INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le budget de l'outre-mer pour 1998 ne constitue pas une rupture par rapport aux
évolutions engagées au cours des dernières années
mais tend à accentuer les efforts conduits précédemment,
en particulier en matière de regroupement des crédits
consacrés à l'outre-mer et en faveur du développement des
moyens consacrés à la politique de l'emploi.
Les moyens prévus pour 1998 passent de 4,86 à 5,22 milliards
de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, soit une
progression de 7,3 % par rapport à la loi de finances initiale pour
1997. En outre, le secrétaire d'Etat s'est engagé à
poursuivre la politique initiée par M. Jean-Jacques de Peretti visant
à améliorer la couverture des autorisations de programme par les
crédits de paiement.
Deux priorités se détachent clairement : l'emploi et le logement
social.
S'agissant de la première, le Fonds pour l'emploi dans les
départements d'outre-mer (FEDOM) créé par la loi Perben du
27 juillet 1994, reste l'instrument principal de la politique gouvernementale.
Représentant déjà la principale dotation budgétaire
du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, le FEDOM se voit doté
de 1,7 milliard de francs de crédits soit une augmentation de
14,3 % par rapport à 1997.
Toutefois, il convient de souligner d'emblée que cette progression
résulte de l'intégration dans le chapitre consacré au
FEDOM des dotations affectées au financement des emplois-jeunes. Or,
votre rapporteur a eu l'occasion à plusieurs reprises d'émettre
de sérieuses réserves sur cette approche qui risque, compte tenu
du principe de fongibilité des crédits du FEDOM,
d'entraîner des transferts de ressources d'un dispositif d'emploi
à l'autre, ce qui pénaliserait le démarrage des
emplois-jeunes.
Quant au logement social, les moyens progressent également de
manière significative puisque les crédits de paiement de la ligne
budgétaire unique d'aide au logement dans les départements
d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte (LBU)
s'établissent à 568 millions de francs en 1998 contre 463
millions de francs en 1997 soit une augmentation de 23 %.
En autorisations de programme, les crédits s'élèvent
à 1.096 millions de francs et recouvrent d'une part une baisse de 150
millions de francs liée à la réduction du taux de la TVA
(de 9,5 à 2,1 %) applicable dans les DOM au logement social et
d'autre part l'intégration des crédits, soit 96 millions de
francs, destinés à la résorption de l'habitat insalubre
dans les DOM.
Au-delà de ces priorités, le budget de l'outre-mer prend en
compte certaines spécificités en particulier en Guyane et en
Nouvelle-Calédonie.
En Guyane, sont notamment prévues :
- une dotation supplémentaire pour les équipements scolaires
;
- une augmentation de 37 % des crédits destinés aux
infrastructures qui sont ainsi portés à 18,47 millions de francs
et qui permettront en particulier la poursuite de la réalisation de la
route Régina-Saint-Georges ;
- une dotation de 10 millions de francs pour la commune de Cayenne, dans
le cadre du redressement des finances communales auxquelles l'Etat participe
par une subvention d'équilibre.
Pour la Nouvelle-Calédonie, le chapitre de répartition
spécifique de cette collectivité est reconduit à hauteur
de 390 millions de francs dans le but de poursuivre les actions de
développement économique en partenariat avec le territoire et les
provinces. Une dotation de 5,35 millions de francs en 1998 est également
prévue pour l'inauguration l'an prochain du centre " Jean-Marie
Djibaou ".
Les autres collectivités sont essentiellement visées par
l'intermédiaire des dotations du FIDOM (fonds d'investissement des
départements d'outre-mer) et du FIDES (fonds d'investissement pour le
développement économique et social) respectivement dotés
de 232,5 millions et de 6,45 millions de francs.
Bien que globalement positives, ces orientations appellent néanmoins de
nombreuses observations qui seront développées ci-après.
I. UNE POLITIQUE DE L'EMPLOI DONT LES INSTRUMENTS SONT CONFORTÉS MAIS DONT LES RÉSULTATS NE SONT PAS A LA HAUTEUR DU DÉFI DÉMOGRAPHIQUE
Le chômage continue à progresser en outre-mer
malgré les mesures prises notamment dans le cadre de la loi Perben.
On peut constater que l'actuel gouvernement maintient les instruments de la
politique de l'emploi mis en place par ses prédécesseurs. La
principale innovation réside dans l'extension aux départements
d'outre-mer du dispositif emplois-jeunes et l'affectation de crédits
spécifiquement consacrés à sa mise en place. Toutefois,
malgré les efforts entrepris, l'exclusion continue à progresser
et conduit à souhaiter qu'un nouvel élan soit donné
à cette politique.
A. L'ÉVOLUTION TOUJOURS TRÈS PRÉOCCUPANTE DU CHÔMAGE
1. Dans les départements d'outre mer
Le nombre de demandeurs d'emploi progresse plus rapidement
dans les départements d'outre-mer qu'en métropole. Entre le 31
décembre 1994 et le 30 juin 1997, le nombre de demandeurs d'emploi
inscrits à l'ANPE a crû de 11,6 % passant de 179.445 à
200.226, alors que, pour la même période, ce nombre n'a
augmenté que de 2 % en métropole. Cette progression a
été particulièrement forte en Guyane (+ 38,6 %) et
à la Guadeloupe (+18,4 %).
Le tableau suivant retrace cette évolution.
Demandes d'emplois en fin de mois
1997 (1) |
96/97 |
94/97 |
|
GUADELOUPE |
49.424 |
5,03 % |
18,40 % |
MARTINIQUE |
43.132 |
- 3,16 % |
- 0,15 % |
GUYANE |
12.314 |
14,21 % |
38,64 % |
REUNION |
95.356 |
1,36 % |
11,37 % |
TOTAL |
200.226 |
1,92 % |
11,58 % |
(1)
Chiffres au 30 juin 1997 (sources
ANPE)
L'évolution des taux de chômage, évaluée par l'INSEE
au cours des enquêtes sur l'emploi effectuées en mars 1993, puis
mars 1995 pour les Antilles et la Guyane et mars 1996 pour la Réunion,
apparaît aussi très contrastée : stable à la
Guadeloupe, le chômage est en baisse en Guyane mais augmente de 5,1
points à la Réunion.
Taux de chômage
1993 |
1995/96 |
|
GUADELOUPE |
26,1 % |
26,1 % |
GUYANE |
24,1 % |
23 % |
MARTINIQUE |
25 % |
26,1 % |
RÉUNION |
31,7 % |
36,8 % |
(sources INSEE, enquêtes emploi)
Concernant les demandeurs d'emploi inscrits à l'ANPE, on observe depuis
quatre ans pour les quatre DOM, les caractéristiques suivantes :
- la part des
femmes
(51,9 %) est maintenant très proche de
celle observée en métropole (50,6 %). La part des
jeunes
de moins de 25 ans dans l'ensemble des demandeurs d'emploi qui avait
décru en 1995 a recommencé à progresser depuis 1996.
Jeunes - 25 ans |
1994 |
1995 |
1996 |
GUADELOUPE |
23,6 % |
22,3 % |
22,5 % |
MARTINIQUE |
19,1 % |
17,0 % |
17,6 % |
GUYANE |
18,6 % |
18,2 % |
21,2 % |
REUNION |
23,4 % |
21,8 % |
24,9 % |
TOTAL DOM |
22,3 % |
20,5 % |
22,6 % |
- la répartition de la demande d'emplois en fin de
mois (DEFM) en
niveaux de formation
au 31 décembre 1996 fait
apparaître des différences significatives entre les
départements d'outre-mer et la métropole. La part du niveau VI
(1er cycle du deuxième degré) est de 41,1 % dans les DOM contre
24,6 % en métropole. Inversement, les demandeurs d'emploi ayant atteint
le niveau baccalauréat (niveau IV et plus) représentent 14,5 % de
la DEFM dans les DOM contre 28,4 % en métropole. La structure de la DEFM
par formation est elle-même bien différenciée d'un
département à l'autre. Le niveau VI représente 31,4 % de
la DEFM en Guadeloupe mais 49,3 % en Guyane et 48,7 % à la
Réunion ;
- le nombre des
chômeurs de longue durée
s'élève en juin 1997 à 92.064 dans les DOM. Après
les années 1994 et 1995 marquées par une très forte
augmentation, les chiffres se sont stabilisés, hormis pour la
Martinique, mais à un niveau très élevé.
La proportion de demandeurs d'emploi inscrits depuis plus d'un an reste
supérieure avec 46 % dans les DOM (en juin 1997) à ce qu'elle est
en métropole (36,9 % à la même date).
Nombre de chômeurs de longue durée |
1994 |
1995 |
1996 |
1997* |
GUADELOUPE |
49,4 % |
51,9 % |
48,9 % |
47,8 % |
MARTINIQUE |
45,9 % |
49,9 % |
54,4 % |
53,7 % |
GUYANE |
39 % |
38,3 % |
35,4 % |
36,5 % |
RÉUNION |
44,4 % |
44,1 % |
40,3 % |
42,8 % |
* Chiffres au 30 juin 1997
2. Les territoires d'outre mer
Nouvelle-Calédonie :
Le dernier recensement (1996) fait apparaître une population totale de
196.836 habitants, soit une progression de 20 % par rapport à 1989.
Le nombre de demandeurs d'emploi était de 7.419 en décembre 1996,
en évolution de - 0,5 % sur décembre 1995.
En 1996, 1.118 demandeurs d'emploi ont bénéficié de
l'indemnisation pour chômage total, représentant 15 % du total des
demandeurs d'emploi contre 28 % en décembre 1993. Cette forte
diminution, pour la troisième année consécutive, est le
résultat de l'introduction de conditions plus rigoureuses à
l'indemnisation du chômage, instituées par
délibération du congrès du Territoire du 3 novembre 1993.
L'accroissement du nombre de salariés de 1989 à 1996 a
été plus ou moins fort selon les secteurs d'activité, sans
que cela ne modifie profondément la part relative qu'ils occupent.
Ainsi, le secteur des services publics et semi-publics reste de loin le premier
employeur du territoire (+ 20 %), suivi par le commerce (17,6 %),
l'industrie et le bâtiment (14 %) et les autres industries (11 %).
L'augmentation la plus forte a été enregistrée par les
secteurs des professions libérales (+ 38 %), des mines (+ 38 %), du
transport (+ 38 %) et des activités de bureau (+ 32 %).
Wallis et Futuna :
La population active salariée recensée par la caisse locale de
retraite et la caisse de compensation des prestations familiales (CLR-CCPF) est
de 1.548 personnes en décembre 1996. Compte tenu des retards de
déclaration, on estime que l'effectif est stable entre 1995 et 1996.
Au 31 décembre 1996, le nombre de demandeurs d'emploi était de
321 personnes, ce qui représente une progression considérable sur
1994 (207 demandeurs d'emploi au 31 décembre 1994). La politique de
création d'emploi apparaît particulièrement difficile dans
sa mise en oeuvre, pour plusieurs raisons dont le poids du secteur public (qui
représente près des deux tiers des emplois), l'absence
d'investissements extérieurs du fait de l'impossibilité pour un
non-autochtone d'acquérir un terrain et la difficulté de
concilier coutume et initiative individuelle.
Polynésie française
Un recensement général de la population de Polynésie
française a été effectué en 1996. Le
décompte par communes est disponible mais les données
socio-économiques ne seront exploitables qu'en fin d'année 1997.
Néanmoins, une enquête menée en 1994 par l'Institut
territorial de la statistique permet de disposer de données plus
récentes sur le marché de l'emploi que celles du recensement de
1988.
Le taux de chômage (BIT) en 1994 s'établissait à 11,8 % sur
l'ensemble du territoire, soit un effectif de 9.320 personnes.
Les statistiques de l'agence pour l'emploi et la formation professionnelle
(AEFP) ne donnent qu'une vision très partielle du marché de
l'emploi car, en l'absence de système d'indemnisation du chômage,
l'inscription comme demandeur d'emploi, bien que recommandée, est
facultative.
Par ailleurs, ces statistiques ne reflètent que la situation de
l'archipel de la Société, le marché de l'emploi dans les
autres archipels restant encore très embryonnaire.
Demandes d'emploi enregistrées
1994 |
1995 (1) |
1996 |
7.416 |
11.448 |
12.598 |
Source AEFP
(1)
chiffre rectifié
Depuis plusieurs années, le territoire tente de mener,
parallèlement à la politique de développement
économique, une action en matière de planification familiale,
compte tenu notamment de l'importance du nombre des maternités chez les
jeunes filles mineures. Outre l'aspect démographique, ce problème
est également à l'origine de risques tant pour les mères
que pour les enfants placés souvent en danger affectif et
éducatif.
Cette action passe notamment par le soutien aux associations familiales et
autres mouvements dans le domaine de l'information de la vie de couple et de la
famille et le développement des centres de planification familiale qui
sont notamment autorisés à délivrer des contraceptifs, y
compris aux mineurs.