CONCLUSION
A l'issue de l'examen de ce traité d'interdiction
complète des essais nucléaires, votre commission est
amenée à effectuer plusieurs observations.
Tout d'abord
la portée politique du traité est
incontestable
. Un très large accord s'est manifesté, au sein
de la communauté internationale, pour renforcer le régime de
non-prolifération et pour stopper, sur le plan qualitatif, la course aux
armements nucléaires, puisque l'interdiction des essais devrait
empêcher le perfectionnement des armes nucléaires ou la mise au
point d'armes de type nouveau.
Ensuite, on peut se réjouir du
dispositif solide de
vérification
prévu par le traité. Le système de
surveillance combiné aux inspections sur place est en mesure de garantir
une efficacité réelle à la vérification et de jouer
ainsi un rôle dissuasif sur un éventuel contrevenant. Tout est
donc mis en oeuvre pour pouvoir évaluer le respect par les Etats de
leurs obligations.
Mais une
interrogation majeure et fondamentale subsiste sur les chances
d'application effective de ce traité
, en l'absence de ratification
unanime par l'ensemble des Etats disposant de capacités
nucléaires significatives, dont la signature est requise.
Nous nous trouvons donc devant un texte très large par sa portée,
puisqu'il édicte une interdiction générale de tous les
essais nucléaires, quelle que soit leur puissance, assorti d'un
dispositif de surveillance et de vérification particulièrement
solide, mais qui, faute d'unanimité, pourrait ne jamais être
appliqué.
S'oriente-t-on, comme semblent le penser certains observateurs, vers une
application "de fait" sinon de droit du traité ?
Divers éléments plaident en effet en ce sens. Une volonté
de coopération internationale semble se dégager pour mettre en
place, quoi qu'il arrive, le dispositif technique de surveillance, et celui-ci
jouera un rôle dissuasif. D'autre part, du fait de l'existence même
du traité, signé par une très large majorité des
Etats, la réalisation d'un essai apparaîtrait comme une
provocation pour la communauté internationale.
Put-on également exclure, à moyen terme, une évolution de
la position indienne ? Les récentes évolutions politiques
intérieures indiennes ne semblent pas aller dans ce sens, mais on peut
aussi constater qu'en restant sur sa position quant aux engagements
internationaux sur la non-prolifération, l'Inde se prive de
possibilités de coopération civile qui pourraient contribuer
à satisfaire ses immenses besoins énergétiques.
S'oriente-t-on, au contraire, vers un blocage durable du traité et un
effritement de l'accord réalisé entre les 5 puissance
nucléaires et les Etats non nucléaires ?
Cette hypothèse pessimiste serait particulièrement
délicate pour notre pays. En démantelant son centre d'essais et
en se privant, de manière irréversible, de ses moyens techniques
d'expérimentation, la France a misé sur un arrêt
définitif et universel des essais. En cas d'échec du
traité et de cet objectif, elle pourrait se retrouver dans une situation
d'infériorité. Notre pays se doit donc de mener une action
constante en vue d'obtenir l'entrée en vigueur du traité, et de
ce point de vue, il est logique qu'il figure parmi les premiers à
engager le processus de ratification.
D'autre part, il doit impérativement réussir la mise en oeuvre de
la simulation, qui doit désormais garantir, sur le long terme, notre
dissuasion nucléaire. C'est pourquoi votre commission demeurera
très vigilante sur le financement de ce programme, dans une
période marquée par une remise en cause des crédits
d'équipement militaire.
Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous
demande d'approuver le présent projet de loi, conforme aux grands
objectifs que défend la France sur la scène internationale.