Projet de loi relatif à l'environnement sonore aéroportuaire

LEGRAND (Jean-François)

RAPPORT 204 (98-99) - COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES

Table des matières




N° 204

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 9 février 1999

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi portant création de l' autorité de contrôle technique de l' environnement sonore aéroportuaire ,

Par M. Jean-François LE GRAND,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Marc Pastor, Pierre Lefebvre, vice-présidents ; Georges Berchet, Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Xavier Dugoin, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain Journet, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Edmond Lauret, Gérard Le Cam, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Bernard Murat, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Henri Weber.

Voir le numéro :

Sénat
: 8 (1998-1999).


Environnement.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi qui nous est soumis résulte d'un engagement pris par le ministre chargé de l'aviation civile lors de l'annonce, le 23 septembre 1997, du lancement des travaux pour la construction des deux nouvelles pistes sur l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle. Le Gouvernement s'engageait à cette date dans la voie tracée par la mission Douffiagues, à laquelle votre rapporteur a eu l'honneur d'appartenir : celle d'une maîtrise des nuisances sonores, contrôlée par une autorité indépendante, préalable nécessaire au développement du trafic aérien.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LA MAÎTRISE DES NUISANCES SONORES : UN PRÉALABLE INDISPENSABLE AU DÉVELOPPEMENT DU TRAFIC AÉRIEN

A. LA POLLUTION SONORE : UN PROBLÈME LANCINANT

1. Le bruit : une des principales pollutions actuelles

a) Une agression fortement ressentie dans la vie quotidienne

Le bruit n'est pas un phénomène nouveau. Déjà, bien avant la révolution industrielle, les écrits d'Horace nous rappellent que, voilà 2000 ans, retentissaient dans Rome les sabots des mules, les aboiements des chiens, les hurlements des portefaix. A un siècle de nous, Baudelaire nous dit " La rue autour de moi hurlait ".

Pourtant, le bruit est devenu, depuis un quart de siècle, l'une des premières sources de pollution, avec notamment le développement de la circulation routière , qui est citée par les enquêtes 1( * ) comme la première cause de nuisance sonore.

Une prise de conscience collective récente de l'ampleur du phénomène

Plusieurs rapports ou missions sur le bruit -et plus particulièrement celui des transports- ont été demandés à des experts par les gouvernements successifs ces vingt dernières années. On citera notamment la mission initialement confiée en 1981 par notre collègue Daniel Hoeffel, alors ministre, à M. Gilbert Batsch, puis renouvelée par Mme Huguette Bouchardeau, qui avait conduit le conseil des ministres du 11 avril 1984 à décider d'un " plan de rattrapage des points noirs du bruit ".

Une mission fut confiée en 1989 par M. Brice Lalonde à M. Jean Tutenuit, à la suite de la réunion du 18 avril 1989 du comité interministériel pour la qualité de la vie.

La loi relative à la lutte contre le bruit , qui a, notamment, instauré une " taxe d'atténuation des nuisances sonores " payée par les compagnies aériennes, a été adoptée en décembre 1992.

Depuis, le rapport du député Bernard Serrou sur la protection des riverains contre le bruit des transports terrestres, a été remis en 1994 au Premier ministre. Le rapport Serrou estimait à 2.600 le nombre de sites -les " points noirs "- où les habitants sont soumis à plus de 60 décibels plus de 8 heures par jour.

" En avril 1998, le Conseil économique et social a présenté un rapport sur " le bruit dans la ville ".

Tout récemment, M. Claude Lamure a remis, en novembre 1998, un rapport au ministre de l'environnement sur " la résorption des points noirs du bruit routier et ferroviaire ", qui recense 3.000 " points noirs " et évalue à 300.000 le nombre de français qui souffrent de troubles du sommeil dus au bruit nocturne. Le bruit subi par les riverains d'aéroports est toutefois exclu du champ de cette étude.

Quelques chiffres sur la gêne sonore

Comme l'indique le dernier rapport de l'Institut français de l'environnement (IFEN), depuis 1996, dans le cadre de l'enquête permanente sur les conditions de vie des ménages, l'INSEE mesure la perception par les ménages français de la qualité de l'environnement. L'analyse des réponses obtenues auprès d'un échantillon de 8.000 logements montre que le bruit constitue une nuisance importante.

Le bruit de la circulation est la nuisance sonore la plus fréquemment ressentie. Début 1998, 33 % des ménages se déclarent gênés par ce type de bruit , au moins de temps en temps, lorsqu'ils sont dans leur logement. Près de la moitié des ménages habitant à Paris sont régulièrement gênés par le bruit de la circulation, contre un ménage sur cinq en zone rurale. 52 % des ménages qui habitent à proximité d'une route sont gênés par le bruit qu'elle engendre.

La deuxième source de nuisance sonore provient du voisinage.

Le tableau suivant retrace les résultats de cette enquête de l'INSEE sur les conditions de vie des ménages :

LA GÊNE SONORE

 

Pourcentage des ménages gênés par le bruit de...

 

Circulation

Voisinage

Commerces

Statut d'occupation

 
 
 

propriétaire

30

21

9

locataire

37

42

15

Catégorie professionnelle

 
 
 

agriculteur

17

7

5

artisan

32

25

14

cadre

35

34

12

profession intermédiaire

36

32

13

employé

36

40

15

ouvrier

33

31

11

retraité

32

23

10

Chômeur

 
 
 

oui

33

35

14

non

33

29

11

Type de commune

 
 
 

rurale

20

12

5

agglomération

36

33

13

banlieue de Paris

40

38

13

Paris

46

55

27

Type de voisinage

 
 
 

maison individuelle

27

16

7

immeuble collectif

43

45

21

cité

38

59

13

mixte (1)

41

37

17

Route à proximité

oui

52

36

17

non

13

24

7

Ensemble

33

30

12

Source : enquête permanente sur les conditions de vie des ménages, INSEE-Ifen, 1998.

(1) (caractéristique notée par l'enquêteur)

b) Des effets nocifs sur la santé

Le bruit peut produite deux sortes de dommages sur l'organisme : les uns sont spécifiques et portent sur l'audition, voire les fonctions " psycho-acoustiques " (communication humaine par exemple) ; les autres ne sont pas spécifiques . Il s'agit du désagrément, de la gêne au sens large, de la fatigue, ainsi que de troubles nerveux et généraux.

Les effets auditifs du bruit

Le danger du bruit pour l'appareil auditif dépend de l'intensité du son et de sa durée. Les spécialistes estiment qu'il y a danger pour les capacités auditives à partir d'une ambiance sonore de 85 dB(A) 2( * ) . Plus l'intensité sonore dépasse ce seuil, plus le délai d'apparition du danger se raccourcit. De même, plus l'écoute est longue et répétée, plus l'intensité sonore, même faible, est dommageable.

Le dommage est d'autant plus imprévisible que la douleur n'est ressentie qu'à partir de 120 dB(A) pour une oreille normale. La détérioration auditive peut dont n'apparaître qu'ultérieurement. Le plus grand traumatisme provient des sons aigus car le réflexe de défense de l'oreille contre le bruit, le réflexe " stapédien ", n'est relativement efficace que pour les fréquences basses ou moyennes. Un son écouté même quelques minutes à une intensité sonore ne dépassant pas 90 dB(A) peut produire une fatigue auditive qui se traduit par une élévation temporaire du seuil d'audition (déficience passagère) éventuellement accompagnée de bourdonnements, sifflements et tintements, ainsi que de modifications de la sensation auditive, qui prend un caractère ouaté et métallique.

Le tableau suivant indique la correspondance entre les sensations auditives et le niveau de décibels de différentes sources sonores :

L'ÉCHELLE DES BRUITS

Sensation auditive

Bruits intérieurs

Bruits extérieurs

Bruit des véhicules

dB(A)

 

Turbo-réacteur au banc d'essai

 
 

140

 

Marteau-pilon

 

Réacteur d'avion à quelques mètres

130

Seuil de douleur

Banc d'essai de moteurs

 
 

120

 

Atelier de chaudronnerie

 
 
 
 
 
 
 

110

 

Presse à découper

 
 
 

Très difficilement supportable

Raboteuse

Marteau piqueur à 5 m

Moto de course à 2 m

100

 

Atelier de forgeage

Rue à trafic intense

Klaxons d'auto

95

Pénible à entendre

Radio très puissante

Circulation intense à 1 m

Métro en marche

85

 

Atelier dactylo

 

Métro sur pneu

75

 

Restaurant bruyant

Circulation importante

 

70

Bruyant mais supportable

Appartement bruyant

 
 

65

Bruit courant

Conversation normale, musique de chambre

Rue résidentielle

Bateau à moteur

60

 

Restaurant tranquille, grands magasins

rue très tranquille

voiture silencieuse

50

Assez calme

Appartement normal

 

Transatlantique (1 ère classe)

45

 

Bureau tranquille

 
 

40

Calme

 
 

Bateau à voile

35

 

Appartement calme dans quartier tranquille

 
 

30

 

Conversation à voix basse

 
 

25

 

Studio en radio

 
 

20

Très calme

 

Feuilles agitées par un vent doux

 

15

 

Cabine prise de son

 
 

10

Silence inhabituel

Laboratoire d'acoustique

 
 

5

Seuil d'audition

 
 
 

0

Source : Secrétariat d'Etat à la santé, cité par l'Ifen.

La gêne dépend en outre du niveau sonore, non seulement absolu, mais aussi relatif par rapport au niveau de fond , à la présence ou non d'un autre bruit, à l'accumulation, à l'aspect répétitif ou continu et à la période de la journée.

Les effets non auditifs du bruit

Le bruit ne cantonne pas ses effets à l'audition
. En effet, l'appareil auditif constitue une fonction de guet et d'alarme qui diffuse les influx nerveux. Tout bruit insolite ou intense provoque un ensemble de réflexes et d'attitudes d'investigation, d'émotion, d'attente anxieuse, d'augmentation de la vigilance et de détérioration de celle-ci quand le bruit est jugé alarmant. Il peut entraîner des réactions sur l'ensemble de l'organisme : hypertension artérielle, vertiges, réduction du champ visuel, stress, spasmes digestifs, fatigue excessive, irritabilité.

En outre, le bruit contrarie le sommeil. Il provoque des difficultés d'endormissement, des éveils au cours de la nuit et réduit la durée du sommeil profond, phase importante pour la récupération. Les troubles du sommeil génèrent eux-mêmes des effets secondaires : fatigue, baisse de vigilance, erreurs plus fréquentes.

Les conséquences psychologiques de l'exposition au bruit, si elles sont moins connues, ne doivent pas êtres sous-estimées.

Votre rapporteur en est convaincu, notamment parce qu'il a rencontré ou consulté, dans le cadre de la préparation du présent rapport, des associations de riverains des plates-formes aéroportuaires. Au cours de ces échanges sont revenus les mots de " souffrance ", " calvaire ", situation " intenable ", " insupportable ".

Le bruit nocturne est particulièrement pénible .

Si la question des souffrances physiques et morales liées à l'exposition au bruit est posée à l'ensemble de la société, et dans des secteurs d'activité divers, c'est aux nuisances sonores aériennes seulement que s'adresse le présent projet de loi.

Votre commission souhaite toutefois préciser qu'il serait extrêmement réducteur d'en conclure que ce type de transport porte seul la responsabilité de la gêne sonore imposée à nos concitoyens. Toutes les études et les différents rapports montrent à l'évidence qu'il n'en est rien.

2. Le bruit des avions : origines, progrès et perspectives

Par rapport aux autres bruits, le bruit des avions se caractérise par de forts niveaux de crête, séparés par des moments de silence. Les progrès technologiques appliqués notamment à la motorisation ont permis une diminution du bruit des appareils, qui devrait se poursuivre. Pour autant, le problème de la gêne sonore demeure.

a) Les origines du bruit des avions

Les bruits liés au moteur

Pour les avions à réaction en vol, on peut décomposer le bruit des groupes motopropulseurs en bruit " de jet " lié à l'expulsion des gaz à l'arrière du moteur et en bruits internes, eux-mêmes liés aux parties tournantes du moteur (soufflantes amont et aval, compresseur et turbine) ainsi qu'au bruit de la combustion.

Le bruit de jet est dû à la génération de fortes turbulences dans la zone où les gaz chauds à haute pression éjectés de la tuyère du moteur se mélangent à l'air ambiant. Le bruit de jet est un bruit à large bande, qui est fonction croissante du diamètre de la tuyère et de la vitesse d'écoulement du jet. Il est plus marqué à l'arrière. Il a été fortement réduit dans les moteurs modernes à double flux de gaz, à grand diamètre et à basse vitesse d'éjection.

Le bruit des parties tournantes du moteur est caractérisé par la présence de bruits de " raies " qui se superposent à un bruit à large bande. Ce bruit est plus marqué à l'avant du réacteur.

Le bruit de combustion est attribué à des fluctuations volumétriques du gaz en expansion, causées par une combustion non stable du kérosène. Il est difficile à dissocier du bruit de jet dans le spectre de bruit.

Le bruit aérodynamique est dû aux turbulences aérodynamiques créées autour de l'avion. Le bruit des volets, des becs et du train d'atterrissage en sont des exemples. Compte tenu des progrès réalisés sur les moteurs, cette source de bruit devient aussi importante que le bruit du moteur, notamment en phase d'atterrissage.

b) Des progrès importants

En 30 ans, la recherche et les progrès technologiques réalisés sur les moteurs ont permis de réduire d'un peu plus de 20 décibels le bruit des avions à réaction. Ainsi, un avion équipé de réacteurs conçus au débat des années 60 produisait un bruit équivalent à 125 Airbus A320. La zone exposée à un bruit de 85 dB(A) au décollage a été réduite par plus de huit fois entre un avion des années 70 et un avion des années 90.

Ces progrès ont pu être obtenus par l'augmentation du " taux de dilution " : le flux d'air chaud et rapide dans le moteur est doublé par un flux d'air froid et plus lent qui limite l'effet de " déchirement " lors de l'éjection des gaz à l'arrière du moteur.

De même, des mélangeurs mixent air froid et air chaud à l'intérieur même de la nacelle du moteur, ce qui réduit le bruit.

Le bruit émis à l'intérieur du moteur a pu être " piégé " à l'aide de parois absorbantes dont on tapisse désormais l'intérieur de la nacelle.

Les schémas suivants permettent de visualiser les progrès effectués en termes de réduction de l'emprunte sonore au sol ces vingt dernières années.

ÉVOLUTION DE L'EMPRUNTE SONORE DES MOTEURS

Source : Airbus industrie

Si on transpose cette courbe à l'aéroport de Paris-Orly, on obtient le résultat suivant :

AEROPORT DE PARIS-ORLY

Comparaison des empreintes au sol (85 Db(a))

A320 B 727- 200

Source : Airbus Industrie

L'effort de recherche se poursuit pour réduire le " bruit à la source ", notamment pendant les phases de survol et d'approche qui génèrent le plus de nuisances.

On distingue désormais la réduction passive du bruit de la réduction active , qui consiste à générer électroniquement des " contre-bruits, " émis par des hauts-parleurs au niveau de l'entrée d'air du moteur, sur la même fréquence, mais en opposition de phase, afin d'aboutir à une neutralisation acoustique. Ce contrôle acoustique " actif " devrait permettre de poursuivre dans la voie des progrès accomplis, qui sont rappelés par le graphique ci-après :

ÉVOLUTION DU BRUIT DES MOTEURS

Source : Airbus Industrie

A ce sujet, votre rapporteur souhaite que l'Etat soutienne, dans le cadre européen, comme au niveau de la politique nationale d'aide à la recherche, la recherche en matière de réduction du bruit dans le secteur de la construction aéronautique. Votre commission a, d'ailleurs, sur proposition de votre rapporteur, affirmé cette position lors de l'examen des crédits budgétaires pour 1999.

c) Une question qui reste lancinante pour les riverains

Malgré les réels progrès réalisés grâce notamment au changement de motorisation des avions, que personne n'a contesté devant votre rapporteur, le problème des nuisances sonores supportées par les riverains reste entier.

Il est difficile d'avancer une estimation du nombre de personnes concernées. A la demande de votre rapporteur, l'administration a estimé que le nombre de riverains situés dans l'emprise d'un plan de gêne sonore 3( * ) serait d'environ 160.000 , tandis que des associations 4( * ) estiment à 3.000.000 le nombre de personnes concernées, au sens large, par le présent projet de loi et donc par les nuisances sonores liées au transport aérien.

La croissance du trafic aérien, même si elle s'est accompagnée d'une baisse du bruit produit par avion, a accru le nombre et la fréquence des mouvements. Le bruit a changé de nature, mais il n'est pas perçu comme étant moins pénible, au contraire, la continuité du bruit diurne et parfois nocturne, en ayant accru la pénibilité.

En outre, la croissance de l'activité des aéroports a elle-même généré un " bruit ambiant ", lié entre autres à la circulation routière, qui s'ajoute à celui des avions proprement dits.

Plus largement, les riverains estiment que ce sont toutes leurs conditions de vie qui ont été bouleversées.

Votre rapporteur a rencontré des riverains des aéroports parisiens qui, installés dans la région parfois avant l'aéroport lui-même, ont vécu une transformation sociale, voire une " paupérisation " des communes concernées , sans parler des conséquences sur les prix du marché de l'immobilier.

Les réponses que votre rapporteur a reçues de la part d'associations de riverains d'Ile-de-France et de province, auxquelles une contribution écrite a été demandée à l'occasion de l'élaboration du présent rapport, reflètent elles aussi la profondeur de leur malaise.

Une réponse doit impérativement être apportée à cette exaspération et à cette souffrance des riverains.

Ne nous y trompons pas : il y va de l'avenir du transport aérien dans notre pays
. Un exemple est particulièrement éclairant en la matière : rappelons-nous qu'à Strasbourg, la décision d'implantation de la société DHL, qui aurait entraîné une multiplication des vols de nuit, a été finalement abandonnée sous la pression des riverains, malgré la perspective d'importantes créations d'emplois sur la plate-forme.

B. LE TRANSPORT AÉRIEN : UNE CONTRIBUTION ESSENTIELLE À LA CROISSANCE ET À L'EMPLOI

1. Un secteur en mouvement

L'internationalisation de l'économie et le développement des échanges " tirent " vivement la croissance du trafic aérien.

Les chiffres de l'organisation internationale de l'aviation civile (OACI) pour le trafic aérien régulier total, exprimé en tonnes-kilomètres transportées, incluant le trafic passagers, le fret et le trafic postal, indiquent une augmentation de 8 % en 1997 par rapport à 1996.

Les prévisions de l'OACI estiment à respectivement 5,4 % et 6,1 % la croissance moyenne annuelle du trafic passagers et fret d'ici à 2001.

Cette croissance du trafic a des retombées économiques très positives.

2. Une contribution importante à la croissance et à l'emploi

Une étude réalisée par l'Airports Council International Europe, intitulée " Emploi et prospérité en Europe " et publiée en septembre 1998 donne une indication de l'apport du transport aérien à la croissance et à l'emploi :

" En dépit des variations dans l'impact direct sur la création d'emplois pour chaque aéroport en fonction des caractéristiques de son trafic et de son rôle, cette étude confirme le chiffre souvent cité d'au moins 1.000 emplois sur site créés par million de passagers par an.

Les estimations de l'impact indirect et de l'impact induit sont dérivées de cette quantification de l'impact direct au moyen de multiplicateurs ou d'une analyse input/output. L'impact économique indirect et, par conséquent, l'impact économique induit d'un aéroport sont plus difficiles à quantifier, car la démarche nécessite non seulement une bonne compréhension du fonctionnement d'un aéroport, mais également de ses interactions avec l'économie locale, régionale ou nationale. La variabilité de ces estimations est importante en raison des différentes méthodologies adoptées ou de la taille de la zone d'étude.

L'étude indique que le total de l'impact direct, indirect et induit d'un aéroport sur l'emploi peut être en moyenne de 2.200 emplois par million de passagers

Les aéroports jouent un rôle fondamental pour attirer et retenir les industries dans les zones environnantes, situées généralement dans un rayon de 1 ou 2 heures de route. En dépit des fortes variations caractérisant l'impact mesuré dans l'échantillonnage d'aéroports, l'impact sur l'emploi et sur l'économie en général est substantiel. Ce rôle économique plus large est connu sous les noms d'impact catalyseur ou de retombées économiques (choix d'implantation de certaines sociétés, amélioration de leur compétitivité économique, attraction des visiteurs d'affaires et de loisirs).

L'étude indique que, de manière générale, l'impact catalyseur peut multiplier l'impact d'un aéroport 1,8 fois, soit environ 4.000 emplois par million de passagers, compte tenu de tous les facteur. L'impact catalyseur sera supérieur dans le cas d'aéroports disposant de réseaux bien développés de services réguliers internationaux.
"

Votre rapporteur est prudent quant à l'applicabilité réelle de ces ratios, notamment en raison de la difficulté méthodologique à délimiter les effets induits, ainsi que la particularité des situations : l'étude est fondée sur les grandes plates-formes européennes, or il existe une grande diversité de situations sur les aéroports français et les effets sur l'emploi sont dépendants de la structure du trafic.

Même si l'équivalence " un million de passagers supplémentaires par an = 1.000 emplois directs, 2.200 emplois directs et indirects et 4.000 emplois directs, indirects et " catalysés " " n'est pas une vérité scientifique, elle donne quand même la mesure des potentialités de ce secteur.

Votre rapporteur est convaincu que le transport aérien est essentiel pour conforter notre économie, pour créer des emplois et pour améliorer notre rayonnement international.

Bien plus, la France dispose, avec les possibilités d'extension de ses capacités aéroportuaires, d'un atout unique en Europe.

Alors, sachons saisir cette chance ! De notre capacité à comprendre, à écouter et à résoudre les problèmes vécus par les populations qui souffrent de l'exposition au bruit du transport aérien -et de notre volonté à éviter que ne se reproduisent ces situations d'exposition au bruit- dépendra l'avenir de ce secteur.

C. LA MAÎTRISE DES NUISANCES SONORES EN EUROPE : DES RÉPONSES RÉGLEMENTAIRES DIVERSES

Soucieuse à la fois de ne pas entraver le bon développement du transport aérien et de limiter la pollution sonore aéroportuaire, les autorités réglementaires ont élaboré un corpus de normes.

1. La réglementation acoustique internationale

Des normes internationales ont, corrélativement à l'accroissement spectaculaire du trafic aérien ces trente dernières années, durci les exigences acoustiques relatives à la certification des aéronefs.

Ces normes se fondent sur une définition commune des conditions de mesure et de représentation du bruit. Elles sont définies par l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), dans un document intitulé " Annexe 16 à la Convention relative à l'aviation civile internationale " (dénommée Annexe 16).

Cette réglementation vise à éviter que l'augmentation du trafic aérien ne conduise, à terme, à une augmentation de la nuisance subie par les riverains d'aérodromes. A cet effet, elle incite les constructeurs et les exploitants d'aéronefs à l'utilisation des technologies de réduction des nuisances les plus performantes, compatibles avec les impératifs de sécurité et de viabilité économique.

Elle impose des contraintes à différents stades de la vie d'un aéronef : la conception, la production, l'adjonction à la flotte d'une compagnie et l'exploitation.

En ce qui concerne la conception et la production , la réglementation définit des niveaux de bruit maximaux en fonction des différentes catégories d'aéronefs et de la masse au décollage . Pour les avions de transport à réaction, qui constituent la source essentielle de nuisance sonore au voisinage des aéroports, les normes établies au début des années 1970 et énoncées dans le chapitre 2 de l'Annexe 16 ont été remplacées en 1977 par des normes plus sévères, constituant le chapitre 3 de cette Annexe.

Cette évolution amène à classer les avions de transport à réaction en trois générations , dont chacune représente une diminution par rapport à la précédente d'au moins 50 % en niveau d'énergie acoustique :

- les avions d'un type conçu avant la première norme OACI, qu'on qualifie " d' avions non certifiés " ,

- les avions d'un type conçu approximativement entre 1970 et 1977, certifiés suivant les normes du chapitre 2, qu'on qualifie d' avions " chapitre 2 " ,

- les avions certifiés suivant les normes du chapitre 3, qu'on qualifie d' avions " chapitre 3 " .

L'accroissement de la flotte mondiale d'avions à réaction depuis les années 1960 s'est, en conséquence, heureusement accompagné d'une réduction considérable du nombre des appareils les plus bruyants, même s'il existe encore au niveau mondial un nombre significatif d'avions bruyants en circulation.

En Europe, des normes plus contraignantes ont été mises en place.

2. La réglementation européenne5( * )

a) Les règles communautaires

Des normes communautaires prescrivent des conditions de constitution des flottes et d'exploitation des avions en vue de réduire les nuisances sonores. La Communauté européenne a posé des règles communes pour les aéroports de l'Union européenne, avec des étapes dans l'évolution des flottes, pour ne pas compromettre l'équilibre économique des entreprises du transport aérien. Ainsi, les avions les plus anciens (non certifiés) ont été définitivement retirés de l'exploitation en 1989. Pour les avions " chapitre 2 ", leur adjonction à une flotte européenne a été proscrite en 1990 et la directive n° 92-14 du 2 mars 1992 impose leur retrait progressif d'exploitation, qui doit être achevé 6( * ) le 1 er avril 2002.

Un règlement européen a autorisé le retrait anticipé des avions du chapitre 2 sur les aéroports européens en période nocturne, afin de réduire l'exposition au bruit de la nuit.

Outre les projets de réglementation tendant à interdire l'addition aux flottes présentes en Europe des avions " hushkitté ", c'est-à-dire des avions du chapitre 2 munis d'atténuateurs de bruit pour répondre aux normes du chapitre 3, qui demeurent bruyants par rapport aux autres avions du chapitre 3, la Communauté européenne a prévu la possibilité pour un Etat-membre de limiter l'accès à un aéroport , suivant certaines procédures, pour faire face aux problèmes environnementaux.

Plusieurs Etats-membres ont utilisé ces possibilités.

b) Les solutions retenues sur les principaux aéroports européens

D'après le rapport précité d'avril 1998 sur la maîtrise des nuisances sonores sur les aéroports européens, les diverses mesures mises en oeuvre sur les 22 principaux aéroports s'articulent autour de six moyens :

Restriction de trafic

En sus des règles européennes citées ci-dessus, nombreuses sont les restrictions de trafic supplémentaires imposées sur les aéroports européens pour limiter les nuisances sonores. Elles prennent des formes diverses. L'interdiction du trafic sous forme d'un couvre-feu total entre 23 h 30 et 6 h 00 sur l'aéroport d'Orly est un exemple unique en Europe d'après cette étude.

Maîtrise de l'urbanisme

La maîtrise de l'urbanisme est un élément essentiel de la politique de maîtrise des nuisances sonores en Europe. Les limitations peuvent être de nature législative. Quand de telles législations n'existent pas, au Royaume-Uni par exemple, des mesures de maîtrise de l'urbanisme peuvent être mises en oeuvre sur la base d'accords volontaristes.

En France, c'est la loi du 11 juillet 1985 sur l'urbanisme au voisinage des aéroports 7( * ) qui a instauré, autour de l'élaboration de plans d'exposition au bruit, documents graphiques délimitant différentes zones de bruit autour des plate-formes, des prescriptions en matière d'urbanisme. Des dispositions existent également aux Pays-Bas.

Limitation des opérations au sol

Des restrictions à la réalisation des essais de moteurs ainsi qu'à l'utilisation des inverseurs de poussée et des moteurs auxiliaires (APU ou Auxiliary Power Unit) ont été mises en place en Europe. Il existe pour ce type de mesures une certaine marge de manoeuvre pour d'administration ou les autorités aéroportuaires, dans la limite du respect de la sécurité. Les restrictions sont publiées dans les manuels d'information aéronautique ou reposent, plus rarement, sur des textes réglementaires. Elles prennent le plus souvent la forme de recommandations ou de restrictions.

Action sur les taxes et redevances aéroportuaires

Une des mesures fréquemment utilisée pour inciter au renouvellement des flottes consiste à augmenter les charges d'exploitation des compagnies aériennes en cas d'utilisation d'avions bruyants (d'ancienne technologie). Cette majoration au titre du bruit prend le plus souvent la forme d'une modulation de la redevance d'atterrissage et plus rarement d'une taxe perçue pour le compte de l'Etat.

Aide financière aux riverains des aérodromes

Un autre volet de la politique européenne de maîtrise des nuisances sonores est l'aide à l'insonorisation des habitations subissant directement les nuisances engendrées par l'activité aéroportuaire. Toutefois, l'examen des principaux aéroports européens montre que ces programmes d'aide ne sont pas systématiques , alors que sur certaines plates-formes ils sont d'ores et déjà achevés.

Sanctions

L'existence et l'application de sanctions pénales ou administratives -sanctions opérationnelles ou financières, voire même condamnations à l'emprisonnement- en cas de non respect de la réglementation relative au bruit, dépendent des juridictions ou des jurisprudences des différents Etats. Certains aéroports appliquent toutefois des sanctions sans qu'aucune base légale ne les justifie et s'exposent alors à des contentieux.

A noter que, d'après le rapport précité, le dispositif français (décret sur les sanctions administratives 8( * ) portant création de la Commission nationale de prévention des nuisances sonores) est le système le plus complet en Europe.

Le tableau suivant récapitule les mesures prises pour limiter les nuisances sonores sur les 22 principaux aéroports européens étudiés dans ce rapport (une grille de lecture de ce tableau figure ci-après) :

GRILLE DE LECTURE DU TABLEAU

- Si une case est hachurée, c'est que le non respect de la prescription peut faire l'objet de sanction.

- Les abréviations ont la signification suivante :

Z zone d'exposition au bruit de 0 h à 24 h

Zd zone d'exposition au bruit diurne

Zn zone d'exposition au bruit nocturne

I indicateur de bruit de 0 h à 24 h

Id indicateur de bruit diurne

In indicateur de bruit nocturne

S seuil maximal de bruit instantané de 0 h à 24 h

Sd seuil maximal de bruit instantané diurne

Sn seuil maximal de bruit instantané nocturne

déc décollage

att atterrissage

QC quota count

sa samedi de 0 h à 24 h

di dimanche de 0 h à 24 h

Rec recommandation uniquement

Res restrictions uniquement

T taxe spécifique

M modulation de la redevance d'atterrissage

td taux de dilution des moteurs

n.c. non communiqué

Source : rapport précité sur la maîtrise des nuisances sonores sur les aéroports européens.

3. La situation française

a) La loi n° 85-696 du 11 juillet 1985 relative à l'urbanisme au voisinage des aérodromes

Un dispositif de maîtrise de l'urbanisme au voisinage des aérodromes a été instauré par la loi du 11 juillet 1985, codifiée dans le code de l'urbanisme.

D'après cette loi, la maîtrise de l'urbanisation autour des aérodromes est directement liée à l'existence d'un plan d'exposition au bruit (PEB) et repose sur un principe général défini à l'article L.147-5 du code de l'urbanisme " Dans les zones définies par le plan d'exposition au bruit, l'extension de l'urbanisation et la création ou l'extension d'équipements publics sont interdites lorsqu'elles conduisent à exposer immédiatement ou à terme de nouvelles populations aux nuisances de bruit ".

Le PEB est un document graphique à l'échelle 1/25.000 e , qui délimite trois zones (A, B, C) d'exposition au bruit, définies par des valeurs d'indice psophique 9( * ) . La zone A correspond à une gêne moyenne ressentie très forte, la zone B à une gêne moyenne ressentie forte et la zone C à une zone moyenne ressentie modérée.

Dans ces zones, l'utilisation des sols est réglementée en vue d'y interdire ou d'y limiter la construction de logements, dans l'intérêt même des populations, ainsi que d'y prescrire des types d'activités peu sensibles au bruit, compatibles avec le voisinage d'un aérodrome.

Pour chaque type d'opération, différentes prescriptions d'urbanisme sont applicables, comme le détaille le tableau suivant :

PRESCRIPTIONS D'URBANISMES APPLICABLES
DANS LES ZONES DE BRUIT DES AÉRODROMES

CONSTRUCTIONS NOUVELLES

ZONE A

ZONE B

ZONE C

Logements nécessaires à l'activité de l'aérodrome, hôtels de voyageurs en transit

autorisés

autorisés

autorisés

Logements de fonction nécessaires aux activités industrielles ou commerciales

autorisés dans les secteurs déjà urbanisés

autorisés

autorisés

Immeubles d'habitation directement liés ou nécessaires à l'activité agricole

autorisés dans les secteurs déjà urbanisés

autorisés

autorisés

Equipements de superstructures nécessaires à l'activité aéronautique

autorisés s'ils ne peuvent être localisés ailleurs

autorisés

Constructions à usage industriel, commercial et agricole

autorisées si elles ne risquent pas d'entraîner l'implantation de population permanente

Equipements publics

autorisés s'ils sont indispensables aux populations existantes et s'ils ne peuvent être localisés ailleurs

Maisons d'habitation individuelles non groupées

INTERDITES

autorisées si secteur d'accueil déjà urbanisé et desservi par équipements publics sous réserve d'un faible accroissement de la capacité d'accueil

Immeubles collectifs, habitats groupés (lotissements ...) parcs résidentiels de loisirs

INTERDITS

 
 
 
 

OPERATIONS DE RENOVATION DES QUARTIERS OU DE REHABILITATION DE L'HABITAT EXISTANT

autorisées sous réserve de ne pas accroître la capacité d'accueil

autorisées sous réserve de ne pas accroître la capacité d'accueil et si secteur d'accueil déjà urbanisé et desservi par équipements publics sous réserve d'un faible accroissement de la capacité d'accueil

 
 
 
 

AMELIORATION ET EXTENSION MESUREE OU RECONTRRUCTION DES CONSTRUCTIONS EXISTANTES

autorisées s'il n'y a pas d'accroissement assimilable à la construction d'un nouveau logement

autorisées s'il n'y a pas d'accroissement assimilable à la construction d'un nouveau logement et si secteur d'accueil déjà urbanisé et desservi par équipements publics sous réserve d'un faible accroissement de la capacité d'accueil

En droit de l'urbanisme, l'existence d'un PEB a donc des effets sur les documents d'urbanisme et sur les autorisations d'utilisation du sol : les schémas directeurs, les schémas de secteurs ainsi que les plans d'aménagement de zones doivent être compatibles avec ses prescriptions. Mais c'est par l'intermédiaire des plans d'occupation des sols (POS) que sont transcrites les prescriptions réglementaires relatives à l'urbanisation dans les zones du PEB.

Dans la pratique, les POS doivent :

- présenter le problème des nuisances sonores et leurs conséquences sur les parties d'aménagement communal (rapport de présentation) ;

- proposer un zonage et un règlement compatibles avec le PEB, l'échelle du PEB (échelle 1/25.000 e ) laissant toutefois une marge d'appréciation quant à la transcription de ses limites sur les plans de zonages des POS (échelle 1/2000 e ) ;

- présenter en annexe le PEB (art. L.147-3 et R.123-24 du code de l'urbanisme).

Pour l'instruction des demandes d'utilisation du sol, et en particulier des permis de construire, deux démarches peuvent s'appliquer :

- lorsqu'il existe un POS rendu public ou approuvé et un PEB approuvé, l'instruction se déroule sur la base des dispositions du POS, sous réserve de sa compatibilité avec les prescriptions de l'article L.147-5 du code de l'urbanisme ;

- lorsqu'il n'existe pas de POS opposable mais uniquement un PEB approuvé, les dispositions de l'article L.147-5 du code de l'urbanisme sont directement opposables.

Votre rapporteur déplore vivement qu'il n'existe pas en droit de l'urbanisme de procédure de " sauvegarde " permettant une maîtrise foncière dans les zones susceptibles d'être touchées par l'approbation d'un nouveau PEB en cours de révision et que, dans ce cas, les demandes d'utilisation du sol soient instruites uniquement sur la base des dispositions d'urbanisme déjà applicables aux territoires concernés.

La très grande partie des aéroports français sont concernés par la réglementation relative aux plans d'exposition au bruit. A ce jour, environ 180 PEB sont en vigueur.

Le projet de loi propose que pour les 9 principaux aéroports français, l'autorité indépendante soit consultée sur les projets de PEB. Cette modification est la seule du projet de loi en matière de maîtrise de l'urbanisme au voisinage des aérodromes.

b) La loi du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit.

La taxe " bruit "

Si elle avait un objectif de lutte contre le bruit en général, la loi dite " loi bruit " du 31 décembre 1992 comportait un volet spécifiquement consacré aux transports aériens. Elle a instauré une taxe d'atténuation des nuisances sonores (ou taxe " bruit ") payée par les compagnies aériennes sur les neuf plus grands aéroports français 10( * ) , désormais intégrée par la loi de finances pour 1999, à la taxe générale sur les activités polluantes, dont le produit est destiné, comme cela est précisé pour le commentaire de l'article 2, à financer l'aide à l'insonorisation des logements des riverains des aéroports .

Rappelons, en outre, que les redevances aéroportuaires elles-mêmes sont, en France, parfois modulées en fonction du bruit émis.

Le calcul de cette taxe " bruit ", perçue désormais pour tout décollage au départ des neuf principaux aéroports français (Paris-Orly, Paris-Charles de Gaulle, Nice, Marseille, Toulouse, Lyon, Bordeaux, Strasbourg et Bâle-Mulhouse) prend en compte la masse maximale au décollage, la qualité acoustique de l'appareil, l'heure de décollage - son taux est doublé pour tout décollage effectué entre 23h30 et 06h00 - et la densité urbaine autour de l'aéroport.

Les plans de gêne sonore

La loi " bruit " a également défini des prescriptions relatives à l'établissement des plans de gêne sonore (PGS), documents cartographiques qui délimitent trois zones (I, II ou III), autour des aéroports et qui permettent de définir l'ordre de priorité des riverains pouvant bénéficier d'une aide à l'insonorisation de leur logement ainsi que le plafond des aides accordées.

A noter que, conformément à l'avis rendu par le Conseil national du bruit le 8 janvier 1998, une réforme du mode d'établissement des PGS est actuellement en cours . Cette réforme devrait s'appuyer sur une nouvelle unité de mesure du bruit permettant une plus juste appréciation de la gêne ressentie par les riverains. La correspondance de ce nouvel indice avec le bruit réellement émis par les avions sera établie par une enquête de gêne sonore auprès d'un échantillon représentatif des personnes concernées au voisinage des aéroports et en particulier de celui de Roissy. Cette enquête est couplée à une campagne de mesures in situ des niveaux de bruit pour cet aéroport, actuellement en cours de réalisation. Les premiers résultats devraient être disponibles au cours du premier semestre 1999.

En plus de ces dispositions générales, des mesures réglementaires spécifiques s'appliquent à certains plates-formes aéroportuaires. Votre rapporteur évoquera celles relatives aux deux plus grands aérodromes franciliens.

c) Les mesures spécifiques à l'aéroport de Paris-Orly

En 1994, le ministre chargé de l'aviation civile avait pris des mesures, toujours en vigueur, pour limiter les nuisances sonores sur l'aéroport d'Orly :

- limitation du nombre total de mouvements :

Le niveau de trafic maximal est exprimé aujourd'hui en termes de créneaux horaires. Il est fixé à 250 000 créneaux par an.

- instauration d'un couvre feu :

Tout mouvement d'aéronef entre 23h30 et 6h00 du matin est interdit sur l'aéroport d'Orly. Ce couvre feu est respecté, seulement deux mouvements toutes les trois semaines sont, en moyenne, acceptées à titre dérogatoire.

- définition de trajectoires de moindre bruit :

Des trajectoires " de moindre bruit " sont publiées dans la documentation aéronautique pour limiter les nuisances autour d'Orly lors des procédures de décollage, en évitant les zones les plus habitées.

Une table ronde sur l'avenir de cet aéroport, organisée par le ministre chargé de l'aviation civile le 14 décembre dernier, a été l'occasion d'annoncer 19 mesures nouvelles pour le développement et la maîtrise des nuisances sonores sur l'aéroport d'Orly.

Pour ce dernier aspect, les dispositions actuellement en cours d'élaboration, outre la révision annoncée du PEB et du PGS, sont les suivantes :

Plafonnement des mouvements des avions de " chapitre 2 " :

Un plafonnement du nombre de mouvements des avions du " chapitre 2 " sera mis en place, sur la base du nombre de mouvements de tels appareils effectués en 1997 sur la plate-forme. Pour les nouvelles compagnies désirant s'implanter à Orly, un quota de vols leur sera alloué, sur la base de la moyenne constatée en 1998, soit 7,9 %. Cette mesure prendra la forme d'un arrêté ministériel et, en cas de constat de non-respect de ces dispositions, la procédure de sanctions instituée par le décret du 27 mai 1997, et déjà appliquée à Roissy (voir ci-dessus et sous le commentaire de l'article L.227-3 du code de l'aviation civile), sera mise en oeuvre (amendes pouvant atteindre 50.000 F pour une personne morale).

Sanction du non respect des procédures de moindre bruit :

Concernant les départs, des procédures de moindre bruit au décollage 11( * ) permettent de réduire les nuisances sonores sur les zones les plus habitées. Le respect de ces procédures fait l'objet de contrôles. Chacune des déviations observées fait l'objet d'une enquête de la part des services en charge de la circulation aérienne et d'un courrier de rappel des procédures d'exploitation à la compagnie aérienne concernée.

Ces dispositions ne sont aujourd'hui publiées uniquement dans la documentation aéronautique. Le ministre s'est engagée à ce qu'elles soient formalisées dans un arrêté ministériel. Ainsi leur non respect pourra être sanctionné en application du décret précité du 27 mai 1997.

Etablissement d'un " code de bonne conduite " :

Comme cela a été fait à Roissy (voir ci-dessous), un " code de bonne conduite " devrait être établi entre tous les professionnels du transport aérien oeuvrant à Orly.

Les engagements des différents acteurs pourront notamment porter sur :

- l'introduction dans la formation des pilotes et des contrôleurs d'une sensibilisation à la nécessité de réduire les nuisances sonores ;

- l'étude et la promotion de méthodes de pilotage à moindre bruit ;

- l'étude de nouvelles procédures.

Elaboration d'une " charte de qualité de l'environnement sonore "

A l'image de la charte élaborée à Roissy (voir ci-dessous), une " charte de qualité de l'environnement sonore " pourra être élaborée entre les différents partenaires pour fixer les objectifs pour maîtriser la pollution sonore et les engagements de l'Etat, d'Aéroports de Paris et des compagnies aériennes.

d) La situation à Paris-Charles de Gaulle

Conformément aux propositions de la mission sur la desserte aéroportuaire du grand bassin parisien, présidée par M. Jacques Douffiagues -à laquelle votre rapporteur a eu l'honneur d'appartenir-, l'ouverture de deux nouvelles pistes, plus courtes , à Roissy (solution du " moindre rempart sonore "), et à la suite du rapport de M. le préfet Carrère et des conclusions que la commission d'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique, présidée par M. Maurice Roy, a rendues le 14 octobre 1996, l'article 3 du décret du 27 mars 1997 a déclaré d'utilité publique les travaux nécessaires à l'aménagement des infrastructures aéronautiques de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle.

Le ministre chargé de l'aviation civile a, lorsqu'il a confirmé , le 23 septembre 1997, la décision de construction des deux nouvelles pistes, annoncé des mesures d'accompagnement dont certaines résultaient directement de la concertation menée depuis plus de deux ans avec les riverains, en vue de limiter les nuisances sonores sur cet aéroport :

Limitation des vols de nuit

Deux arrêtés ont été pris par le ministre chargé de l'Equipement, des Transports et du Logement, pour réduire les émissions de bruit la nuit à Roissy-Charles de Gaulle (et au Bourget).

A Roissy :

L'interdiction de vol de nuit des avions de chapitre 2, les plus bruyants, a été confirmée. Les avions de chapitre  3, les moins bruyants, autorisés à voler la nuit, doivent respecter des procédures particulières de décollage et de montée initiale entre 23h 15 et 6h. Pour les avions munis d'atténuateurs de bruit (hushkités), les plus bruyants au sein du chapitre 3, les procédures sont en cours de modification dans un sens plus contraignant. Les essais moteurs sont interdits de 22 heures à 6 heures, sans dérogation possible de 23 heures à 5 heures.

Au Bourget :

Les avions à hélices, d'un poids supérieur à 9 tonnes et non classés " chapitre 3 ", sont interdits de 23 heures à 6 heures 15. Les avions à réaction sont tous interdits de décollage la nuit.

Limitation des émissions sonores des avions de " chapitre 2 "

Un nouvel arrêté du 29 juin 1998 a imposé aux compagnies aériennes desservant Paris-Charles de Gaulle une diminution progressive de l'énergie sonore des avions du chapitre 2 . En 1998, chaque compagnie devra réduire globalement de 15 % les émissions sonores de ses avions par rapport à 1997, puis de 20 % chaque année jusqu'en 2001.

Nouvelles sanctions

Conformément au décret précité du 27 mars 1997, une Commission nationale de prévention des nuisances s'est mise en place en mars 1998 pour examiner les dossiers établis à la suite des infractions constatées aux règles limitant les nuisances sonores, et proposer des sanctions pouvant aller jusqu'à 50.000 F pour une compagnie.

De mars à octobre 1998, 72 sanctions ont été prises pour un montant cumulé de plus de 1,9 million de francs.

En outre, un nouveau plan de gêne sonore a été établi, les critères d'attribution des aides aux riverains ont été assouplis et le plan d'exposition au bruit est en cours de révision.

Notre pays est engagé, on le voit, sur la voie de la maîtrise des nuisances sonores aéroportuaires, même si ce n'est, au sens des riverains, que trop timidement - comment ne pas les comprendre- ?

C'est, votre rapporteur en est persuadé, la seule solution pour envisager sereinement l'accroissement du trafic aérien.


Pour mieux atteindre cet objectif, le présent projet de loi propose de mettre en place un " arbitre " impartial entre les parties concernées, sous la forme juridique d'une autorité administrative indépendante.

II. L'AUTORITÉ INDÉPENDANTE : UN SOUHAIT PARTAGÉ POUR AMÉLIORER LE DIALOGUE ET LA TRANSPARENCE

A. UN SOUHAIT TRÈS LARGEMENT PARTAGÉ.

1. Le constat et les propositions de la mission Douffiagues

Dans son rapport d'étape rendu public le 31 juillet 1995, la mission conduite par M. Jacques Douffiagues sur la desserte aéroportuaire du grand bassin parisien a fait le constat d'un " dialogue bloqué ", de longue date, entre les différentes parties concernées par l'extension de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle.

La mission commençait son rapport d'étape en ces termes :

" L'opposition affichée de certaines collectivités et des associations riveraines de l'aéroport Charles de Gaulle à l'annonce de la décision ministérielle de réalisation d'une troisième piste à l'aéroport Charles de Gaulle n'était pas un accès de fièvre passagère. Elle était la conséquence de l'accumulation entre les riverains de l'aéroport Charles de Gaulle et les autorités aéronautiques, d'incompréhensions, de malentendus et parfois de maladresses, le résultat d'une histoire dont il faut se souvenir des enchaînements, pour en éviter la reproduction. "

La restauration de la confiance entre riverains et opérateurs aériens est apparue à la mission Douffiagues comme une action à entreprendre d'urgence . Il s'agissait à ses yeux de rétablir " les conditions d'un dialogue franc et confiant, à partir de questions clairement posées, de perspectives fermement tracées, de responsabilités assumées ". Le nécessaire développement de l'activité aéroportuaire passait aussi, selon elle, par la conclusion concomitante entre les partenaires concernés d'un véritable " pacte refondateur " ou " contrat d'objectifs " , accompagné des moyens d'assurer le respect de leurs engagements respectifs. La mission Douffiagues a donc préconisé la " négociation d'un contrat de réduction et de contrôle de l'évolution des nuisances, tant pour le bruit instantané que, progressivement, pour la gêne globale " dont le contrôle de réalisation des objectifs pourrait être assuré avec l'aide d'une " autorité indépendante ".

2. Le rapport de la mission de concertation du préfet Carrère sur l'aéroport Charles de Gaulle

Lors du conseil des ministres du 11 octobre 1995, le Gouvernement a reconnu la justesse de cette approche. Il a chargé le préfet Gilbert Carrère d' " organiser la concertation publique " relative au projet de développement de l'aéroport, le premier des thèmes en étant " l'établissement d'un contrat de maîtrise des nuisances sonores ".

Le rapport de cette mission de concertation, remis en mars 1996, a notamment suggéré qu'une institution soit chargée d'assurer le suivi et le contrôle de la mise en oeuvre de ce contrat . On peut ainsi lire, à l'annexe 1 du rapport, consacrée aux propositions :

" Soucieuse de répondre à l'attente des riverains telle qu'elle a été rapportée par la mission Douffiagues, attente partagée par ADP 12( * ) , la mission s'est efforcée de trouver un cadre juridique qui donne à l'institution l'indépendance et les moyens de contrôle requis, tout en préservant sa nécessaire dimension partenariale. C'est ainsi que lui serait reconnue par ses membres, au premier rang desquels les entreprises et professionnels usagers de l'aéroport, non seulement le droit à une information exhaustive sur les nuisances générées par le trafic aérien, mais plus encore un véritable droit d'interpellation publique en cas de constatation de manquements aux prescriptions réglementaires ou contractuelles liant ceux-ci, telles que " le  code de conduite " préconisé par la mission Douffiagues . "

Le rapport Carrère préconisait toutefois la création de l'autorité indépendante sous forme d'un groupement d'intérêt public (GIP), voire d'un syndicat mixte, remarquant que, si la structure juridique de l'autorité administrative indépendante correspondait mieux à la fonction d'interpellation qui lui serait confiée, la " lourdeur des procédures " et la difficulté d'y inscrire " la démarche partenariale nécessaire à la réconciliation entre l'aéroport et son environnement " pas conduisait la mission à écarter cette solution.

Le rapport Carrère préservait en outre la possibilité d'étendre la compétence de l'autorité à d'autres aérodromes :

" La création d'une telle structure sur Roissy Charles de Gaulle apparaîtrait en cas de succès comme une opération pilote exemplaire dont la transposition à d'autres sites tels qu'Orly est d'ores et déjà suggérée. Il est vrai qu'aux termes du présent projet, elle serait d'emblée dotée de pouvoirs dont aucune structure de concertation sur quelque aéroport étranger que ce soit n'est à ce jour dotée. L'enjeu est donc véritablement d'en faire le laboratoire d'un dialogue moderne, rigoureux, entre le transport aérien et ceux qui en subissent les nuisances. Le présent projet préserve donc la possibilité d'un élargissement à d'autres aérodromes. "

3. Les conclusions de la commission d'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique de l'extension de Paris-Charles de Gaulle

En même temps qu'elle a émis, dans ses conclusions du 14 octobre 1996, un avis favorable au projet d'extension de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle , la commission d'enquête présidée par M. Maurice Roy a associé cet avis de plusieurs conditions suspensives, parmi lesquelles figuraient, outre l'élaboration d'une charte de maîtrise des nuisances sonores et d'un code de bonne conduite :

" La mise en place de l'institution indépendante présidée par un conseiller d'Etat comprenant, à côté d'un collège scientifique d'experts, des représentants de l'Etat, d'Aéroports de Paris, des élus, des associations, des partenaires économiques (chambres de commerces).

Son statut, à l'exception d'une association, sera défini par la loi pour se rapprocher de celui d'un groupement d'intérêt public ou de toute autre forme équivalente. "

4. L'institution indépendante créée par le décret du 28 mars 1997

S'inspirant de ces recommandations, le précédent Gouvernement avait prévu la création, pour l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle, d'une institution indépendante , dont les missions -très proches de celles que le présent projet de loi confie à l'autorité administrative indépendante qu'il propose de créer-, sont détaillées, ci-après, sous le commentaire de l'article premier (article L 227-4 du code de l'aviation civile).

Cette institution indépendante, bien que mise en place par décret le 28 mars 1997, n'a jamais eu d'activité.

5. L'engagement pris par le ministre lors de l'annonce de l'extension de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle

Lors de la conférence de presse sur l'avenir de Roissy, le 23 septembre 1997, au cours de laquelle a été annoncé le lancement des travaux pour la construction des deux nouvelles pistes, le ministre s'est exprimé ainsi :

" J'en arrive à la satisfaction d'une exigence unanime : qu'une autorité réellement indépendante soit mise en place. Les contrôleurs, si je puis dire, ne doivent pas être liés aux contrôlés. (...)L'autorité indépendante sera réellement indépendante de toutes le parties en cause. Et ce n'est pas un décret qui la définira dans ses missions et sa composition, mais la loi. "

6. Un accord de principe quasi unanime

Votre rapporteur a pu le constater lors des entretiens qu'il a eus dans le cadre de la préparation du présent rapport : aucune des parties concernées (administration, gestionnaires d'aéroports, compagnies, associations de riverains) n'a contesté le principe de la création d'une autorité indépendante.

Tous ont souhaité l'intervention d'un " arbitre ", d'un " tiers extérieur et objectif ", voire d'un " juge de paix " qui permette d'améliorer l'information et le dialogue.

B. L'AUTORITÉ ADMINISTRATIVE INDÉPENDANTE : UN MODÈLE JURIDIQUE DÉSORMAIS CONSACRÉ

1. Une catégorie qui rassemble des institutions diverses13( * )

a) Une apparition progressive

Alors que l'organisation administrative française est fondée sur un principe hiérarchique , conforté par l'article 20 de la Constitution qui indique que le Gouvernement " dispose de l'administration ", sont peu à peu apparues, au sein de l'administration publique, des institutions exerçant, en toute indépendance, des fonctions administratives.

Dès la création, en 1967, de la Commission des opérations de bourse (COB), puis de la Commission nationale du droit de réponse (1975) et de la Commission des sondages (1977), le modèle des autorités administratives indépendantes s'est peu à peu dégagé, même s'il faut attendre la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés pour voir figurer dans la loi - au sujet de la Commission nationale informatique et libertés (CNIL) le terme " d'autorité administrative indépendante ".

Le Conseil Constitutionnel n'a pas censuré le mouvement de création de ces autorités administratives indépendantes. Bien au contraire il lui est arrivé de suppléer au silence de la loi, en requalifiant d'autorité administrative indépendante la Haute Autorité de la communication audiovisuelle (décision du 26 juillet 1984), et en faisant de même pour le Conseil supérieur de l'audiovisuel qui a succédé à la Haute Autorité (décision du 17 janvier 1989). Plusieurs décisions du Conseil constitutionnel ont admis que soient transférés aux autorités administratives indépendantes des pouvoirs de réglementation et de sanction administratives.

Dans son rapport annuel, le Conseil d'Etat a, dès 1983, estimé " commode et légitime ", par la voix de sa Commission du rapport et des études, de regrouper sous le vocable d'" autorités administratives indépendantes " des organismes publics situés au sein de l'exécutif, dotés d'un pouvoir autonome de décision ou d'influence dans un secteur déterminé.

Au contentieux, le Conseil d'Etat, compétent pour connaître, en tant que juge administratif, des recours pour excès de pouvoir dirigés contre les actes des " autorités administratives " s'est aussi attaché à qualifier ces actes d'actes administratifs. Ainsi en a-t-il été, par exemple, des décisions du Médiateur de la République (arrêt Retail du 10 juillet 1981).

Quant à la doctrine , elle a depuis longtemps admis l'existence d'une nouvelle notion de droit administratif, l'analysant dans les manuels, dans de nombreux articles de revues et au cours de divers colloques.

b) Une réalité multiforme

La liste de ces autorités est difficile à établir, en raison de leur extrême diversité. Au-delà de certaines autorités bien connues comme la COB ou le CSA existent, en effet, d'autres commissions qui peuvent être rattachées à cette catégorie.

Le tableau suivant tente d'en dresser une liste -sans doute non exhaustive.

LES AUTORITES ADMINISTRATIVES INDEPENDANTES

La régulation des activités financières

- la Commission des Opérations de Bourse

- le Conseil de discipline des organismes de placement collectif en valeurs mobilières

- la Commission bancaire

- le Conseil des marchés financiers

- la Commission de contrôle des assurances

- le Conseil de la Concurrence

- la Commission des clauses abusives

- la Commission de la sécurité des consommateurs

- le Médiateur du cinéma

La régulation de l'information et de la communication

- le Conseil supérieur de l'audiovisuel

- le Conseil supérieur de l'agence France-Presse

- La Commission paritaire des publications et des agences de presse

- la Commission des sondages

- la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques

La protection contre les excès de la bureaucratie

- la Commission nationale de l'Informatique et des Libertés

- la Commission d'accès aux documents administratifs

- la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité

- le Médiateur de la République

- la commission des infractions fiscales

L'évaluation de l'action administrative

- le Comité national d'évaluation des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel

La régulation des services publics de réseau

- l'Autorité de régulation des télécommunications

- la future Commission de régulation de l'électricité (projet de loi).

Comme le fait remarquer un article de doctrine consacré à cette question 14( * ) , " on ne saurait nier les différences évidentes qui apparaissent entre les autorités. Aussi doit-on convenir qu'il existe parmi ces autorités un " noyau dur " composé d'autorités disposant d'un pouvoir de décision qui en fait d'incontestables autorités (CNIL, CNCL 15( * ) , COB, Conseil de la concurrence...) et une nébuleuse composée d'autorités qui ne disposent pas d'un pouvoir de décision au sens juridique classique mais qui exercent une influence déterminante en fixant des directives de comportement... "

C'est de façon empirique, en comparant les textes relatifs à ces diverses institutions, qu'a pu être mise à jour une définition de l'autorité administrative indépendante.

2. Quelques éléments de définition du régime juridique de ces autorités

a) Autorité...

Les autorités administratives indépendantes sont investies d'une autorité réellement coercitive ou simplement morale, qui se manifeste par un pouvoir soit de décision, soit de recommandation, de proposition ou même simplement d'avis . C'est davantage leur influence, leur capacité de persuasion, la légitimité qui leur est reconnue pour assurer la régulation d'un secteur ou l'application d'une loi qui importe, plus que l'étendue de leur pouvoir normatif. Ces autorités ont souvent été créées, comme le fait remarquer l'ouvrage précité de M. Michel Gentot, pour " renouveler les modes classiques d'expression du pouvoir d'Etat ". Cet ouvrage estime que :

" C'est donc une définition large de " l'autorité " qu'il convient de retenir, intégrant des organismes qui ont des responsabilités dans un processus administratif de décision ou de contrôle, en exerçant un " pouvoir d'influence " ou une " magistrature morale ", autant que ceux auxquels le législateur a confié le pouvoir de prendre des décisions réglementaires ou individuelles. "

Deux caractéristiques renforcent généralement ce critère d'autorité :

- la respectabilité, la compétence voire l'éminence des membres, parfois dénommés les " sages " ;

- la collégialité des délibérations et des décisions 16( * ) .

b) ...administrative...

Les autorités administratives indépendantes sont constituées au sein de l'administration .

Ce caractère administratif est révélé par le fait qu'elles n'ont pas de personnalité morale distincte de l'Etat. Elles disposent en outre de prérogatives de puissance publique : il s'agit parfois de pouvoirs réglementaires, voire d'un pouvoir de sanction administrative. Des recours peuvent être formés devant le juge administratif contre les actes administratifs pris par elle (voire devant le juge judiciaire).

La gamme des pouvoirs qui peuvent être confiés à ces autorités administratives est large :

- pouvoir d'avis : ce pouvoir, qualifié de " minimum vital " par certains auteurs, concrétise le pouvoir d'influence de ces autorités. Il s'agit souvent d'une consultation, parfois d'un avis conforme (commission des infractions fiscales ; CNIL), plus contraignant.

- pouvoir de recommandation : proche de l'avis, la recommandation émane spontanément de l'autorité. Elle est dépourvue de force exécutive ;

- pouvoirs d'investigation : il peut s'agir d'une obligation d'information, d'un droit à recueillir des renseignements (CNIL, CADA, COB) ; d'un droit à convoquer des agents publics (Médiateur, CNIL, Conseil de la concurrence) ; ou d'un pouvoir de saisie de documents (Conseil de la concurrence).

- pouvoir réglementaire : le pouvoir de prendre des règlements, c'est-à-dire des normes générales et impersonnelles créant des obligations et ouvrant des droits, a été conféré par la loi à certaines autorités. Le Conseil Constitutionnel a admis cette possibilité 17( * ) ;

- pouvoir de prendre des mesures individuelles : certaines autorités (CSA, ART...) ont un pouvoir d'autorisation individuelle, voire de nomination (CSA), ainsi que de mise en cause (avertissement de la CNIL, mise en demeure de l'ART, injonction du CSA, de la COB, de la Commission bancaire...).

- pouvoir de saisir un juge : la COB ou le Conseil de la concurrence par exemple sont titulaires de ce type de pouvoir ;

- pouvoir de sanction : c'est le cas du CSA, de la COB, du Conseil de la concurrence ou de l'ART. L'octroi de pouvoirs de sanction à une autorité administrative indépendante a été reconnu par le Conseil Constitutionnel (pour le CSA et la COB en 1989, pour l'ART en 1996).

- pouvoir de médiation, voire d'arbitrage : l'ART dispose, en matière d'interconnexion 18( * ) , de pouvoirs importants d'arbitrage entre les opérateurs, dans le cadre de la conclusion des conventions d'interconnexion. Ces pouvoirs ont été utilisés à plusieurs reprises, dans le cadre du litige sur la fourniture du téléphone et d'Internet sur les réseaux du " Plan Câble ".

c) ...indépendante.

Bien que ce point ait pu être, par le passé, sujet à controverse 19( * ) , en raison de la nomination de certains membres par des politiques, l'indépendance est une des caractéristiques essentielles de ces autorités.

Elle est assurée par le statut des membres :

- irrévocabilité ;

- impossibilité d'effectuer un second mandat ;

- régime d'incompatibilités strictes qui permettent de garantir leur impartialité.

Cette indépendance s'entend tant vis-à-vis du Gouvernement que de différents groupements d'intérêts, et même de l'opinion. Elle est renforcée par le fait que ces autorités disposent de services propres et d'une autonomie de gestion.

III. LE PROJET DE LOI ET LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. LE PROJET DE LOI

Adopté en conseil des ministres le 7 octobre dernier, le présent projet de loi s'inscrit, comme cela a été dit, dans le prolongement de la concertation menée à l'occasion du projet d'extension de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle qui a montré le souhait que le développement des infrastructures, nécessaire à la croissance du transport aérien, soit mis en oeuvre dans le cadre d'une politique de transparence et de concertation avec les riverains , notamment pour la lutte contre les nuisances sonores.

L'article premier du projet de loi propose de mettre en place une haute autorité en matière de nuisances sonores aéroportuaires , dont l'indépendance et l'impartialité seraient incontestables. Cette " Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire " serait composée de membres désignés par le président de l'Assemblée nationale et par le président du Sénat, et d'experts en matière de bruit ou d'aéronautique. L'indépendance des membres de cette institution serait garantie par une durée de mandat de six ans et par la mise à disposition d'un budget. Elle serait renforcée par des clauses de non renouvellement, d'absence de possibilité de révocation et d'incompatibilité du mandat avec certaines fonctions.

Cette autorité serait dotée d'un pouvoir d'élaboration de prescriptions techniques et d'un devoir d'information des riverains pour les principaux sites aéroportuaires, c'est-à-dire Paris-Charles de Gaulle, Paris-Orly , Nice, Marseille, Toulouse, Lyon-Satolas, Mulhouse, Bordeaux et Strasbourg.

Il lui appartiendrait de définir des prescriptions et d'homologuer les réseaux de mesure du bruit. Le devoir d'information serait mis en oeuvre par la diffusion très large des mesures de bruit enregistrées, la mise en oeuvre d'un plan de communication et la publication d'un rapport annuel. L'autorité aurait également une mission de conseil et d'avis, notamment lors de l'établissement des plans de gêne sonore et des plans d'exposition au bruit (article 4).

L'article 2 du projet de loi renforce le rôle des commissions consultatives de l'environnement en les dotant d'une instance permanente de travail, le comité permanent, et de moyens de fonctionnement.

Pour les principaux sites aéroportuaires, le texte propose de rendre de droit la création de cette commission et de lui confier un pouvoir de saisine de l'autorité indépendante pour contrôler le respect des engagements pris par les différentes parties intéressées à l'exploitation de l'aérodrome en vue d'assurer la maîtrise des nuisances sonores. En outre, le texte propose que les commissions consultatives d'aide aux riverains soient constituées en son sein.

L'article 3 du projet de loi restreint le trafic d'hélicoptères dans les zones à forte densité de population.

B. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

1. Un accord de principe

Votre commission estime que la création de cette nouvelle autorité indépendante, attendue par l'ensemble des parties concernées depuis que la mission Douffiagues l'avait proposée en 1996, est nécessaire à la pérennité et à la qualité de la concertation autour des aéroports, en vue de mieux maîtriser les nuisances sonores.

2. Une volonté d'instituer une autorité morale plus qu'un organisme coercitif

Votre commission est consciente du fait que les pouvoirs qui seront conférés à la nouvelle autorité sont moins étendus que ceux de certaines de ses " consoeurs " qui disposent de pouvoirs d'autorisation individuelle pour l'attribution de licences, d'arbitrage ou de sanction administrative. Mais cette " modestie " semble sage à votre commission.

En effet, les missions de la nouvelle autorité (information, conciliation, garantie de la fiabilité des mesures du bruit) répondent aux attentes des différents acteurs de voir mis en place un tiers objectif, à l'autorité morale incontestable
. Aller plus loin, au nom d'un modèle juridique -d'ailleurs contestable, vu la diversité des autorités administratives indépendantes décrites au chapitre II de cet exposé général- serait inadapté.

Ainsi, votre commission n'a-t-elle pas souhaité accroître dès aujourd'hui les pouvoirs de l'autorité par rapport à ce que prévoit le présent texte de loi.

Pour autant, elle a entendu renforcer, dans le cadre des pouvoirs de médiation qui lui sont dévolus, les compétences de cet organisme en adoptant des amendements accroissant ses missions :


- d'information des riverains ;

- de recommandation aux pouvoirs publics ;

- de conciliation entre les parties en cas de désaccord sur l'application d'engagements définis dans les chartes de maîtrise de l'environnement sonore.

Afin d'insister sur le renforcement de ce rôle de médiation et de conciliation, votre commission vous propose de supprimer les termes, trop restrictifs, de " contrôle technique " dans le nom de l'autorité, pour faire de cette dernière " l'Autorité de régulation de l'environnement sonore aéroportuaire " (ARESA).

3. Un souci d'améliorer le fonctionnement de l'autorité et d'accroître ses garanties d'indépendance

Pour renforcer les garanties d'indépendance de l'autorité, votre commission a adopté des amendements inscrivant dans le texte de loi des dispositions qui existent pour certaines autres autorités indépendantes comme le CSA, l'ART ou la CNIL :

- incompatibilité avec la détention d'intérêts dans une entreprise aéronautique ;

- limite d'âge (65 ans) pour être nommé ;

- dispositions précisant le montant du traitement des membres ;

- statut et obligation de confidentialité du personnel.


Dans un souci d'efficacité, votre commission a adopté des amendements pour mieux coordonner les actions respectives de l'autorité et des commissions consultatives de l'environnement , ce qui est d'autant plus important que ces dernières voient leur rôle et leurs moyens renforcés par l'article 2 du projet de loi.

4. Un impératif : la prise en compte des problèmes de santé humaine

Votre commission a introduit, au collège de l'autorité, une personne qualifiée en matière de santé humaine , à côté des experts en matière acoustique et aéronautique.

5. Un souhait d'aboutir à une solution pragmatique et concertée pour le trafic d'hélicoptères

Votre commission a adopté un amendement remplaçant les interdictions absolues posées par l'article 3 du projet de loi par une solution plus souple permettant au ministre de limiter, au cas par cas et après consultation des parties intéressées, les nuisances causées par le trafic d'hélicoptères dans les zones fortement urbanisées.

6. Maîtriser l'urbanisme et mieux informer les riverains

Votre commission a adopté trois articles additionnels tendant à :

- informer clairement les riverains potentiels, à peine de nullité du contrat de vente ou de location, lorsqu'un bien immobilier qu'ils s'apprêtent à louer ou à acheter, est situé dans un plan d'exposition au bruit ;

- étendre cette obligation d'information au-delà du plan d'exposition au bruit (jusqu'à la courbe isopsophique 69) ; :

- instaurer une procédure conservatoire en matière de droit de l'urbanisme pour éviter que ne soient construites les zones susceptibles d'être incluses, à court terme, à un plan d'exposition au bruit.

Votre commission vous propose d'adopter le projet de loi ainsi amendé.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1 er -

Autorité de contrôle technique
de l'environnement sonore aéroportuaire


Chapitre VII du titre II du livre II de la première partie
du code de l'aviation civile : " Environnement des aérodromes "

Cet article insère dans le code de l'aviation civile un nouveau chapitre, composé de huit articles, créant une nouvelle autorité administrative indépendante compétente en matière de bruit aux abords des aéroports.

Ce nouveau chapitre VII du titre II, relatif aux aérodromes ouverts à la circulation aérienne publique, du livre II, consacré aux aérodromes, de la première partie -législative- du code de l'aviation civile, insère huit articles nouveaux , relatifs à la création et au mode de nomination des membres de la nouvelle autorité administrative indépendante, à leur régime d'incompatibilité, aux dispositions de leur statut qui garantissent leur indépendance, ainsi qu'aux pouvoirs de ses agents, à ses attributions et aux modalités de publicité de ses travaux.

Dans un souci de clarté et afin de refléter plus clairement le contenu de ce nouveau chapitre, votre commission vous propose d'intituler ce chapitre : " Autorité de régulation de l'environnement sonore aéroportuaire ".

En effet, votre commission a modifié l'intitulé de l'autorité (voir ci-après).

Article L.227-1 du code de l'aviation civile -

Création et composition de l'autorité

Cet article instaure une nouvelle autorité indépendante et fixe le mode de désignation et la durée du mandat de ses membres.

La rédaction de cet article s'inspire des dispositions en vigueur pour les autres autorités administratives indépendantes, relatives à l'existence et au mode de désignation de leurs membres, qu'il s'agisse par exemple des lois relatives à la création du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), de la Commission nationale informatique et liberté (CNIL) ou de l'Autorité de régulation des télécommunications (ART), même si certaines spécificités apparaissent dans le texte proposé.

I. CRÉATION D'UNE AUTORITÉ ADMINISTRATIVE INDÉPENDANTE DE CONTRÔLE TECHNIQUE DE L'ENVIRONNEMENT SONORE AÉROPORTUAIRE

La question du principe de la création d'une autorité administrative indépendante a déjà été soulevée dans l'exposé général du présent rapport. Votre rapporteur n'y reviendra pas.


On se bornera donc ici à indiquer que le texte proposé pour l'article L.227-1 du code de l'aviation civile institue un organisme doté d'un tel statut, qui est dénommé " Autorité de contrôle technique de l'environnement sonore aéroportuaire ".

En cohérence avec ses propositions tendant à renforcer le rôle de proposition et de médiation de cette autorité, votre commission a adopté un amendement à cet article comme aux autres articles, tendant à la nommer " Autorité de régulaiton de l'environnement sonore aéroportuaire " (ARESA) et non " Autorité de " contrôle technique " de l'environnement sonore aéroportuaire " (ACTESA).

En conséquence de la création de cette autorité, l'institution indépendante créée en 1997 par le décret n°97-284 du 27 mars 1997 pour le seul aéroport de Roissy -et qui n'a pas eu d'activité- serait supprimée et le décret abrogé.

Contrairement à ce qui est de mise pour d'autres autorités indépendantes, le texte du projet de loi ne définit pas la mission générale de l'organe qu'il créé. Votre commission vous propose d'insérer dans le texte une phrase pour remédier à cette lacune.

II. COMPOSITION DE L'AUTORITÉ

1. Le nombre de membres

Le nombre de membres de l'autorité est fixé à sept par le projet de loi
. Les exemples d'autorités indépendantes existantes montrent que le législateur a opté, au fil des textes de loi, pour une diversité de solutions : le nombre de membres de la CNIL est de dix-sept, celui de la COB de dix, alors que le CSA a neuf membres, l'ART cinq membres, tandis que le projet de loi relatif à la modernisation et au développement du service public de l'électricité propose de nommer six membres à la Commission de régulation de l'électricité.

2. Le mode de nomination des membres

Comme c'est souvent le cas pour ce type de structure administrative, le mode de nomination des membres est mixte : le texte prévoit que, à l'instar de dispositions de la Constitution relatives au Conseil constitutionnel et de dispositions législatives similaires pour d'autres autorités, certains membres seront nommés par le pouvoir exécutif et d'autres par le pouvoir législatif. Cette pluralité d'origine vise à accroître la légitimité, la représentativité, le pluralisme et l'indépendance des membres.

Pourtant, cette logique n'est pas mise en oeuvre clairement par le projet de loi :

D'abord, les membres " désignés " par le Président de l'Assemblée nationale et du Sénat sont pourtant " nommés par décret du Premier Ministre ". Cette disposition consacre une certaine confusion des genres : le décret ne pouvant contrevenir au choix des Présidents des assemblées, il est alors contraint.

On rappellera cependant que de telles dispositions existent déjà dans le droit : la loi de 1978 relative à l'informatique aux fichiers et aux libertés a consacré une solution voisine pour la CNIL, de même que la loi de 1986 relative à la liberté de la communication pour le CSA.

Ensuite, le projet de loi prévoit l'intervention de deux types de décrets pour la nomination des membres de l'autorité :

- un décret en Conseil des ministres pour la nomination du Président,

- un " décret du Premier Ministre " pour la nomination des six autres membres, dont deux seraient au préalable " désignés " , comme cela vient d'être dit, par les présidents des assemblées parlementaires.

Cette solution pourrait résulter de la volonté de conférer au président de l'autorité une légitimité et un prestige supplémentaire du fait de sa nomination en Conseil des ministres -qui requiert en outre, en pratique un accord du Président de la République et du Premier Ministre sur sa personne-.

Même si un système voisin s'applique déjà à la COB, autorité dont la collégialité est d'ailleurs moins marquée que d'autres autorités indépendantes, le Président et les autres membres de cette autorité n'étant pas nommés pour la même durée, cette disposition est en contradiction avec le caractère collégial de ce type d'institution, qui est une garantie d'indépendance et d'impartialité .

Aussi, votre commission vous propose d'adopter une rédaction qui, se rapprochant de certains modèles déjà en vigueur (dont celui de l'ART), consacre une répartition plus claire du pouvoir de nomination entre pouvoirs législatif et exécutif et au sein même de l'exécutif, et qui respecte mieux le principe de collégialité :

- deux membres seraient nommés respectivement par le Président de l'Assemblée nationale et le Président du Sénat ;

- cinq membres, dont le président et les quatre experts, seraient nommés par décret du Président de la République.

3. La qualification des membres

Le texte de loi ne formule pas d'exigence générale quant à la qualité des membres susceptibles d'être nommés, à l'inverse par exemple du décret précité du 27 mars 1997 pour l'institution indépendante, ainsi que, pour l'Autorité de régulation des télécommunications, de la loi du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications qui avait prévu, à la suite d'un amendement de la Haute Assemblée 20( * ) , que les membres soient compétents en matière, notamment, d'économie des territoires.

On relèvera également que le projet de loi précité sur le service public de l'électricité comprend une prescription d'ordre général sur la compétence des membres de la commission de régulation de l'électricité en matière juridique, économique et technique.

Votre commission vous propose de rajouter une condition de compétence générale pour les membres de l'autorité, afin d'accroître leur légitimité et leur autorité, notamment pour les membres " non experts " comme le président et les deux membres nommés par les présidents des assemblées parlementaires.

Le projet de loi prévoit que des personnalités soient nommées pour leur compétence respectivement en matière " d'acoustique et de gêne sonore " et " d'aéronautique et de navigation aérienne ". Ces dispositions sont reprises du décret du 27 mars 1997 qui imposait que, sur les dix experts de l'institution indépendante, la moitié soit compétente en acoustique et gêne sonore et l'autre en aéronautique et navigation aérienne.

Votre commission vous propose d'introduire, au sein de l'autorité, un expert en matière de santé humaine et de composer ainsi le collège des experts :

- un expert en santé humaine ;

- un expert en acoustique et en gêne sonore ;

- un expert en transport aérien ;


- un expert en navigation aérienne.

On notera que ne figure pas dans le texte, contrairement aux dispositions relatives à l'ART et au CSA, par exemple, de limite d'âge pour la nomination. Votre commission vous propose d'en instaurer une identique (65 ans).


4. La durée et le rythme de renouvellement des mandats

Le projet de loi prévoit que les membres de l'autorité sont nommés pour six ans.


Cette durée est identique à celle qui régit le statut des membres du CSA, ou de l'ART, pour ne prendre que ces deux exemples. La durée du mandat des membres de la CNIL est quant à elle de cinq ans, celle des membres de la COB de quatre ans (six ans pour le Président).

Rythme de renouvellement

Le souci légitime d'assurer la continuité de l'action de l'autorité inspire le système proposé, relativement classique, de renouvellement triennal par moitié des membres.

Le projet de loi prévoit que :

- les membres de l'autorité " autres que le Président " sont renouvelés par moitié tous les trois ans ;

- le mandat est de six ans ;

- pour la première nomination, trois membres -dont ne fait pas partie le Président- choisis par tirage au sort dans chaque catégorie (experts aériens, experts en matière de bruit, membres désignés par les Présidents des assemblées), sont nommés pour 3 ans seulement.

Votre commission a adopté une rédaction modifiée de ces dispositions, tendant à assurer :

- un renouvellement par moitié tous les trois ans ;

- un mandat de six ans, sauf, à la constitution initiale de l'autorité, pour trois membres, dont deux " experts " et un membre nommé par l'un ou l'autre président des assemblées, désignés par tirage au sort et nommés pour trois ans seulement, le président étant, quant à lui, nommé pour six ans.


En prenant l'hypothèse que l'autorité soit constituée en 2000, le système de renouvellement serait le suivant : le Président serait nommé en 2000 puis tous les six ans, et seraient effectuées, à partir de 2003, 3 ou 4 nominations tous les trois ans, suivant le schéma ci-après :

RYTHME PRÉVU DE DÉSIGNATION DES MEMBRES

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Nombre de nominations

7

 
 

3

 
 

4

 
 

3

 
 

4

siège n° 1 : Président

-

-

-

-

-

-

 
 
 
 
 
 
 

siège n° 2 : (Sénat ou Assemblée)

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

siège n° 3 : (Sénat ou Assemblée)

-

-

-

-

-

-

 
 
 
 
 
 
 

siège n° 4 : (expert)

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

siège n° 5 : (expert)

-

-

-

-

-

-

 
 
 
 
 
 
 

siège n° 6 : (expert)

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

siège n° 7 (expert)

-

-

-

-

-

-

 
 
 
 
 
 
 

- : première série de nominations pour 6 ans

: première série de nominations pour 3 ans, par tirage au sort

deuxième série de nominations (pour 6 ans)

: troisième série de nominations (pour 6 ans)

: quatrième série de nominations (pour 6 ans)

: cinquième série de nominations (pour 6 ans)

5. Les garanties d'indépendance des membres

Comme il est de coutume, deux dispositions, en plus du régime d'incompatibilités qui figure à l'article L.227-2 (voir ci-dessous), assurent l'indépendance des membres de l'autorité :

- l'irrévocabilité du mandat,

- son caractère non renouvelable,

Il s'agit de deux garanties essentielles.

L'interruption anticipée du mandat donne lieu à une nomination pour la durée du temps restant à courir. Si celle-ci est inférieure ou égale à deux ans, et par dérogation au principe de non-renouvelabilité, le remplaçant peut être renommé membre de l'autorité .

Ces dispositions figurent, plus ou moins clairement, dans d'autres textes réglant le statut d'autorités administratives indépendantes.

Notons que les motifs d'empêchement éventuel d'un membre de l'autorité ne sont pas spécifiés dans le présent projet. Il est simplement dit : " si l'un des membres ne peut exercer son mandat ... ".

Pour renforcer les garanties d'indépendance, votre commission vous propose de préciser que, comme c'est le cas pour la CNIL 21( * ) , sauf démission, il ne peut être mis fin aux fonctions de membre de l'autorité qu'en cas d'empêchement constaté par elle dans des conditions qu'elle définit.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-1 du code de l'aviation civile ainsi modifié.

Article L.227-2 du code de l'aviation civile -

Régime d'incompatibilité des membres de l'autorité

Cet article pose les incompatibilités corrélatives à la fonction de membre de l'autorité, en vue d'assurer l'indépendance de l'institution.

Cet article comporte un autre volet traditionnel du statut des membres d'une autorité administrative indépendante, destiné à assurer leur indépendance, celui des incompatibilités électives et professionnelles .

Le texte dispose que la fonction de membre de l'autorité est incompatible avec :

- un mandat électif ;

- une activité professionnelle publique ou privée ;

- une responsabilité associative conférant un intérêt direct ou indirect à l'activité des aéroports.

Votre commission vous propose d'y ajouter une incompatibilité avec la détention directe ou indirecte d'intérêts dans une entreprise du secteur de l'aéronautique.

Elle a, en outre, apporté à la rédaction une clarification destinée à lever une éventuelle ambiguïté quant à l'incompatibilité avec tout mandat électif et toute activité professionnelle.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-2 du code de l'aviation civile ainsi modifié.

Article L.227-3 du code de l'aviation civile -

Compétences générales de l'autorité

Cet article confère des compétences générales à l'autorité, en matière de recommandation et de saisine de l'administration.

Dans le texte proposé par le projet de loi pour cet article du code, les compétences générales de l'autorité sont de deux ordres :

un pouvoir de recommandation , à son initiative ou à la demande des ministres chargés de l'environnement ou de l'aviation civile, sur :

la maîtrise des nuisances sonores et la limitation de leur impact sur l'environnement ;

La mesure du bruit.

Votre commission vous propose de préciser qu'il s'agit de la mesure des nuisances sonores occasionnés non seulement par le transport aérien, mais aussi par l'activité aéroportuaire, ce qui étend la notion aux bruits ambiants et au bruit du trafic routier notamment.

En outre, compte tenu d'une certaine remise en cause actuelle des indices de bruit retenus et de la nécessité de définir de nouveaux indices de mesure, votre commission vous propose de préciser que ce pouvoir de recommandation de l'autorité concernant la mesure du bruit s'étend à la définition des indices de mesure .

un pouvoir de saisine de l'autorité administrative, en cas de manquement aux règles de protection de l'environnement des aérodromes.

Par souci de clarté rédactionnelle, votre commission vous propose de préciser qu'il s'agit de l'environnement sonore des aérodromes.


En effet, même si la question de la compétence de l'autorité sur les autres éléments de l'environnement aéroportuaire (qualité de l'air et de l'eau notamment) se pose, le choix du projet de loi est de limiter, pour l'instant, ces compétences à la gêne sonore.

Ce pouvoir de saisine de " l'autorité administrative compétente " par la nouvelle activité indépendante pose la question de la coordination de son action avec la commission existante en matière de sanction des infractions aux limitations des nuisances sonores.

Rappelons que, suivant le décret en Conseil d'Etat du 27 mai 1997, pris par le précédent Gouvernement et appliqué par l'actuel Gouvernement, l'article R.226-1 du code de l'aviation civile indique que le ministre peut infliger une sanction administrative à un contrevenant, sur proposition de la commission nationale de prévention des nuisances (CNPN).

La CNPN est ainsi composée :

COMMISSION DE PRÉVENTION DES NUISANCES SONORES

Article R.226-5 du code de l'aviation civile

(Décret n° 97-534 du 27 mai 1997, art. 1 er )

Les membres de la Commission nationale de prévention des nuisances, ainsi que leurs suppléants, sont nommés par arrêté du ministre chargé de l'aviation civile pour une période de trois ans renouvelable.

La commission est présidée par un inspecteur général de l'aviation civile et de la météorologie et comprend en outre :

1° Quatre représentants de l'Etat, dont un proposé par le ministre chargé de l'environnement et un proposé par le ministre chargé de la défense ;

2° Quatre personnalités qualifiées dans le domaine de l'aéronautique, dont au moins un exploitant et un gestionnaire d'aérodrome ;

3° Quatre personnalités qualifiées dans le domaine de l'environnement, proposées par le ministre chargé de l'environnement, dont une au moins au titre des associations de riverains.

La procédure de sanction définie aux articles R.226-1 à 6 du code de l'aviation civile est la suivante :

- un arrêté ministériel est nécessaire pour fixer des restrictions d'usage sur une plate-forme . A ce jour, sont concernés les aérodromes de Charles-de-Gaulle, Le Bourget, Toulouse, Toussus-le-Noble et Issy-les-Moulineaux. (Un arrêté est en préparation pour Nice) ;

- lorsqu'une infraction aux arrêtés portant restriction d'usage en vue de réduire le bruit autour des aérodromes est constatée, un procès-verbal d'infraction est dressé par un agent assermenté et notifié au responsable du vol, par lettre recommandée avec accusé de réception ;

- les responsables du vol, propriétaires, exploitations techniques ou exploitant commerciaux des aéronefs doivent alors justifier leur décision par lettre recommandée avec accusé de réception, adressée sous quarante-huit heures au ministre chargé de l'aviation civile ; le responsable du vol dispose d'un mois pour faire part de ses observations,

- à l'issue de ce délai, un dossier est adressé au ministre chargé de l'aviation civile , comprenant :

la copie du procès-verbal d'infraction et sa notification,

la réponse éventuelle du responsable du vol,

tout élément complémentaire d'enquête ou d'appréciation,

un rapport écrit ;

- quinze jours plus tard avant la réunion de la CNPN, le contrevenant est convoqué et reçoit à cette occasion communication des éléments de son dossier. On lui rappelle le montant maximum de l'amende encourue, ainsi que la possibilité de se faire représenter ou assister par la personne de son choix ;

- après l'avoir entendu, la commission transmet, sous forme d'avis, sa proposition au ministre. Le montant maximal des amendes est de 10.000 francs pour une personne physique et de 50.000 francs pour une compagnie.

Le projet de loi ne modifie pas le fonctionnement de cette commission.

De nombreuses personnes concernées, entendues par votre rapporteur lors de la préparation du présent rapport, ont souhaité, en effet, que la Commission nationale de prévention des nuisances , où siègent l'administration, les riverains, les compagnies et le gestionnaire d'aéroport, soit maintenue en l'état .

Prenant acte de ce souhait, votre commission s'est toutefois interrogée :

- quelle sera l'articulation des actions respectives de l'autorité et de la Commission de prévention des nuisances sonores ?

- de quels moyens concrets disposera l'autorité pour constater, éventuellement, les infractions considérées et être ainsi à même de saisir la CNPN ? En particulier, la rédaction actuelle peut laisser supposer que l'autorité pourra diligenter des agents pour constater les infractions et créer ainsi un corps de contrôleurs qui ferait double emploi avec les agents assermentés cités à l'article L.150-13 du code, qui constatent aujourd'hui les infractions et dressent les procès-verbaux pour les transmettre à la Commission de prévention des nuisances sonores. Dans un souci de bonne coordination des actions de l'autorité et de la CNPN, votre commission vous proposera, à l'article L.227-8, un tendant à éviter une telle situation.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-3 du code de l'aviation civile ainsi modifié.

Article L.227-4 du code de l'aviation civile -

Compétences pour le contrôle du bruit au voisinage
des neuf aérodromes les plus importants

Cet article détaille les compétences de l'autorité pour la mesure et la maîtrise du bruit au voisinage des 9 aérodromes français ayant le trafic le plus important.

En plus des compétences à caractère général définies ci-dessus, l'autorité dispose, pour les aérodromes les plus significatifs, de pouvoirs élargis.

I. CHAMP D'APPLICATION

Les aérodromes visés

Les compétences de l'autorité sont renforcées pour les aérodromes ayant le trafic le plus élevé.

Le projet de loi fait ainsi référence aux aérodromes visés à l'article 16 de la loi n° 92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit, qui définit notamment l'assiette de la " taxe bruit " 22( * ) , c'est-à-dire, depuis les modifications apportées par l'article 103 de la loi de finances pour 1998 : Paris-Charles de Gaulle, Paris-Orly, Nice, Marseille, Toulouse, Lyon-Satolas, Mulhouse, Bordeaux et Strasbourg .

Le graphique suivant illustre l'importance respective du trafic de passagers (en 1997) sur ces aéroports.

Source : DGAC

Mais cette rédaction, juridiquement valable à la date du dépôt du projet de loi, ne l'est plus.

En effet, l'article 45 de la loi de finances initiale pour 1999, relatif à la taxe générale sur les activités polluantes, a modifié profondément, dans son paragraphe IV. 2, la rédaction de cet article 16, en y supprimant les critères de définition des aérodromes soumis à la taxe bruit, qui se trouvent désormais, en vertu du I de ce même article 45, intégrés à l'article 266 septies 3 du code des douanes.

Aussi, votre commission vous propose de viser, au lieu de l'article 16 de la loi précitée de 1992, l'article 266 septies 3 du code des douanes.

Cette modification de référence ne change pas le champ d'application, proposé par le présent article, fondé, depuis l'article 103 de la loi de finances pour 1998, sur le critère suivant : " aérodromes recevant du trafic public pour lesquels le nombre annuel des mouvements d'aéronefs de masse maximale au décollage supérieure ou égale à 20 tonnes est supérieur à 20.000 " , contre 40.000 auparavant .

Les populations concernées

Pour estimer le nombre de nos concitoyens touchés par les nuisances sonores aéroportuaires, une première approche -nécessairement imparfaite- est donnée par le champ d'application des dispositifs d'aide aux riverains des aérodromes, instaurée par la loi bruit de 1992, en vue de l'insonorisation des logements.

Pour les 9 principaux aérodromes français précités qui sont concernés par ce dispositif, les plans de gêne sonore (PGS), établis afin de constater la gêne subie dans leur voisinage, concernent environ 160.000 personnes (dont 120.000 autour des aéroports de Paris-Orly et Paris-Charles de Gaulle) ; plus largement, certaines associations 23( * ) estiment à 3.000.000 le nombre de personnes concernées par le projet de loi.

La sensibilité croissante aux nuisances sonores et l'évolution de la nature du bruit (exposition plus contraire à une fréquence accrue) pourrait conduire à élargir la notion de gêne . Rappelons, que sous l'égide du ministère de l'équipement, des transports et du logement et du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement, une enquête de gêne sonore couplée à une campagne de mesures de bruit in situ est actuellement menée autour des aéroports parisiens. Cette étude, dont les premiers résultats devraient être disponibles au cours du premier semestre 1999, devrait permettre de mieux appréhender la gêne due au bruit autour de certains aéroports et, partant, du nombre de nos concitoyens concernés par elle.

II. COMPÉTENCES DE L'AUTORITÉ

A. UN RÔLE D'AUTORITÉ MORALE ET DE MÉDIATION

Dans le projet qui vous est soumis, l'autorité se voit attribuer des compétences de prescription technique pour la mesure du bruit, de communication auprès du public, de médiation auprès des acteurs concernés, en cas de désaccord entre eux, et de recommandation aux pouvoirs publics.

Cette liste peut paraître modeste par rapport aux compétences de certaines de ses aînées (autorisations individuelles, sanctions, pouvoir réglementaire...), comme cela a été dit dans l'exposé général du présent rapport.

Votre commission considère que ce choix est sage, car il répond aux attentes des parties concernées.

Cette " modestie " est toutefois illustrée par la différence des moyens humains et financiers de l'autorité et des plus importantes de ses aînées :


Le conseil supérieur de l'audiovisuel dispose de 230 agents 24( * ) (il s'agit des services, à l'exclusion des 166 personnes non salariées des comités techniques radiophoniques, qui travaillent pour lui) et d'un budget de plus de 200 millions de francs 25( * ) ;

L'autorité de régulation des télécommunications , créée en 1997, disposera en 1999 d'un budget de 87,5 millions de francs et de 142 emplois budgétaires ;

La nouvelle autorité aurait, d'après les premières estimations communiquées à votre rapporteur, outre les crédits nécessaires à la rémunération des membres, un budget de fonctionnement d'environ 5 millions de francs par an, ainsi répartis :

- 2 millions de francs de frais de structure : loyer, salaires et charges pour le personnel (un secrétaire général, un adjoint technique, un adjoint administratif, un chargé d'études et une secrétaire) ;

- 3 millions de francs de dépenses d'intervention (contrôle, études, plan de communication).

B. DES COMPÉTENCES PRINCIPALEMENT REPRISES DE CELLES DE L'INSTITUTION INDÉPENDANTE PRÉVUE PAR LE DÉCRET DU 28 MARS 1997

Dans le projet de loi, les compétences de l'autorité, même si elles sont plus larges, sont très largement inspirées de celles de l'institution indépendante prévue par un décret du 28 mars 1997, pour la plate-forme de Roissy-Charles de Gaulle.

Rappelons que cette institution n'a jamais réellement fonctionné, malgré le parution du texte réglementaire relatif à sa création.

Le tableau suivant résume les compétences que le projet de loi propose de donner à l'autorité et les compare à celles actuellement dévolues par les textes réglementaires à l'institution indépendante :

COMPÉTENCES RESPECTIVES DE L'AUTORITÉ ET DE L'INSTITUTION INDÉPENDANTE

 

FUTURE AUTORITE (PROJET DE LOI)

ACTUELLE INSTITUTION INDÉPENDANTE (DÉCRET DU 28 MARS 1997)

Champ de compétence

Paris-Charles de Gaulle, Paris-Orly, Nice, Marseille, Lyon, Toulouse, Mulhouse, Bordeaux, Strasbourg. Autres aérodromes pour ses compétences générales.

Paris-Charles de Gaulle.

Mission générale

Pas de phrase de principe dans le projet de loi , si ce n'est qu'elle émet " des recommandations sur toute question relative à la mesure du bruit, à la maîtrise des nuisances sonores du transport aérien et à la limitation de leur impact sur l'environnement "

Mission générale de " contrôler les dispositions prises pour mesurer les nuisances sonores dues au transport aérien autour de l'aéroport Charles-de-Gaulle, de garantir l'impartialité des informations diffusées sur ces nuisances sonores, de veiller au respect des engagements pris dans ce domaine et de favoriser la concertation ".

" L'institution indépendante fait les recommandations qui lui paraissent utiles ".

1°) Prescriptions techniques pour la mesure du bruit

L'autorité définit les prescriptions techniques applicables :

- aux stations de mesure du bruit ;

- à leur nombre et leur emplacement ;

- à leur exploitation.

Ces prescriptions doivent être homologuées par arrêté ministériel.

Elle peut prêter son concours aux personnes morales concernées par la maîtrise des nuisances sonores autour de l'aéroport qui lui en font la demande pour :

- évaluer l'efficacité des mesures prévues ou mises en oeuvre en vue d'assurer la maîtrise des nuisances sonores liées à l'exploitation de l'aéroport ;

- faire toutes propositions notamment en matière de mesures nouvelles ;

- surveiller le fonctionnement et le développement du réseau de mesure du bruit.

2°) Mise en oeuvre des prescriptions techniques

Si les prescriptions techniques ne sont pas respectées, l'autorité peut mettre l'exploitant en demeure puis faire procéder aux frais de ce dernier aux travaux nécessaires .

Pas de pouvoir en la matière .

3°) et 4°) Communication après du public

L'autorité établit un programme de diffusion des résultats de la mesure du bruit et veille à sa mise en oeuvre,

Elle s'assure de la fiabilité des conditions dans lesquelles les informations ont été recueillies.

Elle recueille et rend publiques périodiquement, après en avoir analysé la fiabilité, toutes informations sur le bruit dû au transport aérien autour de l'aéroport, en particulier celles provenant du réseau de mesure de bruit autour de l'aéroport. Ces informations sont de nature à permettre l'évaluation et la comparaison séparées des énergies sonores émises respectivement au cours des périodes diurne et nocturne ;

Elle peut exécuter ou faire exécuter, à son initiative ou à la demande de personnes morales concernées par la maîtrise des nuisances sonores autour de l'aéroport, des études et expertises pour préciser l'impact sonore du transport aérien autour de l'aéroport et analyser ses causes. Elle décide de la diffusion de l'intégralité ou des conclusions des expertises et études qu'elle fait effectuer ou qu'elle détient ;

5°) Plan de gêne sonore et plan d'exposition au bruit

L'autorité est consultée sur les projets de plan de gêne sonore et de plan d'exposition au bruit.

L'institution donne son avis sur les projets de plans d'exposition au bruit et de gêne sonore.

6°) Association aux décisions réglementaires

Est consultée sur les projets de textes réglementaires fixant les mesures visant à assurer la protection de l'environnement sonore et sur les projets d'élaboration ou de modification des procédures de départ, d'attente et d'approche aux instruments.

Pas de pouvoir en la matière .

7°) Contrôle du respect des engagements pris

Contrôle à son initiative ou sur saisine d'une commission consultative de l'environnement le respect des engagements pris pour la maîtrise des nuisances sonores.

Elle vérifie la bonne application des engagements pris par les diverses parties intéressées à l'exploitation de l'aéroport Charles-de-Gaulle en vue d'assurer la maîtrise des nuisances sonores liées à cette exploitation, engagements qui seront retracés dans un document dénommé " contrat de maîtrise des nuisances sonores ". Elle rend publiques toutes informations utiles à cet effet ;

Son rapport public d'activité
présente notamment le compte rendu de l'exécution du " contrat de maîtrise des nuisances sonores ".

Association aux sanctions et aux plaintes

Sur tous les aéroports, elle peut saisir l'autorité administrative des manquements à la réglementation en matière de nuisances sonores.

Le ministre chargé de l'aviation civile et celui chargé de l'environnement ainsi que les préfets territorialement compétents peuvent lui soumettre toute plainte d'une personne physique ou morale qui conteste la suite réservée par les services de l'Etat ou ses établissements publics à une réclamation présentée au sujet de nuisances sonores autour de l'aéroport.

Les compétences de l'autorité peuvent être résumées ainsi :

Pouvoir de prescription technique et de mise en oeuvre pour la mesure du bruit

La compétence première de l'autorité, pour laquelle elle disposera des pouvoirs les plus étendus, est celle de la définition et du contrôle des réseaux de mesure du bruit.

Elle disposera en effet en la matière des compétences suivantes :

- Définition des normes techniques -même si l'homologation par arrêté est nécessaire- des appareils, des configurations et des conditions d'exploitation des réseaux de mesure du bruit ;

- Contrôle de leur bonne mise en oeuvre ;

- Pouvoir de faire exécuter , au frais du gestionnaire d'aéroport, les travaux nécessaires, après mise en demeure.

Droit à être consultée

Le texte prévoit que l'autorité est consultée sur les textes réglementaires relatifs à l'environnement sonore aéroportuaire et les procédures de départ, d'attente et d'approche aux instruments, ainsi que sur les projets de plans de gêne sonore et d'exposition au bruit. Rappelons que les commissions consultatives de l'environnement et les commissions consultatives d'aide aux riverains sont également consultées sur ces derniers documents.

La demande d'avis est une compétence traditionnelle dévolue par la loi aux autorités administratives indépendantes. Il s'agit, en effet, d'un des principaux moyens pour asseoir le rôle d'influence de ces autorités.

Rappelons que la consultation, contrairement à l'avis conforme ou à la proposition, ne lie juridiquement pas sur le fond l'autorité titulaire du pouvoir réglementaire , qui n'est tenue que de respecter la forme d'un recueil d'avis préalable à son acte.

La force contraignante qui s'attache à cette consultation est proportionnelle à " l'autorité morale " de l'autorité.

Mission de diffusion des informations

L'autorité est investie d'une mission de communication des données recueillies par les réseaux de mesure du bruit. Elle doit en outre s'assurer de la fiabilité de ces données.

Ce pouvoir répond à une forte attente de la part tant des riverains que des exploitants d'aéroports eux-mêmes, comme votre rapporteur l'a personnellement constaté.

Fonction de vérification

Dans le texte de cet article, l'autorité est chargée de " contrôler " le respect des engagements pris par les parties intéressées pour la maîtrise des nuisances sonores. Ce cas trouvera à s'appliquer, sans doute, pour les chartes de l'environnement sonore aéroportuaire que peuvent signer, comme cela a récemment été le cas à Roissy, les partenaires intéressés à l'exploitation d'un aérodrome.

Si on comprend que puisse être ressenti le besoin d'un observateur neutre pour constater les progrès et les efforts réalisés par les uns et les autres, on ne peut que se demander, dans la rédaction actuelle du projet de loi, quelles suites seraient données, le cas échéant, à un constat de carence.

Les " chartes " n'ayant pas de valeur juridique et relevant du simple engagement moral,, il est exclu que le " contrôle " par l'autorité, tel qu'il résulte de la rédaction actuelle du respect des engagements pris, ait des conséquences à caractère contraignant pour les parties.

Votre commission vous propose en revanche de confier à l'autorité un rôle de proposition et de médiation, en cas de carence de l'une ou l'autre partie. Pour ce faire, la commission a adopté plusieurs amendements, prévoyant que l'autorité :

- évalue le respect des engagements pris,

- rend publics les résultats de l'évaluation,

- propose, en cas de carence, dans le cadre d'un pouvoir de médiation, des solutions pour débloquer la situation.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-4 du code de l'aviation civile ainsi modifié.

Article L.227-5 du code de l'aviation civile -

Pouvoir d'investigation des agents de l'autorité

Cet article confie aux membres et agents de l'autorité et aux experts qu'elle désigne le pouvoir de faire des vérifications sur place et de se faire communiquer des informations.

Le projet propose de donner à l'autorité la possibilité, dans l'exercice des missions qui viennent d'être décrites, de charger un de ses membres ou un de ses agents, ou un expert mandaté par elle de procéder à des vérifications sur place ou de se faire communiquer des renseignements utiles à ses missions.

On remarquera, comme cela a été dit dans le commentaire de l'article L.227-3, que les missions décrites à l'article L.227-3 sont mentionnées dans le champ d'application de ces pouvoirs de vérification sur place. En conséquence, il serait théoriquement possible à l'autorité de mandater un agent ou un expert pour constater un manquement aux règles de limitation des nuisances sonores aux abords des aéroports, afin de saisir la Commission de prévention des nuisances, qui décidera alors des sanctions à proposer au ministre, alors que, d'après l'article R.226-2 du code de l'aviation civile issu du décret précité du 27 mai 1997, instaurant le système de sanctions administratives : " Les manquements (...) sont constatés par les fonctionnaires et agents visés à l'article L.150-13 " . En pratique, comme cela a déjà été dit, un procès verbal d'infraction est établi par un agent assermenté et notifié au responsable du grief.

Dans ce cas, la question de la cohérence de ces deux procédures parallèles de constatation des infractions se poserait.

Votre commission vous propose donc de préciser que le pouvoir d'investigation des agents de l'autorité ne s'étend pas qu'aux compétences du 1 er alinéa de l'article L.227-3, et non à celle visées au 2 e alinéa.


Le deuxième alinéa de l'article L.227-5 dispose que les intéressés (autorités publiques, agents publics, exploitants d'aérodromes et transporteurs aériens) ne peuvent s'opposer à l'action de l'autorité.

Votre commission vous propose de préciser que cette obligation s'applique en particulier aux services de la navigation aérienne.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-5 du code de l'aviation civile ainsi modifié.

Article L.227-6 du code de l'aviation civile -

Rapport annuel de l'autorité

Cet article instaure l'obligation de publication d'un rapport annuel de l'autorité.

Le texte prévoit que le rapport annuel public de l'autorité est remis au Gouvernement et au Parlement.

Afin de coordonner leurs actions respectives, votre commission vous propose de préciser que le rapport de l'autorité est transmis aux commissions consultatives de l'environnement.

En outre, pour renforcer la transparence et pour asseoir le pouvoir de recommandation de l'autorité, votre commission vous propose d'indiquer que le rapport d'activité peut être l'occasion pour l'autorité de suggérer toutes modifications législative ou réglementaire qu'elle estime souhaitables 26( * ) .

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-6 du code de l'aviation civile ainsi modifié.

Article L.227-7 du code de l'aviation civile -

Ressources de l'autorité

Cet article précise le statut des crédits de l'autorité et les modalités de contrôle budgétaire qui s'appliquent à elle.

Le dispositif de contrôle budgétaire proposé par cet article pour l'autorité est calqué sur celui qui s'applique pour les autres autorités administratives indépendantes, comme le CSA ou l'ART.

Il n'appelle pas de commentaire particulier.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-7 du code de l'aviation civile sans modification.

Article L.227-8 du code de l'aviation civile -

Services de l'autorité

Cet article traite de la gestion interne de l'autorité : services et règlement intérieur.

Le bref texte proposé pour cet article dispose d'une part que les services de l'autorité sont placés sous l'autorité de son Président et, d'autre part, que l'autorité établit son règlement intérieur. On retrouve des dispositions identiques pour les autorités similaires.

Votre commission vous propose de préciser, comme il est fréquent pour ce type d'institutions, que :

- ses agents sont soumis au secret professionnel ;

- elle peut employer des contractuels ou des fonctionnaires en activité dans les mêmes conditions (traitements, primes...) que le ministère chargé de l'aviation civile.

Votre commission vous propose d'adopter l'article L.227-8 du code de l'aviation civile, ainsi que l'article 1 du projet de loi, dans leur rédaction ainsi modifiée.

Article 2 -

Commissions consultatives de l'environnement

Cet article renforce le rôle, les moyens et la composition des commissions consultatives de l'environnement.

Cet article vise à renforcer le rôle des commissions consultatives de l'environnement.

Votre commission vous proposera d'accompagner ce renforcement, souhaité par les associations de riverains, d'une meilleure coordination des actions respectives de ces commissions et de la nouvelle autorité.

I. LES COMMISSIONS CONSULTATIVES DE L'ENVIRONNEMENT

Les commissions consultatives de l'environnement (CCE) 27( * ) ont été instituées par l'article 2 de la loi n° 85-696 du 11 juillet 1985 relative à la maîtrise de l'urbanisme au voisinage des aérodromes, qui prévoit que l'autorité administrative peut mettre en place une CCE . Cette création est de droit lorsque la demande en est faite par une commune dont une partie du territoire est couverte par le plan d'exposition au bruit de l'aérodrome.

La loi prévoit que les CCE sont consultées sur toute question d'importance relative aux incidences de l'exploitation de l'aéroport sur les zones affectées par les nuisances de bruit et, le cas échéant, sur le plan de gêne sonore. Elles doivent en outre se prononcer, comme cela a été dit dans l'exposé général, en vertu de l'article L.147-3 du code l'urbanisme 28( * ) , sur les projets de plan d'exposition au bruit.

Les CCE sont créées et présidées par le Préfet du département sur lequel est situé l'aéroport (dans le cas des aéroports de Paris-Orly, Paris-Le Bourget et Paris-Charles de Gaulle, les CCE sont présidées par le Préfet de la région Ile-de-France). Sont en outre représentés dans les CCE : les associations de riverains, les usagers de la plate-forme, son gestionnaire, les collectivités locales et les administrations concernées.

D'après les chiffres fournis à votre rapporteur par l'administration, 80 aérodromes sont dotés d'une CCE . Toutefois, l'activité de ces commissions est très variable. Celle de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle est particulièrement active depuis, notamment, l'annonce de la décision d'extension de cet aérodrome et l'élaboration corrélative d'un document formalisant les engagements respectifs des parties pour la maîtrise des nuisances sonores (la Charte). Ainsi, de février à juillet 1998, 14 réunions du comité de rédaction de la Charte de qualité de l'environnement sonore ont eu lieu, ainsi que 15 réunions des sous-groupes de la CCE, 56 personnes ayant au total participé à ses réunions.

Mais la CCE de Paris-Orly ne s'est pas réunie depuis presque 9 ans. Celle du Bourget, également en sommeil, devrait prochainement être réunie par le Préfet de région.

Votre commission vous propose d'inscrire dans la loi que les CCE doivent se réunir une fois pas an au moins.

II. LES MODIFICATIONS PROPOSÉES PAR LE PROJET DE LOI

Extension du rôle et des moyens des CCE


Le projet de loi prévoit de renforcer le rôle de ces commissions, notamment en les dotant d'une instance permanente de travail et de moyens de fonctionnement. En outre, pour les principaux sites aéroportuaires, il est proposé de rendre de droit la création d'une CCE et de confier à cette dernière un pouvoir de saisine de l'autorité indépendante pour contrôler le respect des engagements pris par les différentes parties intéressées à l'exploitation de l'aéroport en vue d'assurer la maîtrise de nuisances sonores.

Création de droit des CCE

Le texte du projet de loi propose de rajouter, en sus de la circonstance où une commune concernée le demande, un nouveau cas de création de droit des CCE : celui où l'aérodrome concerné atteint le critère des 20.000 mouvements annuels d'aéronefs de masse maximale au décollage supérieure à 20 tonnes.

La portée pratique de cette modification devrait rester limitée.

Comme précédemment et pour les mêmes raisons, votre commission vous propose de remplacer la référence à l'article 16 de la loi " bruit " par la référence à l'article 266 septies 3 du code des douanes.

Extension des compétences des CCE


A la disposition de la loi précitée du 11 juillet 1985 prévoyant que la CCE est consultée sur toute question d'importance relative aux incidences de l'exploitation aéroportuaire sur les zones voisines, le projet de loi propose de rajouter que la CCE peut, à son initiative, émettre des recommandations sur ces questions.

Se pose, là encore, la question du partage des rôles et de la bonne coordination entre l'autorité indépendante et les CCE.

Votre commission vous propose d'indiquer, dans le texte de loi, que ces recommandations sont transmises à l'autorité. Même dans le cas où il ne s'agit pas de l'un des neufs principaux aéroports, l'autorité pourra prendre connaissance de ces recommandations pour alimenter son pouvoir de proposition et d'avis.

En outre, votre commission a adopté un amendement consacrant le rôle des CCE pour coordonner la rédaction des " chartes de l'environnement sonore ".


Moyens et conditions de fonctionnement des CCE

Le projet de loi prévoit que les moyens de fonctionnement des CCE sont mis à disposition par l'exploitant de l'aérodrome. Notons que la présidence en est toutefois assurée par le représentant de l'Etat (Préfet de Région ou Préfet de département).

En outre, il est prévu que la commission puisse créer en son sein un " comité permanent ", sorte d'organe restreint qui assurerait la continuité de la commission et pourrait exercer ses compétences consultatives et de recommandation.

Inclusion des commissions consultatives d'aide aux riverains dans les CCE

Les deux derniers alinéas de l'article 2 du présent projet de loi proposent respectivement :

- de constituer les commissions consultatives d'aide aux riverains (CCAR) au sein des CCE ;

- de prévoir qu'un décret en Conseil d'Etat (et non plus un arrêté conjoint à 5 ministres comme aujourd'hui) fixe la composition et les règles de fonctionnement des CCAR.

Pour comprendre la portée de ces modifications, il convient tout d'abord de rappeler ce que sont les CCAR.

Rôle des CCAR

La composition et les règles de fonctionnement des CCAR sont définies par un arrêté interministériel du 21 septembre 1994.

Conformément à la loi précitée relative à la lutte contre le bruit de 1992, les CCAR interviennent pour l'attribution des aides financières accordées aux riverains des aéroports en vue de l'insonorisation de leurs logements.

Le dispositif d'aide aux riverains des aérodromes est financé par la taxe précédemment appelée taxe d'atténuation des nuisances sonores, désormais intégrée à la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), perçue auprès des transporteurs aériens utilisateurs des aéroports concernés 29( * ) , et dont la gestion a été confiée à l'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l'Energie (ADEME), établissement public sous la tutelle des ministères chargés de l'Environnement, de la Recherche et de l'Industrie chargé de la distribution des aides aux riverains.

Ce dispositif fait intervenir les CCAR à deux niveaux :

D'abord, pour l'élaboration des plans de gêne sonore.

Conformément à la loi " bruit " de 1992, le champ d'éligibilité géographique de l'aide aux riverains est défini par les plans de gêne sonore (PGS).

Un décret, signé le 18 mars 1994 est modifié par un décret du 31 mai 1997 puis par un décret du 30 avril 1998, précise les modalités d'établissement des PGS, dont l'objet est de délimiter trois zones , établies sur la base du niveau de gêne correspondant au trafic prévu l'année d'établissement du plan autour des aérodromes. Ces niveaux de gêne sont exprimés en Indice Psophique (IP). On distingue :

- la zone I, définie par des valeurs d'IP supérieures à 96 où la gêne est très forte ;

- la zone II, définie par des valeurs d'IP comprises entre 96 et 89, où la gêne est forte ;

- la zone III, définie par des valeurs d'IP comprises entre 89 et 78, où la gêne est modérée.

Ces plans sont approuvés par arrêté préfectoral ou interpréfectoral après consultation des commissions d'aide aux riverains de chaque aérodrome concerné et des conseils municipaux des communes touchées par le plan de gêne.

Des plans de gêne sonore ont été établis sous l'autorité du préfet coordonnateur pour les aérodromes suivants : Paris-Orly, Paris-Charles-de-Gaulle, Toulouse-Blagnac, Nice-Côte d'Azur, Lyon-Satolas et Marseille-Provence.

Ils sont en cours de révision sur la base des nouvelles règles d'établissement édictées en 1997. Dans le cas particulier de l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle, le nouveau PGS a été approuvé par arrêté interpréfectoral en date du 1er octobre 1998, ce qui a permis d'inclure dans l'emprise du PGS une partie de la ville de Gonesse, et notamment son hôpital.

Les plans de gêne sonore des aérodromes de Bordeaux, Strasbourg et Mulhouse-Bâle sont en cours d'élaboration.

Ensuite, pour l'attribution des aides :

L es caractéristiques des aides sont définies par un décret en Conseil d'Etat relatif aux opérations d'aide aux riverains d'aérodrome, signé le 20 juin 1994 et modifié par un décret du 31 mai 1997, puis par un décret du 27 novembre 1998, qui précisent notamment :

* la nature des opérations d'aide (aides à l'insonorisation des bâtiments ou, exceptionnellement, acquisition d'immeubles à usage d'habitation),

* les bâtiments concernés par les opérations d'aide en faisant référence aux dates d'autorisation de construire et à leur implantation par rapport aux plans de gêne sonore susvisés,

* le montant des dépenses allouées aux opérations d'aide.

Un arrêté interministériel, signé le 14 décembre 1994 et modifié par un arrêté du 15 mai 1997 définit, quant à lui, le montant forfaitaire des travaux d'insonorisation des logements admis au bénéfice de l'aide aux riverains.

La commission d'aide aux riverains est consultée sur l'attribution des aides issues du produit de cette ancienne taxe d'atténuation des nuisances sonores, désormais intégrée à la TGAP.

Le bilan d'utilisation de ce prélèvement est le suivant :

Selon des chiffres fournis par l'ADEME, le produit de cette taxe s'est élevé, depuis son instauration en 1993, à environ 200 millions de francs. Le montant total disponible pour l'aide aux riverains a été de 182 millions de francs. Les ressources provenant des aéroports parisiens dominent largement, représentant plus de 90 % du produit total de la taxe.

Le tableau ci-après présente le nombre de dossiers acceptés en commissions consultatives d'aide aux riverains depuis la mise en place de l'aide, en 1993, jusqu'à la fin de l'année 1997 :

BILAN D'ACTIVITE DES CCAR

 

Nombre de dossiers acceptés en CCAR

Nombre de logements

Montant total estimé des travaux (en millions de francs)

Aéroports parisiens

1.699

4 310

150,4

Toulouse

170

170

11,9

Marseille

87

100

0,4

Nice

14

145

2,2

Lyon

4

22

0,6

TOTAL

1 974

4 765

165,4

Source : DGAC

Pour chaque aérodrome, le nombre et la nature des logements se décomposent comme suit :

LOGEMENTS CONCERNES

 

Logements individuels

Logements collectifs

Total

Aéroports parisiens

1.733

2.577

4.310

Toulouse

166

4

170

Marseille

82

18

100

Nice

0

145

145

Lyon

0

22

22

Source : DGAC

Pour 1998, le produit estimé de la taxe s'élève à 69 millions de francs et à 92 millions de francs pour 1999, chiffres tenant compte des modifications introduites par la loi de finances pour 1998 (doublement du taux de la taxe).

Fusion des CCAR et des CCE

Dans un souci de rationalisation des structures, le présent texte de loi propose que les CCAR soient désormais constituées au sein des commissions consultatives de l'environnement.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 ainsi modifié.

Article 3 -

Limitation des nuisances sonores liées au trafic d'hélicoptères

Cet article propose une nouvelle rédaction de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1992 relatif à la limitation des nuisances sonores liées au trafic d'hélicoptères.

I. HISTORIQUE DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI BRUIT

Le projet de loi n° 35 (Sénat, 1992) relatif à la lutte contre le bruit avait été déposé en novembre 1992 sur le Bureau du Sénat par le Gouvernement de M. Pierre Bérégovoy, qui avait déclaré l'urgence pour sa discussion.

Ce texte, défendu par le ministre de l'environnement de l'époque, Mme Ségolène Royal, avait été renvoyé à la Commission des Affaires économiques et examiné en même temps que deux propositions de loi 30( * ) , dont le rapporteur, notre collègue Bernard Hugo, avait repris certaines dispositions pour les intégrer, sous forme d'amendements de la commission, au texte du projet de loi.

La discussion du texte en première lecture au Sénat avait eu lieu le 9 décembre 1992.

A cette occasion, le Sénat avait, sur avis favorable de votre commission, -le Gouvernement s'en remettant quant à lui à la sagesse de la Haute Assemblée 31( * ) -, adopté l'amendement n° 52 rectifié de notre collègue Jean Simonin et des membres du groupe du rassemblement pour la République, un sous-amendement n° 91 de M. Paul Caron, insérant un article additionnel au projet de loi, après l'article 7, visant à limiter les nuisances sonores liées au trafic des hélicoptères, en interdisant, notamment, le survol à basse altitude des immeubles d'habitation par les hélicoptères et les " baptêmes de l'air ", vols d'école et d'entraînement au-dessus des zones à forte densité de population.

Lors de la première lecture à l'Assemblée nationale, le 14 décembre 1992, un amendement n° 37, présenté par M. Roger Léron, avait inséré ce dispositif, dans une version modifiée, et légèrement moins restrictive, à l'article 6 du projet de loi.

Lors de la commission mixte paritaire, réunie le 16 décembre 1992 au Palais du Luxembourg, il avait été décidé de retenir la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, sous la forme d'un article 6 bis, devenu l'article 7 du texte de loi définitif. La nouvelle lecture du texte issu de la commission mixte paritaire avait eu lieu le Samedi 19 décembre à l'Assemblée nationale et le Dimanche 20 décembre au Sénat.

Le texte de loi fut ensuite promulgué le 31 décembre 1992 et publié au Journal Officiel du 1er janvier 1993.

Toutefois, le texte de l'article 7 tel qu'il est paru au Journal Officiel comporte une " coquille " par rapport au texte adopté par les assemblées parlementaires : un membre de phrase du 1er alinéa a été omis par erreur.


La disposition interdisant les " vols circulaires avec passagers sans escale ou avec escale touristique de moins d'une heure " a été par erreur retranscrite 32( * ) en interdiction des " vols circulaires avec passagers sans escale touristique de moins d'une heure " .

Le texte promulgué avait ainsi un sens opposé à celui qu'avait voulu lui donner le législateur ! Aussi, cette disposition n'a pu être correctement appliquée par l'administration, faute de base légale appropriée.

II. L'INTÉRÊT D'UNE LIMITATION DES NUISANCES LIÉES AUX HÉLICOPTÈRES

Le Conseil National du Bruit a publié, en juillet 1995, un rapport sur les nuisances sonores causées par le trafic des hélicoptères.

Caractéristiques du bruit généré par les hélicoptères

La source de bruit sur un hélicoptère, outre la turbine moteur, qui pose un problème technique similaire à celui relatif aux turbines d'un avion, est le rotor principal , qui émet un spectre sonore important dans une large bande . Cette émission, appelée " bruit impulsif ", a pour cause l'interaction entre les pales du rotor et les tourbillons d'air, notamment lors de la descente. En survol à grande vitesse, elle a pour origine essentielle la compression de l'air par la pale avançante.

Dans certaines configurations de vol, les bruits générés par le rotor anticouple et par les compresseurs moteur viennent amplifier, parfois de façon déterminante, la " signature sonore " de l'hélicoptère.

A noter que, de façon voisine à la réglementation internationale exposée ci-dessus et applicable en matière d'aéronefs, les normes de l'OACI définissent, pour les hélicoptères, notamment au chapitre 11 de l'annexe 16 précitée, des limites en termes de bruit.

Votre rapporteur tient à souligner que des progrès importants ont été réalisés par cette industrie, et se poursuivent, pour réduire le niveau sonore des hélicoptères. Ils passent parfois simplement par la transformation des habitudes de pilotage, mais aussi par d'importantes modifications des appareils eux-mêmes.

Signalons d'ailleurs les recherches effectuées par l'industrie de ce secteur, qui travaille sur un projet " d'hélicoptère silencieux ".

L'activité héliportuaire en France

L'activité des hélicoptères en France (hors la Défense et la sécurité civile) est plus difficilement comptabilisable que celle des aéronefs. De nombreux mouvements sont en effet réalisés à la demande, seules quelques lignes régulières existant, entre Nice et Monaco par exemple.

Votre rapporteur a toutefois obtenu de l'administration une estimation de l'activité pour le site d'Issy-les-Moulineaux : l'activité hélicoptères est en baisse régulière sur ce site où ont été réalisés seulement 12.099 mouvements en 1998, contre 31.403 mouvements en 1990. Sur les principaux axes de circulation réservés aux hélicoptères en région parisienne, le trafic recensé varie de 10 à 15.000 mouvements par tronçon.

Les nuisances sonores causées par les hélicoptères

D'après l'administration, les réclamations de riverains sont concentrées sur quelques zones dont les principales sont : Issy-les-Moulineaux, Saint-Tropez, ainsi que les communes concernées par les cheminements en région parisienne.

Des mesures sont en préparation pour limiter l'effet des nuisances sonores. Ainsi, en région parisienne et aux abords d'Issy les Moulineaux, l'administration a fait savoir à votre rapporteur qu'un arrêté de limitation du trafic dans la zone de transit autour de Paris et de l'héliport serait en préparation.

Il viserait à limiter au strict nécessaire les survols, à interdire l'accès de l'héliport aux hélicoptères les plus bruyants et à limiter le trafic sur ce site les samedis, dimanches et jours fériés.

III. LE TEXTE DU PROJET DE LOI

Le présent article propose de revenir à la rédaction adoptée en décembre 1992.

Votre commission vous propose d'adopter une rédaction plus souple et mieux à même de favoriser la concertation pour régler au cas par cas le problème des nuisances liées aux hélicoptères : un décret en Conseil d'Etat -qui serait élaboré après une large concertation- donnerait au ministre un pouvoir de limitation du trafic, des types d'appareils et des manoeuvres d'approche et de départ, qui pourrait ensuite être adapté en fonction des besoins de chaque plate-forme.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 3 ainsi modifié.

Article 4 -

Consultation de l'autorité indépendante pour le plan d'exposition au bruit. Coordination.

Par coordination avec l'article 1, cet article insère au code de l'urbanisme une disposition relative à la consultation de l'autorité indépendante pour l'élaboration des plans d'exposition au bruit.

Le présent article vise à insérer, à l'article L.147-3 du code de l'urbanisme 33( * ) , relatif au mode d'élaboration des plans d'exposition au bruit, une obligation de consultation de l'autorité indépendante, pour les aérodromes où elle dispose de compétences particulières en la matière, par coordination avec les dispositions du 5° de l'article L.227-4 du code de l'aviation civile, dans sa rédaction proposée par l'article 1er du présent projet de loi.

Votre commission vous propose, comme précédemment, de remplacer la référence à l'article 16 de la loi " bruit " par celle du 3 de l'article 266 septies du code des douanes.

En outre, afin de mieux coordonner leurs actions respectives, votre commission vous propose de préciser que l'autorité prend connaissance au préalable de l'avis de la CCE concernée, avant d'émettre le sien, pour les neuf plus grands aérodromes.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 ainsi modifié.

Articles additionnels après l'article 4 -
(Articles L.147-7 à L.147-9 du code de l'urbanisme) -

Protection et information préalable des riverains potentiels des aérodromes. Maîtrise de l'urbanisme.

Ces articles additionnels adoptés par votre commission visent à renforcer l'information et la protection des riverains potentiels des aérodromes et à mieux maîtriser l'urbanisation.

Quoique l'aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle ait été ouvert et ait fonctionné jusqu'à maintenant avec deux pistes, il convient de se rappeler que, lors de sa création, il avait été prévu qu'il évoluerait graduellement, jusqu'à fonctionner avec cinq pistes. Le plan de réservation foncière avait été défini dans cette perspective.

A partir de 1973, les pouvoirs publics ont mis en place un dispositif tendant à maîtriser l'urbanisation aux abords des installations aéroportuaires et la loi n° 85-696 du 11 juillet 1985 relative à l'urbanisme au voisinage des aérodromes a rendu les plans d'exposition au bruit obligatoires.

Pour Roissy, les riverains présents aux alentours au moment de la création de l'aéroport, ou s'y étant installés depuis en dépit du voisinage des installations, se sont longtemps opposés à la construction de nouvelles pistes. Or, les perspectives de croissance du trafic aérien rendaient impérative l'extension des capacités aéroportuaires.

Certains ont pu s'émouvoir de cette farouche opposition des riverains, qui n'a pas été sans retarder le projet d'extension de l'aéroport de Roissy, considérant que les habitants des zones concernées étaient nécessairement informés des risques qu'ils encouraient d'être soumis à certaines nuisances sonores.

Or, s'il est vrai qu'un certain nombre d'entre eux ont consciemment choisi de vivre dans ces zones et ont le plus souvent acheté ou loué leur logement à des prix avantageux, en raison de sujétions présentes ou futures, force est de constater que d'autres ont choisi leur lieu de résidence sans être nécessairement informés des perspectives de développement de l'aéroport ou du plan d'exposition au bruit.

C'est pourquoi l'idée de construire à Roissy une cinquième piste ayant été abandonnée et celle de construire une troisième et une quatrième pistes ayant été prise, il apparaît aujourd'hui nécessaire de prendre les moyens d'informer pleinement les riverains de Roissy et des autres aérodromes d'importance des risques de nuisances sonores, à l'instar des politiques suivies en la matière dans certains pays étrangers (aux Etats-Unis, par exemple).

Le fait de se soumettre à ces risques en toute connaissance de cause rendrait d'ailleurs beaucoup moins compréhensible l'opposition éventuelle de riverains à une situation ou à un projet connu d'eux.

C'est pourquoi votre rapporteur a déposé une proposition de loi 34( * ) qui, s'inspirant de règles existantes en droit de la consommation, a pour double objet :

- d'obliger contractuellement le vendeur ou le bailleur d'un bien immobilier situé dans le périmètre d'un plan d'exposition au bruit, à stipuler explicitement dans le contrat de vente ou de location que le bien se trouve exposé à des nuisances sonores d'origine aérienne et à préciser la nature de cette exposition en indiquant le type de zone -tel que défini à l'article L.147-4 35( * ) du code de l'urbanisme- où il se trouve localisé ;

- d'obliger contractuellement le vendeur ou le bailleur d'un bien immobilier situé dans un rayon élargi par rapport au plan d'exposition au bruit, pour les 9 principaux aérodromes, à stipuler explicitement dans le contrat de vente ou de location que le bien se trouve localisé dans un tel périmètre.

Votre commission a intégré ces dispositions sous forme d'amendements au présent projet de loi.

En outre, pour remédier à l'absence de prescriptions urbanistiques dans les zones limitrophes des PEB pourtant susceptibles d'être incluses, en vertu d'une révision en cours du PEB, dans le futur périmètre de la zone C, votre commission a prévu que le représentant de l'Etat puisse, temporairement, étendre à ces zones les dispositions applicables aux zones C.

Votre commission vous propose d'adopter ces articles additionnels.

*

* *

Votre commission vous propose d'adopter l'ensemble du projet de loi ainsi amendé.


1 Voir l'ouvrage de l'IFEN : " L'environnement en France en 1999 " p. 233, éditions La découverte.

2 Décibels (A), pondérés en fonction des caractéristiques de l'oreille humaine.

3 Voir plus loin pour la définition du plan de gêne sonore.

4 Voir le site Internet : www.ufcra.com.

5 Les développements suivants sont largement inspirés du rapport du ministère de l'équipement : " La maîtrise des nuisances sonores sur les aéroports européens " paru à la Documentation française en avril 1998.

6 Cette obligation ne concerne toutefois pas les avions à hélices ni les avions supersoniques ni les " petits " avions à réaction, ni les avions militaires.

7 Voir plus loin pour le détail des mesures mises en place.

8 Décret n° 97-534 du 27 mai 1997 instituant des sanctions administratives en vue d'assurer la protection de l'environnement des aérodromes et modifiant le code de l'aviation civile.

9 Indice de mesure du bruit.

10 Depuis l'article 103 de la loi de finances initiale pour 1998.

11 La zone de navigation obligatoire en configuration " face à l'est " et la procédure d'évitement de la vallée de Chevreuse en configuration " face à l'ouest ".

12 Aéroports de Paris

13 Les développements suivants sont largement inspirés de l'ouvrage de Michel Gentot : " Les autorités administratives indépendantes ", Montchrestien, 1991.

14 Catherine TEITGEN-COLLY : " Les autorités administratives indépendantes, histoire d'une institution ", La vie judiciaire,1988.

15 Actuel CSA

16 Sauf exceptions (le Médiateur de la République).

17 Dans sa décision n° 86-217 DC du 18 septembre 1986 (sur la CNCL) puis dans sa décision n° 88-248 DC du 17 janvier 1989 (sur le CSA). Cette jurisprudence a été confirmée pour l'Autorité de régulation des télécommunications (ART) en 1996.

18 Connexion physique et logique des réseaux des opérateurs de télécommunications.

19 Voir le revue " Pouvoirs " n°46, 1988, l'article d'Evelyne Pisier " vous avez dit indépendants ! "

20 Proposé par la Commission des Affaires économiques, sur proposition du rapporteur, notre collègue M. Gérard Larcher.

21 Article n° 8 de la loi n° 78-17 précitée.

22 Désormais intégrée à la taxe générale sur les activités polluantes.

23 Voir le site Internet : www.ufcna.com, rubrique consacrée au présent projet de loi.

24 Information recueillie sur son site Internet.

25 206,3 millions de francs en 1997 d'après le dernier rapport d'activité du Conseil.

26 Comme c'est le cas pour l'ART

27 Votre rapporteur utilisera le sigle " CCE ", tout en ayant conscience qu'il est ordinairement réservé aux commissions consultatives économiques des aérodromes.

28 Issu de la loi précitée du 11 juillet 1985.

29 Il s'agit, depuis que l'article 103 de la loi de finances pour 1998 a étendu ce dispositif aux aérodromes accueillant annuellement plus de 20.000 mouvements commerciaux de plus de 20 tonnes, au lieu de 40.000 initialement, des neufs aérodromes suivants : Paris-Orly, Paris-Charles-de-Gaulle, Toulouse-Blagnac, Nice-Côte d'Azur, Lyon-Satolas et Marseille-Provence depuis le 1er janvier 1993 et Bordeaux, Strasbourg-Entzheim et Mulhouse-Bâle depuis le 1er janvier 1998.

30 Proposition de loi de Mme Hélène Luc et plusieurs de ses collègues tendant à renforcer le droit des riverains des aéroports à participer à la lutte contre le bruit et proposition de M Pierre Vallon relative à la lutte contre le bruit.

31 Voir le Journal Officiel des débats du 9 décembre 1992, page 3853.

32 Voir le Journal Officiel - Lois et décrets du 1er janvier 1993, page 15

33 Issu de la loi précitée de 1985

34 Proposition de loi n° 198 de M. Jean-François LE GRAND.

35 En effet, cet article indique que le plan d'exposition au bruit prévoit trois zones diversement exposées au bruit engendré par les avions : les zones de bruit fort (dites A et B) et la zone de bruit modéré (dite C).



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