C. DES SUJETS DE SATISFACTION MAIS AUSSI DE PRÉOCUPPATION
Votre
rapporteur spécial se félicite de ce que ce budget retrouve le
chemin de la croissance, après des années de stagnation, voire de
régression, et, en particulier, de l'effort entrepris pour favoriser le
développement du tourisme tant sur le plan social qu'économique.
Il note avec satisfaction la poursuite de
l'encouragement au tourisme
social
avec l'extension du chèque vacances mais, également,
la
réactivation de la concertation entre l'État et les
collectivités territoriales
avec la préparation des contrats
de Plan et la
relance d'une politique offensive de conquête des
marchés extérieurs
: les succès de la France
n'ont rien de garantis et il ne faudrait pas que notre pays ne s'endorme sur
ses lauriers.
Mais votre rapporteur spécial se doit d'attirer l'attention sur les
points qui le préoccupent et dont il pense qu'ils devraient être
mieux pris en compte par la politique du Gouvernement :
1. Les créations d'emploi et l'amélioration de la formation aux métiers du tourisme
La
secrétaire d'État peut mettre à son actif la
création d'un certain nombre d'emplois jeunes; elle peut
également se réjouir de la création de 12000 emplois par
an dans le secteur du tourisme et se donner pour objectif d'en créer 30
000 . Mais, s'agissant d'emplois durables, il convient de se demander si l'on
s'en donne vraiment les moyens, notamment par une politique de formation
adaptée.
A cet égard,
dans un espace de plus en plus concurrentiel, la
compétition ne se fera pas seulement sur les prix mais aussi sur la
qualité
. De ce point de vue, il ne suffira pas de baisser les
charges sur les bas salaires - ou de diminuer le taux de TVA - pour
développer l'emploi hôtelier ; il convient de
développer la formation :
la profession consomme trop peu de
formation continue admet la fédération française de
l'hôtellerie.
Des régions, comme l'Alsace, montrent l'exemple
de ce professionnalisme à défaut duquel on ne bâtit pas un
outil compétitif.
La formation est une occasion de développer la concertation entre tous
les partenaires : professionnels, salariés et administrations
concernés.
2. Le maintien des " duty free "
En
principe, le 1er juillet 1999, le commerce hors taxes au sein de l'Union
européenne devrait être supprimé. En mai dernier, les
ministres des finances des Quinze ont rejeté la demande d'étude
d'impact formulée par l'Irlande, pourtant soutenue par plusieurs
États, dont la France.
La France est la première concernée par ce changement de
régime.
D'abord 50% des produits vendus en hors taxes dans l'ensemble des
aéroports, sont français
. L'argumentation de la Commission
européenne a pour elle la logique communautaire ; il s'agit
d'abolir une forme de commerce qui n'a plus de raison d'être à
l'intérieur du marché unique.
Mais
l'enjeu en termes d'emplois
est considérable comme l'a
souligné, à juste titre, le député du Pas de
Calais, André Capet, dans le rapport qu'il a remis au premier
Ministre : selon lui,
" l'application brutale de la directive de 1991
provoquerait un drame économique, social, financier et politique "
Trois secteurs d'activité sont particulièrement
concernés :
• dans le transport aérien , le commerce hors-taxes constitue un apport essentiel pour les ressources de certains aéroports de second rang (l'aéroport de Tarbes, principalement fréquenté par les pèlerins de Lourdes, survit grâce à ce commerce qui assure 70 % de ses recettes) comme pour Aéroports de Paris, dont le duty free représente 17 % des recettes ;
• enfin, dans le secteur des produits de luxe, des alcools et des spiritueux, déjà secoué par la crise asiatique, l'entrée en vigueur de la directive devrait entraîner une diminution importante des ventes . 2 000 emplois seraient menacés dans la région de Cognac , déjà en crise, où une baisse des ventes de l'ordre de 30 % est attendue en 1999.
Il convient dans le cas où il ne serait pas possible de faire revenir l'Union européenne sur sa décision, de soutenir vigoureusement la démarche de M. Capet tendant à prévoir une adaptation progressive, et non pas instantanée, des tarifs du commerce hors-taxes .
3. Le renforcement de la protection du consommateur
Comment ne pas évoquer, dans le cadre de ce rapport, la tragique noyade de Banyoles en Catalogne. Au-delà du fait divers tragique, il y a en effet la question plus générale de la protection du consommateur de prestations de tourisme. La France dispose d'une législation sans doute parmi les plus rigoureuses en matière d'agence de voyage. Il n'y a pas là que le résultat de la fatalité. Il est important de savoir de quels moyens dispose le secrétariat d'État, éventuellement en agissant au niveau européen, pour prévenir autant que faire se peut, ce genre de catastrophe mais aussi des situations moins dramatiques certes, mais plus courantes où l'on voit des touristes victimes de voyagistes défaillants, sans moyens de rapatriement.
4. La sensibilisation des professionnels à la lutte contre le tourisme sexuel
Un million d'enfants sont réduits dans le monde à la prostitution. Cette situation n'est pas acceptable et doit être combattue par tous les moyens, y compris au niveau des professionnels et c'est à cet titre que l'on évoque les nécessaires campagnes de sensibilisation des opérateurs. Alors que l'Italie vient d'adopter une loi réprimant le tourisme sexuel, il semble important que la secrétaire d'État précise, à l'occasion de cette discussion budgétaire, l'action qu'elle mène en ce domaine.
*
Telles étaient les observations de votre rapporteur spécial qui constituent, selon lui, moins de critiques que des occasions pour le Gouvernement de justifier la politique qu'il entend mener sur la base d'un budget qui, bien qu'en hausse sensible, n'est pas, une fois encore, à la mesure de l'apport du tourisme à l'économie française.