de confidentialité du personnel.
Dans un souci d'efficacité, votre commission a adopté des
amendements
pour mieux coordonner les actions respectives de
l'autorité et des commissions consultatives de l'environnement
, ce
qui est d'autant plus important que ces dernières voient leur rôle
et leurs moyens renforcés par l'article 2 du projet de
loi.
4. Un impératif : la prise en compte des problèmes de santé humaine
Votre commission a introduit, au collège de l'autorité, une personne qualifiée en matière de santé humaine , à côté des experts en matière acoustique et aéronautique.
5. Un souhait d'aboutir à une solution pragmatique et concertée pour le trafic d'hélicoptères
Votre commission a adopté un amendement remplaçant les interdictions absolues posées par l'article 3 du projet de loi par une solution plus souple permettant au ministre de limiter, au cas par cas et après consultation des parties intéressées, les nuisances causées par le trafic d'hélicoptères dans les zones fortement urbanisées.
6. Maîtriser l'urbanisme et mieux informer les riverains
Votre
commission a adopté trois articles additionnels tendant à :
- informer clairement les riverains potentiels, à peine de
nullité du contrat de vente ou de location, lorsqu'un bien immobilier
qu'ils s'apprêtent à louer ou à acheter, est situé
dans un plan d'exposition au bruit ;
- étendre cette obligation d'information au-delà du plan
d'exposition au bruit (jusqu'à la courbe isopsophique 69) ; :
- instaurer une procédure conservatoire en matière de droit
de l'urbanisme pour éviter que ne soient construites les zones
susceptibles d'être incluses, à court terme, à un plan
d'exposition au bruit.
Votre commission vous propose d'adopter le projet de loi ainsi
amendé.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1
er
-
Autorité de
contrôle technique
de l'environnement sonore aéroportuaire
Chapitre VII du titre II du livre II de la première partie
du
code de l'aviation civile : " Environnement des
aérodromes "
Cet
article insère dans le code de l'aviation civile un nouveau chapitre,
composé de huit articles, créant une nouvelle autorité
administrative indépendante compétente en matière de bruit
aux abords des aéroports.
Ce nouveau chapitre VII du titre II, relatif aux aérodromes ouverts
à la circulation aérienne publique, du livre II, consacré
aux aérodromes, de la première partie -législative- du
code de l'aviation civile, insère
huit articles nouveaux
,
relatifs à la création et au mode de nomination des membres de la
nouvelle autorité administrative indépendante, à leur
régime d'incompatibilité, aux dispositions de leur statut qui
garantissent leur indépendance, ainsi qu'aux pouvoirs de ses agents,
à ses attributions et aux modalités de publicité de ses
travaux.
Dans un souci de clarté et afin de refléter plus clairement le
contenu de ce nouveau chapitre, votre commission vous propose d'intituler ce
chapitre : " Autorité de régulation de l'environnement
sonore aéroportuaire ".
En effet, votre commission a modifié l'intitulé de
l'autorité (voir ci-après).
Article L.227-1 du code de l'aviation civile -
Création et composition de l'autorité
Cet
article instaure une nouvelle autorité indépendante et fixe le
mode de désignation et la durée du mandat de ses membres.
La rédaction de cet article s'inspire des dispositions en vigueur pour
les autres autorités administratives indépendantes, relatives
à l'existence et au mode de désignation de leurs membres, qu'il
s'agisse par exemple des lois relatives à la création du Conseil
supérieur de l'audiovisuel (CSA), de la Commission nationale
informatique et liberté (CNIL) ou de l'Autorité de
régulation des télécommunications (ART), même si
certaines spécificités apparaissent dans le texte proposé.
I.
CRÉATION D'UNE AUTORITÉ ADMINISTRATIVE INDÉPENDANTE
DE CONTRÔLE TECHNIQUE DE L'ENVIRONNEMENT SONORE AÉROPORTUAIRE
La question du principe de la création d'une autorité
administrative indépendante a déjà été
soulevée dans l'exposé général du présent
rapport. Votre rapporteur n'y reviendra pas.
On se bornera donc ici à indiquer que le texte proposé pour
l'article L.227-1 du code de l'aviation civile institue un organisme
doté d'un tel statut, qui est dénommé
" Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore
aéroportuaire ".
En cohérence avec ses propositions tendant à renforcer le
rôle de proposition et de médiation de cette autorité,
votre commission a adopté un amendement à cet article comme aux
autres articles, tendant à la nommer " Autorité de
régulaiton de l'environnement sonore aéroportuaire " (ARESA)
et non " Autorité de " contrôle technique " de
l'environnement sonore aéroportuaire " (ACTESA).
En conséquence de la création de cette autorité,
l'institution indépendante créée en 1997 par le
décret n°97-284 du 27 mars 1997 pour le seul
aéroport de Roissy -et qui n'a pas eu d'activité- serait
supprimée et le décret abrogé.
Contrairement à ce qui est de mise pour d'autres autorités
indépendantes, le texte du projet de loi ne définit pas la
mission générale de l'organe qu'il créé. Votre
commission vous propose d'insérer dans le texte une phrase pour
remédier à cette lacune.
II.
COMPOSITION DE L'AUTORITÉ
1.
Le nombre de membres
Le nombre de membres de l'autorité est fixé à sept par le
projet de loi
. Les exemples d'autorités indépendantes
existantes montrent que le législateur a opté, au fil des textes
de loi, pour une diversité de solutions : le nombre de membres de la
CNIL est de dix-sept, celui de la COB de dix, alors que le CSA a neuf membres,
l'ART cinq membres, tandis que le projet de loi relatif à la
modernisation et au développement du service public de
l'électricité propose de nommer six membres à la
Commission de régulation de l'électricité.
2.
Le mode de nomination des membres
Comme c'est souvent le cas pour ce type de structure administrative,
le mode
de nomination des membres est mixte
: le texte prévoit que, à
l'instar de dispositions de la Constitution relatives au Conseil
constitutionnel et de dispositions législatives similaires pour d'autres
autorités, certains membres seront nommés par le
pouvoir
exécutif
et d'autres par le
pouvoir législatif.
Cette
pluralité d'origine vise à accroître
la
légitimité, la représentativité, le pluralisme et
l'indépendance des membres.
Pourtant, cette logique n'est pas mise en oeuvre clairement par le projet de
loi :
D'abord, les membres "
désignés
"
par le Président de l'Assemblée nationale et du Sénat sont
pourtant "
nommés par décret du Premier
Ministre
". Cette disposition consacre une certaine confusion
des genres : le décret ne pouvant contrevenir au choix des
Présidents des assemblées, il est alors contraint.
On rappellera cependant que de telles dispositions existent déjà
dans le droit : la loi de 1978 relative à l'informatique aux
fichiers et aux libertés a consacré une solution voisine pour la
CNIL, de même que la loi de 1986 relative à la liberté de
la communication pour le CSA.
Ensuite, le projet de loi prévoit l'intervention de
deux types
de décrets
pour la nomination des membres de l'autorité :
- un décret en Conseil des ministres pour la nomination du
Président,
- un
" décret du Premier Ministre "
pour la
nomination des six autres membres, dont deux seraient au préalable
" désignés "
, comme cela vient d'être dit,
par les présidents des assemblées parlementaires.
Cette solution pourrait résulter de la volonté de conférer
au président de l'autorité une légitimité et un
prestige supplémentaire du fait de sa nomination en Conseil des
ministres -qui requiert en outre, en pratique un accord du Président de
la République et du Premier Ministre sur sa personne-.
Même si un système voisin s'applique déjà à
la COB, autorité dont la collégialité est d'ailleurs moins
marquée que d'autres autorités indépendantes, le
Président et les autres membres de cette autorité n'étant
pas nommés pour la même durée, cette disposition
est en
contradiction avec le caractère collégial de ce type
d'institution, qui est une garantie d'indépendance et
d'impartialité
.
Aussi, votre commission vous propose d'adopter une rédaction qui, se
rapprochant de certains modèles déjà en vigueur (dont
celui de l'ART), consacre une répartition plus claire du pouvoir de
nomination entre pouvoirs législatif et exécutif et au sein
même de l'exécutif, et qui respecte mieux le principe de
collégialité :
- deux membres seraient nommés respectivement par le
Président de l'Assemblée nationale et le Président du
Sénat ;
- cinq membres, dont le président et les quatre experts, seraient
nommés par décret du Président de la République.
3.
La qualification des membres
Le texte de loi ne formule pas d'exigence générale
quant
à la qualité des membres susceptibles d'être nommés,
à l'inverse par exemple du décret précité du
27 mars 1997 pour l'institution indépendante, ainsi que, pour
l'Autorité de régulation des télécommunications, de
la loi du 26 juillet 1996 de réglementation des
télécommunications qui avait prévu, à la suite d'un
amendement de la Haute Assemblée
20(
*
)
,
que les membres soient compétents en matière, notamment,
d'économie des territoires.
On relèvera également que le projet de loi précité
sur le service public de l'électricité comprend une prescription
d'ordre général sur la compétence des membres de la
commission de régulation de l'électricité en
matière juridique, économique et technique.
Votre commission vous propose de rajouter une condition de compétence
générale pour les membres de l'autorité, afin
d'accroître leur légitimité et leur autorité,
notamment pour les membres " non experts " comme le président
et les deux membres nommés par les présidents des
assemblées parlementaires.
Le projet de loi prévoit
que des personnalités soient
nommées pour leur compétence respectivement en matière
"
d'acoustique et de gêne sonore
" et
"
d'aéronautique et de navigation
aérienne
".
Ces dispositions sont reprises du décret
du 27 mars 1997 qui imposait que, sur les dix experts de
l'institution indépendante, la moitié soit compétente en
acoustique et gêne sonore et l'autre en aéronautique et navigation
aérienne.
Votre commission vous propose d'introduire, au sein de l'autorité, un
expert en matière de santé humaine et de composer ainsi le
collège des experts :
- un expert en santé humaine ;
- un expert en acoustique et en gêne sonore ;
- un expert en transport aérien ;
-
un expert en navigation aérienne.
On notera que ne figure pas dans le texte, contrairement aux dispositions
relatives à l'ART et au CSA, par exemple, de limite d'âge pour la
nomination. Votre commission vous propose d'en instaurer une identique (65
ans).
4.
La durée et le rythme de renouvellement des mandats
Le projet de loi prévoit que les membres de l'autorité sont
nommés pour six ans.
Cette durée est identique à celle qui régit le statut des
membres du CSA, ou de l'ART, pour ne prendre que ces deux exemples. La
durée du mandat des membres de la CNIL est quant à elle de cinq
ans, celle des membres de la COB de quatre ans (six ans pour le
Président).
Rythme de renouvellement
Le souci légitime d'assurer
la continuité de l'action de
l'autorité
inspire le système proposé, relativement
classique, de
renouvellement triennal par moitié des membres.
Le projet de loi prévoit que :
- les membres de l'autorité "
autres que le
Président
" sont renouvelés par moitié tous les
trois ans ;
- le mandat est de six ans ;
- pour la première nomination, trois membres -dont ne fait pas
partie le Président- choisis par tirage au sort dans chaque
catégorie (experts aériens, experts en matière de bruit,
membres désignés par les Présidents des
assemblées), sont nommés pour 3 ans seulement.
Votre commission a adopté une rédaction modifiée de ces
dispositions, tendant à assurer :
- un renouvellement par moitié tous les trois ans ;
- un mandat de six ans, sauf, à la constitution initiale de
l'autorité, pour trois membres, dont deux " experts " et un
membre nommé par l'un ou l'autre président des assemblées,
désignés par tirage au sort et nommés pour trois ans
seulement, le président étant, quant à lui, nommé
pour six ans.
En prenant l'hypothèse que l'autorité soit constituée en
2000, le système de renouvellement serait le suivant : le
Président serait nommé en 2000 puis tous les six ans, et seraient
effectuées, à partir de 2003, 3 ou 4 nominations tous
les trois ans, suivant le schéma ci-après :
RYTHME PRÉVU DE DÉSIGNATION DES MEMBRES
|
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
Nombre de nominations |
7 |
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3 |
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4 |
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|
3 |
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4 |
siège n° 1 : Président |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
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siège n° 2 : (Sénat ou Assemblée) |
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siège n° 3 : (Sénat ou Assemblée) |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
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siège n° 4 : (expert) |
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siège n° 5 : (expert) |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
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siège n° 6 : (expert) |
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siège n° 7 (expert) |
- |
- |
- |
- |
- |
- |
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|
|
- :
première série de nominations pour 6 ans
: première série de nominations pour 3 ans, par tirage au
sort
deuxième série de nominations (pour 6 ans)
: troisième série de nominations (pour 6 ans)
: quatrième série de nominations (pour 6 ans)
: cinquième série de nominations (pour 6 ans)
5.
Les garanties d'indépendance des membres
Comme il est de coutume, deux dispositions, en plus du régime
d'incompatibilités qui figure à l'article L.227-2 (voir
ci-dessous), assurent l'indépendance des membres de l'autorité :
- l'irrévocabilité du mandat,
- son caractère non renouvelable,
Il s'agit de deux garanties essentielles.
L'interruption anticipée du mandat
donne lieu à une
nomination pour la durée du temps restant à courir. Si celle-ci
est inférieure ou égale à deux ans, et par
dérogation au principe de non-renouvelabilité, le
remplaçant
peut être renommé membre de
l'autorité
.
Ces dispositions figurent, plus ou moins clairement, dans d'autres textes
réglant le statut d'autorités administratives
indépendantes.
Notons que les motifs d'empêchement éventuel d'un membre de
l'autorité ne sont pas spécifiés dans le présent
projet. Il est simplement dit : "
si l'un des membres ne peut
exercer son mandat ...
".
Pour renforcer les garanties d'indépendance, votre commission vous
propose de préciser que, comme c'est le cas pour la CNIL
21(
*
)
, sauf démission, il ne peut être mis fin
aux fonctions de membre de l'autorité qu'en cas d'empêchement
constaté par elle dans des conditions qu'elle définit.
Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-1 du code de
l'aviation civile ainsi modifié.
Article L.227-2 du code de l'aviation civile -
Régime d'incompatibilité des membres de
l'autorité
Cet
article pose les incompatibilités corrélatives à la
fonction de membre de l'autorité, en vue d'assurer l'indépendance
de l'institution.
Cet article comporte un autre volet traditionnel du statut des membres d'une
autorité administrative indépendante, destiné à
assurer leur indépendance, celui des
incompatibilités
électives et professionnelles
.
Le texte dispose que la fonction de membre de l'autorité est
incompatible avec :
- un mandat électif ;
- une activité professionnelle publique ou privée ;
- une responsabilité associative conférant un
intérêt direct ou indirect à l'activité des
aéroports.
Votre commission vous propose d'y ajouter une incompatibilité avec la
détention directe ou indirecte d'intérêts dans une
entreprise du secteur de l'aéronautique.
Elle a, en outre, apporté à la rédaction une clarification
destinée à lever une éventuelle ambiguïté
quant à l'incompatibilité avec tout mandat électif et
toute activité professionnelle.
Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-2 du code de l'aviation
civile ainsi modifié.
Article L.227-3 du code de l'aviation civile -
Compétences générales de l'autorité
Cet
article confère des compétences générales à
l'autorité, en matière de recommandation et de saisine de
l'administration.
Dans le texte proposé par le projet de loi pour cet article du code, les
compétences générales de l'autorité sont de deux
ordres :
un pouvoir de recommandation
, à son initiative ou à
la demande des ministres chargés de l'environnement ou de l'aviation
civile, sur :
la maîtrise des nuisances sonores et la limitation de leur impact
sur l'environnement ;
La mesure du bruit.
Votre commission vous propose de préciser qu'il s'agit de la mesure
des nuisances sonores occasionnés non seulement par le transport
aérien, mais aussi par l'activité aéroportuaire, ce qui
étend la notion aux bruits ambiants et au bruit du trafic routier
notamment.
En outre, compte tenu d'une certaine remise en cause actuelle des indices de
bruit retenus et de la nécessité de définir de nouveaux
indices de mesure,
votre commission vous propose de préciser que ce
pouvoir de recommandation de l'autorité concernant la mesure du bruit
s'étend à la définition des indices de mesure
.
un pouvoir de saisine
de l'autorité administrative, en
cas de manquement aux règles de protection de l'environnement des
aérodromes.
Par souci de clarté rédactionnelle, votre commission vous propose
de préciser qu'il s'agit de l'environnement sonore des
aérodromes.
En effet, même si la question de la compétence de
l'autorité sur les autres éléments de l'environnement
aéroportuaire (qualité de l'air et de l'eau notamment) se pose,
le choix du projet de loi est de limiter, pour l'instant, ces
compétences à la gêne sonore.
Ce pouvoir de saisine de " l'autorité administrative
compétente " par la nouvelle activité indépendante
pose la question de la coordination de son action avec la commission existante
en matière de sanction des infractions aux limitations des nuisances
sonores.
Rappelons que, suivant le décret en Conseil d'Etat du
27 mai 1997, pris par le précédent Gouvernement et
appliqué par l'actuel Gouvernement, l'article R.226-1 du code de
l'aviation civile indique que le ministre peut infliger une sanction
administrative à un contrevenant, sur proposition de la commission
nationale de prévention des nuisances (CNPN).
La CNPN est ainsi composée :
COMMISSION DE PRÉVENTION DES NUISANCES SONORES
Article R.226-5 du code de l'aviation civile
(Décret n° 97-534 du 27 mai 1997, art. 1
er
)
Les
membres de la Commission nationale de prévention des nuisances, ainsi
que leurs suppléants, sont nommés par arrêté du
ministre chargé de l'aviation civile pour une période de
trois ans renouvelable.
La commission est présidée par un inspecteur
général de l'aviation civile et de la météorologie
et comprend en outre :
1° Quatre représentants de l'Etat, dont un proposé par le
ministre chargé de l'environnement et un proposé par le ministre
chargé de la défense ;
2° Quatre personnalités qualifiées dans le domaine de
l'aéronautique, dont au moins un exploitant et un gestionnaire
d'aérodrome ;
3° Quatre personnalités qualifiées dans le domaine de
l'environnement, proposées par le ministre chargé de
l'environnement, dont une au moins au titre des associations de riverains.
La procédure de sanction
définie aux
articles R.226-1 à 6 du code de l'aviation civile est la suivante :
- un arrêté ministériel est nécessaire pour
fixer
des restrictions d'usage sur une plate-forme
. A ce jour, sont
concernés les aérodromes de Charles-de-Gaulle, Le Bourget,
Toulouse, Toussus-le-Noble et Issy-les-Moulineaux. (Un arrêté est
en préparation pour Nice) ;
- lorsqu'une infraction aux arrêtés portant restriction
d'usage en vue de réduire le bruit autour des aérodromes est
constatée,
un procès-verbal
d'infraction
est
dressé par un agent assermenté et notifié au responsable
du vol, par lettre recommandée avec accusé de
réception ;
- les responsables du vol, propriétaires, exploitations techniques
ou exploitant commerciaux des aéronefs doivent alors
justifier leur
décision
par lettre recommandée avec accusé de
réception, adressée sous quarante-huit heures au ministre
chargé de l'aviation civile ; le responsable du vol dispose d'un mois
pour faire part de ses observations,
- à l'issue de ce délai,
un dossier est adressé au
ministre chargé de l'aviation civile
, comprenant :
la copie du procès-verbal d'infraction et sa notification,
la réponse éventuelle du responsable du vol,
tout élément complémentaire d'enquête ou
d'appréciation,
un rapport écrit ;
- quinze jours plus tard avant la réunion de la CNPN,
le
contrevenant est convoqué
et reçoit à cette occasion
communication des éléments de son dossier. On lui rappelle le
montant maximum de l'amende encourue, ainsi que la possibilité de se
faire représenter ou assister par la personne de son choix ;
- après l'avoir entendu,
la commission transmet, sous forme
d'avis, sa proposition au ministre.
Le montant maximal des amendes est de
10.000 francs pour une personne physique et de 50.000 francs pour une
compagnie.
Le projet de loi
ne modifie pas le fonctionnement de cette commission.
De nombreuses personnes concernées, entendues par votre rapporteur lors
de la préparation du présent rapport, ont souhaité, en
effet, que la
Commission nationale de prévention des nuisances
,
où siègent l'administration, les riverains, les compagnies et le
gestionnaire d'aéroport,
soit maintenue en l'état
.
Prenant acte de ce souhait, votre commission s'est toutefois
interrogée :
- quelle sera
l'articulation
des actions respectives de
l'autorité et de la Commission de prévention des nuisances
sonores ?
- de
quels moyens concrets
disposera l'autorité pour
constater, éventuellement, les infractions considérées et
être ainsi à même de saisir la CNPN ? En particulier, la
rédaction actuelle peut laisser supposer que l'autorité pourra
diligenter des agents pour constater les infractions et créer ainsi un
corps de contrôleurs qui ferait double emploi avec les agents
assermentés cités à l'article L.150-13 du code, qui
constatent aujourd'hui les infractions et dressent les procès-verbaux
pour les transmettre à la Commission de prévention des nuisances
sonores. Dans un souci de bonne coordination des actions de l'autorité
et de la CNPN, votre commission vous proposera, à l'article L.227-8, un
tendant à éviter une telle situation.
Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-3 du code de
l'aviation civile ainsi modifié.
Article L.227-4 du code de l'aviation civile -
Compétences pour le contrôle du bruit au voisinage
des neuf aérodromes les plus importants
Cet
article détaille les compétences de l'autorité pour la
mesure et la maîtrise du bruit au voisinage des 9 aérodromes
français ayant le trafic le plus important.
En plus des compétences à caractère général
définies ci-dessus, l'autorité dispose, pour les
aérodromes les plus significatifs, de pouvoirs élargis.
I.
CHAMP D'APPLICATION
Les aérodromes visés
Les compétences de l'autorité sont renforcées pour les
aérodromes ayant le trafic le plus élevé.
Le projet de loi fait ainsi référence aux aérodromes
visés à
l'article 16
de la loi n° 92-1444
du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit, qui
définit notamment l'assiette de la
" taxe bruit "
22(
*
)
, c'est-à-dire, depuis les modifications
apportées par l'article 103 de la loi de finances pour 1998 :
Paris-Charles de Gaulle, Paris-Orly, Nice, Marseille, Toulouse,
Lyon-Satolas, Mulhouse, Bordeaux et Strasbourg
.
Le graphique suivant illustre l'importance respective du trafic de passagers
(en 1997) sur ces aéroports.
Source : DGAC
Mais cette rédaction, juridiquement valable à la date du
dépôt du projet de loi, ne l'est plus.
En effet, l'article 45 de la loi de finances initiale pour 1999, relatif
à la taxe générale sur les activités polluantes, a
modifié profondément, dans son paragraphe IV. 2, la
rédaction de cet article 16, en y supprimant les critères de
définition des aérodromes soumis à la taxe bruit, qui se
trouvent désormais, en vertu du I de ce même article 45,
intégrés à l'article 266 septies 3 du code
des douanes.
Aussi, votre commission vous propose de viser, au lieu de l'article 16
de la loi précitée de 1992,
l'article 266 septies 3 du code des douanes.
Cette modification de référence ne change pas le champ
d'application, proposé par le présent article, fondé,
depuis l'article 103 de la loi de finances pour 1998, sur le
critère suivant :
" aérodromes recevant du trafic
public pour lesquels le nombre annuel des mouvements d'aéronefs de masse
maximale au décollage supérieure ou égale à
20 tonnes est supérieur à 20.000 "
, contre
40.000 auparavant
.
Les populations concernées
Pour estimer le nombre de nos concitoyens touchés par les nuisances
sonores aéroportuaires, une première approche
-nécessairement imparfaite- est donnée par le champ d'application
des dispositifs d'aide aux riverains des aérodromes, instaurée
par la loi bruit de 1992, en vue de l'insonorisation des logements.
Pour les 9 principaux aérodromes français précités
qui sont concernés par ce dispositif, les plans de gêne sonore
(PGS), établis afin de constater la gêne subie dans leur
voisinage, concernent
environ 160.000 personnes (dont
120.000 autour des aéroports de Paris-Orly et Paris-Charles de
Gaulle) ; plus largement, certaines associations
23(
*
)
estiment à 3.000.000 le nombre de personnes
concernées par le projet de loi.
La sensibilité croissante aux nuisances sonores et l'évolution de
la nature du bruit (exposition plus contraire à une fréquence
accrue) pourrait conduire à
élargir la notion de
gêne
. Rappelons, que sous l'égide du ministère de
l'équipement, des transports et du logement et du ministère de
l'aménagement du territoire et de l'environnement, une enquête de
gêne sonore couplée à une campagne de mesures de bruit in
situ est actuellement menée autour des aéroports parisiens. Cette
étude, dont les premiers résultats devraient être
disponibles au cours du premier semestre 1999, devrait permettre de mieux
appréhender la gêne due au bruit autour de certains
aéroports et, partant, du nombre de nos concitoyens concernés par
elle.
II.
COMPÉTENCES DE L'AUTORITÉ
A.
UN RÔLE D'AUTORITÉ MORALE ET DE MÉDIATION
Dans le projet qui vous est soumis, l'autorité se voit attribuer des
compétences
de prescription technique
pour la mesure du bruit, de
communication
auprès du public, de
médiation
auprès des acteurs concernés, en cas de désaccord entre
eux, et de
recommandation
aux pouvoirs publics.
Cette liste peut paraître modeste par rapport aux compétences de
certaines de ses aînées (autorisations individuelles, sanctions,
pouvoir réglementaire...), comme cela a été dit dans
l'exposé général du présent rapport.
Votre commission considère que ce choix est sage, car il
répond aux attentes des parties concernées.
Cette " modestie " est toutefois illustrée par la
différence des moyens humains et financiers de l'autorité et des
plus importantes de ses aînées :
Le conseil supérieur de l'audiovisuel
dispose de
230 agents
24(
*
)
(il s'agit des services,
à l'exclusion des 166 personnes non salariées des
comités techniques radiophoniques, qui travaillent pour lui) et d'un
budget de plus de 200 millions de francs
25(
*
)
;
L'autorité de régulation des
télécommunications
, créée en 1997, disposera en
1999 d'un budget de 87,5 millions de francs et de 142 emplois
budgétaires ;
La nouvelle autorité
aurait, d'après les
premières estimations communiquées à votre rapporteur,
outre les crédits nécessaires à la
rémunération des membres, un budget de fonctionnement d'environ
5 millions de francs par an, ainsi répartis :
- 2 millions de francs de frais de structure : loyer, salaires
et charges pour le personnel (un secrétaire général, un
adjoint technique, un adjoint administratif, un chargé d'études
et une secrétaire) ;
- 3 millions de francs de dépenses d'intervention
(contrôle, études, plan de communication).
B.
DES COMPÉTENCES PRINCIPALEMENT REPRISES DE CELLES DE
L'INSTITUTION INDÉPENDANTE PRÉVUE PAR LE DÉCRET DU
28 MARS 1997
Dans le projet de loi, les compétences de l'autorité, même
si elles sont plus larges, sont très largement inspirées de
celles de l'institution indépendante prévue par un décret
du 28 mars 1997, pour la plate-forme de Roissy-Charles de Gaulle.
Rappelons que cette institution n'a jamais réellement fonctionné,
malgré le parution du texte réglementaire relatif à sa
création.
Le tableau suivant résume les compétences que le projet de loi
propose de donner à l'autorité et les compare à celles
actuellement dévolues par les textes réglementaires à
l'institution indépendante :
COMPÉTENCES RESPECTIVES DE L'AUTORITÉ ET DE L'INSTITUTION INDÉPENDANTE
|
FUTURE AUTORITE (PROJET DE LOI) |
ACTUELLE INSTITUTION INDÉPENDANTE (DÉCRET DU 28 MARS 1997) |
Champ de compétence |
Paris-Charles de Gaulle, Paris-Orly, Nice, Marseille, Lyon, Toulouse, Mulhouse, Bordeaux, Strasbourg. Autres aérodromes pour ses compétences générales. |
Paris-Charles de Gaulle. |
Mission générale |
Pas de phrase de principe dans le projet de loi , si ce n'est qu'elle émet " des recommandations sur toute question relative à la mesure du bruit, à la maîtrise des nuisances sonores du transport aérien et à la limitation de leur impact sur l'environnement " |
Mission
générale
de
" contrôler
les dispositions prises pour mesurer les nuisances sonores dues au transport
aérien autour de l'aéroport Charles-de-Gaulle, de garantir
l'impartialité des informations diffusées sur ces nuisances
sonores, de veiller au respect des engagements pris dans ce domaine et de
favoriser la concertation ".
|
1°) Prescriptions techniques pour la mesure du bruit |
L'autorité
définit
les prescriptions techniques
applicables :
|
Elle
peut prêter son concours
aux personnes morales concernées par
la maîtrise des nuisances sonores autour de l'aéroport qui lui en
font la demande pour :
|
2°) Mise en oeuvre des prescriptions techniques |
Si les prescriptions techniques ne sont pas respectées, l'autorité peut mettre l'exploitant en demeure puis faire procéder aux frais de ce dernier aux travaux nécessaires . |
Pas de pouvoir en la matière . |
3°) et 4°) Communication après du public |
L'autorité établit un
programme de diffusion des
résultats
de la mesure du bruit et veille à sa mise en oeuvre,
|
Elle
recueille et rend publiques
périodiquement, après en avoir
analysé la
fiabilité, toutes informations
sur le bruit
dû au transport aérien autour de l'aéroport, en particulier
celles provenant du réseau de mesure de bruit autour de
l'aéroport. Ces informations sont de nature à permettre
l'évaluation et la comparaison séparées des
énergies sonores émises respectivement au cours des
périodes diurne et nocturne ;
|
5°) Plan de gêne sonore et plan d'exposition au bruit |
L'autorité est consultée sur les projets de plan de gêne sonore et de plan d'exposition au bruit. |
L'institution donne son avis sur les projets de plans d'exposition au bruit et de gêne sonore. |
6°) Association aux décisions réglementaires |
Est consultée sur les projets de textes réglementaires fixant les mesures visant à assurer la protection de l'environnement sonore et sur les projets d'élaboration ou de modification des procédures de départ, d'attente et d'approche aux instruments. |
Pas de pouvoir en la matière . |
7°) Contrôle du respect des engagements pris |
Contrôle à son initiative ou sur saisine d'une commission consultative de l'environnement le respect des engagements pris pour la maîtrise des nuisances sonores. |
Elle
vérifie la bonne application des engagements
pris par les
diverses parties intéressées à l'exploitation de
l'aéroport Charles-de-Gaulle en vue d'assurer la maîtrise des
nuisances sonores liées à cette exploitation, engagements qui
seront retracés dans un document dénommé " contrat de
maîtrise des nuisances sonores ".
Elle rend publiques toutes
informations utiles à cet effet ;
|
Association aux sanctions et aux plaintes |
Sur tous les aéroports, elle peut saisir l'autorité administrative des manquements à la réglementation en matière de nuisances sonores. |
Le ministre chargé de l'aviation civile et celui chargé de l'environnement ainsi que les préfets territorialement compétents peuvent lui soumettre toute plainte d'une personne physique ou morale qui conteste la suite réservée par les services de l'Etat ou ses établissements publics à une réclamation présentée au sujet de nuisances sonores autour de l'aéroport. |
Les
compétences de l'autorité peuvent être
résumées ainsi :
Pouvoir de prescription technique et de mise en oeuvre pour la mesure
du bruit
La compétence première de l'autorité, pour laquelle elle
disposera des pouvoirs les plus étendus, est celle de la
définition et du contrôle des réseaux de mesure du bruit.
Elle disposera en effet en la matière des compétences suivantes :
-
Définition des normes techniques
-même si
l'homologation par arrêté est nécessaire- des appareils,
des configurations et des conditions d'exploitation des réseaux de
mesure du bruit ;
-
Contrôle
de leur bonne mise en oeuvre ;
-
Pouvoir de faire exécuter
, au frais du gestionnaire
d'aéroport, les travaux nécessaires, après mise en demeure.
Droit à être consultée
Le texte prévoit que l'autorité est consultée sur les
textes réglementaires
relatifs à l'environnement sonore
aéroportuaire et les procédures de départ, d'attente et
d'approche aux instruments, ainsi que sur les projets de plans de gêne
sonore et d'exposition au bruit. Rappelons que les commissions consultatives de
l'environnement et les commissions consultatives d'aide aux riverains sont
également consultées sur ces derniers documents.
La demande d'avis est une compétence traditionnelle dévolue par
la loi aux autorités administratives indépendantes. Il s'agit, en
effet, d'un des principaux moyens pour asseoir le rôle d'influence de ces
autorités.
Rappelons que la consultation, contrairement à l'avis conforme ou
à la proposition,
ne lie juridiquement pas sur le fond
l'autorité titulaire du pouvoir réglementaire
, qui n'est
tenue que de respecter la forme d'un recueil d'avis préalable à
son acte.
La force contraignante qui s'attache à cette consultation est
proportionnelle à " l'autorité morale " de
l'autorité.
Mission de diffusion des informations
L'autorité est investie d'une mission de communication des
données recueillies par les réseaux de mesure du bruit. Elle doit
en outre s'assurer de la fiabilité de ces données.
Ce pouvoir répond à une forte attente de la part tant des
riverains que des exploitants d'aéroports eux-mêmes, comme votre
rapporteur l'a personnellement constaté.
Fonction de vérification
Dans le texte de cet article, l'autorité est chargée de
" contrôler "
le respect des engagements pris par les
parties intéressées pour la maîtrise des nuisances sonores.
Ce cas trouvera à s'appliquer, sans doute, pour les chartes de
l'environnement sonore aéroportuaire que peuvent signer, comme cela a
récemment été le cas à Roissy, les partenaires
intéressés à l'exploitation d'un aérodrome.
Si on comprend que puisse être ressenti le besoin d'un observateur neutre
pour constater les progrès et les efforts réalisés par les
uns et les autres, on ne peut que se demander, dans la rédaction
actuelle du projet de loi, quelles suites seraient données, le cas
échéant, à un constat de carence.
Les " chartes " n'ayant pas de valeur juridique et relevant du simple
engagement moral,, il est exclu que le
" contrôle "
par
l'autorité, tel qu'il résulte de la rédaction actuelle du
respect des engagements pris, ait des conséquences à
caractère contraignant pour les parties.
Votre commission vous propose en revanche de confier à
l'autorité un rôle de proposition et de médiation, en cas
de carence de l'une ou l'autre partie. Pour ce faire, la commission a
adopté plusieurs amendements, prévoyant que
l'autorité :
- évalue le respect des engagements pris,
- rend publics les résultats de l'évaluation,
- propose, en cas de carence, dans le cadre d'un pouvoir de
médiation, des solutions pour débloquer la situation.
Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-4 du code de l'aviation
civile ainsi modifié.
Article L.227-5 du code de l'aviation civile
-
Pouvoir d'investigation des agents de l'autorité
Cet
article confie aux membres et agents de l'autorité et aux experts
qu'elle désigne le pouvoir de faire des vérifications sur place
et de se faire communiquer des informations.
Le projet propose de donner à l'autorité la possibilité,
dans l'exercice des missions qui viennent d'être décrites, de
charger un de ses membres ou un de ses agents, ou un expert mandaté par
elle de procéder
à des vérifications sur place
ou
de se faire communiquer des
renseignements utiles à ses missions.
On remarquera, comme cela a été dit dans le commentaire de
l'article L.227-3, que les missions décrites à
l'article L.227-3 sont mentionnées dans le champ d'application de
ces pouvoirs de vérification sur place. En conséquence, il serait
théoriquement possible à l'autorité de mandater un agent
ou un expert pour constater un manquement aux règles de limitation des
nuisances sonores aux abords des aéroports, afin de saisir la Commission
de prévention des nuisances, qui décidera alors des sanctions
à proposer au ministre, alors que, d'après l'article R.226-2
du code de l'aviation civile issu du décret précité du
27 mai 1997, instaurant le système de sanctions
administratives :
" Les manquements (...) sont constatés
par
les fonctionnaires et agents visés à
l'article L.150-13 "
.
En pratique, comme cela a
déjà été dit, un procès verbal d'infraction
est établi par un agent assermenté et notifié au
responsable du grief.
Dans ce cas, la question de la cohérence de ces deux
procédures parallèles de constatation des infractions se poserait.
Votre commission vous propose donc de préciser que le pouvoir
d'investigation des agents de l'autorité ne s'étend pas qu'aux
compétences du 1
er
alinéa de l'article L.227-3,
et non à celle visées au 2
e
alinéa.
Le deuxième alinéa de l'article L.227-5 dispose que les
intéressés (autorités publiques, agents publics,
exploitants d'aérodromes et transporteurs aériens) ne peuvent
s'opposer à l'action de l'autorité.
Votre commission vous propose de préciser que cette obligation
s'applique en particulier aux services de la navigation aérienne.
Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-5 du code de l'aviation
civile ainsi modifié.
Article L.227-6 du code de l'aviation civile
-
Rapport annuel de l'autorité
Cet
article instaure l'obligation de publication d'un rapport annuel de
l'autorité.
Le texte prévoit que le rapport annuel public de l'autorité est
remis au Gouvernement et au Parlement.
Afin de coordonner leurs actions respectives, votre commission vous propose
de préciser que le rapport de l'autorité est transmis aux
commissions consultatives de l'environnement.
En outre, pour renforcer la transparence et pour asseoir le pouvoir de
recommandation de l'autorité,
votre commission vous propose
d'indiquer que le rapport d'activité peut être l'occasion pour
l'autorité de suggérer toutes modifications législative ou
réglementaire qu'elle estime souhaitables
26(
*
)
.
Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-6 du code de l'aviation
civile ainsi modifié.
Article L.227-7 du code de l'aviation civile
-
Ressources de l'autorité
Cet
article précise le statut des crédits de l'autorité et les
modalités de contrôle budgétaire qui s'appliquent à
elle.
Le dispositif de contrôle budgétaire proposé par cet
article pour l'autorité est calqué sur celui qui s'applique pour
les autres autorités administratives indépendantes, comme le CSA
ou l'ART.
Il n'appelle pas de commentaire particulier.
Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-7 du code de
l'aviation civile sans modification.
Article L.227-8 du code de l'aviation civile
-
Services de l'autorité
Cet
article traite de la gestion interne de l'autorité : services et
règlement intérieur.
Le bref texte proposé pour cet article dispose d'une part que les
services de l'autorité sont placés sous l'autorité de son
Président et, d'autre part, que l'autorité établit son
règlement intérieur. On retrouve des dispositions identiques pour
les autorités similaires.
Votre commission vous propose de préciser, comme il est
fréquent pour ce type d'institutions, que :
- ses agents sont soumis au secret professionnel ;
- elle peut employer des contractuels ou des fonctionnaires en
activité dans les mêmes conditions (traitements, primes...) que le
ministère chargé de l'aviation civile.
Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-8 du code de l'aviation
civile, ainsi que l'article 1 du projet de loi, dans leur rédaction
ainsi modifiée.
Article 2 -
Commissions consultatives de
l'environnement
Cet
article renforce le rôle, les moyens et la composition des commissions
consultatives de l'environnement.
Cet article vise à renforcer le rôle des commissions consultatives
de l'environnement.
Votre commission vous proposera d'accompagner ce renforcement,
souhaité par les associations de riverains, d'une meilleure coordination
des actions respectives de ces commissions et de la nouvelle
autorité.
I.
LES COMMISSIONS CONSULTATIVES DE L'ENVIRONNEMENT
Les commissions consultatives de l'environnement (CCE)
27(
*
)
ont été instituées par
l'article 2 de la loi n° 85-696 du 11 juillet 1985
relative à la maîtrise de l'urbanisme au voisinage des
aérodromes, qui prévoit que
l'autorité administrative
peut mettre en place une CCE
. Cette création est de droit lorsque la
demande en est faite par une commune dont une partie du territoire est couverte
par le plan d'exposition au bruit de l'aérodrome.
La loi prévoit que les CCE sont consultées sur
toute question
d'importance
relative aux incidences de l'exploitation de l'aéroport
sur les zones affectées par les nuisances de bruit et, le cas
échéant, sur le plan de gêne sonore. Elles doivent en outre
se prononcer, comme cela a été dit dans l'exposé
général, en vertu de l'article L.147-3 du code
l'urbanisme
28(
*
)
, sur les projets de plan
d'exposition au bruit.
Les CCE sont créées et présidées par le
Préfet du département sur lequel est situé
l'aéroport (dans le cas des aéroports de Paris-Orly, Paris-Le
Bourget et Paris-Charles de Gaulle, les CCE sont présidées par le
Préfet de la région Ile-de-France). Sont en outre
représentés dans les CCE : les associations de riverains, les
usagers de la plate-forme, son gestionnaire, les collectivités locales
et les administrations concernées.
D'après les chiffres fournis à votre rapporteur par
l'administration,
80 aérodromes sont dotés d'une CCE
.
Toutefois, l'activité de ces commissions est très variable. Celle
de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle est particulièrement
active depuis, notamment, l'annonce de la décision d'extension de cet
aérodrome et l'élaboration corrélative d'un document
formalisant les engagements respectifs des parties pour la maîtrise des
nuisances sonores (la Charte).
Ainsi, de février à juillet
1998, 14 réunions du comité de rédaction de la Charte
de qualité de l'environnement sonore ont eu lieu, ainsi que 15
réunions des sous-groupes de la CCE, 56 personnes ayant au total
participé à ses réunions.
Mais la CCE de Paris-Orly ne s'est pas réunie depuis presque 9 ans.
Celle du Bourget, également en sommeil, devrait prochainement être
réunie par le Préfet de région.
Votre commission vous propose d'inscrire dans la loi que les CCE doivent se
réunir une fois pas an au moins.
II.
LES MODIFICATIONS PROPOSÉES PAR LE PROJET DE LOI
Extension du rôle et des moyens des CCE
Le projet de loi prévoit de renforcer le rôle de ces commissions,
notamment en les dotant d'une instance permanente de travail et de moyens de
fonctionnement. En outre, pour les principaux sites aéroportuaires, il
est proposé de rendre de droit la création d'une CCE et de
confier à cette dernière un pouvoir de saisine de
l'autorité indépendante pour contrôler le respect des
engagements pris par les différentes parties intéressées
à l'exploitation de l'aéroport en vue d'assurer la maîtrise
de nuisances sonores.
Création de droit des CCE
Le texte du projet de loi propose de rajouter, en sus de la circonstance
où une commune concernée le demande, un nouveau cas de
création de droit des CCE : celui où l'aérodrome
concerné atteint le critère des 20.000 mouvements annuels
d'aéronefs de masse maximale au décollage supérieure
à 20 tonnes.
La portée pratique de cette modification devrait rester limitée.
Comme précédemment et pour les mêmes raisons, votre
commission vous propose de remplacer la référence à
l'article 16 de la loi " bruit " par la référence
à l'article 266 septies 3 du code des douanes.
Extension des compétences des CCE
A la disposition de la loi précitée du 11 juillet 1985
prévoyant que la CCE est consultée sur toute question
d'importance relative aux incidences de l'exploitation aéroportuaire sur
les zones voisines, le projet de loi propose de rajouter que la CCE peut,
à son initiative,
émettre des recommandations
sur ces
questions.
Se pose, là encore, la question du partage des rôles et de la
bonne coordination entre l'autorité indépendante et les CCE.
Votre commission vous propose d'indiquer, dans le texte de loi, que ces
recommandations sont transmises à l'autorité. Même dans le
cas où il ne s'agit pas de l'un des neufs principaux aéroports,
l'autorité pourra prendre connaissance de ces recommandations pour
alimenter son pouvoir de proposition et d'avis.
En outre, votre commission a adopté un amendement consacrant le
rôle des CCE pour coordonner la rédaction des " chartes de
l'environnement sonore ".
Moyens et conditions de fonctionnement des CCE
Le projet de loi prévoit que les
moyens de fonctionnement
des CCE
sont mis à disposition par l'exploitant de l'aérodrome. Notons
que la présidence en est toutefois assurée par le
représentant de l'Etat (Préfet de Région ou Préfet
de département).
En outre, il est prévu que la commission puisse créer en son sein
un
" comité permanent ",
sorte d'organe restreint qui
assurerait la continuité de la commission et pourrait exercer ses
compétences consultatives et de recommandation.
Inclusion des commissions consultatives d'aide aux riverains dans les
CCE
Les deux derniers alinéas de l'article 2 du présent projet
de loi proposent respectivement :
- de constituer les commissions consultatives d'aide aux riverains (CCAR)
au sein des CCE ;
- de prévoir qu'un décret en Conseil d'Etat (et non plus un
arrêté conjoint à 5 ministres comme aujourd'hui) fixe la
composition et les règles de fonctionnement des CCAR.
Pour comprendre la portée de ces modifications, il convient tout d'abord
de rappeler ce que sont les CCAR.
Rôle des CCAR
La composition et les règles de fonctionnement des CCAR sont
définies par un arrêté interministériel du 21
septembre 1994.
Conformément à la loi précitée relative à la
lutte contre le bruit de 1992, les CCAR interviennent pour
l'attribution des
aides financières accordées aux riverains des aéroports en
vue de l'insonorisation de leurs logements.
Le dispositif d'aide aux riverains des aérodromes est financé par
la taxe précédemment appelée taxe d'atténuation des
nuisances sonores, désormais intégrée à la taxe
générale sur les activités polluantes (TGAP),
perçue auprès des transporteurs aériens utilisateurs des
aéroports concernés
29(
*
)
, et dont
la gestion a été confiée à l'Agence de
l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie (ADEME),
établissement public sous la tutelle des ministères
chargés de l'Environnement, de la Recherche et de l'Industrie
chargé de la distribution des aides aux riverains.
Ce dispositif fait intervenir les CCAR à deux niveaux :
D'abord, pour l'élaboration des plans de gêne sonore.
Conformément à la loi " bruit " de 1992, le champ
d'éligibilité géographique de l'aide aux riverains est
défini par
les plans de gêne sonore (PGS).
Un décret, signé le 18 mars 1994 est modifié par
un décret du 31 mai 1997 puis par un décret du
30 avril 1998, précise les modalités
d'établissement des PGS, dont l'objet est de
délimiter trois
zones
, établies sur la base du niveau de gêne correspondant au
trafic prévu l'année d'établissement du plan autour des
aérodromes. Ces niveaux de gêne sont exprimés en Indice
Psophique (IP). On distingue :
- la zone I, définie par des valeurs d'IP supérieures
à 96 où la gêne est très forte ;
- la zone II, définie par des valeurs d'IP comprises entre 96 et
89, où la gêne est forte ;
- la zone III, définie par des valeurs d'IP comprises entre 89 et
78, où la gêne est modérée.
Ces plans sont approuvés par arrêté préfectoral ou
interpréfectoral
après consultation des commissions d'aide aux
riverains de chaque aérodrome concerné
et des conseils
municipaux des communes touchées par le plan de gêne.
Des plans de gêne sonore ont été établis sous
l'autorité du préfet coordonnateur pour les aérodromes
suivants : Paris-Orly, Paris-Charles-de-Gaulle, Toulouse-Blagnac,
Nice-Côte d'Azur, Lyon-Satolas et Marseille-Provence.
Ils sont en cours de révision sur la base des nouvelles règles
d'établissement édictées en 1997. Dans le cas particulier
de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle, le nouveau PGS a
été approuvé par arrêté
interpréfectoral en date du 1er octobre 1998, ce qui a permis
d'inclure dans l'emprise du PGS une partie de la ville de Gonesse, et notamment
son hôpital.
Les plans de gêne sonore des aérodromes de Bordeaux, Strasbourg et
Mulhouse-Bâle sont en cours d'élaboration.
Ensuite, pour l'attribution des aides :
L
es caractéristiques des aides
sont définies par un
décret en Conseil d'Etat relatif aux opérations d'aide aux
riverains d'aérodrome, signé le 20 juin 1994 et
modifié par un décret du 31 mai 1997, puis par un
décret du 27 novembre 1998, qui précisent notamment :
*
la nature des opérations d'aide
(aides à
l'insonorisation des bâtiments ou, exceptionnellement, acquisition
d'immeubles à usage d'habitation),
*
les bâtiments concernés
par les opérations
d'aide en faisant référence aux dates d'autorisation de
construire et à leur implantation par rapport aux plans de gêne
sonore susvisés,
*
le montant des dépenses
allouées aux
opérations d'aide.
Un arrêté interministériel, signé le
14 décembre 1994 et modifié par un arrêté
du 15 mai 1997 définit, quant à lui,
le montant
forfaitaire
des travaux d'insonorisation des logements admis au
bénéfice de l'aide aux riverains.
La commission d'aide aux riverains
est consultée sur
l'attribution des aides issues du produit de cette ancienne taxe
d'atténuation des nuisances sonores, désormais
intégrée à la TGAP.
Le
bilan d'utilisation de ce prélèvement est le
suivant
:
Selon des chiffres fournis par l'ADEME, le produit de cette taxe s'est
élevé, depuis son instauration en 1993, à environ
200 millions de francs.
Le montant total disponible pour l'aide aux
riverains a été de 182 millions de francs.
Les
ressources provenant des aéroports parisiens dominent largement,
représentant plus de 90 % du produit total de la taxe.
Le tableau ci-après présente le nombre de dossiers
acceptés en commissions consultatives d'aide aux riverains depuis la
mise en place de l'aide, en 1993, jusqu'à la fin de l'année
1997 :
BILAN D'ACTIVITE DES CCAR
|
Nombre de dossiers acceptés en CCAR |
Nombre de logements |
Montant total estimé des travaux (en millions de francs) |
Aéroports parisiens |
1.699 |
4 310 |
150,4 |
Toulouse |
170 |
170 |
11,9 |
Marseille |
87 |
100 |
0,4 |
Nice |
14 |
145 |
2,2 |
Lyon |
4 |
22 |
0,6 |
TOTAL |
1 974 |
4 765 |
165,4 |
Source
: DGAC
Pour chaque aérodrome, le nombre et la nature des logements se
décomposent comme suit :
LOGEMENTS CONCERNES
|
Logements individuels |
Logements collectifs |
Total |
Aéroports parisiens |
1.733 |
2.577 |
4.310 |
Toulouse |
166 |
4 |
170 |
Marseille |
82 |
18 |
100 |
Nice |
0 |
145 |
145 |
Lyon |
0 |
22 |
22 |
Source
: DGAC
Pour 1998, le produit estimé de la taxe s'élève à
69 millions de francs et à 92 millions de francs pour 1999,
chiffres tenant compte des modifications introduites par la loi de finances
pour 1998 (doublement du taux de la taxe).
Fusion des CCAR et des CCE
Dans un souci de rationalisation des structures, le présent texte de loi
propose que les CCAR soient désormais constituées au sein des
commissions consultatives de l'environnement.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 ainsi modifié.
Article 3
-
Limitation des nuisances sonores
liées au trafic d'hélicoptères
Cet
article propose une nouvelle rédaction de l'article 7 de la loi du
31 décembre 1992 relatif à la limitation des nuisances
sonores liées au trafic d'hélicoptères.
I.
HISTORIQUE DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI BRUIT
Le projet de loi n° 35 (Sénat, 1992) relatif à la lutte
contre le bruit avait été déposé en novembre 1992
sur le Bureau du Sénat par le Gouvernement de
M. Pierre Bérégovoy, qui avait déclaré
l'urgence pour sa discussion.
Ce texte, défendu par le ministre de l'environnement de l'époque,
Mme Ségolène Royal, avait été renvoyé
à la Commission des Affaires économiques et examiné en
même temps que deux propositions de loi
30(
*
)
, dont le rapporteur, notre collègue Bernard
Hugo, avait repris certaines dispositions pour les intégrer, sous forme
d'amendements de la commission, au texte du projet de loi.
La discussion du texte en première lecture au Sénat avait eu lieu
le 9 décembre 1992.
A cette occasion, le Sénat avait, sur avis favorable de votre
commission, -le Gouvernement s'en remettant quant à lui à la
sagesse de la Haute Assemblée
31(
*
)
-,
adopté l'amendement n° 52 rectifié de notre
collègue Jean Simonin et des membres du groupe du rassemblement pour la
République, un sous-amendement n° 91 de M. Paul Caron,
insérant un article additionnel au projet de loi, après
l'article 7, visant à limiter les nuisances sonores liées au
trafic des hélicoptères, en interdisant, notamment, le survol
à basse altitude des immeubles d'habitation par les
hélicoptères et les " baptêmes de l'air ", vols
d'école et d'entraînement au-dessus des zones à forte
densité de population.
Lors de la première lecture à l'Assemblée nationale, le
14 décembre 1992, un amendement n° 37,
présenté par M. Roger Léron, avait
inséré ce dispositif, dans une version modifiée, et
légèrement moins restrictive, à l'article 6 du projet
de loi.
Lors de la commission mixte paritaire, réunie le
16 décembre 1992 au Palais du Luxembourg, il avait
été décidé de retenir la rédaction issue des
travaux de l'Assemblée nationale, sous la forme d'un article 6 bis,
devenu l'article 7 du texte de loi définitif. La nouvelle lecture
du texte issu de la commission mixte paritaire avait eu lieu le Samedi
19 décembre à l'Assemblée nationale et le Dimanche
20 décembre au Sénat.
Le texte de loi fut ensuite promulgué le
31 décembre 1992 et publié au Journal Officiel du
1er janvier 1993.
Toutefois, le texte de l'article 7 tel qu'il est paru au Journal Officiel
comporte une " coquille " par rapport au texte adopté par les
assemblées parlementaires : un membre de phrase du
1er alinéa a été omis par erreur.
La disposition interdisant les
" vols circulaires avec passagers sans
escale ou avec escale touristique de moins d'une heure "
a
été par erreur retranscrite
32(
*
)
en interdiction des
" vols circulaires avec passagers sans escale
touristique de moins d'une heure "
.
Le texte promulgué avait ainsi un sens opposé à celui
qu'avait voulu lui donner le législateur ! Aussi, cette disposition n'a
pu être correctement appliquée par l'administration, faute de base
légale appropriée.
II.
L'INTÉRÊT D'UNE LIMITATION DES NUISANCES LIÉES AUX
HÉLICOPTÈRES
Le Conseil National du Bruit a publié, en juillet 1995, un rapport sur
les nuisances sonores causées par le trafic des
hélicoptères.
Caractéristiques du bruit généré par les
hélicoptères
La source de bruit sur un hélicoptère, outre la
turbine
moteur,
qui pose un problème technique similaire à celui
relatif aux turbines d'un avion, est le
rotor principal
, qui émet
un spectre sonore important dans une large bande
. Cette émission,
appelée " bruit impulsif ", a pour cause l'interaction entre
les pales du rotor et les tourbillons d'air, notamment lors de la descente. En
survol à grande vitesse, elle a pour origine essentielle la compression
de l'air par la pale avançante.
Dans certaines configurations de vol, les bruits générés
par le rotor anticouple et par les compresseurs moteur viennent amplifier,
parfois de façon déterminante, la " signature sonore "
de l'hélicoptère.
A noter que, de façon voisine à la réglementation
internationale exposée ci-dessus et applicable en matière
d'aéronefs, les normes de l'OACI définissent, pour les
hélicoptères, notamment au chapitre 11 de l'annexe 16
précitée, des limites en termes de bruit.
Votre rapporteur tient à souligner que des progrès importants
ont été réalisés par cette industrie, et se
poursuivent, pour réduire le niveau sonore des
hélicoptères. Ils passent parfois simplement par la
transformation des habitudes de pilotage, mais
aussi par d'importantes
modifications des appareils eux-mêmes.
Signalons d'ailleurs les recherches effectuées par l'industrie de ce
secteur, qui travaille sur un projet " d'hélicoptère
silencieux ".
L'activité héliportuaire en France
L'activité des hélicoptères en France (hors la
Défense et la sécurité civile) est plus difficilement
comptabilisable que celle des aéronefs. De nombreux mouvements sont en
effet réalisés à la demande, seules quelques lignes
régulières existant, entre Nice et Monaco par exemple.
Votre rapporteur a toutefois obtenu de l'administration une estimation de
l'activité pour le site
d'Issy-les-Moulineaux
: l'activité
hélicoptères est en baisse régulière sur ce site
où ont été réalisés seulement 12.099
mouvements en 1998, contre 31.403 mouvements en 1990. Sur les principaux
axes de circulation réservés aux hélicoptères en
région parisienne, le trafic recensé varie de 10 à
15.000 mouvements par tronçon.
Les nuisances sonores causées par les hélicoptères
D'après l'administration, les réclamations de riverains sont
concentrées sur quelques zones dont les principales sont :
Issy-les-Moulineaux, Saint-Tropez, ainsi que les communes concernées par
les cheminements en région parisienne.
Des mesures sont en préparation pour limiter l'effet des nuisances
sonores. Ainsi, en région parisienne et aux abords d'Issy les
Moulineaux, l'administration a fait savoir à votre rapporteur qu'un
arrêté de limitation du trafic dans la zone de transit autour
de Paris et de l'héliport serait en préparation.
Il viserait à limiter au strict nécessaire les survols, à
interdire l'accès de l'héliport aux hélicoptères
les plus bruyants et à limiter le trafic sur ce site les samedis,
dimanches et jours fériés.
III.
LE TEXTE DU PROJET DE LOI
Le présent article
propose de revenir à la
rédaction adoptée en décembre 1992.
Votre commission vous propose d'adopter une rédaction plus souple et
mieux à même de favoriser la concertation pour régler au
cas par cas le problème des nuisances liées aux
hélicoptères : un décret en Conseil d'Etat -qui
serait élaboré après une large
concertation- donnerait au ministre un pouvoir de limitation du trafic,
des types d'appareils et des manoeuvres d'approche et de départ, qui
pourrait ensuite être adapté en fonction des besoins de chaque
plate-forme.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 3 ainsi modifié.
Article 4 -
Consultation de l'autorité
indépendante pour le plan d'exposition au bruit. Coordination.
Par
coordination avec l'article 1, cet article insère au code de l'urbanisme
une disposition relative à la consultation de l'autorité
indépendante pour l'élaboration des plans d'exposition au
bruit.
Le présent article vise à insérer, à
l'article L.147-3 du code de l'urbanisme
33(
*
)
, relatif au mode d'élaboration des plans
d'exposition au bruit, une obligation de consultation de l'autorité
indépendante, pour les aérodromes où elle dispose de
compétences particulières en la matière, par coordination
avec les dispositions du 5° de l'article L.227-4 du code de
l'aviation civile, dans sa rédaction proposée par
l'article 1er du présent projet de loi.
Votre commission vous propose, comme précédemment, de
remplacer la référence à l'article 16 de la loi
" bruit " par celle du 3 de l'article 266 septies du code des douanes.
En outre, afin de mieux coordonner leurs actions respectives, votre commission
vous propose de préciser que l'autorité prend connaissance au
préalable de l'avis de la CCE concernée, avant d'émettre
le sien, pour les neuf plus grands aérodromes.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 ainsi modifié.
Articles additionnels après l'article 4
-
(Articles L.147-7 à L.147-9 du code de l'urbanisme) -
Protection et information préalable des riverains
potentiels des aérodromes. Maîtrise de l'urbanisme.
Ces
articles additionnels adoptés par votre commission visent à
renforcer l'information et la protection des riverains potentiels des
aérodromes et à mieux maîtriser l'urbanisation.
Quoique l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle ait été
ouvert et ait fonctionné jusqu'à maintenant avec
deux pistes, il convient de se rappeler que, lors de sa création,
il avait été prévu qu'il évoluerait graduellement,
jusqu'à fonctionner avec cinq pistes. Le plan de réservation
foncière avait été défini dans cette perspective.
A partir de 1973, les pouvoirs publics ont mis en place un dispositif tendant
à maîtriser l'urbanisation aux abords des installations
aéroportuaires et la loi n° 85-696 du
11 juillet 1985 relative à l'urbanisme au voisinage des
aérodromes a rendu les plans d'exposition au bruit obligatoires.
Pour Roissy, les riverains présents aux alentours au moment de la
création de l'aéroport, ou s'y étant installés
depuis en dépit du voisinage des installations, se sont longtemps
opposés à la construction de nouvelles pistes. Or, les
perspectives de croissance du trafic aérien rendaient impérative
l'extension des capacités aéroportuaires.
Certains ont pu s'émouvoir de cette farouche opposition des riverains,
qui n'a pas été sans retarder le projet d'extension de
l'aéroport de Roissy, considérant que les habitants des zones
concernées étaient nécessairement informés des
risques qu'ils encouraient d'être soumis à certaines nuisances
sonores.
Or, s'il est vrai qu'un certain nombre d'entre eux ont consciemment choisi de
vivre dans ces zones et ont le plus souvent acheté ou loué leur
logement à des prix avantageux, en raison de sujétions
présentes ou futures, force est de constater que d'autres ont choisi
leur lieu de résidence sans être nécessairement
informés des perspectives de développement de l'aéroport
ou du plan d'exposition au bruit.
C'est pourquoi l'idée de construire à Roissy une cinquième
piste ayant été abandonnée et celle de construire une
troisième et une quatrième pistes ayant été prise,
il apparaît aujourd'hui nécessaire de prendre les moyens
d'informer pleinement les riverains de Roissy et des autres aérodromes
d'importance des risques de nuisances sonores, à l'instar des politiques
suivies en la matière dans certains pays étrangers (aux
Etats-Unis, par exemple).
Le fait de se soumettre à ces risques en toute connaissance de cause
rendrait d'ailleurs beaucoup moins compréhensible l'opposition
éventuelle de riverains à une situation ou à un projet
connu d'eux.
C'est pourquoi votre rapporteur a déposé une proposition de
loi
34(
*
)
qui, s'inspirant de règles
existantes en droit de la consommation, a pour double objet :
- d'obliger contractuellement le vendeur ou le bailleur d'un bien
immobilier situé dans le périmètre d'un plan d'exposition
au bruit,
à stipuler explicitement dans le contrat de vente ou de
location
que le bien se trouve exposé à des nuisances sonores
d'origine aérienne et à préciser la nature de cette
exposition en indiquant le type de zone -tel que défini à
l'article L.147-4
35(
*
)
du code de
l'urbanisme- où il se trouve localisé ;
- d'obliger contractuellement le vendeur ou le bailleur d'un bien
immobilier situé dans un rayon élargi par rapport au plan
d'exposition au bruit, pour les 9 principaux aérodromes, à
stipuler explicitement dans le contrat de vente ou de location que le bien se
trouve localisé dans un tel périmètre.
Votre commission a intégré ces dispositions sous forme
d'amendements au présent projet de loi.
En outre, pour remédier à l'absence de prescriptions
urbanistiques dans les zones limitrophes des PEB pourtant susceptibles
d'être incluses, en vertu d'une révision en cours du PEB, dans le
futur périmètre de la zone C, votre commission a prévu que
le représentant de l'Etat puisse, temporairement, étendre
à ces zones les dispositions applicables aux zones C.
Votre commission vous propose d'adopter ces articles additionnels.
*
* *
Votre commission vous propose d'adopter l'ensemble du projet de loi ainsi amendé.
1
Voir l'ouvrage de l'IFEN :
" L'environnement en France en 1999 " p. 233, éditions La
découverte.
2
Décibels (A), pondérés en fonction des
caractéristiques de l'oreille humaine.
3
Voir plus loin pour la définition du plan de gêne
sonore.
4
Voir le site Internet : www.ufcra.com.
5
Les développements suivants sont largement inspirés
du rapport du ministère de l'équipement : " La
maîtrise des nuisances sonores sur les aéroports
européens " paru à la Documentation française en
avril 1998.
6
Cette obligation ne concerne toutefois pas les avions à
hélices ni les avions supersoniques ni les " petits " avions
à réaction, ni les avions militaires.
7
Voir plus loin pour le détail des mesures mises en place.
8
Décret n° 97-534 du 27 mai 1997
instituant des sanctions administratives en vue d'assurer la protection de
l'environnement des aérodromes et modifiant le code de l'aviation civile.
9
Indice de mesure du bruit.
10
Depuis l'article 103 de la loi de finances initiale pour
1998.
11
La zone de navigation obligatoire en configuration " face
à l'est " et la procédure d'évitement de la
vallée de Chevreuse en configuration " face à l'ouest ".
12
Aéroports de Paris
13
Les développements suivants sont largement inspirés
de l'ouvrage de Michel Gentot : " Les autorités
administratives indépendantes ", Montchrestien, 1991.
14
Catherine TEITGEN-COLLY : " Les autorités
administratives indépendantes, histoire d'une
institution ", La vie judiciaire,1988.
15
Actuel CSA
16
Sauf exceptions (le Médiateur de la République).
17
Dans sa décision n° 86-217 DC du
18 septembre 1986 (sur la CNCL) puis dans sa décision
n° 88-248 DC du 17 janvier 1989 (sur le CSA). Cette
jurisprudence a été confirmée pour l'Autorité de
régulation des télécommunications (ART) en 1996.
18
Connexion physique et logique des réseaux des
opérateurs de télécommunications.
19
Voir le revue " Pouvoirs " n°46, 1988, l'article
d'Evelyne Pisier " vous avez dit indépendants ! "
20
Proposé par la Commission des Affaires économiques,
sur proposition du rapporteur, notre collègue M. Gérard Larcher.
21
Article n° 8 de la loi n° 78-17
précitée.
22
Désormais intégrée à la taxe
générale sur les activités polluantes.
23
Voir le site Internet : www.ufcna.com, rubrique
consacrée au présent projet de loi.
24
Information recueillie sur son site Internet.
25
206,3 millions de francs en 1997 d'après le dernier
rapport d'activité du Conseil.
26
Comme c'est le cas pour l'ART
27
Votre rapporteur utilisera le sigle " CCE ", tout en
ayant conscience qu'il est ordinairement réservé aux commissions
consultatives économiques des aérodromes.
28
Issu de la loi précitée du 11 juillet 1985.
29
Il s'agit, depuis que l'article 103 de la loi de finances
pour 1998 a étendu ce dispositif aux aérodromes accueillant
annuellement plus de 20.000 mouvements commerciaux de plus de
20 tonnes, au lieu de 40.000 initialement, des neufs
aérodromes suivants : Paris-Orly, Paris-Charles-de-Gaulle,
Toulouse-Blagnac, Nice-Côte d'Azur, Lyon-Satolas et Marseille-Provence
depuis le 1er janvier 1993 et Bordeaux, Strasbourg-Entzheim et
Mulhouse-Bâle depuis le 1er janvier 1998.
30
Proposition de loi de Mme Hélène Luc et plusieurs
de ses collègues tendant à renforcer le droit des riverains des
aéroports à participer à la lutte contre le bruit et
proposition de M Pierre Vallon relative à la lutte contre le bruit.
31
Voir le Journal Officiel des débats du 9
décembre 1992, page 3853.
32
Voir le Journal Officiel - Lois et décrets du
1er janvier 1993, page 15
33
Issu de la loi précitée de 1985
34
Proposition de loi n° 198 de M. Jean-François LE
GRAND.
35
En effet, cet article indique que le plan d'exposition au bruit
prévoit trois zones diversement exposées au bruit
engendré par les avions : les zones de bruit fort (dites A et B) et
la zone de bruit modéré (dite C).