N° 162
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 10 décembre 1997.
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, relatif à la nationalité ,
Par M. Christian BONNET,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Jacques Larché,
président
;
René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, Charles
Jolibois, Robert Pagès, Georges Othily,
vice-présidents
;
Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson,
secrétaires
; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert
Badinter, José Balarello, François Blaizot, André Bohl,
Christian Bonnet, Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Marcel
Charmant, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli,
Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Jean Derian, Michel
Dreyfus-Schmidt, Michel Duffour, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault,
Paul Girod, Daniel Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel
Millaud, Jean-Claude Peyronnet, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre
Schosteck, Alex Türk, Maurice Ulrich, Robert-Paul Vigouroux.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 328 , 443, et T.A. 41 . Sénat : 145 (1997-1998). |
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Nationalité. |
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
Réunie le mercredi 10 décembre 1997 sous la
présidence de M. Jacques Larché, président, la
commission des Lois du Sénat a examiné, sur le rapport de M.
Christian Bonnet, le projet de loi relatif à la nationalité.
M. Christian Bonnet, rapporteur, a rappelé que, moins de cinq ans
après le vote de la loi du 22 juillet 1993 réformant le droit de
la nationalité, ce projet tendait à remettre en cause le
fondement de cette réforme -à savoir l'exigence d'une
manifestation de volonté entre 16 et 21 ans pour l'acquisition de la
nationalité française par les enfants nés en France de
parents étrangers- pour en revenir au principe d'une acquisition
automatique de la nationalité française par ces jeunes à
l'âge de leur majorité.
Le rapporteur a jugé que ce projet de loi n'était ni
nécessaire, ni opportun.
· Pas nécessaire, parce que le droit du sol issu de la tradition
républicaine n'avait aucunement été remis en cause par la
loi de 1993 et que rien ne justifiait de toucher au principe de la
manifestation de volonté, même si l'application -d'ailleurs
globalement satisfaisante- de la loi du 22 juillet 1993 pouvait sans doute
être améliorée, en corrigeant certains dysfonctionnements
constatés dans sa mise en oeuvre.
La commission a vivement regretté ces dysfonctionnements, imputables
pour l'essentiel à l'administration, ainsi que la très nette
insuffisance de l'information dispensée auprès des jeunes
concernés.
· Pas opportun parce que :
- c'étaient essentiellement des préoccupations relatives au
service militaire qui avaient autrefois conduit à l'instauration, par la
loi du 26 juin 1889, d'une acquisition automatique de la nationalité
française par les immigrés de la " deuxième
génération ";
- les flux d'immigrés appelés à acquérir la
nationalité française, autrefois à dominante
européenne et de culture proche de la notre, avaient désormais
une origine tant géographique que culturelle plus lointaine ;
- les principaux facteurs d'intégration -l'école, la famille, le
service militaire ou la religion- s'étaient singulièrement
affadis, au détriment de la capacité d'intégration de la
société française.
Ni opportun non plus parce que le projet de loi heurtait le sentiment d'une
grande majorité de Français, au vu des résultats d'un
récent sondage.
Le rapporteur a pleinement souscrit à la protestation
élevée auprès du Premier ministre par M. René
Monory, Président du Sénat, contre la déclaration
d'urgence sur le projet de loi, d'autant moins justifiée qu'un bilan
définitif de la réforme de 1993 ne pouvait même pas
être établi pour une génération entière de
jeunes concernés par la manifestation de volonté et que,
paradoxalement, le Gouvernement proposait de différer de six mois
l'entrée en vigueur de la nouvelle loi.
En conséquence, la commission des Lois du Sénat a rejeté
toutes les dispositions du projet de loi remettant en cause l'exigence d'une
démarche volontaire pour l'acquisition de la nationalité
française par les jeunes nés en France de parents
étrangers.