IV. LES PROPOSITIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
Votre
commission des Lois a constaté que l'égale
égibilité des femmes et des hommes aux mandats et fonctions est
déjà établie en droit.
Certes, l'article VI de la Déclaration de 1789 ayant posé le
principe de l'égale admissibilité de tous les citoyens aux
emplois publics
" sans autre distinction que celle de leurs vertus et
de leurs talents "
n'a pas eu pour effet immédiat d'accorder la
citoyenneté aux femmes auxquelles la pleine capacité civile
n'était pas reconnue à l'époque, mais leur
éligibilité dans des conditions strictement identiques à
celles des hommes a, depuis, été établie de manière
incontestable.
L'égalité des droits civiques résulte plus
précisément de l'article 3 de la Constitution, reconnaissant
ces droits à tous les nationaux français majeurs des deux sexes.
Il n'est donc pas nécessaire de modifier la Constitution pour
établir une égale éligibilité, puisque celle-ci
découle déjà de la Constitution et qu'aucune disposition
du code électoral ne limite en quoi que ce soit
l'éligibilité des femmes ou des hommes.
Le faible nombre de femmes exerçant des mandats électoraux ou des
fonctions électives pourrait laisser supposer que
l'égalité est plus formelle que réelle.
Il n'en demeure pas moins que le droit d'accéder à ces mandats et
fonctions est strictement égal.
Les pays les " plus avancés " dans ce domaine, loin
d'être dotés d'une législation contraignante, ont
simplement laissé les partis politiques, chargés de
présenter les candidatures aux élections, prendre leurs
responsabilités, ce que ceux-ci ont fait en établissant des
règles internes volontaristes de quotas de candidatures féminines
aux élections, de telles règles internes n'entravant pas leur
liberté.
Votre commission des Lois a considéré qu'il revenait
principalement aux acteurs concernés de remplir leur rôle, reconnu
explicitement par l'article 4 de la Constitution.
Elle a cependant pris en considération le souhait émis par la
plupart des responsables politiques de voir leurs efforts -qui ont
déjà produit des effets non négligeables ces
dernières années- encadrés et facilités par des
dispositions juridiques susceptibles de placer les partis politiques
eux-mêmes dans des conditions d'égalité.
La nécessité, non contestée, d'améliorer la
place des femmes dans la vie politique implique-t-elle de permettre au
législateur de prendre des dispositions contraignantes ou plus
simplement d'adopter des mesures incitatives ?
S'il s'agissait d'autoriser le législateur à prendre des mesures
contraignantes
concernant la recevabilité des candidatures en
fonction du sexe des candidats, il conviendrait en effet de modifier
l'article 3 de la Constitution relatif à la souveraineté,
comme le propose le projet de loi constitutionnelle.
Votre commission des Lois s'est prononcée contre une rédaction
qui permettrait d'imposer par la loi des quotas, car ceux-ci remettraient
gravement en cause le principe essentiel de l'universalité du suffrage
et seraient susceptibles d'encourager le développement
déjà perceptible de revendications de représentation
communautariste émanant de certaines catégories de la
population.
La modification proposée de l'article 3 de la Constitution
conduirait inévitablement la France vers une
" démocratie
communautarisée "
,
ce que votre commission des Lois ne
peut accepter.
S'il s'agit en revanche d'inciter les partis politiques
à
présenter un plus grand nombre de femmes aux élections, en
particulier par la modulation du financement public des partis politiques,
une modification de l'article 4 de la Constitution, relatif aux partis
et groupements politiques apparaît mieux adaptée.
Cette solution présente l'avantage de la souplesse, ne comporte pas de
difficultés notables de mise en oeuvre et, surtout, ne risque pas de
mettre en cause le principe du mandat représentatif.
Elle parait plus adaptée au moment où les partis politiques
semblent prendre en considération la nécessité de mieux
équilibrer la présence des femmes et des hommes dans la vie
publique, puisqu'il s'agirait d'encourager un mouvement amorcé notamment
grâce aux efforts des promoteurs du texte.
Aussi votre commission des Lois vous propose-t-elle de compléter
l'article 4 de la Constitution à cet effet.
D'une part, afin de marquer la responsabilité des partis politiques en
la matière, elle vous propose de prévoir, dans cet article, que
ceux-ci
" favorisent l'égal accès des femmes et des
hommes aux mandats électoraux et aux fonctions
électives ".
D'autre part, votre commission des Lois souhaite que les règles
relatives à leur financement public puissent -si le législateur
l'estime opportun- contribuer à la mise en oeuvre du principe
d'égal accès.