N° 413
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 29 avril 1998
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, portant diverses dispositions d'ordre économique et financier,
TOME I
Par M. Alain LAMBERT,
Sénateur,
Rapporteur Général.
EXAMEN DES TITRES I, III, IV ET V
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Christian Poncelet,
président
; Jean Cluzel, Henri Collard,
Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Philippe Marini,
René Régnault,
vice-présidents
; Emmanuel
Hamel, Gérard Miquel, Michel Sergent, François Trucy,
secrétaires
; Alain Lambert,
rapporteur
général
; Philippe Adnot, Bernard Angels, Denis Badré,
René Ballayer, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse
Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy
Cabanel, Jean-Pierre Camoin, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques
Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert
Haenel, Claude Haut, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Marc
Massion, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin,
Henri Torre, René Trégouët.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème
législ
.) : 727, 781,
et T.A.
115.
Sénat
:
373
et
408
( 1997-1998)
Politique économique.
EXPOSÉ GÉNÉRAL
Hétérogène par nature, ce projet de loi
portant diverses dispositions d'ordre économique et financier regroupe
des dispositifs qui pourraient faire l'objet de textes autonomes. Trois
séries de dispositions peuvent ainsi être distinguées :
- celles relatives à la simplification administrative,
- celles relatives au plan français de passage à l'euro,
accompagnées d'un perfectionnement de notre législation sur les
marchés financiers ;
- la troisième série de dispositions concerne des sujets divers,
dont l'autonomie se borne le plus souvent à un seul article et qui ont
donc toute leur place dans un DDOEF. Le gouvernement a regroupé
certaines de ces dispositions éparses en deux titres, le titre III,
relatif au secteur public et aux procédures publiques, et le titre IV,
relatif à la protection de l'environnement et à la santé
publique. En réalité toutefois, les articles contenus dans ces
deux titres sont dénués de liens entre eux.
I. TITRE I - DISPOSITIONS RELATIVES À LA SIMPLIFICATION
ADMINISTRATIVE
Ces propositions sont le fruit des réflexions menées par le
gouvernement en vue de faciliter la vie des PME et des artisans. Elles se
fondent sur un rapport du député du Nord, Dominique Baert.
Les mesures proposées sont libérales, puisqu'il s'agit de
réduire les formalités administratives qui frappent les
entreprises.
Votre rapporteur remarque que le projet de DDOEF de 1997
1(
*
)
comportait certaines mesures
identiques ou proches de celles contenues dans ce titre I :
la déclaration unique d'embauche (article 21) ;
l'harmonisation de l'assiette des contributions dues par les employeurs
(articles 28-1997 et 1-1998).
Votre commission n'a pas de remarques particulières à formuler
sur ce dispositif, qu'elle juge excellent d'une façon
générale.
Elle profite du débat ouvert par l'article 11 sur la TVA pour
rappeler son attachement à deux mesures non prises à ce
jour : la possibilité pour les collectivités locales d'opter
pour l'assujettissement de leurs déchetteries à la TVA ; et
l'engagement de négociations communautaires afin que le bois de
chauffage des réseaux de chaleur puisse bénéficier du taux
réduit.
II. TITRE II - DISPOSITIONS RELATIVES À L'ADAPTATION DE LA
LÉGISLATION FRANÇAISE ET À LA MODERNISATION DES
ACTIVITÉS FINANCIÈRES EN VUE DE LA TROISIÈME PHASE DE
L'UNION ÉCONOMIQUE ET MONÉTAIRE
Le titre II constitue le troisième volet
du débat
européen de ce printemps, en vue de permettre à la France
d'adopter la monnaie unique dès le 1er janvier 1999.
Il vient ainsi compléter la loi modifiant le statut de la Banque de
France en vue de sa participation au Système européen de banques
centrales adoptée définitivement par le Sénat le
29 avril, et la résolution de votre commission des finances que le
Sénat a bien voulu adopter le 23 avril sur la recommandation de la
Commission des communautés européennes relative à
l'engagement de la troisième phase de l'Union économique et
monétaire. Ce titre II est traité en détail dans le
tome II du présent rapport par notre collègue Philippe
Marini. Votre rapporteur en mentionne ici les grandes lignes pour être
complet sur la présentation de ce projet de loi.
Toutefois, de nombreuses dispositions du titre II n'ont pas de lien direct
avec le passage à l'euro. Elles sont issues des débats relatifs
à la modernisation de la gestion financière pour compte de tiers
et à la législation de l'épargne.
A. LE PLAN DE PASSAGE À L'EURO
Le plan français de passage à l'euro est établi sur le
principe du "ni-ni" entre 1999 et 2002 : ni obligation (de conversion), ni
interdiction.
Les principales dispositions du DDOEF concernant ce plan sont les
suivantes :
- conversion de la comptabilité du capital social et des
déclarations fiscales des entreprises ;
- autorisation de cotation des instruments financiers en euros, adaptation des
systèmes de règlement-livraison, substitution des indices
" euro " aux indices " franc " et continuité des
contrats ;
- conversion des dettes négociables en euros, en particulier celle de
l'Etat ;
- possibilité d'indexer les nouvelles émissions (de l'Etat
notamment), sur l'inflation afin d'alléger la charge de la dette
publique. Cette disposition a rencontré l'hostilité de la Banque
de France ;
- passage des organismes de placement collectif en valeurs
mobilières (OPCVM) à l'euro ;
- extension de l'euro à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon.
Ces dispositions, de nature technique, sont destinées à permettre
de convertir les grands mouvements financiers en euros dès 1999.
B. MODERNISATION DES ACTIVITÉS FINANCIÈRES
Un certain nombre de dispositions du projet de DDOEF sont relatives aux
marchés financiers. Ces dispositions sont les suivantes :
- irrévocabilité des opérations de
règlement-livraison de titres (art. 18) et modification des
règles de transfert de propriété (art. 19) ;
- définition législative de l'appel public à
l'épargne (art. 25) et établissement d'un corpus de règles
propres aux investisseurs "qualifiés" et aux "cercles restreints
d'investisseurs" ;
- création de nouveaux types d'OPCVM (art. 27 à 29) ;
- rachat par une société de ses propres actions (art. 30),
dispositif décidé sur la base du rapport de M. Bernard
Esambert ;
- modification du processus de décision au sein du Conseil des
marchés financiers (art. 32) ;
- extension de la procédure de retrait obligatoire aux certificats
d'investissement et fusion obligatoire des certificats d'investissement et des
certificats de droits de vote (art. 33).
III. TITRE III - DISPOSITIONS RELATIVES AU SECTEUR PUBLIC ET AUX
PROCÉDURES PUBLIQUES
Sous ce titre sont regroupés quatre articles sans lien entre eux.
L'article 35 est relatif au
schéma directeur de desserte
gazière
. Il a pour but de permettre la desserte des zones non
desservies actuellement par Gaz de France. Ce dispositif écorne le
monopole de Gaz de France et a suscité l'ire de ses salariés. Il
se substitue au dispositif voté dans le cadre du DDOEF de 1996
2(
*
)
et qui n'a pas trouvé à
s'appliquer faute de décret d'application. L'Assemblée nationale
l'a modifié dans un sens plus protecteur du monopole de GDF, d'une part,
en supprimant la liberté pour les communes non desservies de faire appel
à l'opérateur de leur choix, et, d'autre part, en
prévoyant que les nouveaux opérateurs autorisés à
distribuer le gaz devront être détenus à 30 % au moins
par l'Etat ou des établissements publics. Votre commission
considère que la difficulté à faire jouer la concurrence
pour les collectivités ou leurs groupements est de nature à
entraver la desserte du territoire. Elle vous proposera donc d'étendre
aux collectivités locales cette condition de détention de
30 %.
L'article 36 est relatif à
l'ouverture du capital d'Air France
.
Il organise notamment un échange d'actions contre des baisses de
salaires. La décision de ne pas privatiser complètement Air
France avait provoqué le départ de son précédent
président Christian Blanc. Cet article suscite aujourd'hui une forte
hostilité des pilotes. Votre commission ne peut que rappeler son
attachement à la privatisation intégrale
3(
*
)
, toute solution intermédiaire
ne pouvant que mener à une impasse.
L'article 37 peut s'analyser comme l'ouverture au secteur privé de
la société nationale des poudres et explosifs, qui souhaite
constituer une société commune avec la société
britannique "Royal Ordnance".
L'article 38 est relatif à un toilettage juridique des règles du
versement de transport, sans modification de son régime sur le fond. Cet
article est au demeurant identique à l'article 47 du projet de 1996.
IV. TITRE IV - DISPOSITIONS FISCALES ET FINANCIÈRES RELATIVES
À LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ET À LA SANTÉ
PUBLIQUE
Ce titre comprend trois articles sans lien entre eux.
L'article 39 est relatif à une
modification du calcul de la puissance
fiscale des véhicules particuliers
. Il est consécutif
à la remise au Parlement d'un rapport gouvernemental demandé
à l'initiative de votre commission. Celle-ci s'est impliquée
depuis plusieurs années dans le débat sur une fiscalité
plus rationnelle des carburants. Il faut noter que le dispositif proposé
n'a pas d'incidence sur la taxe intérieure sur les produits
pétroliers. En revanche, il en a sur les recettes des
collectivités locales, en particulier celles des départements,
via la "vignette". Votre commission est favorable à ce dispositif, qui
devrait encourager l'utilisation des carburants les moins polluants. Toutefois,
conformément à une position constante, elle restera attentive
à d'éventuels transferts de recettes entre les
départements et demandera, le cas échéant, qu'un
dispositif vienne limiter ce transfert.
L'article 40 est relatif à la responsabilité civile et
à l'assurance des propriétaires de navires pour les dommages
résultant de la pollution par les hydrocarbures.
L'article 41 crée une
taxe sur les achats de viande
pour
financer l'élimination des farines animales non conformes aux normes
communautaires. Jugeant qu'il n'est pas équitable que cette charge
repose sur la petite distribution, votre commission présentera un
amendement tendant à éviter cet effet.
V. TITRE V - DISPOSITIONS DIVERSES
Ce titre comprend six articles entre lesquels le gouvernement n'a pu trouver de
point commun.
L'article 42 est relatif au paiement des impôts par virement ou
prélèvement automatique.
L'article 43 est relatif au recensement, sur six mois, des porteurs de
créances sur la Russie tsariste. Un compte d'affectation spéciale
a été créé et doté à cette fin dans
la loi de finances pour 1998.
L'article 44 a pour objet de valider une délibération de la
fondation nationale des sciences politiques relative à son budget. Cette
disposition figurait déjà à l'article 72 du projet de
DDOEF de 1997. Votre commission ne s'oppose pas à cette validation, mais
elle ne peut que critiquer les dysfonctionnements qui l'ont rendu
nécessaire.
L'article 45 crée un nouveau prélèvement sur
l'Association de gestion du fonds des formations en alternance. Le
caractère récurrent de ce type de prélèvement
démontre à l'évidence que la cotisation demandée
aux entreprises à ce titre est trop élevée.
L'article 46 limite l'avantage fiscal tiré de l'amortissement des
biens donnés en location par une société de personnes
.
Cette limitation ne sera pas applicable à certaines opérations
agréées par le ministre du budget relatives à des
équipements lourds, amortissables sur une durée au moins
égale à 8 ans. Il s'agit, notamment, d'épargner les
navires de commerce. Votre rapporteur rappelle à ce sujet que la
commission des finances s'est toujours montrée favorable à une
législation tendant à attirer l'épargne vers le
financement des navires de commerce, afin de renforcer la flotte de commerce
française qui s'est dangereusement réduite depuis vingt ans.
Elle peut difficilement se satisfaire d'un dispositif qui ne les avantage
pas, mais se contente de ne pas les pénaliser
. C'est pourquoi elle
vous proposera un amendement tendant à tenir compte du prix de revient
effectif des biens acquis pour le calcul de l'amortissement, afin de permettre
l'acquisition de navires d'occasion. Elle vous proposera en outre de supprimer
le plafond de 20 % du résultat imposable au-delà duquel les
associés ne sont plus autorisés à imputer les pertes dans
la mesure où cette disposition apparaît aussi inutile
qu'inapplicable.
L'article 47 est relatif à un abaissement du seuil d'autorisation
des cinémas multiplexes.
VI. MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
L'Assemblée nationale n'a pas apporté de modifications
très substantielles aux dispositions originelles de ce projet de DDOEF.
En revanche, elle a adopté de nombreux articles additionnels (28 au
total), ouvrant des débats sur des thèmes absents du projet
d'origine.
Quatre volets nouveaux ont ainsi été ouverts :
- un important volet
collectivités locales
, avec cinq
articles nouveaux (46
bis
, 48, 50, 52 et 56) ;
- des dispositions relatives au
logement
(articles
4
bis
, 4
ter
, 31
bis
, 38
bis
,
38
ter
, 38
quater
, 38
quinquies
et
53) ;
- des dispositions disparates relatives aux
questions
financières
, mais ne concernant pas le titre II (articles
42 A, 55, 59, 60 et 62) ;
- un volet concernant à la fois l'
aménagement du
territoire et les questions agricoles ou agro-alimentaires
(articles
41
bis
, 49 et 51).
De nouvelles dispositions diverses ont par ailleurs été
adoptées.
A. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX COLLECTIVITÉS LOCALES
Les députés ont souhaité adopter un certain nombre de
dispositions relatives aux collectivités locales, le plus souvent hors
l'initiative de leur commission des finances et parfois contre l'avis du
gouvernement. Il en a été ainsi de la création d'une
taxe communale sur les pylônes de téléphonie mobile
(article 46
bis
), calquée sur la taxe sur les pylônes
électriques acquittée par EDF. Cette proposition offre une
recette nouvelle aux communes concernées qui, d'après les calculs
de votre rapporteur, pourrait être de l'ordre de 350 millions de
francs. Toutefois, cette taxe n'est pas sans inconvénient : elle
est peu compatible avec les principes de la baisse des charges des entreprises
et de l'aménagement du territoire défendus par votre commission.
En effet, les opérateurs hésiteront désormais à
implanter des antennes ou pylônes dans les communes qui en sont
dépourvues pour le moment, en particulier lorsque la population à
desservir sera peu nombreuse.
L'avis du gouvernement a également été négatif sur
une proposition de la commission des finances de l'Assemblée nationale
créant une possibilité de déroger à l'obligation
d'établir un budget annexe pour les services de distribution d'eau
potable et d'assainissement pour les communes de moins de 500 habitants
(article 48). Votre commission s'en remet à la sagesse du
Sénat sur cet article, qui facilite la gestion des petites communes,
mais nuit à la transparence du prix de l'eau.
D'autres dispositions significatives ont fait l'objet à
l'Assemblée nationale d'un débat moins polémique :
à l'initiative du gouvernement, l'assujettissement des poids
lourds de plus de 12 tonnes à la taxe à l'essieu en
application d'une directive européenne que la France n'avait pas encore
transposée (article 50). Ce dispositif, qui entraîne la
suppression de la vignette et du droit de timbre pour ces véhicules,
fait l'objet d'une compensation aux départements ;
à l'initiative de M. René Dosière, les
députés ont voté un dispositif de coordination entre la
loi du 7 mars 1998 relative au fonctionnement des conseils
régionaux et le code général des impôts. Il s'agit
notamment de l'application de la procédure dite du "49-3
régional" (article 52) ;
à l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée
nationale a adopté un amendement consensuel permettant aux communes
membres d'un établissement public de coopération intercommunale
de transférer à ce dernier la propriété (et les
obligations d'entretien) des édifices cultuels (article 58).
B. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU LOGEMENT
L'Assemblée nationale a également ouvert un volet "logement", ce
qui est devenu traditionnel dans les projets portant DDOEF.
Ce volet porte essentiellement sur deux thèmes :
le logement locatif privé avec la prolongation du régime de
l'amortissement "Périssol", applicable aux logements locatifs neufs
à usage de résidence principale. Le gouvernement a annoncé
son intention de réformer ce système, mais cette réforme
étant encore en chantier, il préfère éviter une
rupture dans les opérations, et a donc donné son accord à
la prorogation de six mois proposée par la commission des finances
(article 11
bis
). Votre commission approuve cette
prolongation, en attendant d'examiner le nouveau dispositif. Toutefois, votre
rapporteur demandera au gouvernement des engagements de calendrier
précis sur ce nouveau système. S'il était
présenté trop tardivement, les opérations de construction
des logements locatifs privés pourraient être entravées.
Par ailleurs, l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat verra
sa compétence étendue aux transformations de locaux agricoles en
logements dans les zones de revitalisation rurale
(article 38
bis
), selon un dispositif voté à
l'unanimité du Sénat après un avis favorable de votre
commission au cours du débat sur la loi de finances pour 1998, et
annulé par le Conseil Constitutionnel comme étant un "cavalier
budgétaire" ;
le logement locatif public. Il s'agit, pour l'essentiel, de
compléments à des dispositifs existants. Ainsi, les
sociétés d'économie mixte pourront
bénéficier du taux réduit de la TVA sur les acquisitions
de terrains à bâtir (article 11
ter
). Les
locataires de SEM souhaitant acquérir leur logement dans le cadre de la
loi relative à l'habitat de 1994 bénéficieront du
même régime fiscal que les locataires d'organismes HLM
placés dans la même situation (article 38
quinquies
).
L'Assemblée nationale a souhaité également aligner le
statut des sociétés anonymes coopératives d'HLM sur les
sociétés anonymes d'HLM (articles 38
ter
et
38
quater
).
C. LES DISPOSITIONS RELATIVES AUX QUESTIONS FINANCIÈRES.
Des dispositifs très disparates peuvent être regroupés sous
cette rubrique. Il s'agit notamment :
de l'extension du régime juridique des scissions aux caisses de
crédit municipal (article 42 A). Ce dispositif a
été accepté sans débat par l'Assemblée
nationale ;
de la modification du régime des prélèvements
sociaux sur les options sur actions accordées dans le cadre de plans
d'options de souscription ou d'achat d'actions (stock-options). A l'initiative
de sa commission des finances, l'Assemblée nationale est revenue sur un
dispositif voté à l'initiative de la commission des affaires
sociales du Sénat dans la loi de financement de la
sécurité sociale pour 1997, et qui soumet les plus-values sur
options levées avant cinq ans aux cotisations sociales. Elle a
limité le prélèvement aux entreprises de plus de
15 ans à la date de l'attribution des options (article 55).
Votre commission approuve la démarche retenue par l'Assemblée
nationale, mais juge arbitraire et inéquitable de réserver le
traitement favorable aux entreprises de moins de quinze ans. Elle vous
proposera donc une extension à toutes les entreprises. Mais,
fidèle à sa démarche, elle vous proposera également
d'accroître la transparence des attributions d'options par un article
additionnel ;
du renforcement de la lutte contre le blanchiment des capitaux (article
59), en créant des contrôles relatifs aux méthodes de
blanchiment empruntant les canaux de l'investissement immobilier ;
de la prolongation de la mise à disposition de fonctionnaires
auprès de la CNP Assurances SA (article 60) ;
enfin, de la validation des opérations de recapitalisation de la
Compagnie du bâtiment et des travaux publics (article 62). Sur ce
dossier, qui concerne à la fois le traitement des crises bancaires et
l'octroi de la garantie de l'Etat, votre commission ne peut que
répéter, d'une part, qu'elle considère que les faillites
bancaires doivent être possibles, sauf à encourager
l'irresponsabilité de leurs dirigeants (ce que les anglo-saxons
appellent "l'aléa moral") et, d'autre part, qu'il est anormal dans un
Etat de droit que les services d'un ministère puissent engager l'argent
du contribuable sans aucune information ni autorisation législative.
D. LES DISPOSITIONS RELATIVES AU MONDE RURAL, À L'AGRICULTURE ET
À L'AGRO-ALIMENTAIRE
Trois articles, dépourvus de tout lien entre eux, traitent de
problèmes relatifs au monde rural et agricole. Ils viennent s'ajouter
à l'article 41, relatif à la taxe dite
"d'équarrissage" en vue d'éliminer les farines animales non
conformes à la réglementation européenne.
Il s'agit des articles 41
bis
, 49 et 51.
L'article 41
bis
étend les compétences du fonds
de gestion de l'espace rural. Il reprend le dispositif de l'article 75 de
la loi de finances pour 1998, déclaré contraire à la
Constitution par le Conseil Constitutionnel comme n'ayant pas d'incidence
budgétaire.
L'article 49 autorise la publicité pour les boissons
alcoolisées sous forme de dons ou de vente d'objets publicitaires sur
les lieux de production ou de distribution. Voté à
l'unanimité par l'Assemblée, cet article reprend un dispositif
contenu dans un décret du 29 mars 1993 annulé par le Conseil
d'Etat pour défaut de base légale. Il a été
voté après que l'Assemblée eut rejeté une
proposition de revenir à une autorisation plus large de la
publicité commerciale en faveur des boissons alcooliques, qui aurait
été contraire à la loi Evin.
L'article 51 aménage les conditions d'assujettissement des
entreprises agricoles à l'impôt sur le bénéfice
réel.
E. AUTRES DISPOSITIONS
Quatre autres dispositions adoptées par l'Assemblée nationale
méritent d'être signalées.
L'article 54 crée une fonction d'assistant spécialisé
auprès des Cours d'appel et tribunaux de grande instance. Voté
à l'initiative du gouvernement à la demande du Garde des Sceaux,
Mme Elisabeth Guigou, cet amendement a pour objet de renforcer les
services judiciaires en charge de la grande délinquance
financière. Votre commission ne peut qu'être favorable sur ce
principe, tout en regrettant qu'une disposition de cette nature n'ait fait
l'objet d'un examen ni par le Conseil d'Etat, ni par les commissions des lois.
Voté également à l'initiative du gouvernement, l'article
57 aligne les conditions de promotion et de nomination des agents des douanes
ayant accompli un acte de bravoure, sur celles des fonctionnaires de police
placés dans la même situation.
Proposé par la commission des finances, l'article 58 modifie le
régime de la taxe perçue sur les artisans bateliers au profit de
la Chambre nationale de la batellerie artisanale.
Enfin, voté à l'initiative du gouvernement, l'article 61
comble une carence de la loi de finances pour 1998 sur l'entrée en
vigueur du relèvement du plafond de la réduction d'impôt
pour dépenses d'hospitalisation de long séjour et de cure.
Sous le bénéfice de ces observations et des amendements qu'elle
vous soumet, votre commission vous propose d'adopter le présent projet
de loi.
EXAMEN DES ARTICLES
TITRE PREMIER
DISPOSITIONS RELATIVES
À
LA SIMPLIFICATION ADMINISTRATIVE
ARTICLE PREMIER
Harmonisation de l'assiette des contributions dues
par les employeurs
au titre de la formation professionnelle continue
Commentaire : le présent article vise à
aligner l'assiette de deux cotisations spécifiques dues par les
employeurs au titre de la formation professionnelle sur celle des cotisations
de sécurité sociale. Ainsi sera parachevé le mouvement
d'harmonisation engagé par les articles 105, 106 et 107 de la loi
n°95-116 du 4 février 1995 portant diverses dispositions
d'ordre social.
I. L'ÉTAT ACTUEL DU DROIT
Depuis le 1
er
janvier 1996, l'assiette des contributions dues par
les employeurs au titre de la formation professionnelle continue est
alignée sur celle des cotisations de sécurité sociale,
à l'instar de la taxe d'apprentissage et de la participation à
l'effort de construction. Cette assiette n'est plus celle de la taxe sur les
salaires, mais celle des cotisations de sécurité sociale. A la
notion de salaire
4(
*
)
, s'est
donc substituée, que ce soit dans le code du travail, le code
général des impôts ou le code de la construction et de
l'habitation, celle de rémunérations
5(
*
)
. Cette mesure a contribué
à la simplification des formalités administratives mises à
la charge des entreprises, et notamment des plus petites d'entre elles.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le présent article vise à compléter et surtout à
parachever, au plan législatif
6(
*
)
, le mouvement d'harmonisation
engagé par la loi précitée du 4 février 1995
en alignant l'assiette de deux cotisations spécifiques à la
charge des employeurs au titre de la formation professionnelle et qui n'avaient
pas été mentionnées lors de ladite harmonisation. Il
s'agit de l'article L.931-20 du code du travail qui institue une
contribution spécifique de 1 % au titre du congé individuel
de formation et du bilan de compétences des salariés sous contrat
à durée déterminée et de l'article L.954 du
même code qui fixe à un pourcentage ne pouvant être
inférieur à 2 % la contribution spécifique
destinée à financer la formation professionnelle des
salariés intermittents du spectacle.
Votre rapporteur vous propose d'adopter ces dispositions telles
qu'amendées et complétées au plan rédactionnel par
l'Assemblée nationale. Elles figuraient déjà dans
l'article 28 du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre
économique et financier déposé le 2 avril 1997
à l'Assemblée nationale. En outre, bien que la notion de
rémunération soit plus large que celle de salaire, à
laquelle elle se substitue désormais, l'incidence financière de
cette mesure devrait être, d'après les indications qui lui ont
été confirmées par les services du ministère de
l'économie, des finances et de l'industrie, faible, voire
négligeable, pour les entreprises (de l'ordre de quelques millions de
francs au total).
Décision de la commission : votre commission vous propose
d'adopter cet article sans modification.
ARTICLE 2
Suppression de l'autorisation
préalable
en matière de télétransmission de
factures
Commentaire : le présent article tend à
supprimer l'autorisation préalable en matière de
télétransmission de factures. Désormais, l'administration
rédigera un cahier des charges que les entreprises désirant
télétransmettre leurs factures devront respecter. Ces entreprises
devront simplement souscrire une déclaration contenant les
données techniques propres à chaque système.
I - LE DISPOSITIF ACTUEL PRÉVOIT L'AUTORISATION PRÉALABLE PAR
L'ADMINISTRATION DE LA TÉLÉTRANSMISSION DES FACTURES
Pour éviter les fraudes au paiement de la TVA, l'administration
fiscale impose à tout assujetti la délivrance de factures pour
tous biens livrés ou services rendus ainsi que leur conservation.
Ayant à gérer une masse considérable de documents
papiers, les entreprises ont souhaité développer la
télétransmission des factures.
C'est pourquoi l'article 47 de la loi de finances rectificative pour 1990,
devenu l'article 289
bis
du Code général des impôts
a autorisé la transmission de factures par voie
télématique.
Trois cas sont à distinguer :
- les entreprises qui veulent recourir à la
télétransmission des factures déposent une demande
d'autorisation auprès de l'administration fiscale. A compter de la
réception de la demande, l'administration dépose d'un
délai de six mois pour se prononcer, délai qui peut être
prorogé de trois mois si nécessaire ;
- si l'entreprise souhaite modifier le système soumis à
autorisation, elle doit le faire savoir à l'administration
préalablement à sa mise en oeuvre. A défaut d'une
réponse dans un délai de deux mois, la modification est
considérée comme acceptée ;
- les contribuables qui entendent utiliser un système
déjà autorisé doivent en faire la déclaration
auprès de l'administration fiscale au plus tard 30 jours avant sa mise
en oeuvre. A l'expiration de ce délai, l'administration est
réputée avoir donné son autorisation.
Toutefois, la procédure imposée par l'administration fiscale est
jugée encore trop lourde pour les entreprises puisque seulement 24
systèmes de télétransmission ont été
autorisés, pour la facturation de 236 entreprises.
II - LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Le rapport remis par M. Dominique Baert à Mme Marylise Lebranchu,
Secrétaire d'Etat aux PME, au Commerce et à l'Artisanat
prône une simplification des mesures administratives qui pèsent
sur les entreprises. Parmi les "dix commandements" de la simplification
administrative, deux mesures concernent l'article 289
bis
de Code
général des impôts. En effet, le rapport préconise
à la fois de faciliter les téléprocédures et
d'éviter les autorisations ou les agréments préalables.
Prenant acte de ces remarques, le gouvernement propose donc une modification
de l'article 289
bis
du code général des impôts
en remplaçant la procédure d'autorisation préalable par le
système de la déclaration.
Le présent article modifie tout d'abord le II de l'article
289
bis
du code général des impôts.
Désormais, les entreprises qui veulent recourir à la
télétransmission des factures ou modifier de manière
substantielle le dispositif existant n'ont plus à déposer une
demande d'autorisation. Il leur suffit d'en faire la déclaration
auprès de l'autorité administrative selon des modalités et
un modèle de déclaration définis par arrêté
du ministre chargé du budget. Cet arrêté définira le
cahier des charges que devront respecter les entreprises.
Le dispositif est donc doublement assoupli : non seulement les
déclarations ont remplacé les autorisations, mais elles sont
obligatoires seulement dans le cas d'une modification substantielle alors que
l'ancien système prévoyait une demande d'autorisation pour toute
modification. Votre rapporteur tient toutefois à faire remarquer que la
notion de modification substantielle est très subjective.
Le présent article modifie également l'alinéa 2 du
paragraphe III de l'article 289
bis
du code général
des impôts en précisant que la liste séquentielle de tous
les messages émis et reçus ainsi que leurs anomalies
éventuelles peut être conservées sur support papier, mais
également sur support informatique.
Enfin, le présent article modifie les troisième,
quatrième, cinquième et sixième alinéas du
paragraphe III de l'article 289
bis
du code général
des impôts afin d'adapter au nouveau système de déclaration
les suites à donner aux contrôles inopinés des agents de
l'administration sans modifier les règles qui encadrent le droit de la
défense et la nature des contrôles effectués.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.
ARTICLE 3
Harmonisation des dates de
dépôt
des principales déclarations professionnelles
Commentaire : le présent article vise à
fixer, au plus tard au 30 avril, les dates de dépôt des
principales déclarations fiscales professionnelles.
Cette disposition constitue la traduction législative d'une mesure
destinée à
" faciliter les rendez-vous fiscaux de
l'entreprise "
qui avait été préconisée
par M. Dominique Baert, député, dans le rapport remis en
octobre 1997 à Mme Marylise Lebranchu, secrétaire d'Etat aux
petites et moyennes entreprises, au commerce et à l'artisanat.
Le présent article a pour effet d'harmoniser les dates de
dépôt des principales déclarations professionnelles
suivantes :
- déclaration des commissions, courtages, ristournes et honoraires
(art. 240 du code général des impôts) ;
- déclaration des droits d'auteur ou d'inventeur (art. 241 du code
général des impôts) ;
- déclaration des bénéfices industriels et
commerciaux des entreprises individuelles imposables d'après le
régime du réel normal ou simplifié, de résultats
des exploitants agricoles placés sous un régime réel
d'imposition et de résultats des personnes exerçant une
activité non commerciale placée sous le régime de la
déclaration contrôlée (art. 175 du code
général des impôts) ;
- déclaration de résultats des entreprises passibles de
l'impôt sur les sociétés, lorsqu'aucun exercice n'est clos
au cours d'une année (art. 223 du code général des
impôts) ;
- déclaration pour la taxe d'apprentissage (art. 229 du code
général des impôts) ;
- déclaration pour la participation à la formation
professionnelle continue des entreprises de 10 salariés et plus
(art. 235 ter J du code général des impôts) ;
- déclaration pour la participation à la formation
professionnelle continue des entreprises de moins de 10 salariés
(art. 235 ter KD du code général des impôts) .
Par ailleurs, votre rapporteur tient à indiquer que deux décrets
actuellement en préparation et qui seront publiés après
l'adoption du présent projet de loi opéreront une harmonisation
identique au profit de :
- la déclaration de régularisation de TVA (art. 242
sexies
de l'annexe II du code général des
impôts) et la déclaration relative à l'investissement
obligatoire dans la construction (art. 161 de l'annexe II du code
général des impôts) ;
- la déclaration annuelle concernant l'ensemble des paiements et
opérations sur valeurs mobilières (art. 49 D de
l'annexe III du code général des impôts).
On peut par ailleurs souligner que cette mesure, qui n'aura aucune
conséquence sur les finances publiques, officialisera une pratique
suivie depuis plusieurs années par le ministre des finances et tendant
déjà à reporter, à titre gracieux, le
dépôt de la plupart de ces déclarations au 30 avril.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification
ARTICLE 3 bis (nouveau)
Harmonisation des
délais concernant les obligations fiscales
liées à la
cession ou à la cessation d'activité
Commentaire : cet article tend à porter de trente
à soixante jours le délai de déclaration pour les PME de
la taxe sur la valeur ajoutée en cas de cession ou de cessation
d'activité afin de l'harmoniser avec celui concernant la
déclaration de bénéfice.
I - LE DISPOSITIF ACTUEL
L'article 201 du Code général des impôts fixe les
dispositions spéciales concernant les déclarations de plus-values
des contribuables en cas de cession, de cessation ou de décès.
Ainsi, il dispose que "
dans le cas de cession ou de cessation,
en totalité ou en partie, d'une entreprise industrielle, commerciale,
artisanale ou minière, ou d'une exploitation agricole dont les
résultats sont imposés d'après le régime du
bénéfice réel, l'impôt sur le revenu dû en
raison des bénéfices réalisés dans cette entreprise
ou exploitation et qui n'ont pas encore été imposés est
immédiatement établi.
"
Cet article précise par ailleurs les délais dont disposent les
contribuables pour faire parvenir à l'administration soit la
déclaration de leurs plus-values lorsqu'ils sont imposés au
forfait, soit la déclaration de leur bénéfice réel
accompagnée d'un résumé de leur compte de résultat
dans les autres cas.
Jusqu'en 1987, les contribuables disposaient de trente jours pour effectuer
cette démarche. Toutefois, l'article 6 de la loi n °87-502 du
8 juillet 1987 modifiant les procédures fiscales et
douanières a porté de trente à soixante jours le
délai de régularisation de ces deux types de déclaration.
II - LE DISPOSITIF PROPOSÉ
Cet allongement des délais ne concernait jusqu'à présent
que la seule déclaration de bénéfices. Les
déclarations de recettes imposées à tout redevable de la
taxe sur la valeur ajoutée obéissaient à un régime
différent.
Ainsi, l'article 287 du Code général des impôts disposait
que "
en cas de cession ou de cessation d'une activité
professionnelle, les redevables sont tenus de souscrire dans les trente jours
la déclaration
[...] ".
Le présent article tend à modifier cette disposition afin
d'harmoniser les délais de déclaration de plus-values ou de
bénéfice réel d 'une part et de recettes d'autres
part. Cette mesure vise à simplifier les obligations fiscales des
entreprises en évitant la multiplication de délais
différents.
Elle n'a toutefois pas vocation à intéresser toutes les
entreprises. Le texte voté par l'Assemblée nationale
précise que le délai de déclaration des recettes est
porté à soixante jours uniquement pour les entreprises
placées sous le régime simplifié d'imposition. Cette
limitation du champ d'application de la mesure proposée par le
présent article s'explique par les modalités de paiement de la
TVA pour les entreprises soumises au régime réel simplifié.
En effet, ces entreprises, des PME pour la plupart, paient la TVA sous forme
d'acomptes trimestriels calculés à partir du montant de TVA
payé l'année précédente. Une déclaration de
régularisation est faite une fois par an, qui nécessite une
récapitulation de toutes les opérations de l'année. Or, en
cas de cession ou de cessation, le dispositif actuel prévoit que les
redevables sont tenus de souscrire une telle déclaration dans les
30 jours. Afin de leur donner plus de temps pour réaliser cette
opération assez lourde, le présent article élargit le
délai de déclaration à 60 jours.
En revanche, une extension du délai n'est pas justifiée pour les
entreprises soumises au régime réel normal. En effet, celles-ci
comptabilisent au jour le jour toutes leurs opérations et font une
déclaration mensuelle de TVA. En cas de cession ou de cessation, elles
n'ont donc pas de difficulté à déclarer dans un
délai de 30 jours le montant dû de TVA.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.
ARTICLE 4
Simplification des dispositions
relatives aux régimes d'imposition
Commentaire : le présent article a pour objet
d'autoriser les contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu
dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux
et placés sous le régime du forfait d'opter, s'ils le souhaitent,
pour le régime normal d'imposition, et, en conséquence, de
bénéficier de la franchise d'impôt sur les plus-values
acquises à la date de l'option.
Les modalités concrètes de déclaration du résultat
varient selon la taille des entreprises : les plus importantes sont
soumises au régime de l'évaluation réelle normale ;
les autres sont soumises à des obligations moins astreignantes. En
effet, les règles applicables aux bénéfices industriels et
commerciaux impliquent que le chef d'entreprise soit entouré d'une
équipe de comptables et de fiscalistes, ce qu'un petit artisan ne peut
pas toujours se permettre.
C'est pourquoi les petites entreprises dont le chiffre d'affaires ne
dépasse pas un plafond fixé par la loi sont soumises au
régime du forfait qui les dispense de tenir une comptabilité.
Toutefois, le souci des pouvoirs publics est d'inciter les petites
entreprises à renoncer au régime du forfait et à se doter
d'une véritable comptabilité.
Il s'agit pour l'administration
de mieux cerner la réalité des bénéfices de ces
entreprises.
Pour les entreprises, l'existence d'une comptabilité est un instrument
indispensable de gestion. En outre, bien que le forfait soit
généralement avantageux pour le contribuable, il peut aussi
présenter de sérieux inconvénients.
En effet, si en principe le forfait ne prend pas en compte les plus-values
d'actifs, il ignore en revanche les pertes en capital ainsi que les
déficits d'exploitation. Par là, ce mode d'évaluation peut
se révéler très rigoureux pour les forfaitaires quand on
songe que près de la moitié des personnes morales soumises
à l'impôt sur les sociétés sont fiscalement
déficitaires et que la taxation des plus-values dans les régimes
de bénéfice réel est le plus souvent modérée.
Enfin, le contribuable soumis au forfait peut voir son forfait remis en cause
et il n'est pas à l'abri d'un examen d'ensemble de sa situation fiscale
personnelle visant à comparer ses revenus forfaitaires avec le montant
apparent de ses disponibilités.
La première méthode utilisée par l'administration fiscale
pour inciter les petites entreprises à renoncer au forfait est de ne pas
relever les limites du forfait. En effet, ces dernières n'ayant pas
été modifiées depuis 1965, un bon nombre d'entreprises
dépassent mécaniquement chaque année le seuil du forfait.
L'administration peut également inciter les entreprises à
opter pour le régime de l'évaluation réelle en
assortissant cette option d'un certain nombre d'avantages fiscaux.
Les entreprises ont ainsi déjà la possibilité d'opter pour
le régime réel simplifié. Le présent article
propose de les autoriser à opter pour le régime réel
normal.
On peut toutefois se demander si les entreprises y trouveront un
intérêt dès lors qu'elles bénéficient
déjà de la faculté d'opter pour le régime
réel simplifié.
I - LE DROIT EN VIGUEUR
A.LE RÉGIME DU FORFAIT
Les toutes petites entreprises exerçant une activité industrielle
ou commerciale et ne réalisant qu'un chiffre d'affaires modeste sont
dispensées de tenir une véritable comptabilité et de se
livrer aux calculs savants du résultat imposable selon les lois de la
science fiscale. Leur bénéfice est déterminé
forfaitairement une fois tous les deux ou trois ans à partir de
rudiments de comptabilité.
1. Les limites du forfait
Sous réserve d'exclusions, liées à la forme juridique de
l'entreprise ou à la nature des opérations effectuées, le
régime du forfait est le régime de droit commun applicable aux
entreprises individuelles dont le chiffre d'affaires annuel TTC
n'excède pas
:
-
500.000 F
si l'activité de l'entreprise est la vente de
marchandises, l'exploitation d'hôtels, de meublés, de restaurants
ou de cafés ;
-
150.000 F
s'il s'agit d'un prestataire de services.
2. Évaluation et fixation du forfait
Le bénéfice forfaitaire correspond au bénéfice que
l'entreprise peut produire normalement. Il s'agit donc d'un
bénéfice approximatif
, évalué par l'agent
des impôts à partir des éléments qui sont à
sa disposition : déclaration annuelle fournie par le contribuable,
qualité du fonds, emplacement, marges habituelles du secteur
d'activité... Il utilise également les monographies
professionnelles, nationales ou régionales.
La discussion du forfait vise à la fois le bénéfice
imposable et le chiffre d'affaires soumis à la TVA. L'évaluation
faite par l'agent des impôts est notifiée au contribuable qui
dispose de 30 jours pour accepter ou formuler ses observations. A défaut
d'accord amiable, c'est la commission départementale des impôts
directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui détermine le montant
du bénéfice forfaitaire.
La notion de bénéfice forfaitaire s'oppose à la
reconnaissance d'un déficit d'exploitation : au mieux
l'administration considère le résultat comme égal à
zéro ;
si les résultats sont déficitaires, le
contribuable a intérêt à renoncer au forfait
.
Une fois fixé, le forfait est
valable pour deux années
et
peut être reconduit pour une troisième année. Sauf
exception, le forfait ainsi établi ne peut être remis en cause.
Cette sécurité est fortement appréciée par les
exploitants. Enfin, en l'absence de dénonciation, les forfaits font
l'objet d'une reconduction tacite pour une durée d'un an renouvelable.
3. Obligations comptables et déclaratives des forfaitaires
Les obligations comptables imposées au contribuable relevant du
régime du forfait sont réduites au minimum
. Le Code du
commerce dispense en effet les commerçants relevant du forfait de tenir
une comptabilité d'engagement et de présenter des comptes
annuels. Ils ne sont en conséquence astreints qu'à la
tenue
d'une comptabilité de trésorerie
. En cours d'année, la
tenue d'un seul registre est imposée :
- registre des achats, appuyé des factures et de toutes autres
pièces justificatives, pour ceux qui achètent en vue de
revendre ;
- livre-journal des recettes pour les prestataires de services.
A la fin de l'année, le contribuable doit adresser à
l'administration, avant le 16 février, une déclaration
spéciale (imprimé n° 951 M) contenant les
renseignements nécessaires à leur identification et à la
fixation de leur forfait de bénéfice et de chiffre d'affaires
(montant des achats et des ventes, détail des frais
généraux, valeur du stock, détail des immobilisations).
4. Atténuations d'impôt accordées aux forfaitaires
Le bénéfice normal ne tient pas compte des revenus exceptionnels.
En conséquence,
les plus-values sont en principe
exonérées
(article 151
septies
du CGI),
à condition que l'activité ait été exercée
pendant au moins cinq ans.
Par ailleurs, en vue d'alléger les charges des petits contribuables dans
les limites compatibles avec le maintien des conditions de la concurrence,
l'article 282 du CGI a prévu en leur faveur, des dispositions
particulières aboutissant à un
abandon ou
à une
réduction de la TVA leur incombant
.
La TVA n'est ainsi pas acquittée lorsque son montant annuel
n'excède pas 1.350 F avant déduction de la taxe ayant
grevé les biens amortissables (franchise en impôt).
Lorsque le montant annuel de la TVA avant déduction pour investissement
est supérieur à 1.350 F et n'excède pas 5.400 F,
l'impôt exigible est réduit d'une somme égale au tiers de
la différence entre 5.400 F et le montant de la TVA exigible au
titre de l'année civile (décote générale).
Enfin, lorsque le montant annuel de la TVA due avant déduction pour
investissement est compris entre 1.350 F et 20.000 F, l'impôt
exigible est réduit par application d'une décote, pour les
redevables inscrits au répertoire des métiers ou au registre de
la chambre nationale de la batellerie artisanale qui justifient que la
rémunération de leur travail et de celui des personnes qu'elles
emploient représente plus de 35 % du chiffre d'affaires global
annuel tous droits et taxes compris (décote spéciale).
B. ACTUELLEMENT, LES CONTRIBUABLES RELEVANT DU FORFAIT PEUVENT OPTER POUR
LE RÉGIME RÉEL SIMPLIFIÉ
1. La faculté d'opter pour le régime réel
simplifié
Actuellement, l'article 302
septies
A du code général des
impôts autorise les entreprises soumises au régime du forfait
à opter, si elles le souhaitent, pour le
régime réel
simplifié
. L'option doit être notifiée à
l'administration avant le 1
er
février de la première
année au titre de laquelle les entreprises désirent appliquer ce
régime.
Pour rappel, le régime du réel simplifié s'applique de
plein droit aux entreprises dont le chiffre d'affaires annuel, hors taxes, se
trouve compris entre le plafond du forfait et le plancher du réel
normal, c'est-à-dire :
- chiffre d'affaires compris entre 500.000 F (TTC) et 5.000.000 F
(HT) pour les entreprises de vente de marchandises, les hôtels, les
loueurs en meublé, les restaurants et les cafés ;
- chiffre d'affaires compris entre 150.000 F (TTC) et 1.500.000 F
(HT) pour les autres entreprises (prestataires de services).
Les contribuables ayant opté pour le régime réel
simplifié sont soumis à des
obligations déclaratoires
plus lourdes, même si elles restent simplifiées
par rapport au
régime réel normal :
La déclaration des résultats dans le régime réel simplifié
La déclaration de résultats doit être
faite sur un imprimé spécial n° 2031. A cette
déclaration, doivent être joints un certain nombre de tableaux
composant la liasse fiscale. Cette liasse est cependant plus sommaire que dans
le régime réel normal. Elle ne comprend que quatre tableaux
annexes :
- un bilan abrégé ;
- un compte simplifié de résultat fiscal, dégagé
à partir du bénéfice brut, des frais
généraux, des amortissements et des provisions ;
- un tableau des immobilisations et des amortissements ;
- un relevé des provisions.
En particulier les entreprises n'ont pas à remplir l'état
n° 2058 A (rectifications extra-comptables).
Les entreprises sont cependant soumises aux règles comptables de droit
commun, semblables à celles appliquées pour le régime
normal. Toutefois, depuis 1984, la tenue d'une comptabilité
" super-simplifiée " qui se rapproche d'une
comptabilité de caisse est possible. Mais dans ce cas, l'entreprise ne
peut pas constituer de provisions, ce qui peut être un grave
inconvénient pour sa gestion prévisionnelle.
La déclaration des résultats doit être
déposée avant le 1
er
avril ou le 16 avril selon les
cas.
En matière de taxes sur le chiffre d'affaires, les entreprises relevant
du régime réel simplifié n'ont à remplir que des
déclarations abrégées.
Enfin, l'option des forfaitaires pour le régime simplifié doit
être exercée simultanément en matière de TVA et
d'impôt sur le revenu, en vertu d'un arrêt du Conseil d'Etat du 6
février 1981.
2. Les incitations fiscales à la renonciation au forfait
• En contrepartie, les entreprises qui exercent l'option sont, en vertu
de l'article 39
octodecies
du CGI, autorisées à
réévaluer en franchise d'impôt les éléments
d'actifs non amortissables
: fonds de commerce, droit au bail,
terrain. Les entreprises peuvent par là
se prémunir contre une
éventuelle taxation des plus-values
attachées à ces
éléments d'actifs au taux de droit commun.
En effet, le franchissement du plafond du forfait entraîne la soumission
de l'entreprise au droit commun d'imposition des plus-values. Une entreprise
qui serait près de franchir le seuil aura donc tout intérêt
à ce que la plus-value résultant d'une éventuelle cession
de ses actifs soit calculée d'après la valeur
réévaluée et non d'après la valeur d'acquisition
initiale.
Cette disposition ne s'applique pas aux entreprises placées de plein
droit sous le régime simplifié.
• Par ailleurs, afin d'inciter les contribuables soumis au forfait
à opter pour un régime de bénéfice réel, le
législateur a prévu, en 1975, l'institution de
centres de
gestion agréés
pour les aider à remplir leurs
obligations fiscales et à gérer leur entreprise.
Les adhérents à ces organismes bénéficient, sous
certaines conditions et dans certaines limites, d'avantages fiscaux qui
consistent en :
- un
abattement de 20 % sur le montant de leur bénéfice
imposable
, dans la limite de 701.000 F. Cette faculté est en
revanche interdite aux contribuables relevant du forfait, ce qui les incite
à opter pour le régime de l'évaluation réelle
simplifiée.
- une déduction plus importante de la rémunération
versée au conjoint dans les entreprises individuelles ;
- une réduction d'impôt, plafonnée à 6.000 F,
destinée à compenser les frais de tenue de comptabilité
pour les petits contribuables dont le chiffre d'affaires n'excède pas
les limites du forfait.
• Enfin, la
franchise et les décotes en matière de
TVA
(cf. supra)
sont applicables
aux redevables placés par
option sous le régime simplifié d'imposition.
II - LE DISPOSITIF PROPOSE
A. LE PRÉSENT DISPOSITIF PROPOSE D'AUTORISER LES ENTREPRISES RELEVANT
DU FORFAIT À OPTER POUR LE RÉGIME RÉEL NORMAL
Le présent article propose d'ouvrir aux forfaitaires la faculté
d'opter pour le
régime normal d'imposition
.
Le gouvernement prévoit de fixer par décret en Conseil d'Etat les
modalités réglementaires d'application de cette faculté.
Les contribuables ayant exercé l'option seraient en conséquence
soumis aux obligations déclaratives correspondantes qui peuvent
être assez lourdes.
La déclaration des résultats dans le régime réel normal
Le régime du bénéfice réel normal
implique la tenue d'une comptabilité complète conforme au Plan
comptable général ainsi que la présentation de tous les
documents comptables et fiscaux qui doivent accompagner la déclaration
de résultats.
La déclaration de résultats doit être faite sur un
imprimé spécial n° 2031. La liasse que les
contribuables doivent joindre à cette déclaration des
résultats est particulièrement lourde et compliquée. Elle
comprend ainsi un certain nombre de tableaux, les uns étant de nature
comptable (bilan, compte de résultat, tableau des immobilisations,
amortissements, provisions) ; les autres de nature fiscale (état
n° 2058 A de détermination du résultat fiscal,
déficits et provisions non déductibles, plus-values et
moins-values).
En plus de ces imprimés normalisés, les entreprises doivent
joindre un certain nombre d'autres documents :
- état explicitant le calcul des provisions de caractère
fiscal ;
- état de suivi des valeurs fiscales ;
- état d'affectation des voitures de tourisme...
La déclaration des résultats doit parvenir à
l'administration :
- avant le 1
er
avril si l'exercice comptable coïncide avec
l'année civile ;
- avant le 1
er
mars dans les autres hypothèses.
Lorsque la déclaration n'est pas adressée dans les délais,
l'entreprise encourt, outre certaines amendes fiscales, le risque de voir son
bénéfice évalué d'office par l'administration.
Aussi bien a-t-elle intérêt, si certains renseignements lui font
défaut, à établir dans les délais une
déclaration provisoire qui sera complétée dès que
la situation définitive sera connue.
En contrepartie, l'option pour le régime réel normal
emporterait les mêmes avantages fiscaux que l'option pour le
régime réel simplifié
:
réévaluation en franchise fiscale des immobilisations non
amortissables, abattement sur bénéfice et réduction
d'impôt en cas d'adhésion à un centre de gestion
agréé.
En outre, les députés ont adopté un amendement tendant
à permettre à un forfaitaire qui opterait pour le régime
réel normal de continuer à bénéficier de la
franchise ou de la décote de TVA.
Selon la fiche d'impact annexée au présent projet de loi,
100.000 entreprises
seraient concernées.
Néanmoins, comme l'écrit le rapporteur général du
budget de l'Assemblée nationale,
" on peut douter [du
succès réel de cette mesure de souplesse] auprès des
entrepreneurs individuels qui ne retireront aucun avantage particulier de la
préférence donnée au régime normal par rapport au
régime simplifié d'imposition ".
B. MESURE DE COORDINATION EN MATIÈRE DE BÉNÉFICES NON
COMMERCIAUX
Les personnes qui perçoivent des bénéfices non commerciaux
ou des revenus assimilés sont placées :
- soit sous le régime de la déclaration
contrôlée
7(
*
)
du
bénéfice net ;
- soit sous le régime de l'évaluation administrative
8(
*
)
du bénéfice imposable
(articles 101 à 102 du CGI).
- soit sous le régime déclaratif spécial
9(
*
)
lorsque le montant annuel des
recettes n'excède pas 100.000 F.
Le régime de la déclaration contrôlée s'applique
à titre obligatoire, notamment :
- aux contribuables dont le montant annuel des recettes excède
175.000 F ;
- aux contribuables qui optent pour le régime réel
simplifié TVA pour l'imposition de leur chiffre d'affaires (article 302
septies
A
quater
du CGI).
Le présent article prévoit dans son paragraphe IV
d'étendre cette dernière obligation à tout contribuable
qui a opté pour un régime réel.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter
cet article sans modification.