PROJET DE LOI
(Texte proposé par le Gouvernement)
Article unique
Est autorisée la ratification du traité d'amitié, d'entente et de coopération entre la République française et la République d'Azerbaïdjan, signé à Paris le 20 décembre 1993, et dont le texte est annexé à la présente loi 6( * ) .
ANNEXE -
ETUDE D'IMPACT 7(
*
)
I - Etat de droit et situation de fait existants et leurs
insuffisances
Le traité d'amitié, d'entente et de coopération est le
premier accord soumis à ratification signé avec
l'Azerbaïdjan, jeune République née en 1991.
Il est à noter que ce pays est désireux de négocier et de
conclure avec ses partenaires des accords intergouvernementaux dans tous les
domaines, afin de remplacer les textes hérités de l'Union
Soviétique dont la prolongation est considérée comme
attentant à l'honneur national.
II - Bénéfices escomptés
L'Azerbaïdjan est un pays encore très centralisé, où,
en dépit de réformes économiques rigoureuses, l'initiative
privée reste marginale. Les grands contrats, en particulier, ont un
caractère politique et sont supervisés directement par le Chef de
l'Etat.
La ratification du Traité d'amitié, d'entente et de
coopération sera appréciée par la partie
azerbaïdjanaise comme un geste politique de nature à favoriser le
développement des relations bilatérales, y compris sur le plan
économique.
Nous en attendons donc un impact stimulant pour nos relations commerciales avec
l'Azerbaïdjan, et un
bénéfice économique
important compte tenu des données suivantes :
1. L'Azerbaïdjan, grâce aux découvertes
pétrolières faites dans la mer Caspienne, devrait devenir un
marché porteur dès le début du siècle prochain
:
- Depuis 1994, l'Azerbaïdjan a signé cinq grands contrats
pétroliers, dont un d'exploitation appelé par la profession
pétrolière "contrat du siècle", et quatre d'exploration.
Ils impliquent une participation à la mise en valeur de la mer Caspienne
des plus grandes compagnies pétrolières internationales.
- Des estimations minimales, fondées sur des projections se limitant aux
seules réserves prouvées couvertes par le "contrat du
siècle", prévoient que l'Azerbaïdjan disposera d'une
production
minimale
de 35 millions de tonnes par an en l'an 2010 (1/3 de
la production du Koweït) et, sur quinze ans, de
recettes de
trésorerie estimées à 80 milliards de dollars
.
- Ces recettes pourraient être doublées, voire triplées, si
les quatre contrats d'exploration signés à ce jour aboutissent
à une mise en exploitation des gisements prospectés. Elles
pourraient encore augmenter si, comme l'Azerbaïdjan l'espère, les
recherches géologiques en cours ouvrent la voie à de nouveau
contrats d'exploration.
2. Les contrats pétroliers devraient induire deux séries
d'investissements étrangers, ainsi qu'une hausse de la consommation
intérieure
:
- en amont, dans la mesure où l'Azerbaïdjan doit préparer
dès maintenant les conditions de l'exploitation
pétrolière, dont les premières productions sont attendues
fin 1997 : il s'agit d'abord de la construction ou de la réfection des
voies d'évacuation des hydrocarbures, qui sont actuellement
insuffisantes. On prévoit notamment la construction d'un oléoduc
vers la Géorgie et la mer Noire, ainsi que la modernisation de
l'oléoduc qui relie actuellement l'Azerbaïdjan à la Russie.
On prévoit également la construction de stockages
pétroliers et d'autres infrastructures permettant la circulation des
hommes et du matériel nécessaires à la prospection et
à l'exploitation.
- en aval, dans la mesure où l'Azerbaïdjan veut utiliser ses
recettes à la réhabilitation de ses réseaux de
communication, de son patrimoine urbain et de ses industries traditionnelles,
comme celle du coton ou du ciment.
- en outre, le gouvernement prévoit de relever le niveau de vie d'une
population durement affectée par la récession des années
91-94 et par le conflit du Haut-Karabakh (un million de
réfugiés). Une partie des recettes pétrolières sera
affecté au soutien de la consommation intérieure, y compris la
consommation de luxe qui est déjà stimulée par la
présence du personnel des compagnies pétrolières.
L'Azerbaïdjan peut donc devenir un marché important de la CEI
pour la France
, surtout si nous parvenons à augmenter notre part de
marché, qui n'est pas négligeable : 1 à 2 % si l'on compte
le commerce entre l'Azerbaïdjan et ses voisins, mais 4 à 8 % si
l'on ne considère que les échanges hors de l'espace
régional immédiat (CEI, Iran, Turquie). C'est une part
inférieure à l'Allemagne et à la Grande-Bretagne, mais
comparable à celle des Etats-Unis et de l'Italie.
3. Nos entreprises ont pris conscience du potentiel azerbaïdjanais
:
Elles travaillent déjà, non seulement à maintenir, mais
à augmenter notre part de marché. Elles sont présentes sur
des créneaux porteurs :
a) dans le secteur du pétrole
: Elf et Total s'emploient à
rattraper le retard pris au départ de la compétition entre les
compagnies pétrolières, retard qui explique leur absence du
premier des cinq contrats signés par l'Azerbaïdjan. Elf a acquis
une participation de 10 % dans le troisième contrat, et le statut
d'opérateur, avec 65 % des parts, dans le cinquième contrat, dit
de "Lenkoran". Total y participe à hauteur de 10 %.
Elf prévoit des investissements importants sur le gisement de Lenkoran,
à hauteur d'au moins
1,5 milliard de francs,
si la prospection
donne des résultats positifs.
b) dans les secteurs d'investissements induits :
Nos entreprises se sont portées candidates dans un grand nombre de
secteurs clés du développement de l'Azerbaïdjan :
réhabilitation du système d'alimentation en eau de Bakou, une des
plus grandes villes de l'espace CEI (offre Degremont/Lyonnaise des Eaux) ; la
construction de l'aéroport du Nakhitchevan, enclave azerbaïdjanaise
entre l'Arménie et l'Iran (offre Dumez/GTM) ; la modernisation de
l'aéroport de Bakou (offre Thomson/CSF) ; la rénovation du
parc aérien (ventes d'Airbus en location-vente) ; la construction de
l'oléoduc Bakou-Poti ; la reprise des cimenteries (offre Lafarge) ; le
commerce de luxe (ouverture d'un magasin Pierre Cardin à Bakou), pour ne
citer que les secteurs les plus prometteurs dans l'immédiat.
Conclusion
: le Traité d'amitié, d'entente et de
coopération soumis à ratification ne se contente donc pas de
sanctionner le dialogue politique bilatéral établi entre nos deux
pays ; il peut avoir une réelle incidence sur nos investissements dans
ce pays. Ceux-ci, à leur tour, peuvent avoir un impact significatif sur
la santé de quelques-unes de nos grandes entreprises,
pétrolières notamment. Ils peuvent également engendrer un
courant d'échange qui impliquera nos entreprises de travaux publics,
ainsi que nos petites et moyennes entreprises, avec des retombées
positives pour l'emploi en France.