2. Sur le fond : une réduction du déficit qui repose exlusivement sur de nouvelles taxes ou augmentations de prélèvements, à l'exclusion de mesures de maîtrise des dépenses
La réduction du déficit de l'assurance maladie
en 1998 repose exclusivement sur une augmentation des
prélèvements. En effet, l'objectif national de dépenses
d'assurance maladie pour 1998 est moins strict que celui qui avait
été adopté l'an dernier et il ne s'accompagne pas d'un
encadrement de toutes les dépenses entrant dans son champ.
Outre les 4,6 milliards de recettes supplémentaires résultant
d'un basculement des cotisations maladie sur un taux de CSG plus
élevé que celui qui correspondrait à une stricte
substitution (basculement que votre commission propose de supprimer, voir plus
haut), le projet de loi de financement propose ainsi plusieurs mesures
financières, d'un rendement global presque équivalent.
a) Une bonne taxe, sous réserve de sa conformité au droit européen : la taxe de santé publique sur les tabacs
Le projet de loi de financement comporte d'abord une bonne
mesure, même si sa conformité à nos engagements
européens doit être prouvée par le Gouvernement, à
savoir la création d'une taxe de santé publique sur les tabacs.
Cette taxe, qui sera perçue à compter du 1er janvier 1998, serait
assise et recouvrée sous les mêmes règles que la taxe sur
la valeur ajoutée.
Avec un taux de 2,5 %, elle aurait un rendement de 1,3 milliard de
francs.
Cette taxe s'appliquerait au prix de vente au détail de tous les tabacs
et produits du tabac : elle se superposerait donc aux droits de consommation
sur le tabac régis par le code des impôts. Cette taxe reposerait
sur les mêmes principes que la taxe de 0,74 % perçue au
profit du BAPSA.
Votre commission estime que l'institution de cette taxe est une bonne chose,
car elle contribuera à l'augmentation des prix du tabac et donc, toutes
les études le démontrent, à la diminution de la
consommation.
Elle demande cependant au Gouvernement de bien vouloir démontrer que
cette taxe n'est pas contraire au droit communautaire sur les accises, ni
à l'interprétation de la commission qui exige de ne pas
déformer la structure des taux.
Sous cette réserve, votre commission vous proposera, dans un souci de
santé publique, de majorer le taux prévu par le projet de loi,
notamment pour le tabac à rouler.
b) Deux taxes antiéconomiques au rendement improbable : relèvement de la taxe sur la publicité des laboratoires et création d'une taxe sur les ventes directes de médicaments
Le projet de loi de financement de la sécurité
sociale propose deux mesures antiéconomiques concernant les laboratoires
pharmaceutiques, le relèvement de la taxe sur la publicité des
laboratoires et la création d'une taxe sur les ventes directes de
médicaments.
La première est antiéconomique car elle substitue à la
politique du médicament, qui repose sur des bases conventionnelles, un
mécanisme fiscal.
Le Gouvernement, ce faisant, méconnaît l'importance et le
caractère réversible des investissements étrangers en
France et l'incompréhension des laboratoires étrangers, notamment
anglais et américains, à qui l'on demande à la fois de
signer des engagements contractuels avec l'Etat et de voir ces engagements
démentis par l'Etat sans négociation préalable.
La seconde mesure, elle aussi, est antiéconomique car elle vise à
supprimer un circuit de distribution des médicaments, les ventes
directes réalisées par les laboratoires pharmaceutiques
auprès des officines. Par une disposition fiscale, le Gouvernement
institue, de facto, un monopole de distribution au profit des grossistes
répartiteurs.
Votre commission estime que telle n'est pas la bonne démarche : il
conviendrait d'abord, avant de régler la question de la distribution de
médicaments, de réfléchir à des questions
essentielles telles que la nécessité d'un " service public
de la distribution ", l'amélioration du mode de
rémunération des pharmaciens d'officine et les meilleurs moyens
de promouvoir les médicaments génériques.
Un simple mécanisme fiscal ne saurait apporter une réponse
définitive au problème posé tant que ces importantes
questions n'auront pas été traitées.
Antiéconomiques, ces mesures ont aussi un rendement très
improbable. En effet, l'une comme l'autre auront pour objet de faire
disparaître l'assiette qui sert de base à la perception des taxes
auxquelles elles se rapportent, à savoir un taux élevé de
dépenses de promotion par rapport au chiffre d'affaires et la vente
directe de médicaments remboursables à l'officine.
C'est pourquoi votre commission désapprouve absolument
l'évaluation de leur rendement dans l'exposé des motifs du projet
de loi (600 millions de francs, soit 300 millions de francs par taxe).
C'est pourquoi aussi elle vous proposera de modifier l'article majorant la taxe
sur les dépenses promotionnelles, en ne prévoyant une taxation
très sévère que pour les dépenses excessives et en
renvoyant à la politique conventionnelle le soin de parvenir à un
" désarmement promotionnel " entre les laboratoires. Elle
vous
proposera aussi de supprimer l'article instituant une taxation des ventes
directes des laboratoires, qui a été modifié par
l'Assemblée nationale dans un sens qui ne convient pas à votre
commission : des mesures fiscales peuvent contribuer à
l'effectivité d'une politique, mais pas s'y substituer.
Le projet de loi de financement comporte deux autres mesures, commentées
plus haut (première partie du présent rapport), qui ont une
influence significative sur le déficit de la branche maladie : la
reprise de la dette (1,2 milliard de francs) et l'utilisation de
l'excédent de la contribution sociale de solidarité des
sociétés (1 milliard de francs).