VI. LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SOUTIENT UNE RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL VOLONTAIRE ET NÉGOCIÉE ET APPELLE À DES PROGRÈS EN TERMES DE FLEXIBILITÉ
A. LA FRANCE DOIT S'INSPIRER DES PAYS QUI ONT RÉUSSI À RÉDUIRE LEUR TAUX DE CHÔMAGE
1. Le modèle social français a échoué devant l'obstacle du chômage
Les analyses sont maintenant nombreuses qui ont mis en
évidence les limites d'un " modèle social
français " reposant sur l'intervention de l'Etat, la
réglementation à outrance, une économie plus ou moins
mixte, des prélèvements obligatoires très
élevés.
Sans vouloir revenir sur des faits connus et avérés, il est utile
de rappeler brièvement les conséquences de ce modèle sur
l'emploi. Comme le considère Denis Olivennes dans une note de la
Fondation Saint-Simon
44(
*
)
:
"
Au lieu d'élargir sans cesse la croissance et la
création d'emplois, nous nous obstinons à freiner notre
capacité productive en réduisant le nombre de nos actifs. Les
Américains cherchent à agrandir sans cesse le gâteau ; nous
nous attachons à le partager en considérant, à tort, qu'il
n'est pas extensible
"
.
Ce modèle est solide car sa
contradiction interne est occultée par le fait qu'il protège
efficacement le corps central de la société et accompagne
socialement l'exclusion qu'il engendre.
Autrement dit, "
il garantit les revenus, mais il compromet
l'emploi
".
Les réglementations protègent certains secteurs d'activité
et certains segments de population. En conséquence, "
le
modèle français garantit aux salariés disposant d'un
emploi une plus grande stabilité que leurs collègues de la
plupart des autres pays occidentaux mais, en revanche, il institue un mur entre
l'emploi et le chômage rendant ces deux mondes hermétiques l'un
à l'autre, ce qui explique par exemple le haut niveau du chômage
de longue durée et du chômage des jeunes
". On doit, par
ailleurs, constater que ce modèle ne préserve pas des
défauts supposés des économies libérales, les
inégalités entre riches et pauvres s'accroissent à mesure
que le chômage s'installe. Comme le soulignait dernièrement
l'hebdomadaire Business Week
45(
*
)
, l'économie française
est coupée en deux : "
la plupart des 14,2 millions de
salariés du privé sont flexibles et productifs, les jeunes sont
qualifiés et intègrent le marché du travail avec un
contrat précaire (...) alors que les 5,3 millions de
salariés du secteur public sont accrochés aux droits acquis et
sont ardemment favorables à une réduction de leur durée du
travail de 10 % sans réduction de salaire
. ".
"
En France, les charges sociales sont parmi les plus
élevées au monde et l'impôt sur les sociétés
est à la hausse afin de financer un énorme secteur public. Ceci,
ajouté à une réglementation étouffante de l'Etat, a
fait partir des vagues de chefs d'entreprise vers la Grande-Bretagne et les
Etats-Unis. En conséquence, la France manque d'industries de croissance
comme la biotechnologie alors que les industries matures comme l'automobile se
rationalisent et licencient
". L'économie étant
dépourvue des industries d'avenir qui déterminent la
création d'emplois aux Etats-Unis, les gouvernements français en
sont ramenés à espérer un retournement de la conjoncture
pour réduire les files de chômeurs.
Pour réduire durablement le chômage en France, il convient, selon
toute vraisemblance, d'encourager la création de richesses, avant de se
poser la question de leur redistribution. Dans cette perspective,
l'aménagement du temps de travail constitue, avec les modalités
de son organisation, le volet interne de la flexibilité. Il ne faudrait
pas négliger toutefois l'autre face de la flexibilité, la
flexibilité externe, qui recouvre les relations juridiques entre
l'employeur et ses salariés ; des progrès doivent
également être réalisés dans ce domaine.