EXAMEN DES ARTICLES

Article additionnel avant l'article premier -
Définitions

Votre commission vous propose de placer en tête de la proposition de loi, ce que lui paraît plus logique, les dispositions relatives aux définitions actuellement situées à l'article 3.

Pour les raisons exposées lors de l'examen de l'article 3, elle préfère par ailleurs renvoyer expressément à la convention d'Ottawa plutôt que de développer ces définitions dans la loi française.

Article Premier -
Interdiction des mines antipersonnel

L'article premier pose le principe de l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, de la production, de l'acquisition, du stockage, de l'offre, de la cession, de l'importation, de l'exportation, du transfert et de l'emploi des mines antipersonnel.

Il reprend, en les précisant, les quatre grandes catégories d'interdiction totale définies dans l'article premier de la convention d'Ottawa , à savoir :

• la production , qui est interdite en tant que telle, ainsi que la fabrication, notion pour le moins très voisine, et la mise au point, terme pouvant s'appliquer à la définition de procédés de production, c'est-à-dire aux licences, qu'il convient également de proscrire,

• la détention , visée par les notions d'acquisition, de stockage et d'importation,

• le commerce , couvert par l'interdiction de l'offre, de la cession, de l'exportation et du transfert,

• et enfin l' emploi des mines antipersonnel.

Ainsi que cela a été indiqué dans le rapport relatif à la convention d'Ottawa, deux types d'interdiction sont déjà en vigueur dans notre pays sur la base du régime administratif de contrôle a priori prévu par le décret loi du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions, modifié en dernier lieu par l'ordonnance n° 58-917 du 7 octobre 1958.

Les mines antipersonnel étant classées dans la catégorie des matériels de guerre, c'est sur la base des dispositions de ce décret-loi qu'ont été successivement interdites leur exportation et leur fabrication.

En ce qui concerne les exportations de mines antipersonnel , un moratoire de fait a été appliqué dès 1986 puis officialisé en 1993, la délégation générale pour l'armement ayant rappelé aux industriels de l'armement le 23 septembre 1993 qu'aucune autorisation ne serait accordée pour l'exportation de mines antipersonnel. Cette décision gouvernementale s'est appuyée sur les articles 12 et 13 du décret loi précité qui prohibent l'exportation sans autorisation des matériels de guerre et soumettent l'acceptation des commandes par les industriels à un agrément préalable de l'Etat. La commission interministérielle pour l'étude des exportations des matériels de guerre (CIEEMG) a veillé à une application stricte de ces dispositions.

S'agissant de la fabrication , le précédent gouvernement a décidé en septembre 1995 d'adopter un moratoire sur la production de toutes les mines antipersonnel. L'article 2 du décret-loi du 18 avril 1939 soumet en effet à l'autorisation et au contrôle de l'Etat la fabrication des matériels de guerre et permet donc aux autorités gouvernementales de prendre des mesures d'interdiction. En pratique, aucun industriel français ne fabriquait plus de mines antipersonnel depuis 1987.

L'article premier de la proposition de loi donne donc force législative à l'interdiction de la fabrication et de l'exportation des mines antipersonnel, déjà effective sur la base de textes réglementaires.

Il étend le champ des interdictions au stockage , ce qui impliquera la destruction des stocks, spécifiquement visée à l'article 11, et surtout à l' emploi des mines antipersonnel.

Comme votre rapporteur l'a rappelé dans son rapport relatif à la convention d'Ottawa, en dehors de la protection de la base aérienne de Solenzara, en cours de redéfinition, l'usage des mines antipersonnel par les forces armées n'a plus cours depuis les événements du Liban de 1982 et 1983, qui avaient exigé une protection particulière des installations françaises, en particulier de la Résidence des Pins.

Cette doctrine avait été formalisée par le gouvernement d'Alain Juppé dans un communiqué du Conseil des ministres du 2 octobre 1996 précisant que la France renonçait à l'emploi des mines antipersonnel "sauf en cas de nécessité absolue imposée par la protection de ses forces. Dans ce dernier cas, toute dérogation ne pourrait être autorisée que par une décision des autorités gouvernementales. L'emploi se ferait dans le strict respect des conditions de sécurité et en toute conformité avec les conventions internationales en vigueur".

Cette ultime réserve a disparu avec la signature par la France de la convention d'Ottawa. Des moyens techniques susceptibles de remplir les fonctions d'alerte traditionnellement dévolues au mines antipersonnel mais faisant appel à l'intervention humaine, et non à un fonctionnement automatique et aveugle, -le système MODER (Moyen de défense rapproché)- sont mis au point en parallèle afin de répondre aux besoins de protection des forces armées. Ils commenceront à équiper l'armée de terre au cours de l'année 1999, la dotation complète devant être disponible en 2001.

Votre commission a observé que la proposition de loi n° 403 de Mme Marie-Claude Beaudeau et des membres du groupe communiste, républicain et citoyen envisageait d'appliquer une même interdiction aux composants des mines antipersonnel. Cette interdiction, qui irait au-delà de la convention d'Ottawa, viserait par exemple les détonateurs ou les explosifs. Mais il paraît peu envisageable d'en proscrire la fabrication dans la mesure où ils ne sont pas spécifiquement dédiés aux mines antipersonnel et peuvent être utilisés pour la production d'autres types de matériels.

Votre commission vous propose pour sa part de compléter cet article en étendant l'interdiction à la conservation des mines antipersonnel. Outre que le terme est expressément employé par la convention, il peut compléter celui de stockage qui semble plutôt viser la détention d'une quantité élevée de mines.

Elle vous propose d'adopter cet article assorti de cet amendement.

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