II. UNE RÉPONSE DE POLITIQUE ECONOMIQUE RIGOUREUSE MAIS RÉALISTE
Devant
l'inflexion du rythme de croissance de l'activité économique
perceptible dès le premier semestre, le gouvernement prit les mesures
nécessaires pour atteindre son objectif d'assainissement des comptes
publics, mais aussi, on l'oublie souvent, pour donner plus de dynamisme
à une économie guettée par la langueur.
Ce dernier volet de la politique gouvernementale a poursuivi deux objectifs qui
ont été inégalement atteints. Le premier consistait
à alléger le coût du travail afin d'enrichir le contenu de
la croissance en emplois à travers une baisse de 10 % du coût
salarial aux alentours du SMIC et une réduction de 40 % pour les
embauches de chômeurs de longue durée. Le second objectif
était de soutenir la demande en revalorisant le SMIC et plusieurs
prestations sociales.
Ces deux objectifs, partiellement contradictoires, n'ont pas connu le
même succès. Si l'allégement du coût du travail peu
qualifié a permis de contenir le chômage, la politique des revenus
a certes accru le pouvoir d'achat des ménages appelés à
profiter de ces mesures mais n'a pas eu les effets économiques attendus.
Les revenus distribués n'ont pas été consommés, le
taux d'épargne des ménages connaissant une hausse sans
précédent.
Quant aux mesures de redressement des finances publiques, elles allaient se
manifester principalement dans la loi de finances rectificative du
4 août 1995 avec une hausse de 2 points du taux normal de TVA,
une majoration exceptionnelle de 10 % de l'impôt sur les
sociétés et une suppression de la remise sur les cotisations
d'assurance-vieillesse des salariés.
Ces mesures furent sans doute coûteuses à court terme puisque
selon certaines estimations
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)
elles amputèrent la croissance du PIB de 0,2 point en 1995 et
0,5 point en 1996.
Mais, elles permirent d'atteindre l'objectif de réduction du besoin de
financement des administrations publiques de l'ordre de 1 point du PIB en
1995.
Cette politique, dont les effets ont été mal ressentis par
l'opinion publique, doit, rétrospectivement, être saluée
comme particulièrement cohérente.
On l'a souvent, à tort, décrite comme excessivement
restrictive. Un tout autre jugement s'impose pourtant. On doit rappeler que,
par rapport à un objectif louable de politique budgétaire, la
stabilisation du poids de la dette publique dans le PIB, le gouvernement
d'alors, plutôt que de la rechercher en une seule fois, inscrivit sa
politique budgétaire dans une trajectoire destinée à
atteindre progressivement cet objectif.
Une telle démarche, cohérente avec nos engagements
européens, s'imposait pour tout à la fois éviter un
resserrement excessif de la politique budgétaire et parvenir à
maîtriser le déficit et la dette publics.
Il faut seulement regretter que ce gage de bonne gestion budgétaire
ayant été donné, la politique monétaire n'ait pas
été suffisamment assouplie pour contrebalancer les effets d'une
politique budgétaire responsable.
L'année 1995 rappelle ainsi à chacun que la politique
économique forme un tout, et qu'une coordination des politiques
budgétaire et monétaire s'impose, sans laquelle il n'est pas
possible de rechercher un objectif global.