DEUXIÈME PARTIE

ASSURANCE MALADIE

Le changement de Gouvernement résultant de la dissolution de l'Assemblée nationale, au printemps dernier, est intervenu au pire moment pour l'assurance maladie.

Alors que la mise en oeuvre des ordonnances du 24 avril 1996 réformant la système de soins et la protection sociale était en bonne voie et commençait à produire ses premiers effets positifs, les annonces du nouveau Gouvernement concernant la politique de santé et d'assurance maladie, qui se traduisent en partie dans les dispositions du présent projet de loi de financement, risquent d'avoir des conséquences défavorables pour l'assurance maladie.

En effet, la prévision de réduction du déficit tendanciel de l'assurance maladie (le déficit serait de - 5,1 milliards de francs, au lieu de - 12,9 milliards en tendanciel, selon les chiffres du Gouvernement) affichée dans le projet de loi de financement résulte d'une prévision de croissance optimiste et, surtout, d'une augmentation des prélèvements.

Elle s'accompagne d'un relâchement significatif de la politique de maîtrise des dépenses. L'objectif national de dépenses d'assurance maladie proposé par le Gouvernement progresse ainsi de 2,23%, soit un taux supérieur à celui de l'évolution spontanée des dépenses, estimé à 2,2% par la Commission des comptes de la sécurité sociale.

Il apparaît ainsi que le Gouvernement se contente de constater les dépenses plutôt que de chercher à maîtriser leur évolution.


En outre, les déclarations du Gouvernement laissent prévoir que la mise en oeuvre des indispensables mesures de réforme résultant des ordonnances sera, soit retardée, soit abandonnée. Et les signaux de relâchement de l'effort adressés aux professionnels de santé se multiplient.

En conséquence, déjà, depuis l'été, les dépenses d'assurance maladie progressent à un rythme bien supérieur à celui qui avait été constaté depuis la publication des ordonnances. Il n'est donc plus exclu que, contrairement à ce que l'on aurait pu penser jusqu'à l'été, les objectifs de dépenses pour 1997 ne soient finalement pas respectés.

I. LA PREMIÈRE ANNÉE D'APPLICATION DU PLAN JUPPÉ : LES BASES D'UNE INDISPENSABLE RÉFORME DE L'OFFRE DE SOINS ET UN SUCCÈS FINANCIER NOTABLE

Le premier bilan de l'application des ordonnances dites " Juppé " est très positif : non seulement, dans l'année qui a suivi leur promulgation, les bases d'une réforme essentielle du système de soins ont été jetées, mais les dépenses ont été maîtrisées sans rationnement des soins et sans déremboursement.

A. LA MISE EN OEUVRE DES ORDONNANCES : LES DÉBUTS, FRAGILES, D'UNE RÉFORME EN PROFONDEUR DE L'OFFRE DE SOINS ET DE L'ASSURANCE MALADIE

Les principales dispositions contenues dans les ordonnances du 24 avril 1996 (ordonnance n° 96-345 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins et ordonnance n° 96-346 portant réforme de l'hospitalisation publique et privée) sont entrées en application en 1996 et au cours des six premiers mois de 1997.

Elles mettent en place les instruments nécessaires pour améliorer le service médical rendu aux assurés sociaux, en ville et à l'hôpital, dans un souci de bon usage des soins.

Parallèlement, la Conférence nationale de santé a adressé au Parlement son deuxième rapport qui détermine les priorités de santé qui doivent être prises en considération.

1. La médecine de ville bénéficie d'un nouveau cadre juridique

a) Les principaux textes d'application de l'ordonnance ont été publiés

Sur les 24 mesures réglementaires d'application de l'ordonnance consacrée à la médecine de ville, 18 ont été publiées en 1996 et au cours des six premiers mois de 1997. Demeurent encore inappliquées, pour l'essentiel, les dispositions qui concernent la transmission électronique des feuilles de soins, la carte de professionnel de santé et les conditions d'inscription des médicaments sur la liste des collectivités.

Textes d'application de l'ordonnance 96-345 du 24 avril 1996
relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins

Objet de la mesure - articles de l'ordonnance

Nature du décret

Références du texte

Situation actuelle

Article premier :

- Conférence nationale de santé : missions, composition, fonctionnement

Décret en Conseil d'Etat

n° 96-720 du 13.08.96 modifié par n° 97-618 du 30.05.97

Publié le 14.08.96 Publié le 01.06.97

- Conférences régionales de santé : missions, composition, fonctionnement

Décret en Conseil d'Etat

n° 97-360 du 14.07.97

Publié le 18.04.97

Article 2 : Formation initiale des médecins

* modifications du 3ème cycle des études médicales

Décret en Conseil d'Etat

n° 97-494 du 16.05.97

Publié le 18.05.97

* organisation du stage

Décret simple

n° 97-495 du 16.05.97

Publié le 18.05.97

Article 3 : Formation médicale continue : composition et modalités de fonctionnement des conseils

Décret en Conseil d'Etat

n° 96-1050 du 05.12.96

Publié le 06.12.96

Article 4 : Fonds de réorientation et de modernisation : modalités de gestion, de fonctionnement et de participation des conseils

Décret en Conseil d'Etat

n° 96-788 du 11.09.96

Publié le 12.09.96

Article 5 : Incitation à la cessation anticipée d'activité : plafond de l'allocation de remplacement

Décret simple

n° 97-379 du 21.04.97

Publié le 22.04.97

Article 6 : Filières et réseaux : modalités des expérimentations

Décret en Conseil d'Etat

n° 96-789 du 11.09.96

Publié le 12.09.96

Article 7 :

Carnet de santé - définition des informations et conditions d'accès

Décret en Conseil d'Etat

n° 96-925 du 18.10.96

Publié le 20.10.96

Volet de santé : définition des informations et conditions d'accès

Décret en Conseil d'Etat

en préparation

Article 8 :

- Participation des caisses aux actions d'accompagnement de l'informatisation des professionnels de santé

Décret simple

n° 97-373 du 18.04.96

Publié le 20.04.96

- Carte électronique individuelle : contenu, identification, délivrance, utilisation

Décret en Conseil d'Etat

en préparation

- Répertoire national interrégimes : contenu, modalités de gestion et d'utilisation

Décret en Conseil d'Etat

n° 96-793 du 12.09.96

Publié le 13.09.96

- Documents servant au remboursement : contenu, support, conditions de délais de transmission

Décret en Conseil d'Etat

courant octobre 1997

en préparation

Article 9 : Carte de professionnel de santé : contenu, modalités de délivrance et d'utilisation

Décret en Conseil d'Etat

en préparation

Article 10 : Infractions L. 315-3 : modalités de consultation du comité médical régional

Décret en Conseil d'Etat

n° 96-786 du 10.09.96

Publié le 11.09.96

Article 14 : Expertise technique spécifique pour les contestations portant sur les nomenclatures (L. 141-2-1)

Décret en Conseil d'Etat

n° 96-785 du 10.09.96

Publié le 11.09.96

Article 15 : ordres : section des assurances sociales (CSS - L. 145-7)

Décret en Conseil d'Etat

n° 96-1053 du 06.12.96

Publié le 09.12.96

Article 16 : Admission au remboursement inscription sur liste après avis ANAES

Décret en Conseil d'Etat

en préparation

Article 17 : Calcul du montant du versement

Décret en Conseil d'Etat

n° 96-116 du 19.12.96

Publié le 20.12.96

Article 22 : Prescription de médicament en dehors des indications de prise en charge (intégré au décret infraction L. 315-3)

Décret en Conseil d'Etat

n° 96-785 du 10.09.96

Publié le 11.10.96

Article 23 : Médicaments génériques : critères d'exonération des études de biodisponibilités

Décret en Conseil d'Etat

n° 97-221 du 13.03.97

Publié le 14.03.97

Article 24 : Conditions d'inscription des médicaments sur la liste des collectivités

Décret en Conseil d'Etat

en préparation

Il faut aussi noter que le règlement conventionnel minimal, prévu par l'article L. 162-5-9 du code de la sécurité sociale pour s'appliquer en cas d'absence de convention nationale, n'a toujours pas été publié au Journal Officiel.

b) Des conventions médicales spécifiques ont été conclues

Pour la première fois, des conventions spécifiques ont été conclues pour les médecins généralistes et les médecins spécialistes. Elles ont été signées, pour les généralistes, par le syndicat MG-France et, pour les spécialistes, par l'Union collégiale des chirurgiens et spécialistes français (UCCSF), syndicat nouvellement reconnu comme représentatif des médecins spécialistes.

Les deux conventions, malgré leur spécificité, comportent cependant un socle de dispositions communes. Il concerne le principe du libre choix du médecin, les ordonnances et feuilles de soins, les secteurs tarifaires, les RMO, la fixation des honoraires, et surtout les modalités de respect de l'objectif d'évolution des dépenses d'honoraires.

Les articles 27 à 32 bis de la convention généraliste ci-après correspondent ainsi, pour l'essentiel, aux articles 19 à 24 bis de la convention des médecins spécialistes.

GESTION DE L'OBJECTIF PRÉVISIONNEL D'ÉVOLUTION
DES DÉPENSES MÉDICALES (extraits)

Article 28 : Définition du champ de l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses médicales

a) L'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses médicales comprend les dépenses remboursables, hors dépassement, engendrées par l'activité des médecins libéraux, pour tous les régimes et pour les trois risques (maladie, maternité, accidents du travail).

Cet objectif concernant d'une part les médecins généralistes et, d'autre part, les médecins spécialistes, est décomposé en un montant prévisionnel des dépenses d'honoraires et un montant prévisionnel des dépenses de prescriptions.

b) Les postes de dépenses concernés par le champ défini ci-dessus sont :

- Pour les honoraires : actes médicaux inscrits à la NGAP, honoraires de surveillance, forfaits d'accouchement, frais de déplacement des médecins, forfaits thermaux, autres honoraires, forfaits scanner et IRMN 9( * ) .

- Pour les prescriptions : actes d'auxiliaires médicaux inscrits à la NGAP, frais de déplacements des auxiliaires médicaux, médicaments, accessoires et pansements, actes de biologie inscrits à la NABM, optique, orthopédie, produits d'origine humaine, cures thermales, frais de transports des malades, indemnités journalières maladie et accidents du travail.

c) Sont exclues du champ de l'objectif des dépenses médicales :

- Les dépenses de ville correspondant à des honoraires et des prescriptions qui ne sont pas liées à l'activité des médecins libéraux : honoraires et prescriptions des sages-femmes (sauf soins infirmiers), des chirurgiens-dentistes et des médecins exerçant en centres de santé, prescriptions des médecins hospitaliers publics.

- Les dépenses des associations et structures prises en charge au titre des forfaits :


· de soins à domicile,

· de soins courants et de sections de cure médicale des établissements pour personnes âgées,

· de soins de long séjour,

· de réadaptation fonctionnelle,

· de dialyse à domicile,

· d'insuffisance respiratoire chronique.

- Les dépenses ne résultant pas de la prescription des médecins et qui ne constituent pas des soins de ville :


· les prestations en espèces maternité,

· les rentes accidents du travail.

Article 29 : Fixation de l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses médicales

Conformément à l'article L. 162-5-2-1 du code de la sécurité sociale, l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses médicales, concernant les médecins relevant de la présente convention, est fixé chaque année par annexe à ladite convention et peut comprendre une provision pour revalorisation d'honoraires.

L'objectif d'évolution des dépenses médicales fait l'objet dans cette même annexe d'une adaptation soit par zone géographique, soit par spécialité.

L'adaptation par zone géographique est effectuée selon une démarche de réduction progressive des disparités entre ces zones, des consommations moyennes de soins médicaux par bénéficiaire de l'assurance maladie.

Article 30 : Suivi de la réalisation de l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses médicales

Le constat du niveau de réalisation de l'objectif prévisionnel des dépenses médicales de l'année est effectué nationalement, au plus tard au début du mois de février de l'année suivante.

Un suivi de l'objectif est assuré trimestriellement par la Commission conventionnelle paritaire nationale qui analyse l'évolution des dépenses au regard de cet objectif.

Les caisses s'engagent à fournir :


· à chaque médecin un relevé semestriel de ses honoraires et de ses prescriptions comparant son activité à celle de ses confrères de même catégorie par zone géographique ;

· aux partenaires conventionnels nationaux et locaux, un relevé trimestriel agrégé des honoraires et prescriptions pris en compte dans l'objectif prévisionnel.

Article 31 : Versement de la provision pour revalorisation d'honoraires en cas de respect de l'objectif prévisionnel national

Si le montant des dépenses médicales de l'année est inférieur au montant prévisionnel de ces dépenses incluant une provision pour revalorisation des honoraires, la différence est versée à concurrence de cette provision, à l'ensemble des médecins relevant de la présente convention, quelle que soit leur zone géographique d'installation, en proportion de leur activité remboursée de ladite année.

Article 32 : Reversement du dépassement en cas de non-respect de l'objectif prévisionnel national

Si le montant des dépenses médicales de l'année est supérieur au montant prévisionnel de ces dépenses, le reversement exigible des médecins conventionnés, est calculé conformément à la réglementation en vigueur.

Du montant du reversement ainsi défini sont déduites les sommes reversées dans l'année de référence et correspondant aux éventuelles sanctions financières individuelles résultant du non-respect des références médicales opposables, de la répétition des indus et des décisions rendues par les comités médicaux régionaux.


Les conventions ont aussi prévu des mesures transitoires applicables aux résultats des objectifs 1997.

Ainsi, si un reversement est exigible des médecins généralistes ou spécialistes au titre de l'année 1997, les parties signataires des conventions pourront décider de déduire le montant du reversement de celui de l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses des médecins généralistes ou spécialistes.

Le recouvrement des sommes dues par les médecins sera donc différé jusqu'à ce que soit constaté le respect de l'objectif pour 1998.

Si ce dernier est respecté, le reversement sera annulé.

En toute hypothèse, aucun reversement ne sera donc demandé aux médecins avant 1999.

Les clauses spécifiques des conventions, pour les médecins généralistes, concernent l'option conventionnelle (voir plus loin, II-A-2. du présent rapport) et les dispositions relatives aux gardes et urgences, avec la création de la lettre clé VU (visite d'urgence).

Pour les médecins spécialistes, la convention prévoit que l'assuré pourra régler certains actes onéreux au moyen d'un " titre médecin ". Elle prévoit aussi qu'un groupe de travail paritaire analysera les spécificités de l'exercice des différentes spécialités et qu'une lettre clé KCC (actes sanglants réalisés au moyen d'un plateau technique lourd) sera créée.

c) La distribution du carnet médical : une utile mesure pédagogique

En application de l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 et du décret du 18 octobre 1996 relatif au carnet de santé, tous les assurés sociaux ont progressivement reçu leur carnet de santé.

Cette opération de grande ampleur a été achevée dans des délais raisonnables, puisqu'elle s'est terminée en 1997.

La distribution du carnet médical a eu un fort impact dans la population et, malgré un taux d'utilisation encore modeste en moyenne, présente un réel intérêt en termes de santé publique. Elle prépare les assurés sociaux à la carte d'assuré social, lorsque celle-ci sera pourvue d'un volet médical.

La Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés a mis en place une méthode d'évaluation de l'utilisation du carnet de santé dont les premières conclusions viennent d'être rendues publiques.

L'enquête qui a été réalisée sur un échantillon de patients montre :

- un faible taux (6,3 %) de patients ne possédant pas le carnet (perdu ou non reçu) ;

- une utilisation partielle du carnet dans 32,8 % des cas, régulière dans 15,5 % des cas, une non-utilisation dans 51,7 % des cas ;

- que près d'un acte sur quatre et une hospitalisation sur cinq sont renseignés sur le carnet de santé ;

- que les facteurs influençant la bonne utilisation du carnet de santé sont l'âge (27 % d'utilisation à 20 ans contre plus de 70 % à partir de 80 ans), l'existence d'une ALD, la région de résidence du patient, une consommation médicale importante et le recours au généraliste plutôt qu'au spécialiste.

Par ailleurs, les études qualitatives faites par des instituts de sondage à la demande de la CNAMTS auprès des patients et des médecins montrent que le carnet de santé est de nature à transformer en profondeur les comportements à condition de conjuguer la conviction et l'obligation. Les études soulignent clairement que la conviction doit être privilégiée.

En conséquence, la CNAMTS a entrepris en juillet une campagne de communication sur le sujet, destinée à conforter, à l'occasion de la période estivale, l'idée de l'utilité de l'usage du carnet de santé.

L'analyse des chiffres de l'enquête réalisée par la CNAMTS doit être faite avec prudence.

Certains ont cru pouvoir assimiler les résultats montrant une utilisation partielle du carnet à un échec de l'opération.

Votre commission estime qu'il n'en est rien. Les chiffres montrent en effet que près de la moitié des Français utilisent le carnet, au moins partiellement. Alors que la présentation du carnet constitue une contrainte, dont le non-respect n'est pas sanctionné, il est déjà satisfaisant que près de la moitié des Français aient compris, dès la première année, l'intérêt de ce carnet.

En outre, votre commission rappelle que le carnet de santé de l'enfant, souvent cité comme modèle, a mis longtemps à s'imposer auprès des parents et des médecins.

2. Les nouveaux instruments d'adaptation de l'offre hospitalière sont progressivement mis en place

a) L'activité des agences régionales de l'hospitalisation en 1997

L'ordonnance n° 96-346 du 24 avril 1996 portant réforme de l'hospitalisation publique et privée a créé les agences régionales de l'hospitalisation dans le but de constituer une autorité de décision compétente tant pour l'hospitalisation publique que pour l'hospitalisation privée remédiant à la dispersion des responsabilités, des moyens et des compétences entre les différents services de l'Etat et l'assurance maladie.

Les agences régionales de l'hospitalisation ont pour mission de définir et de mettre en oeuvre la politique régionale d'offre de soins hospitaliers, d'analyser et de coordonner l'activité des établissements de santé publics et privés et de déterminer leurs ressources.

La constitution et le fonctionnement des agences obéissent à une convention constitutive, conforme à un modèle type arrêté par le décret du 29 novembre 1996.

Cette convention type fixe les règles de composition, de fonctionnement et les attributions de la commission exécutive, ainsi que le rôle du directeur. Elle précise également les différentes modalités de participation des membres de l'agence à l'exercice de ses missions et à ses moyens. En effet, les agences étant des structures légères, elles fonctionnent en mobilisant pour leur compte les services de l'Etat et des caisses d'assurance maladie.

Les directeurs des agences régionales de l'hospitalisation ont été nommés par le décret en Conseil des ministres du 15 janvier et les conventions constitutives signées avant le 31 décembre, délai imparti par l'ordonnance ; elles sont publiées au Journal Officiel du 10 janvier 1997.

Des arrêtés interministériels ont également fixé les budgets des agences pour 1997.

* La gestion des dotations régionales

Conformément à l'ordonnance du 24 avril 1996, l'effort de réduction des inégalités de ressources entre régions a été amplifié pour la campagne budgétaire 1997 et notamment, grâce au PMSI qui donne la connaissance des coûts hospitaliers à activité comparable. Ainsi, pour 1997, deux approches complémentaires ont été combinées :

- les écarts de moyens disponibles pour la satisfaction des besoins sanitaires, mesurés par le ratio dépenses hospitalières par habitant hospitalisable dans le secteur public ;

- les écarts de coûts pour une activité comparable, mesurés par le point ISA (indice synthétique d'activité) issu du PMSI. Cette deuxième approche permet de comparer les " prix de revient " moyens des régions dans les disciplines de médecine, chirurgie et obstétrique, hors activité d'enseignement et de recherche (dans les établissements de plus de 100 lits) et ainsi de tenir compte de l'efficience relative du système de santé hospitalier.

Les régions les plus avantagées ont été celles qui connaissent à la fois une dotation par habitant modeste dans ces régions et un prix de revient faible ; au contraire, les régions les mieux dotées par habitant et ayant un prix de revient élevé seront celles qui ont contribué à la péréquation.

Il convient de préciser que le transfert des compétences entre les agences régionales de l'hospitalisation et les préfets s'est effectué à partir du 15 janvier 1997 (ARH de Centre) pour se terminer le 14 avril 1997 (ARH de Picardie). Pour la campagne budgétaire 1997, les préfets ont donc réparti les dotations régionales initiales et ont fixé les budgets primitifs des établissements de santé sous compétence tarifaire de l'Etat (établissements publics de santé et établissements privés participant au service public hospitalier).

* Les objectifs assignés aux agences

S'il est encore trop tôt pour faire le bilan des obstacles auxquels se heurtent les agences, il est en revanche possible de dégager leurs priorités principales. Au-delà du traitement des dossiers des établissements connaissant des difficultés, les agences ont centré leurs priorités sur trois axes : adapter l'offre de soins aux besoins de la population et mettre en oeuvre les priorités de santé publique dégagées par les conférences régionales de santé, maîtriser les dépenses hospitalières ainsi que l'organisation interne des agences.

Le premier travail des directeurs d'agence a été d'organiser le travail au sein de l'agence. Le développement des systèmes d'information des agences (suivi de la consommation de la dotation régionale, des emplois...) a également constitué une priorité majeure. De plus, les agences ont toutes eu pour objectif de se doter des capacités d'expertise dans des domaines stratégiques, comme par exemple, en matière de contrôle de gestion.

Les agences se sont attachées, dans leur première année de fonctionnement, à dresser l'état des lieux de l'organisation du système de soins par rapport aux préconisations de l'ordonnance (coopération, complémentarité) et à l'exécution des schémas régionaux d'organisation sanitaire.

Une fois cet examen engagé, les agences sont entrées dans la phase de préparation de la campagne budgétaire 1998. Elles se sont donc livrées à des analyses sur le terrain leur permettant de faire le bilan de la politique d'allocation de ressources menée en 1997.

b) Les premiers contrats d'objectifs : contenu, procédures d'évaluation

L'ordonnance du 24 avril 1996 prévoit la conclusion progressive de contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens entre les agences régionales de l'hospitalisation et chaque établissement de santé public ou privé. A la charnière des schémas régionaux d'organisation sanitaire et des projets des établissements, le contrat articule les objectifs du schéma à ceux de l'établissement.

La démarche contractuelle doit, d'une part, garantir un meilleur fonctionnement du système hospitalier car elle renforce l'autonomie des établissements et la visibilité de leur action à un horizon de moyen terme. Le contrat constitue par ailleurs un instrument de pilotage pertinent pour les agences régionales de l'hospitalisation qui pourront, après avoir formalisé des objectifs communs avec chaque établissement, suivre la mise en oeuvre des programmes d'action et en évaluer les résultats.

La pluriannualité des contrats, de trois à cinq ans, permet, sans s'affranchir des règles relatives à l'annualité budgétaire, d'organiser les évolutions indispensables dans une approche à moyen terme.

Si le principe de contractualisation est retenu pour l'ensemble des établissements de santé, quelle que soit leur nature juridique, le contenu et la forme du contrat différent selon qu'il concerne un établissement sous dotation globale, ou un établissement sous objectif quantifié national.

Pour les établissements publics et participant au service public hospitalier, le contrat résulte de la confrontation entre une approche " régulatrice ", dont le schéma régional d'organisation sanitaire est la traduction, et les objectifs de chaque établissement, exprimés dans le projet d'établissement approuvé. Il fixe les actions dont conviennent les partenaires pour conduire les évolutions de l'organisation et de l'activité rendues nécessaires par l'évolution des techniques, les nouveaux besoins des usagers ou les impératifs de sécurité et de qualité des soins. Il constitue l'instrument privilégié de correction des inégalités financières entre les établissements. Instrument d'accompagnement des évolutions des établissements et de l'amélioration qualitative de l'offre de soins, il aborde tous les domaines énoncés par la loi : activités médicales, organisation interne, coopération, gestion, délai retenu pour s'engager dans la procédure d'accréditation, moyens humains et financiers.

Pour les établissements de santé privés, le contrat prend la forme d'un contrat-type, annexé au contrat tripartite national qui est conclu entre l'Etat, la CNAM et les fédérations de cliniques. Il fixe les tarifs des prestations et se substitue aux anciennes conventions passées avec les CRAM. Il prévoit, en outre, les actions susceptibles d'améliorer la qualité et la sécurité des soins et les coopérations auxquelles les établissements s'obligent. Il indique le délai dans lequel les établissements s'engagent à demander leur accréditation. Les dispositions de l'ordonnance relatives à la contractualisation avec les établissements privés ont donné lieu à publication d'un décret d'application n° 97-372 du 18 avril 1997, et celles relatives aux établissements publics et participant au service public à une circulaire datée du 13 janvier 1997.

La mise en place récente des agences régionales de l'hospitalisation rend prématurée l'établissement d'un bilan des contrats d'objectifs et de moyens d'ores et déjà conclus pour l'application de l'ordonnance du 24 avril 1996 : il faut toutefois souligner le fait que plusieurs contrats ont toutefois déjà été signés ou le seront au cours du quatrième trimestre.

c) La coopération entre les établissements de santé publics et privés

La coopération entre les établissements de santé constitue un enjeu majeur pour la recomposition et l'adaptation du dispositif hospitalier, en ce qu'elle permet de mettre en commun des moyens afin de rendre les meilleurs services aux malades dans le cadre d'une rationalisation de l'ensemble des moyens sanitaires.

Les modalités de la coopération interhospitalière ont été précisées par la loi n° 91-748 du 31 juillet 1991 portant réforme hospitalière, qui énonce les formes juridiques possibles : la convention, le syndicat interhospitalier, le groupement d'intérêt public et le groupement d'intérêt économique.

L'ordonnance du 24 avril 1996 portant réforme de l'hospitalisation publique et privée a encore étendu le champ de ces procédures traditionnelles de coopération hospitalière et prévu de nouveaux outils de coopération entre les établissements, tels que les réseaux de soins, les communautés d'établissements ou les groupements de coopération sanitaire.

L'analyse des dispositifs existants a montré que les actions de coopération ont d'abord été conduites dans les domaines logistique, médico-technique et du personnel. Le domaine médical a été jusqu'ici peu concerné, par les opérations de rapprochement. On note cependant ces deux dernières années, l'existence de quelques accords.

L'essentiel des actions menées (72%) passe par le canal des conventions entre les hôpitaux. Les rapprochements de structures, au travers des syndicats interhospitaliers demeurent peu nombreux (8 %), de même que les mises en commun de moyens réalisés grâce à des groupements d'intérêt public et à des groupements d'intérêt économique (2 %).

Les articles 29 et 30 de l'ordonnance portant réforme de l'hospitalisation publique et privée ont consacré les réseaux de soins et les communautés d'établissements comme de nouveaux dispositif de régulation permettant une meilleure organisation des soins et une meilleure insertion des établissements de santé dans leur environnement.

Les réseaux de soins doivent permettre aux établissements de santé de développer les partenariats propices à une prise en charge plus globale du malade au regard des exigences d'orientation, de graduation et de continuité des soins. Votre commission est très favorable à la mise en place de tels réseaux, dans l'intérêt des malades et de la coordination des soins qui leur sont délivrés.

Les communautés ont pour vocation de favoriser une plus grande complémentarité entre les établissements de santé assurant le service public hospitalier et situés dans un même secteur sanitaire.

Les réseaux de soins et les communautés d'établissements, qui s'inscrivent, chacun selon ses modalités propres, dans une logique d'amélioration de la qualité des soins et d'optimisation des moyens, relèvent de la seule forme conventionnelle. Toutefois, ces dispositifs doivent être compatibles avec la carte sanitaire et favoriser la mise en oeuvre des complémentarités et des actions de coopération inscrites dans les SROS et leurs annexes. En outre, ils doivent tenir compte des objectifs de santé publique fixés par les conférences nationale et régionales de santé ainsi que des politiques nationales initiées par le ministre chargé de la santé.

Les réseaux de soins et les communautés d'établissements sont agréés par les directeurs de l'agence régionale de l'hospitalisation, et leur mise en oeuvre peut être réalisée dans le cadre des contrats d'objectifs et de moyens. Les établissements de santé assurant le service public hospitalier qui n'auront pas adhéré à une communauté d'établissements au 25 avril 1999 seront tenus d'en présenter les raisons dans un rapport adressé au directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation.

Outre les communautés d'établissements et les réseaux de soins, l'ordonnance a également créé le groupement de coopération sanitaire qui permet la mise en oeuvre d'actions de partenariat entre les établissements publics et les établissements privés de santé lorsque ces derniers, n'assurant pas le service public hospitalier, ne remplissent pas les conditions légales permettant de constituer un syndicat interhospitalier.

L'ordonnance énonce précisément le champ des réalisations possibles à travers cette nouvelle modalité juridique : équipements matériels lourds d'intérêt commun y compris des plateaux techniques tels des blocs opératoires ou des services d'imagerie médicale, ou interventions communes des professionnels médicaux et non médicaux.

Le groupement de coopération sanitaire n'a pas la qualité d'établissement de santé et ne peut être employeur. Il est cependant doté de la personnalité morale et peut détenir des autorisations d'équipements matériels lourds.

Le groupement est constitué par convention approuvée et publiée par le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation. L'assemblée générale des membres est habilitée à prendre toute décision intéressant le regroupement, décisions mises en oeuvre par un administrateur élu. Le décret n° 97-240 du 17 mars 1997 a précisé les conditions d'élaboration, le contenu et les modalités de mises en oeuvre des conventions constitutives.

Par ailleurs, l'ordonnance donne au directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation la possibilité d'inciter les établissements publics de santé à conclure des conventions de coopération, à créer un syndicat inter-hospitalier ou un groupement d'intérêt public, ou même à fusionner. La demande du directeur de l'agence doit être motivée. Si elle demeure sans effet, après avis du comité régional de l'organisation sanitaire et sociale, le directeur de l'agence peut prendre des décisions s'imposant à l'établissement, y compris la création ou la suppression d'emplois médicaux et des crédits afférents.

De plus, l'ordonnance modifie, dans son article 40, les conditions de constitution des syndicats interhospitaliers. Désormais ces syndicats, créés à la demande de deux ou plusieurs établissements assurant le service public hospitalier, doivent au moins inclure un établissement public de santé.

La coopération entre les établissements publics et privés constitue un bon moyen d'assurer une progressive adaptation du tissu hospitalier.

A cet égard, votre commission souligne la nécessité pour le Gouvernement de lever rapidement les principaux obstacles réglementaires à la coopération, notamment lorsqu'elle est envisagée entre un établissement de santé public et un établissement de santé privé. Ces obstacles sont en effet de nature à compromettre certaines opérations ou à en différer la réalisation.

3. Le deuxième rapport de la Conférence nationale de santé constitue un instrument de travail utile pour le Parlement

La Conférence nationale de santé instituée par l'ordonnance n° 96-345 du 24 avril 1996 a remis son deuxième rapport annuel au Parlement.

En 1996, la conférence avait déterminé dix priorités de santé d'égale importance. Elle en a analysé l'impact au cours de ses travaux, à Lille, du 30 juin au 2 juillet dernier. Si la loi de financement pour 1997 avait traduit certaines priorités par des mesures strictement financières (taxation des permis, hausse des prix du tabac), des actions budgétaires ou des décisions des caisses d'assurance maladie ont aussi participé à leur mise en oeuvre.

Cette année, la Conférence nationale de santé a choisi, à raison, de concentrer son rapport sur un nombre de thèmes plus réduit. Quatre grandes priorités ont ainsi été retenues ; elles figuraient déjà parmi les dix priorités fixées l'an dernier.

Une telle approche convient mieux à votre commission : en effet, le rapport de la conférence étant destiné à éclairer le Parlement pour faire des choix de santé, il est bien évident que tout, malheureusement, ne peut être considéré comme prioritaire.

Le choix de quatre priorités parmi les dix de l'an dernier montre bien aussi que la portée des priorités déterminées par la conférence ne peut être annuelle, quelle que soit la bonne volonté du Parlement et du Gouvernement pour les mettre en oeuvre.

Les membres de la conférence ont bien compris, enfin, que la loi de financement annuelle de la sécurité sociale ne peut constituer le vecteur exclusif de mise en oeuvre des priorités : la loi de financement a un contenu constitutionnel très strict, qui ne peut être dépassé.

Le deuxième rapport de la Conférence fournit donc au Parlement un instrument de travail extrêmement précieux pour l'ensemble de son activité législative tout au long de l'année. Les quatre priorités qu'elle a retenues sont détaillées dans le tome IV duprésent rapport (compte rendu de l'audition de M. Joël Ménard).

Il s'agit du renforcement de la prévention et de la promotion de la santé des enfants, des adolescents et des jeunes, de l'amélioration de la prévention, du dépistage et de la prise en charge des cancers, de la diminution de l'incidence des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et la réduction des inégalités de santé inter et intrarégionales.

D'ores et déjà, le 25 septembre dernier, le Sénat a adopté dans le cadre de la proposition de loi relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l'homme , des dispositions renforçant la lutte contre les infections nosocomiales : elles constituent la première mise en oeuvre d'une priorité retenue par la conférence.

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