AVIS N° 88 TOME III - PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1998 - COOPERATION
Mme Paulette BRISEPIERRE, Sénateur
Commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces arméesAvis n° 88 Tome III - 1997/1998
Table des matières
- I. L'AFRIQUE EN QUÊTE DE NOUVEAUX ÉQUILIBRES
- II. LA POLITIQUE DE LA FRANCE EN AFRIQUE À L'ÉPREUVE
-
III. L'ÉVOLUTION PRÉOCCUPANTE DES CRÉDITS DESTINÉS À LA COOPÉRATION
- A. LA PRÉSENCE FRANÇAISE EN QUESTION
- B. UNE AIDE PROJET ENCORE INSUFFISANTE
- CONCLUSION
- EXAMEN EN COMMISSION
N° 88
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998
Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 1997.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances pour 1998 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME III
COOPÉRATION
Par Mme Paulette BRISEPIERRE,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM. Xavier
de Villepin,
président
; Yvon Bourges, Guy Penne, Jean Clouet,
François Abadie, Mme Danielle Bidard-Reydet, MM. Jacques Genton,
vice-présidents
; Michel Alloncle, Jean-Luc
Mélenchon, Serge Vinçon, Bertrand Delanoë,
secrétaires
; Nicolas About, Jean Arthuis, Jean-Michel Baylet,
Jean-Luc Bécart, Daniel Bernardet, Pierre Biarnès,
Didier Borotra, André Boyer, Mme Paulette Brisepierre, MM. Michel
Caldaguès, Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
MM. Charles-Henri de Cossé-Brissac, Pierre Croze, Marcel
Debarge, Jean-Pierre Demerliat, Xavier Dugoin, André Dulait, Hubert
Durand-Chastel, Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Philippe
de Gaulle, Daniel Goulet
,
Jacques Habert, Marcel Henry, Roger
Husson, Christian de La Malène, Edouard Le Jeune, Maurice
Lombard, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Paul
d'Ornano, Charles Pasqua, Alain Peyrefitte, Bernard Plasait, Régis
Ploton, André Rouvière, André Vallet.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
230
,
305
à
310
et T.A.
24
.
Sénat
:
84
et
85
(annexe n°
2
)
(1997-1998).
Lois de finances.
Mesdames, Messieurs,
1,25 milliard d'habitants en 2025 : en trente ans, le nombre d'Africains aura
doublé et représentera 18 % de la population mondiale.
Plus que les vicissitudes du quotidien, les perspectives démographiques
à moyen terme doivent éclairer notre diplomatie en Afrique et
notre politique de coopération.
Il y a là en effet pour la France un défi majeur mais aussi une
chance qu'il faudra saisir. Notre pays devra apporter sa part au
développement économique nécessaire aux besoins d'une
population plus nombreuse. Mais en retour, l'influence dont il
bénéficiera sur le continent africain lui assurera sur la
scène internationale un rôle et un rayonnement conformes à
sa tradition historique et à sa vocation.
Il importe que notre coopération soit résolument tournée
vers l'avenir. L'Afrique change. Ces mutations requièrent une analyse
lucide. Notre action doit s'adapter en conséquence et s'ouvrir en
particulier aux nouvelles générations d'Africains dont
dépendra bientôt le destin du continent.
Et il n'est pas sûr que le projet de budget de la coopération, en
baisse de 3,5 % par rapport à l'an passé soit à la mesure
des enjeux décisifs que représente notre présence en
Afrique.
*
* *
I. L'AFRIQUE EN QUÊTE DE NOUVEAUX ÉQUILIBRES
Les événements récents en Afrique Centrale ne se réduisent pas aux péripéties familières au continent : révolutions de palais, coups d'Etat... Ils traduisent à l'échelle d'une région, des mutations plus profondes. A cet égard, leur analyse peut fournir un préalable utile à une réflexion sur la politique française en Afrique.
A. QUEL ÉQUILIBRE POLITIQUE POUR L'AFRIQUE CENTRALE ?
L'année politique s'achève en Afrique centrale
par une large redistribution des cartes : effondrement du régime du
Maréchal Mobutu Sese Seko au Zaïre, rebaptisé
République démocratique du Congo (RDC), retour au pouvoir par la
force au Congo-Brazzaville de l'ancien Président Sassou N'Guesso au
terme d'un conflit sanglant. Au-delà de ces bouleversements, de
nouvelles solidarités se dessinent, de nouveaux équilibres
géopolitiques se cherchent. En toile de fond cependant ce sont toujours
les mêmes scènes de désolation : l'odyssée tragique
des réfugiés dans l'est zaïrois, les souffrances des
populations civiles victimes de conflits fratricides et implacables.
Mais l'Afrique centrale ne résume pas toute l'Afrique. A l'ouest, la
plupart des pays connaissent une stabilité favorable à la
poursuite de la croissance économique. Au sud, Pretoria, malgré
les difficultés intérieures, s'affirme comme une puissance
continentale avec laquelle désormais il faudra compter.
1. Les mutations de la scène politique
a) La fin du Zaïre de Mobutu Sese Seko
Octobre 1996 : les troupes rwandaises appuyées par
l'Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo
de Laurent-Désiré Kabila pénètrent dans l'est du
Zaïre où se trouvent réfugiés, dispersés dans
des camps de fortune, plusieurs centaines de milliers de Rwandais d'origine
hutue.
Quelques dizaines de milliers de réfugiés regagnent le Rwanda.
D'autres -la majorité- fuient plus à l'ouest sous la pression des
troupes rebelles de Kabila. Ces dernières, animées par la
volonté de conquête du pouvoir de leur chef, mettent en
déroute les troupes de l'armée régulière
zaïroise. Après trente-deux ans d'un pouvoir sans partage ou
presque, le Président Mobutu est contraint à l'exil.
Au-delà du fleuve Zaïre à Brazzaville,
l'échéance présidentielle prévue pour le 27 juillet
aiguise les ambitions et met aux prises l'ancien chef de l'Etat, le
général Denis Sassou N'Guesso soutenu par sa milice (les
" Cobras ") et son successeur élu en août 1992, Pascal
Lissouba.
Après de longs combats qui ont débuté le 5 juin, le
général Sassou N'Guesso s'assure, le 14 octobre dernier, le
contrôle de Brazzaville et, le lendemain, de Pointe-Noire, capitale
pétrolière et poumon économique du pays, ceci grâce
au concours décisif des troupes et des blindés angolais venus de
l'enclave de Cabinda.
b) Incertitudes en Centrafrique
Plus au nord, en Centrafrique, le Président Ange Félix Patassé, pourtant démocratiquement élu, s'est trouvé confronté à des mutineries à répétition dont la dernière en date, en novembre 1996, ébranla très sévèrement les fondements de son autorité. La mise en place d'une force interafricaine de 700 hommes détachés par six pays (Burkina Faso, Gabon, Mali, Sénégal, Tchad et Togo) à la suite des accords de paix signés à Bangui le 25 janvier 1( * ) , grâce au soutien financier et logistique de la France, n'a pas permis de mettre fin immédiatement aux troubles et aux violences.
2. Le fruit logique d'alliances régionales
a) L'émergence de nouvelles puissances régionales
De Kigali à Brazzaville en passant par Kinshasa,
existe-t-il un fil conducteur qui permette de comprendre la succession des
événements ? Certes, la fragilité des pouvoirs en place
trouve son explication première dans les dévoiements de
l'autorité publique. Toutefois, à l'exception de la Centrafrique
dont la situation apparaît principalement commandée par des
déterminants internes, l'intervention de forces extérieures a
représenté un élément souvent décisif dans
le dénouement de crises politiques.
A travers les différents événements dont l'Afrique
centrale est le théâtre, de nouvelles alliances régionales
semblent en effet à l'oeuvre où l'Ouganda, le Rwanda, l'Angola et
désormais la République démocratique du Congo et le
Congo-Brazzaville jouent chacun leur rôle.
Pour accéder au pouvoir, le Président ougandais Yoweri Museveni
s'était appuyé sur le Rwandais Paul Kagamé, en retour il a
procuré au chef du Front patriotique rwandais (FPR) à dominante
tutsie les moyens d'abattre le régime en place à Kigali (juillet
1994) après les terribles massacres dont furent victimes les populations
tutsies du Rwanda ainsi que les Hutus modérés.
Minoritaires au Rwanda comme au Burundi, les Tutsis s'inquiétaient de la
menace représentée par les menées de certains responsables
Hutus à partir des camps de réfugiés installés dans
le Kivu, au Zaïre. En outre, le Maréchal Mobutu apportait un appui
constant aux militaires Hutus défaits dans leur propre pays. L'alliance
des Tutsis du FPR et des hommes de l'Alliance des forces démocratiques
pour la libération du Congo de Laurent-Désiré Kabila
repose sur cet antagonisme commun vis-à-vis de Mobutu.
L'Angola
, deuxième puissance pétrolière,
représente une autre pièce essentielle de cette nouvelle logique
d'alliance. José Eduardo Dos Santos, ancien révolutionnaire
devenu Président de l'Angola, s'est trouvé en butte à
l'hostilité du régime de Mobutu. Le Zaïre a ainsi
accordé son soutien à l'Unita, le mouvement de rébellion
angolais placé sous l'autorité de Jonas Savimbi. La victoire de
M. Kabila a naturellement changé la donne et rapproché le
Zaïre du pouvoir en place à Luanda.
Cependant le conflit angolais connaissait également des prolongements au
Congo où le Président Lissouba bénéficiait de
l'appui de l'Unita tandis que le général Sassou N'Guesso recevait
une aide très active des forces angolaises. Compte tenu de la
solidarité nouvelle entre l'Angola et le Zaïre, la tentative du
Président Lissouba d'obtenir un soutien militaire
2(
*
)
de Kinshasa se trouvait condamnée à
l'échec.
A la faveur de ces événements,
l'Afrique du Sud
a su se
poser comme arbitre et apparaître comme une puissance régionale de
premier plan. Les dénouements des crises politiques en Afrique centrale
servent plutôt ses intérêts.
Grâce au développement, et à la qualité de ses
réseaux d'infrastructure ferroviaires et énergétiques,
Pretoria pourrait s'assurer la maîtrise de l'énergie
électrique produite à partir du barrage d'Inga dans l'ancien
Zaïre et l'évacuation de l'ensemble des minerais d'Afrique
australe. La vente de matériels militaires constitue un autre enjeu
d'importance : ainsi l'Afrique du Sud aurait fourni aux autorités du
nouveau Congo, pour un montant de 330 000 dollars, des équipements
destinés aux forces de police de Kinshasa... dont l'entraînement
est par ailleurs assuré par des cadres ougandais.
b) Un jeu diplomatique autonome
Une leçon se dégage de la succession de ces
événements. Les alliances ont ignoré les clivages
traditionnels entre Afrique francophone, anglophone ou lusophone. Elles se sont
déterminées avant tout en fonction d'amitiés politiques,
de solidarités régionales mais aussi de liens ethniques comme le
soulignait à juste titre un observateur
3(
*
)
: les
références traditionnelles aux
statuts de " maîtres " ou de
" dépendants " et
à une hiérarchie fondée, non sur
l'antériorité de l'accès à la terre, mais sur la
prise de possession sous une forme pacifique ou conquérante d'un
territoire, créent des connivences souvent méconnues par les
puissances occidentales.
Le poids de ces facteurs régionaux explique que les
événements aient, en grande partie, échappé
à l'influence des grandes puissances. Le jeu diplomatique dans la
région a ainsi conquis une autonomie certaine. Le sommet de Luanda (27
octobre 1997) où les Présidents Dos Santos, Sassou N'Guesso,
Kabila et Bongo ont adopté une déclaration commune
récusant toute forme d'ingérence
4(
*
)
dans leurs
affaires intérieures en a
apporté une nouvelle preuve.
B. UNE CROISSANCE ENCORE FRAGILE
1. Des économies mieux orientées
a) Une croissance fortifiée
L'Afrique a renoué avec la croissance. Depuis la
dévaluation du franc CFA en janvier 1994, les pays de la zone franc, en
particulier, se distinguent par des résultats particulièrement
remarquables avec une progression de 5,5 % du produit intérieur brut en
1996 -contre 5 % en moyenne pour les pays situés hors de la zone franc.
Ainsi, pour la première fois depuis de nombreuses années, ces
pays connaissent
un taux de croissance réel supérieur au taux
d'accroissement naturel de la population et partant, une amélioration du
revenu par habitant.
En outre pour la première fois également, depuis 1990, le
continent a connu en 1996
une croissance de ses échanges
supérieure à celle du commerce mondial avec une hausse de 8,5 %
pour les exportations et de 5,5 % pour les importations.
Ces performances reposent en premier lieu sur
la hausse des revenus de la
production agricole
. Trois facteurs ont en effet joué dans un sens
favorable : les bonnes conditions climatiques, le niveau encore soutenu du
cours des matières premières, la restructuration des
filières de cultures de rente.
A titre d'exemple, le Burkina Faso, à la faveur de la campagne
1996/1997, a augmenté de plus de 30 % sa production de coton-graine et
de coton-fibre grâce à une meilleure organisation de la production
(adhésion massive des paysans aux groupements de producteurs,
amélioration du rapport qualité/prix des intrants et remise de
2,2 milliards de francs CFA d'arriérés de dettes aux groupements
villageois). Ainsi, à la faveur de la hausse des recettes globales de la
campagne, les revenus distribués aux paysans progresseront de 44,4 %
pour dépasser 35 milliards de francs CFA.
De façon plus générale, dans la plupart des pays de la
zone franc, l'augmentation des revenus ruraux a donné un nouvel
élan à la consommation des ménages.
Le retour des financements extérieurs publics
constitue l'autre
facteur, décisif, de la croissance dans les pays de la zone franc. Dans
le cadre des programmes destinés à atténuer le choc de la
dévaluation, en effet, le soutien des bailleurs de fonds internationaux
a représenté 10 % du produit intérieur brut de la zone en
1994, 8 % en 1995 et 6 % en 1997.
D'après le Fonds monétaire international, le taux de croissance
approchera 4 % en 1997. La croissance dans les Etats de la zone franc pourrait
se stabiliser légèrement au-dessus de ce niveau. Grâce au
dynamisme de l'économie ivoirienne, l'Union économique et
monétaire ouest-africaine (UEMOA) enregistrera un point de croissance de
plus que les Etats de la Communauté économique et
monétaire d'Afrique centrale (CEMAC).
Ces résultats apparaissaient d'autant plus remarquables qu'ils ont
été obtenus dans le respect des grands équilibres
financiers
b) Un assainissement de la situation économique
.
Une inflation et des déficits mieux
maîtrisés
Dans les pays de la zone franc
l'inflation
a été contenue
au-deçà de 5 % en 1996. Elle dépassait 31 % en 1994
et encore 11 % en 1995.
De même,
les déficits budgétaires
se sont
réduits de 9 à 10 % du PIB dans les années 80 à 5,6
% aujourd'hui. Ici encore, les finances publiques des pays de la zone franc se
trouvent dans une situation plus favorable avec un déficit
budgétaire inférieur à 5 % du PIB.
Hors intérêts et hors concours extérieur, la zone
connaît même un excédent budgétaire de l'ordre de 4 %
du PIB (contre un déficit de 2,8 % du PIB en 1993).
Au-delà de l'assainissement des finances publiques, plusieurs pays ont
entrepris de rénover en profondeur les cadres de l'organisation
économique. La libéralisation se poursuit à travers la
suppression des prix administrés, les privatisations, le
développement de la concurrence.
.
Une adaptation progressive des circuits financiers
L'année qui s'achève s'est caractérisée par un
effort particulier de restructuration des circuits financiers et du secteur
bancaire mais aussi par la mise en place d'une politique monétaire
fondée sur des instruments de marché, le développement des
systèmes de financement coopératifs ou d'organismes de
microcrédits. Symbole de ces changements,
une bourse des valeurs
regroupant les entreprises privées les plus notables d'Afrique de
l'Ouest verra le jour avant la fin de l'année à Abidjan. Les pays
d'Afrique centrale nourrissent également, à plus longue
échéance, un projet comparable.
Pour l'heure, la place financière d'Abidjan peut se prévaloir
d'un véritable succès : depuis le 1er janvier 1994, l'indice
boursier a progressé de 363 % et la capitalisation boursière de
404 % pour atteindre 615 milliards de francs CFA
5(
*
)
. Une trentaine de sociétés y sont
cotées dont la plupart ont été récemment
privatisées. La réussite de la bourse d'Abidjan reflète
l'amélioration de la situation économique de la Côte
d'Ivoire et peut avoir un véritable effet d'entraînement sur les
pays voisins.
. la mise en place de dynamiques régionales
Des pôles régionaux de développement autour de la
Côte d'Ivoire mais aussi, à une échelle plus vaste encore,
autour de l'Afrique du Sud paraissent aujourd'hui en voie de se constituer. Ces
pays connaissent, en effet, des évolutions prometteuses : une
économie déjà diversifiée ou encore un taux
d'utilisation de l'appareil productif encore très élevé
(plus de 90 %). L'intégration régionale a progressé dans
le cadre des organisations comme l'UEMOA, la CEMAC et la communauté de
développement de l'Afrique australe (SADC).
L'UEMOA et la CEMAC se sont efforcées de renforcer la cohérence
de leurs zones respectives. Ainsi, l'harmonisation des réglementations
et l'exercice des contrôles au niveau régional ont fortement
contribué à l'assainissement du système bancaire. Par
ailleurs, les politiques communes en matière d'assurance ont conduit
à l'émergence d'un véritable
marché
régional de l'assurance
. Les caisses de prévoyance sociale
sont également soumises à des contrôles régionaux et
disposeront à partir du ler janvier 1998 d'un plan comptable commun.
Enfin, les Etats ont adopté les premiers textes communs en
matière de
droit des affaires.
Toutes ces initiatives s'inscrivent naturellement dans la durée.
Toutefois elles constituent un
jalon essentiel du retour à la
confiance, indispensable pour renforcer l'intérêt des
investisseurs privés pour l'Afrique.
L'insuffisance de l'investissement privé apparaît en effet
aujourd'hui encore comme l'une des principales faiblesses des économies
africaines.
2. Les facteurs de fragilité
Le retour de la croissance repose sur des bases encore fragiles : un afflux d'aides extérieures dont le renouvellement n'apparaît guère assuré, un niveau soutenu du cours des matières premières sur des marchés par nature fluctuants...
a) Une dépendance excessive
Les économies dépendent trop exclusivement de la vente d'un nombre limité de produits primaires. Sans doute, au Sénégal ou en Côté d'Ivoire, l'exportation de produits agricoles transformés ouvre-t-elle des perspectives prometteuses. Mais, ailleurs, la diversification du tissu productif avance très lentement.
b) L'insuffisance de l'investissement
Le taux d'investissement global moyen depuis la
dévaluation représente dans la zone franc 16 % du PIB en Afrique
de l'Ouest et 20 % en Afrique centrale. Cependant le continent apparaît
sur ce point, décisif pour le développement, en net retrait par
rapport aux économies asiatiques qui ont connu un taux d'investissement
global moyen de 28 % par an sur la période 1975-1995.
L'épargne intérieure reste difficile à mobiliser,
même si, paradoxalement, elle apparaît relativement abondante.
Ainsi, selon certaines estimations, l'Afrique centrale connaît
actuellement une situation de surliquidités. En 1996 le montant des
liquidités aurait atteint 160 milliards de francs CFA dans les six
Etats-membres de la Banque des Etats d'Afrique centrale et s'investissait
à l'étranger ou dans des biens non productifs comme l'immobilier.
La fragilité des systèmes bancaires demeure encore l'une des
principales explications de cette défiance très
préjudiciable au développement des économies africaines.
L'augmentation de l'investissement passe dès lors nécessairement
par une mobilisation de l'épargne extérieure.
Or comme le rappelait en mai dernier le rapport de la Conférence des
Nations unies pour la coopération et le développement, l'Afrique
n'a attiré entre 1991 et 1995 que 2 % du total des investissements
étrangers, soit 45 milliards de dollars. Encore ces flux se sont-ils
concentrés sur un nombre réduit de pays (le Nigeria, l'Egypte et
le Maroc ont attiré la moitié des fonds) et de secteurs (les
services et le pétrole).
En 1996, d'après la Banque mondiale, les flux de capitaux nets vers les
pays en développement sont passés de 230 milliards de dollars
à 285 milliards de dollars, soit une hausse de 17,5 %. Cette
progression repose essentiellement sur l'afflux des capitaux privés -80
% des flux. L'Afrique subsaharienne apparaît en marge de ce mouvement.
L'an passé, elle n'a reçu que 12 milliards de dollars de capitaux
privés alors que, dans le même temps, un montant de quatorze
milliards de dollars s'investissait au Brésil.
L'harmonisation des règles de droit doit encore être
intensifiée. Il faut regretter à cet égard que la "charte
pour l'investissement" préparée par un groupe franco-africain
d'experts indépendants n'ait pu être adoptée lors de
réunion semestrielle de la zone franc en avril dernier. Plutôt que
de mettre en place une inspection générale des douanes et
l'établissement d'une fiscalité foncière dans les pays de
la zone, les ministres ont préféré s'en tenir à de
grands principes peu contraignants. La mise en place d'un cadre juridique
constitue pourtant une condition indispensable, il faut le
répéter, pour mobiliser les investisseurs privés
aujourd'hui souvent découragés par l'instabilité politique
et l'insuffisance de l'Etat de droit.
Aujourd'hui, l'Afrique doit s'efforcer de surmonter ces facteurs de
fragilité et en particulier l'insuffisance de l'investissement
privé pour créer les conditions d'une croissance durable.
Dans cette perspective, le soutien de la communauté internationale lui
est encore indispensable.
II. LA POLITIQUE DE LA FRANCE EN AFRIQUE À L'ÉPREUVE
Parce que la France n'a jamais délaissé
l'Afrique, parce qu'elle est restée fidèle aux liens
tissés par l'histoire et a voulu soutenir le développement du
continent, en un mot, parce que, seule parmi les anciennes puissances
coloniales, elle peut se prévaloir d'une vraie politique en Afrique,
elle s'est exposée plus que d'autres aux critiques et aux reproches.
L'année 1997 s'est ainsi caractérisée par une attaque en
règle contre notre diplomatie en Afrique. La France a été
accusée d'ignorer les évolutions profondes du continent, et de
s'en tenir à ses liens avec des chefs d'Etat autoritaires et corrompus
au mépris des principes affichés au sommet franco-africain de La
Baule. Considérée comme la première pièce d'un jeu
de domino qui allait emporter toute l'Afrique centrale, la chute du
Maréchal Mobutu a été considérée comme un
grave revers de notre politique africaine. Ces sombres pronostics ne se sont
pas vérifiés. Les troubles n'ont touché que le Congo et le
retour au pouvoir d'un homme, Sassou N'guesso, jugé plutôt
favorable à la France semble ouvrir à moyen terme une
période de stabilité. En outre, faut-il le rappeler, la France
n'a jamais eu d'intérêts économiques essentiels au
Zaïre. La communauté française ne compte guère que
six cents personnes. Enfin, la théorie des dominos ne s'est pas,
jusqu'à présent, vérifiée.
Les jugements portés sur la politique de notre pays méritent
ainsi plus de nuances. Est-ce à dire que notre action sur le continent
ne doive pas s'adapter ? Au contraire, des changements paraissent souhaitables.
Encore faut-il, pour en prendre la juste mesure, se reposer sur une analyse
sereine et objective de la situation et non sur je ne sais quels partis pris.
A. LES RISQUES DE LA FIDÉLITÉ
La France demeure le premier bailleur de fonds du continent africain. Son aide s'inscrit dans le cadre d'une politique de coopération mise en place depuis la période de la décolonisation. Cependant, la position de la France apparaît aujourd'hui contestée. Cette remise en cause tien à la fois aux mutations du continent africain mais aussi à certaines erreurs ou lacunes dans la gestion de notre politique africaine.
1. La France, premier partenaire de l'Afrique
Tandis que l'aide publique au développement connaît depuis plusieurs années déjà un mouvement préoccupant de recul, la France a su maintenir une aide substantielle.
a) Le reflux historique de l'aide publique au développement
Dans son rapport " coopération pour le
développement " (février 1997), l'OCDE dressait un constat
alarmant de l'évolution de l'aide publique au développement.
L'effort consenti par les pays industrialisés au profit des pays en
développement a chuté de 14 % entre 1992 et 1995. Il est
passé de 59,14 milliards de dollars en 1994 à 58,89 milliards de
dollars en 1995.
L'aide représente en moyenne 0,27 % du produit national brut des pays
membres du Comité d'aide au développement : un résultat
bien en deçà de l'objectif de 0,7 % fixé par les Nations
unies en 1970. Autour de cette moyenne, il existe d'importants écarts
entre la participation des Etats-Unis (0,12 %), la plus faible au regard des
moyens disponibles, et l'effort consacré à l'aide au
développement par les pays scandinaves (au dessus de 0,80 %).
Aide publique au développement en pourcentage du
PIB
En % du PIB |
1995 |
1996 |
France hors TOM |
0,48 |
0,43 |
Allemagne |
0,31 |
0,32 |
Canada |
0,38 |
0,31 |
Etats-Unis |
0,10 |
0,12 |
Italie |
0,15 |
0,20 |
Japon |
0,28 |
0,20 |
Norvège |
0,87 |
0,85 |
Pays-Bas |
0,81 |
0,83 |
Royaume-Uni |
0,28 |
0,27 |
Suède |
0,77 |
0,82 |
.
Un exemple de désengagement : le Japon
L'évolution de l'aide publique japonaise paraît exemplaire d'un
certain désengagement de la communauté internationale vis
à vis des pays en développement. Au premier rang mondial, en
valeur absolue, l'aide publique japonaise a baissé de 35 % en 1996. En
outre, le gouvernement japonais envisage une baisse de 10 % de l'aide publique
au développement dans la prochaine loi de finances pour 1998. Cette
réduction s'inscrit dans la logique -commune à la plupart des
autres pays industrialisés- de maîtrise des dépenses
publiques, mais elle s'explique également par la volonté de
réformer le dispositif de l'aide, sinon l'esprit même de la
coopération japonaise. Ainsi, le gouvernement souhaite favoriser une
meilleure combinaison des capitaux privés à l'aide publique et
d'une certaine façon, cette préoccupation fait écho au
souci manifesté par les entreprises japonaises de
bénéficier plus directement des concours publics destinés
au monde en développement.
.
L'Afrique, principale bénéficiaire de l'aide
.
L'aide publique au développement bénéficie principalement
à l'Afrique qui n'a toutefois reçu que 21,8 milliards de francs
en 1995 contre 25 milliards en 1992 (suivent, en ordre décroissant :
l'Asie, l'Amérique latine et l'Europe méridionale -par pays, la
Chine reste le plus important bénéficiaire de l'aide publique au
développement).
b) La France, un effort soutenu
Avec une aide publique au développement de 8,44
milliards de dollars en 1995, la France se situe parmi les premiers bailleurs
de fonds derrière le Japon (14,48 milliards de dollars), mais devant les
Etats-Unis (7,36 milliards de dollars). Rapporté au nombre d'habitants,
l'aide française s'élève à 12 dollars par mois,
tandis qu'elle ne dépasse pas deux dollars par mois aux Etats-Unis.
I - Aide bilatérale |
24 751 |
- Dons |
19 799 |
Coopération technique |
10 175 |
Aide projets |
2 775 |
Aide programme |
1 749 |
Allégements de dettes |
5 100 |
- Prêts |
3 401 |
Aide projet |
2 437,8 |
Consolidation de dettes |
- 156 |
Coûts de gestion |
- 1 551 |
II - TOM |
4 686 |
III - Aide multilatérale |
8 682 |
Aide européenne |
4 321 |
- Banques et fonds multilatéraux |
3 210 |
- Nations unies |
746 |
- FASR-FMI |
405 |
TOTAL APD |
38 119 |
2. Des choix contestés
a) Un " pré carré " remis en cause
La présence française en Afrique a subi le
contrecoup de deux évolutions dont la maîtrise échappait
complètement à notre pays : la crise économique et
financière de la fin des années 80 et du début de la
décennie suivante dans le continent africain, la fin de la guerre froide
et la remise en cause des positions diplomatiques figées par
l'antagonisme Est-Ouest.
.
L'influence croissante
des institutions financières
internationales
Lorsque les pays africains se sont trouvés tour à tour, en
particulier dans la zone franc, confrontés à une grave crise
financière, la France a pris conscience qu'elle ne pouvait assumer,
seule, la responsabilité d'un assainissement économique de ses
partenaires africains. Le recours au Fonds monétaire international (FMI)
et à la Banque mondiale s'est révélé indispensable.
La logique économique défendue par ces institutions fondée
sur les axiomes du libéralisme a trouvé droit de cité dans
des pays marqués encore par l'étatisation des structures de
production et des réglementations très lourdes (sinon toujours
respectées).
A bien des égards, les préoccupations des institutions de
Bretton-woods s'accordaient avec les changements souhaités par la
France. Elles leur ont permis parfois de se concrétiser. La
dévaluation du franc CFA en 1994 apparaît à cet
égard exemplaire.
Avec les années, la France a pu faire valoir auprès des
représentants du FMI et de la Banque mondiale une sensibilité
plus respectueuse des réalités locales et corriger ainsi ce que
pouvait avoir d'excessif un libéralisme par trop dogmatique.
A titre d'exemple la Banque mondiale a retenu pour thème dans son
dernier rapport consacré au développement " l'Etat dans un
monde en mutation ". Longtemps partisan de la réduction du
rôle de l'Etat, la Banque reconnaît la nécessité d'un
Etat efficace pour favoriser la mise en place d'une économie de
marché efficace.
Il n'en reste pas moins que la France ne peut plus apparaître, même
pour les pays qui nous sont les plus liés, comme un interlocuteur
exclusif.
.
Les Etats-Unis, un nouvel acteur sur le continent
Dans la logique d'opposition entre deux blocs antagonistes, les Etats-Unis
s'accommodaient fort bien de l'influence française sur le continent
africain, influence inspirée à la fois par un souci de
stabilité et de solidarité avec les intérêts des
démocraties occidentales. Ce partage des rôles, héritage de
la guerre froide, s'est trouvé remis en cause à la suite de
l'effondrement de l'empire soviétique. Désormais essentiellement
guidés par des intérêts nationaux, les Etats-Unis pouvaient
souhaiter jouer leur propre partie en Afrique.
D'autres facteurs ont contribué à aiguiser l'intérêt
de Washington pour le continent africain : l'émergence d'une nouvelle
puissance régionale, l'Afrique du Sud, affranchie des liens de
l'apartheid mais aussi l'exploitation des richesses minières, en
particulier dans le golfe de Guinée où les perspectives de
prospection pétrolière apparaissent très prometteuses.
La politique américaine en Afrique s'est toutefois montré
hésitante. Les derniers événements dans l'ancien
Zaïre en ont apporté le témoignage.
Tandis que le 15 novembre 1996, ils soutenaient une résolution appelant
au respect de l'intégrité territoriale du Zaïre, les
Etats-Unis apportaient un appui politique, financier voire militaire à
l'offensive de Laurent-Désiré Kabila. Double jeu ou confusion ?
Il est difficile de le dire. Cependant, les manoeuvres du chef de l'Alliance
ont bientôt échappé au contrôle des Etats-Unis dont
il faut tout de même rappeler qu'ils ont été les principaux
soutiens du régime de Mobutu Sese Seko pendant de nombreuses
années. Les difficultés liées à l'envoi d'une
commission d'enquête des Nations unies sur les massacres commis contre
les réfugiés dans le Kivu illustrent encore les
ambiguïtés de la diplomatie de Washington qui, à cette
occasion, a montré les limites de son influence sur le nouvel homme fort
installé à Kinshasa.
Si la diplomatie américaine apparaît hésitante, la
politique économique des Etats-Unis répond à une
stratégie plus déterminée.
Certes, pour l'heure, l'Afrique demeure pour les Etats-Unis un partenaire
économique marginal. Elle représente 1 % de ses exportations (5,8
milliards de francs) et 2 % de ses importations (15 milliards de dollars). Les
échanges se concentrent sur un petit nombre de pays (l'Afrique du Sud,
le Nigeria, l'Angola et le Gabon représentent 80 % des importations
américaines) et sur un nombre limité de produits avec au premier
rang, les hydrocarbures.
En outre, les conditions d'accès au marché américain
demeurent restrictives : 67 % des ventes africaines supportent des droits de
douane. Moins de 4 % d'entre elles bénéficient du système
de préférences généralisé dont le
dispositif, du reste, est aujourd'hui suspendu à une prorogation du
Congrès.
Par ailleurs, les mécanismes d'incitation destinés aux
entreprises américaines ont subi les effets de la contrainte
budgétaire. Les engagements de l'agence américaine de garantie
des investissements privés à l'étranger (l'OPIC) se sont
réduits de 237 millions de dollars en 1994 à 174 millions de
dollars en 1995.
Quant à l'aide bilatérale destinée à l'Afrique,
elle a connu une contraction sévère entre 1993 et 1996 passant de
850 millions de dollars à 550 millions de dollars (0,1 % du produit
intérieur brut américain).
Par ailleurs, le fonds de développement pour l'Afrique a
été démantelé en 1996 et l'aide à l'Afrique
relève désormais du fonds général d'intervention de
l'agence américaine.
Cependant, les Etats-Unis paraissent aujourd'hui résolus à
imprimer un nouvel élan à leur présence économique
en Afrique. En juin 1997, avant le sommet du groupe des huit pays les plus
industrialisés à Denver, le Président Bill Clinton a
présenté une initiative économique pour le continent dont
il n'est pas inutile d'évoquer ici les grandes lignes. D'après
Washington, la faiblesse des performances africaines s'explique par la
conjonction de trois facteurs : l'instabilité politique marquée
par de nombreuses guerres civiles, les déséquilibres
macro-économiques, les distorsions des mécanismes d'allocations
de ressources et, en particulier, un niveau de protection douanière trop
élevé (soit un coût additionnel de 11 milliards de dollars
presque équivalent au montant de l'aide publique reçue).
Cependant, le redressement des économies africaines, sensible depuis
1995 (avec un taux de croissance du PIB de l'ordre de 4 % en moyenne), ouvre la
perspective de débouchés intéressants pour les
exportations américaines.
Le renforcement de la présence américaine ne passe toutefois pas
par l'aide au développement mais par une utilisation efficace des
mécanismes de marché et de l'initiative privée. Ces
orientations se sont traduites par un projet de loi (" African growth
and
opportunity Act ") en cours d'examen devant le congrès. Ce texte
comporte deux volets principaux :
- une extension du système de préférences
généralisées à des produits sensibles (textile et
habillement) jusque là exclus du dispositif ;
- la mise en place de nouveaux programmes d'appui à l'investissement
privé sous les auspices de l'OPIC à travers un fonds de prise de
participation de 150 millions de dollars et un fonds de 500 millions
destinés aux investissements privés dans les infrastructures.
Ces objectifs rencontrent toutefois un faisceau d'oppositions. Le
système de préférences généralisées
n'est plus en vigueur depuis plusieurs mois et son extension au
textile-habillement ne s'accorde pas aux intérêts de l'industrie
textile américaine bien défendue au sein du congrès
-déjà des contingents ont été imposés aux
productions du Kenya et de l'île Maurice. En outre, les programmes de
l'OPIC demeurent une cible privilégiée pour les adversaires de
" l'assistance sociale aux entreprises " et pourraient
subir de
nouvelles réductions au nom de la rigueur budgétaire.
Cependant, les entreprises américaines n'ont pas attendu les choix
définitifs des autorités publiques pour passer à
l'offensive sur les marchés africains : les investissements industriels
directs des Etats-Unis progressent rapidement. D'un montant de
173 millions
de dollars en 1994 ils s'élevaient à 1,2 milliard de dollars en
1996 dont 30 % en Afrique du Sud.
Désormais, la France doit compter avec ces concurrents, même sur
les terres traditionnelles de la francophonie.
b) Les erreurs françaises
L'analyse des erreurs de notre diplomatie ne doit pas
s'arrêter aux positions arrêtées par le gouvernement
français au moment de la crise zaïroise. Il lui faut
également tenter d'expliquer l'origine de ces choix malheureux mais
aussi s'interroger sur certaines orientations qui, à l'épreuve
des réalités africaines, ont montré leurs limites.
.
Les déconvenues diplomatiques dans la région des grands
lacs
Le soutien accordé jusqu'au dernier moment au maréchal Mobutu
exposait la France à de sérieuses déconvenues dans la
crise zaïroise. La capacité d'arbitrage et la liberté de
manoeuvre diplomatique française dans la région apparaissaient,
il est vrai, sérieusement limitées par les positions
prêtées à la France dans la région des grands lacs
et, en particulier, l'appui -apprécié avec une certaine
injustice- accordé au président Habyarimana du Rwanda avant son
assassinat par des Hutus extrémistes.
.
La multiplicité des centres de décision
La multiplicité des centres de décision dans la politique
africaine constitue un handicap sérieux pour la mise en oeuvre d'une
diplomatie cohérente et déterminée. Comme le soulignait M.
Michel Roussin
6(
*
)
" la gestion de [la
crise zaïroise], qu'il s'agisse des quatre responsables Afrique de
l'Elysée, des services du Quai d'Orsay, du ministère de la
défense, sans oublier les pseudo-réseaux, ne pouvait qu'engendrer
télescopages, appréciations approximatives et absence
d'anticipation ".
La " diplomatie " des réseaux -plus ou moins occultes-
paraît aujourd'hui particulièrement préjudiciable à
la politique française en Afrique. Elle double souvent -lorsqu'elle ne
la contredit pas- l'action de nos ambassadeurs sur place, elle sert souvent
plus utilement les intérêts de certains de nos interlocuteurs
africains -qui savent habilement jouer des concurrences entre plusieurs
réseaux- que l'intérêt national, elle repose sur un
système de relations fondé sur d'anciennes connaissances et
ignore les jeunes élites qui représentent pourtant l'espoir de
l'Afrique et l'Afrique de demain.
.
Une politique des visas trop restrictive vis-à-vis de nos
partenaires africains
Un nombre croissant d'étudiants et de chercheurs africains
préfèrent ainsi se former au sein des universités
américaines plus accessibles. A terme, cette orientation trop rigoureuse
de la France risque de peser durablement sur son rayonnement et sur son
influence. La politique des visas et des bourses doit être
organisée de façon plus généreuse.
La relève des générations en Afrique constitue un
défi pour la France qui doit s'assurer, auprès des prochains
responsables, du capital de confiance dont la créditaient les
élites africaines de l'époque postcoloniale.
.
Une application excessivement formelle des critères
démocratiques
Les valeurs affirmées au sommet franco-africain de La Baule en 1990, si
louables soient-elles dans leur principe, ont montré leurs limites
à l'épreuve des réalités africaines. Le
conditionnement de l'aide française aux progrès de la
démocratie a entraîné des dérives.
Pour satisfaire les bailleurs de fonds, certains chefs d'Etats ont
adopté tous les attributs de la démocratie sans suivre en rien
l'esprit des institutions démocratiques. Comme le soulignait
récemment l'ambassadeur de France, M. Stéphane Hessel, " ce
n'est pas parce qu'un président a été
démocratiquement élu qu'il est un bon porteur de la
démocratie. Et ce n'est pas parce qu'un président a pris le
pouvoir par un coup d'Etat qu'il n'est nécessairement pas porteur d'une
évolution démocratique ".
Ainsi, la forme des institutions importe parfois moins que le fonctionnement
effectif du pouvoir. Paradoxalement
certains
régimes
présidentiels forts paraissent mieux à même que des
démocraties fragiles et d'ailleurs souvent factices d'assurer une
véritable transition vers l'Etat de droit. L'erreur est parfois de
vouloir aller trop vite en réagissant avec notre propre mentalité
sans tenir compte des différences et de la nécessité d'une
évolution progressive. Sans doute, dès lors, faut-il encourager
les avancées concrètes de l'Etat de droit -mise en place de
règles juridiques transparentes, bon fonctionnement de la justice ...-
et ne pas se satisfaire seulement d'un respect de façade des
procédures démocratiques.
B. LES VOIES DU CHANGEMENT
Les observations précédentes doivent permettre
de mieux discerner les orientations de la politique africaine de la France pour
les années à venir. L'enjeu est capital car
l'influence de la
France sur le continent constitue un élément décisif du
statut de grande puissance dont notre pays peut se prévaloir sur la
scène internationale.
Rappelons-le, 150 000 Français vivent
et travaillent en Afrique. La France demeure pour le continent le premier
pourvoyeur d'aide, mais aussi le premier investisseur. Elle est
représentée par 121 groupes industriels et 68 banques ou
compagnies d'assurances. Elle contrôle 21 % des parts du marché
africain. En 1996, ses exportations vers le continent ont progressé de
9,5 % et ses importations de plus de 6 %. Les échanges se sont
soldés par un excédent français supérieur à
11 milliards de francs.
La politique africaine de la France doit s'articuler autour des deux axes qui
font sa spécificité : une volonté de présence, une
coopération renouvelée.
1. Une présence renforcée dans une Afrique élargie
La présence de la France sur le continent africain soulève deux questions majeures : dans quel cadre géographique doit-elle s'inscrire ? Quels efforts doivent être accomplis en faveur de la communauté française ?
a) L'Afrique, partenaire privilégié
Selon votre rapporteur, l'aide publique doit se concentrer
sur
l'Afrique. Aussi la disparition de la notion de " champ " et
l'extension des attributions du secrétariat d'Etat à la
coopération à l'ensemble des pays en développement pouvait
faire craindre une dilution des concours publics sur un nombre excessif de
pays. Ce risque paraît conjuré. En 1997, l'Afrique
bénéficie de 72 % des ressources procurées par les
programmes de coopération destinés aux 34 nouveaux pays
d'Afrique, du Pacifique Sud et des Caraïbes.
La coopération avec les pays Caraïbe représente 8 % des
moyens engagés. Mais les programmes demeurent modestes. Le plus
important, destiné à la République dominicaine, ne
dépasse pas 7 millions de francs. En outre, un fonds Caraïbe
(doté de 7 millions de francs) dont les crédits sont
délégués au Préfet de la Guadeloupe finance des
projets permettant de favoriser l'insertion des départements d'outre-mer
dans la région.
La part dévolue aux pays du Pacifique Sud (20 % du financement au titre
des programmes attribués aux nouveaux pays du champ) peut surprendre au
regard des besoins de développement et du poids démographique de
ces micro-Etats.
Même si la présence de la France dans le Pacifique Sud
représente un enjeu géostratégique majeur, la
concentration de l'aide sur le Vanuatu (plus de 26 millions de francs -soit 72
% du montant des programmes bilatéraux) soulève quelques
interrogations.
La priorité dévolue à l'Afrique demeure cependant
préservée. De ce point de vue, les programmes de
coopération s'inscrivent dans la cohérence des choix retenus pour
l'attribution des aides au titre du Fonds d'aide et de coopération
(FAC). Toutefois, les programmes de coopération permettent d'ouvrir
notre aide à de nouveaux pays africains. Il convient de s'en
réjouir. Certes, les pays d'Afrique francophone doivent demeurer
privilégiés mais ils ne sauraient cependant, aujourd'hui,
recueillir l'exclusivité du soutien français en Afrique.
En effet, l'Afrique bouge. De nouvelles puissances régionales
émergent. Des perspectives de développement intéressantes
se dessinent. Or souvent, les autres anciennes puissances coloniales, longtemps
indifférentes, ne peuvent se prévaloir d'aucune " chasse
gardée ". Au contraire, dans de nombreux pays, la présence
française est sollicitée et notre aide présente un fort
impact en termes politiques, à la différence des pays
francophones où du fait de la fidélité de notre pays aux
liens tissés par l'histoire, l'appui de la France revêt presque un
caractère " normal ". Il y a donc là dans les pays du
champ des opportunités politiques et économiques dont il faut
jouer.
Les étapes retenues lors de la première tournée en Afrique
du ministre des affaires étrangères -du 8 au 11 octobre dernier-
apparaissent significatives à cet égard : au Gabon et à la
Côte d'Ivoire sont en effet venus s'ajouter l'Afrique du Sud et
l'Ethiopie. Il n'est d'ailleurs pas indifférent que ces deux derniers
pays, avec le Nigeria et le Kenya, figurent au premier rang des pays africains
bénéficiaires des programmes de coopération
destinés aux nouveaux pays du champ.
Trois programmes méritent à cet égard
l'intérêt :
-
le développement du français au Nigeria
pour
répondre au souhait manifesté par ce pays de développer
l'enseignement de notre langue (devenue deuxième langue officielle de ce
pays qui compte 112 millions d'habitants) à travers le renforcement des
actions en cours (écoles pilotes, alliances françaises, centres
de formation) mais aussi une initiative plus originale à laquelle le
Togo et le Bénin ont été associés (envoi
d'enseignants béninois en français et utilisation pour la
formation des maîtres nigérians de structures béninoises et
togolaises) ;
-
l'amélioration de l'élevage
(situation sanitaire des
troupeaux, modernisation des structures d'encadrement, organisation des
éleveurs)
dans la Corne de l'Afrique
(Djibouti, Erythrée
et Ethiopie) ;
-
la
coopération avec la Communauté de
développement de l'Afrique australe
avec pour premier axe, une
assistance technique auprès de l'unité chargée du
problème de l'eau (localisée au Lesotho).
La coopération privilégie l'Afrique du Sud qui, avec une dotation
de 36 millions de francs en 1997, apparaît comme notre premier partenaire
parmi les pays africains non francophones. Les enjeux commerciaux sont ici de
première importance et les échanges entre nos deux pays ont
d'ailleurs progressé de 20 % sur les six premiers mois de l'année.
b) Appuyer la présence française en Afrique
Notre influence en Afrique repose principalement sur cette
communauté de Français -chefs d'entreprises, salariés du
secteur privé, coopérants et leurs familles- qui oeuvre au
quotidien et parfois dans des conditions très difficiles au
développement, et à la pérennité de la
solidarité entre la France et l'Afrique. C'est pourquoi il convient de
donner à ces Français les moyens d'exercer leur activité
dans les meilleures conditions. Votre rapporteur insistera en particulier sur
trois aspect.
.
Un effort nécessaire en faveur des PME-PMI françaises
En premier lieu, les crédits aux petites et moyennes entreprises
françaises installées en Afrique devraient faire l'objet d'une
attention particulière. Or, la Caisse française de
développement ne met aucune ligne de crédit particulière
à disposition de cette catégorie d'entreprises -alors même
qu'à l'instar des sociétés africaines analogues, elles
vivifient et renforcent le tissu industriel d'un pays.
.
Un socle de garanties pour les travailleurs français en Afrique
Un socle de garanties doit être apporté aux travailleurs
français en Afrique. A cet égard, une réponse enfin
satisfaisante à la question des retraités pensionnés par
les caisses de retraites d'Etats africains de la zone franc pourrait avoir une
valeur exemplaire. On le sait, après avoir accompli tout ou partie de
leur carrière professionnelle en Afrique, les Français
rencontrent des difficultés récurrentes pour percevoir leurs
droits à pension acquis auprès des régimes locaux
d'assurance vieillesse. Surtout, la valeur de ces pensions s'est trouvée
réduite de moitié à la suite de la dévaluation du
franc CFA. Une mission tripartite dirigée par l'inspection
générale des affaires sociales, menée avec les services du
ministère des affaires étrangères et de la
coopération a certes reconnu que la France ne pouvait se substituer
à des Etats souverains pour garantir la valeur des prestations servies
par leurs régimes de sécurité sociale et libellées
dans leur monnaie nationale. On peut toutefois objecter que la
dévaluation du franc CFA est intervenue sur une initiative
française. Notre pays, qui a apporté une aide importante aux pays
africains, doit assumer sa part de responsabilité vis à vis de
ses propres ressortissants. Du reste, afin de tenir compte du préjudice
subi en 1994, la France avait institué une aide exceptionnelle
plafonnée et versée sous condition de ressources. Le gouvernement
a décidé de réexaminer, sans tenir compte de la date
limite, les quelques dossiers de demandes d'aide exceptionnelle au titre du
dispositif pour 1994 qui avaient été déposés hors
délai.
La mission tripartite a également formulé cinq propositions
intéressantes sur le versement des retraites par les régimes de
pension africains : une centralisation par le centre de sécurité
sociale des travailleurs migrants -l'organisme de liaison français- des
dossiers des personnes rencontrant des difficultés ; l'évocation
systématique de cette question lors des rencontres bilatérales ou
multilatérales entre le gouvernement français et ses homologues
africains ; une aide, dans le cadre de la politique de coopération, au
fonctionnement des caisses de retraite en complément de l'action
déjà menée au sein de la Conférence interafricaine
des institutions de prévoyance sociale en matière de
contrôle de gestion et d'assistance technique ; en cas de
carrière mixte accomplie en France et dans un Etat lié à
la France par une convention libérale de coordination, une liquidation
autonome et sans délais des pensions, afin que les retards ou les
carences des institutions étrangères ne se traduisent pas
également par des retards du côté français ; les
moyens de favoriser la preuve de leurs activités en Afrique pour les
personnes ayant cotisé à des caisses locales afin
d'améliorer la prise en compte de ces périodes pour le calcul des
pensions françaises.
Il faut espérer que ces propositions puissent se concrétiser
rapidement. Votre rapporteur, pour sa part, y apportera une attention vigilante.
Il ne faut jamais l'oublier, l'expatriation demeure en particulier pour tous
les travailleurs indépendants, un choix risqué mais aussi un
choix coûteux. Elle conduit à renoncer au double avantage que
représentent la gratuité de l'enseignement et une protection
sociale nationale généreuse.
C'est pourquoi il importe de soutenir nos compatriotes quand ces derniers se
trouvent confrontés à des situations difficiles comme ce fut le
cas à la suite de la dévaluation du franc CFA en 1994 ou encore
dans des périodes de trouble telles que la crise congolaise. Dans ces
circonstances il conviendrait d'examiner de façon
urgente
les
conditions d'une indemnisation directe ou indirecte. Ainsi au Congo, une
formule adéquate reposerait sur l'exonération de droits de douane
ou des dégrèvements d'impôt pour les opérateurs
français installés dans ce pays.
Certes, ces mesures dépendent avant tout du gouvernement congolais.
Mais,
dans le contexte actuel,
la France apparaît en mesure
d'obtenir des autorités de Brazzaville des initiatives en faveur des
Français du Congo.
.
Le dispositif militaire français en Afrique : un
élément essentiel pour la sécurisation de la
communauté française
La pérennité de notre présence en Afrique dépend du
maintien d'un dispositif militaire propre à sécuriser nos
concitoyens dans un environnement régional souvent marqué par
l'instabilité. Les événements du Congo Brazzaville ont
souligné tout l'intérêt d'une présence militaire
française. En juin dernier, dans le cadre de l'opération
Pélican, l'armée française a déployé
à Brazzaville 1 250 soldats et procédé à
l'évacuation en quelques jours de 5 700 personnes dont 1 523
Français. A cette occasion les militaires français ont, une fois
de plus, montré leur efficacité et leur courage. Il convient ici,
de leur rendre un nouvel hommage.
Ce n'est donc pas sans une profonde inquiétude que votre rapporteur
envisage les redéploiements de notre dispositif militaire sur le
continent.
Le dispositif militaire actuel
Pays |
8 125 hommes |
SENEGAL |
1 265 hommes/évolution possible : 1 100 hommes
Bataillon à 2 unités de combat
|
COTE D'IVOIRE |
580 hommes/maintien
Bataillon à 1,5 unité de combat
|
GABON |
600 hommes/évolution possible : 550 hommes
Bataillon à 2 unités de combat
|
TCHAD |
840 hommes/évolution possible : 550 hommes
Groupement Terre à 2,5 unités de combat - 1
détachement ALAT
|
RCA
|
1 390 hommes/évolution attendue : 0
Terre : 4 unités de combat - 1 détachement ALAT
|
DJIBOUTI |
3 450 hommes/évolution possible : 2 800 hommes
Terre : 8 unités de combat - 1 détachement ALAT
|
Le dispositif actuel s'articule autour de 6 bases, fortes de
quelque 8 000 hommes -dont 5 000 en zone subsaharienne. Il
développe capacité de prévention (fondée sur les
forces prépositionnées et la synergie avec la coopération
militaire technique) et capacité d'action avec une panoplie de moyens
peu nombreux mais facilement projetables et les possibilités de
renforcement du dispositif par des forces de métropole grâce aux
plates-formes portuaires ou aéroportuaires protégées par
nos éléments stationnés.
Dans le cadre de la réforme des armées, les travaux du
comité stratégique ont conduit à un réexamen de
l'ensemble de notre dispositif outre-mer et à une réduction des
effectifs prépositionnés. Les capacités
opérationnelles reposeront dès lors sur un dispositif
resserré constitué à terme par des unités
entièrement professionnalisées, composées, pour les deux
tiers, de personnels d'unités détachées en renfort de la
métropole pour une durée de 4 à 6 mois et pour le reste,
de personnels affectés sur le territoire.
La révision du dispositif devait également entraîner la
fermeture d'une base. Le choix s'est porté sur les bases
centrafricaines. Choix surprenant au regard de l'importance des infrastructures
concernées et surtout de la position centrale particulièrement
adaptée au déploiement de nos forces sur l'ensemble de la zone
Afrique centrale. Certes les ambiguïtés du Chef de l'Etat
centrafricain expliquent en partie la solution retenue. Mais ces
considérations politiques sont-elles à la mesure des enjeux
stratégiques que présente le dispositif militaire français
en Centrafrique ?
Si la rationalisation de notre présence militaire apparaît
inévitable dans le contexte actuel, trop d'incertitudes demeurent encore
sur les moyens de préciser nos capacités opérationnelles.
La sécurisation de nos compatriotes ne suppose pas nécessairement
un déploiement de forces considérables. Mais il faut au moins une
présence qui soit dissuasive.
A titre d'exemple, il aurait sans doute suffi de compléter l'effectif de
douze soldats affectés à la surveillance de notre Consulat
à Pointe-Noire, par un nombre équivalent de militaires
chargés de patrouiller en ville pour intimider les fauteurs de troubles
et rassurer ainsi la communauté française restée sur place
pendant les événements.
2. Une coopération mieux adaptée
Chaque année le thème de la réforme de notre dispositif de coopération revient avec une telle constance que votre rapporteur se fait quelque scrupule d'évoquer de nouveau cette question à l'occasion de la présentation du projet de budget. Cependant, la réorganisation revêt une actualité particulière cette année car le Conseil des ministres devrait présenter les grandes lignes d'une réforme avant la fin du mois de novembre. L'attention accordée aux questions institutionnelles ne doit toutefois pas détourner la réflexion des objectifs de notre coopération et de leur éventuelle adaptation.
a) La nécessité d'une direction politique
La dispersion des moyens dévolus à l'aide
publique au développement n'est que le reflet de l'éclatement des
centres de décision dans ce domaine. Le secrétariat d'Etat
à la coopération maîtrise moins de 14 % des ressources
totales destinées à l'aide.
Chaque ministère tend à conduire sa propre politique au risque
d'une perte de cohérence et de transparence.
Répartition de l'aide publique au
développement de la France
(TOM inclus)
Années 1995-1996
Versements nets en MF
1995 |
1996 |
|||
Montant |
% |
Montant |
% |
|
Ministère de l'Economie et des Finances |
18 719,15 |
44,42 |
15 420,87 |
40,45 |
. Aide multilatérale |
9 493,09 |
7 935,74 |
||
. Prêts du trésor |
2 261,28 |
1 659,94 |
||
. Dons associés aux prêts du trésor |
512,86 |
546,93 |
||
. Consolidation de dettes |
118,65 |
156,15 |
||
. Annulations de dettes |
5 366,86 |
4 985,60 |
||
. Garanties diverses |
147,65 |
197,72 |
||
. Bonifications La Baule 5 % |
171,98 |
114,95 |
||
. Dons projets dons et à l'ajustement structurel |
646,78 |
136,14 |
||
Ministère Coopération et Développement |
4 985,54 |
11,83 |
5 264,90 |
13,81 |
. Coopération technique |
2 456,37 |
2 376,70 |
||
. Fonds d'aide et de coopération |
1 302,40 |
1 187,70 |
||
. Concours budgétaires |
139,12 |
302,40 |
||
. Dons projets dons et à l'ajustement structurel |
853,75 |
1 169,54 |
||
. Transport d'aide alimentaire |
94,00 |
85,95 |
||
. Autres dons |
139,90 |
142,61 |
||
Ministère des Affaires étrangères |
3 176,42 |
7,54 |
3 312,31 |
8,69 |
Coopération technique |
2 544,02 |
2 483,54 |
||
. Aide d'urgence |
70,85 |
82,78 |
||
. Nations unies |
561,55 |
745,99 |
||
Caisse française de développement |
2 885,91 |
6,85 |
1 897,02 |
4,98 |
. Prêts du premier guichet |
1 019,64 |
777,91 |
||
. Prêts d'ajustement |
1 866,27 |
1 119,11 |
||
Ministère de la Recherche et de la Technologie |
2 811,86 |
6,67 |
2 705,54 |
7,10 |
. Recherche |
2 811,86 |
2 705,54 |
||
Ministère de l'Education nationale |
1 625,03 |
3,86 |
1 982,48 |
5,20 |
. Ecolage |
1 625,03 |
1 982,48 |
||
Autres ministères |
1 484,42 |
3,52 |
1 299,29 |
3,41 |
. Aide alimentaire |
218,57 |
272,38 |
||
. Aide aux réfugiés |
620,00 |
400,00 |
||
. Autres |
645,85 |
626,91 |
||
TOM |
4 873,70 |
11,57 |
4 685,75 |
12,29 |
Coûts administratifs |
1 577,14 |
3,74 |
1 551,05 |
4,07 |
TOTAL |
42 139,17 |
100,00 |
38 119,21 |
100,00 |
La multiplicité des centres de décision
politique soulève des difficultés particulières pour
l'exercice d'une tutelle partagée entre les ministères des
finances, des affaires étrangères et le secrétariat d'Etat
à la coopération, sur un organe d'exécution comme la
Caisse française de développement. Faute d'orientation politique,
cet organisme, dont le rôle est crucial pour l'aide française, est
souvent conduit à définir lui-même ses priorités.
Certes, le gouvernement précédent avait entrepris de renforcer la
coordination de la politique de coopération grâce à la mise
en place d'un comité interministériel de l'aide au
développement -le CIAD- (et ses relais sur le terrain, les
comités locaux d'aide au développement). Cependant le CIAD s'est
réuni une fois seulement depuis sa création et ne paraît
pas s'être affranchi d'un certain formalisme.
Plutôt que de céder à cette tentation bien française
de créer de nouvelles structures chaque fois qu'une institution
existante ne donne pas satisfaction, il convient de s'attacher à
quelques objectifs simples et clairs. Votre rapporteur en distinguera trois :
-
la politique africaine et la coopération font partie
intégrante de notre diplomatie
: dans ces domaines, la direction
politique doit appartenir, sous l'autorité du Président de la
République et du Premier ministre, au ministre des affaires
étrangères ;
-
l'identité de la politique africaine doit être
préservée
et nos partenaires africains ont besoin d'un
interlocuteur spécifique : à cet égard le maintien au sein
du gouvernement (sous la forme d'un ministre délégué ou
d'un secrétaire d'Etat) d'un responsable politique en charge de la
coopération apparaît indispensable ;
-
sur le terrain, les " métiers " doivent être mieux
distingués
: aux missions de coopération les missions de
conseil et d'assistance technique, aux agences de la Caisse française de
développement la responsabilité opérationnelle des projets
en particulier pour les infrastructures même dans des domaines comme
l'éducation ou la santé qui relèvent traditionnellement
des missions de coopération.
b) Pour une coopération rénovée
La coopération française change peu à peu
de visage. Trois inflexions en particulier attirent l'attention car elles
éclairent peut-être les grandes orientations de l'avenir :
.
Un effort prioritaire pour le développement de proximité
Le développement de proximité apparaît désormais
comme une priorité. Il requiert des moyens financiers plus
limités, il n'expose pas aux déconvenues associées trop
souvent aux grands projets d'infrastructure dont les coûts de
fonctionnement peuvent s'avérer prohibitifs, enfin il
bénéficie directement aux populations concernées et
contribuent ainsi à terme à limiter les flux d'immigration non
maîtrisés. Les exemples pourraient être multipliés.
Votre rapporteur se bornera à citer la réanimation des circuits
de crédits pour remédier aux insuffisances du système
bancaire, à travers l'aide apportée par la coopération
française en Côte d'Ivoire au réseau des
coopératives rurales d'épargne et des coopératives
d'épargne et de crédit. Ce réseau créé en
1976 mais fragilisé par les défaillances successives de l'office
national de la promotion rurale et de la Banque nationale de
développement agricole, constituait souvent pour une population aux
moyens très modestes le seul recours pour obtenir un crédit.
L'appui des bailleurs de fonds a permis d'assainir le système qui, pour
les 95 caisses de Côte d'Ivoire, réunit aujourd'hui 77 500
adhérents et 4,7 milliards de francs CFA.
Les CREP-COOPEC offrent quatre lignes de crédit : investissement,
campagne, consommation, scolaire. Dans un pays où le système de
sécurité sociale présente nombre de déficiences,
elles permettent par exemple d'octroyer des avances représentant 70 %
des dépenses liées aux ordonnances médicales. A terme, les
bailleurs de fonds cherchent à assurer l'autofinancement des caisses et
à garantir ainsi la pérennité du dispositif en place.
.
La recherche de partenariats
La coopération doit s'inscrire dans le cadre d'un véritable
partenariat. Les procédures choisies doivent permettre de
responsabiliser les autorités locales et fixer des engagements
réciproques pour la mise en oeuvre d'un projet. A cet égard la
formule de
" contrats de partenariat et de
développement "
étudiée par le secrétariat
d'Etat à la coopération sur le modèle des contrats de plan
français ouvre une piste intéressante.
.
Une meilleure synergie avec les autres bailleurs de fonds
Enfin l'aide française doit savoir mieux utiliser les synergies avec les
autres bailleurs de fonds tout en valorisant sa part d'initiative mais aussi sa
participation financière (qui représente le quart des ressources
du Fonds européen de développement par exemple) au sein de ces
instances.
Au chapitre des expériences prometteuses, le programme de
développement de la région de Kayes au Mali devait permettre de
fédérer les efforts de la France (responsable de la modernisation
du chemin de fer, de la construction de 100 km de routes goudronnées,
des travaux d'électrification et d'assainissement) et de l'Union
européenne (chargée de financer une route Bamako-Dakar). Le
désenclavement de la région déshéritée de
Kayes ne constitue pas seulement un facteur important du développement
du Mali, il présente aussi des enjeux pour la France : 95 % des
immigrés maliens installés dans notre pays, soit au total 37 000
personnes selon les chiffres officiels, mais plus vraisemblablement une
centaine de milliers, sont originaires de la région de Kayes.
De façon générale, il faut, dans notre coopération,
privilégier
la rapidité d'exécution qui constitue le
meilleur gage de l'efficacité.
III. L'ÉVOLUTION PRÉOCCUPANTE DES CRÉDITS DESTINÉS À LA COOPÉRATION
Le projet de budget de la coopération pour 1998
s'élèvera à 6 485 millions de francs soit une baisse de
3,55 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1997. Les
autorisations de programmes se contractent de 14,5 % (2 321,8 millions de
francs au lieu de 2 425,6 millions de francs en 1997).
(en millions de francs)
Catégorie de dépenses |
PLF
|
LFI
|
Evolution (en %) |
Part dans les crédits du ministère (en %) |
||
97/96 |
98/97 |
LFI 97 |
PLF 98 |
|||
Assistance technique civile (chap.42-23-10) |
1 445 |
1 370 |
- 3,1 |
- 5,2 |
21,5 |
21 |
Aide projet (chap.68-91)
|
2 375
|
2 299
|
- 14,8
|
- 3,2
|
28 |
31 |
Coopération technique (Bourses, formation, échanges, appui aux organismes concourant au développement) |
547 |
541 |
- 4,5 |
- 1 |
8 |
8,3 |
Concours financiers (chap.41-43) |
810 |
570 |
- 21,6 |
- 29 |
12 |
8,7 |
Assistance technique et coopération militaire (chap.41-42) |
739 |
703 |
- 4,7 |
- 4,8 |
11 |
10,8 |
Appui aux initiatives privées et décentralisées (chap.42-44) |
153 |
150 |
+ 3,8 |
- 2 |
2,2 |
2,3 |
Le projet de budget s'inscrit dans la continuité des
grandes orientations arrêtées l'an passé :
- la réduction des concours financiers à hauteur de 223 millions
de francs, responsable pour l'essentiel de la baisse des crédits
dévolue à la coopération (238,7 millions de francs) ;
- la déflation des effectifs de l'assistance technique parvenus
aujourd'hui à un niveau préoccupant ;
- la priorité accordée à l'aide projet, même si la
contrainte budgétaire ne permet pas de lui accorder encore l'effort
nécessaire.
A. LA PRÉSENCE FRANÇAISE EN QUESTION
1. Les moyens du ministère sous contrainte
a) La réduction des crédits dévolus au service
.
Les
emplois et les
rémunérations
Le ministère de la coopération perdra 12 emplois dont 7 dans
l'administration centrale, 2 dans les missions de coopération et
d'action culturelle et 3 dans les centres médico-sociaux. La
réduction des effectifs dans les services extérieures traduit, en
particulier, l'effort de rationalisation conduit sous l'égide du
comité interministériel sur les moyens extérieurs de
l'Etat (CIMEE) : un emploi de chef de mission est ainsi supprimé de
nouveau en 1998 par fusion des fonctions d'ambassadeur et de chef de mission.
En fait, depuis 1993, les services extérieurs se caractérisent
par la stabilité de leurs effectifs de fonctionnaires (de 167 à
175 entre 1993 et 1995) et par la diminution du nombre des contractuels (de 380
à 354).
Parallèlement, les crédits dévolus aux
rémunérations progressent de 0,4 % entre 1997 et 1998 en raison
de l'ajustement de l'indemnité de résidence à
l'augmentation constatée du coût de la vie dans de nombreux pays.
.
La réduction des dépenses de matériel
et de fonctionnement courant
La baisse de près de 8 % des crédits destinés au
matériel et au fonctionnement concerne principalement les services
extérieurs. Elle prolonge la tendance observée au cours des
années passées avec la rationalisation des services, la
suppression de certains avantages (comme la prise en charge des coûts de
l'électricité au domicile des agents) et un contrôle
renforcé de la gestion des achats au sein de chaque mission.
Les mesures d'économie ont pour contrepartie un effort de
productivité appuyé sur le développement des applications
informatiques. Ainsi, en 1998, les moyens dévolus à
l'informatique progresseront de 3 %.
b) Le rayonnement culturel de la France dans les pays du champ soumis à la stricte contrainte budgétaire
.
Les centres culturels
L'augmentation de la dotation destinée aux centres culturels s'explique
en fait par un double transfert des charges
- des actions en faveur de livres inscrites auparavant au Fonds d'aide et de
coopération et désormais imputées aux centres culturels
sur le chapitre 34-98-30 ;
- des rémunérations des personnels expatriés des alliances
françaises.
.
L'Agence pour l'enseignement français à
l'étranger (AEFE)
Chargée de la gestion de l'ensemble des établissements
d'enseignement français à l'étranger, l'Agence
rémunère les enseignants sur ses crédits (supposés
couvrir ainsi le traitement brut, les indemnités d'expatriation et de
résidence, les rémunérations supplémentaires pour
enfants à charge, les mesures de revalorisation, les indemnités
et avantages statutaires à l'exception des primes de vie chère et
autres rémunérations supplémentaires).
L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger est
placée sous la double tutelle du ministère des affaires
étrangères et du ministère de la coopération. Ce
dernier ne participe toutefois que pour un cinquième aux ressources
totales de l'Agence.
Les subventions de fonctionnement (au chapitre 36-30 art. 10) à l'AEFE
s'élèvent à un montant de 368,4 millions de francs,
très proche de la dotation accordée en 1997.
.
Les équipements
Par ailleurs, les dotations pour les équipements se contractent de
54 % pour les autorisations de programme (de 47,660 millions de francs
à 22 millions de francs) et de 34 % pour les crédits de paiement
(de 43,3 millions de francs à 28,7 millions de francs).
Dans ces conditions, les opérations se limiteront à
l'achèvement des grands travaux entrepris (en particulier pour le
lycée de Tananarive) et à la reconstruction du centre culturel de
Port au Prince.
.
Les bourses
Les crédits dévolus aux bourses et à la formation
(chapitre 42-43, art. 10) s'élèvent à 245 millions de
francs. En 1996, les bourses ont été attribuées à 4
474 bénéficiaires (contre 4 439 en 1995). Désormais,
conformément au souci de privilégier des formations courtes et
ciblées, le nombre de stagiaires dépasse celui des
étudiants (qui représentaient encore 60 % des boursiers africains
en 1994). Près de 80 % des formations s'accomplissent en France.
L'orientation de ces bourses demeure un sujet de perplexité.
Correspond-elle vraiment aux besoins d'économies en
développement ? En effet
37 % des stages concernent l'administration
et les services, 21 % les lettres et sciences humaines mais seulement 2,7 %
l'agriculture, 2 % l'informatique.
Ce n'est qu'en 1997 qu'un progamme de
bourses d'entreprise
a été mis en place.
2. La baisse prolongée de l'assistance technique : une remise en cause, à terme, de l'une des caractéristiques essentielles de notre coopération
La déflation continue des effectifs de l'assistance technique ne saurait se poursuivre dans les années à venir sans remettre en cause un élément fondamental de notre coopération fondé sur une forte présence humaine sur le terrain.
a) L'assistance civile
En 1998, 225 postes d'enseignants et 10 postes de techniciens
seront de nouveau supprimés. En 8 ans, les effectifs de l'assistance
civile auront ainsi été réduits de plus de moitié.
Cette évolution répondait au souci de limiter le nombre de postes
de coopérants dits de substitution. Elle a du reste principalement
concerné les postes d'enseignants réduits de 62 % entre 1990 et
1998 (tandis que, sur la même période, les postes de techniciens
se contractaient de 46 %).
Toutefois, aujourd'hui, le seuil est atteint en deçà duquel notre
coopération changerait de nature. Notre pays dispose en effet
grâce aux connaissance et à l'expérience acquise des
coopérants, d'une capacité d'expertise sur les questions de
développement sans exemple dans les autres pays industrialisés.
En outre, la présence sur le terrain d'hommes et de femmes
compétents constitue une garantie certaine pour une bonne utilisation,
sur place, de notre aide. C'est pourquoi, votre rapporteur appelle le
gouvernement à revoir désormais la politique menée
continuellement ces dernières années en matière de
réduction des effectifs.
ASSISTANCE TECHNIQUE - POSTES ETATS ET
INTER-ETATS
EFFECTIFS TOUS STATUTS
Etat |
Enseignants |
Techniciens |
Total |
Angola |
10 |
5 |
15 |
Bénin |
25 |
38 |
63 |
Burkina Faso |
76 |
69 |
145 |
Burundi |
0 |
2 |
2 |
Cambodge |
4 |
17 |
21 |
Cameroun |
112 |
98 |
210 |
Cap-Vert |
6 |
6 |
12 |
Centrafrique |
42 |
38 |
80 |
Comores |
27 |
29 |
56 |
Congo |
28 |
52 |
80 |
Côte d'Ivoire |
350 |
102 |
452 |
Djibouti |
148 |
66 |
214 |
Gabon |
195 |
76 |
271 |
Gambie |
4 |
1 |
5 |
Guinée |
25 |
38 |
63 |
Guinée B |
6 |
13 |
19 |
Guinée E |
9 |
15 |
24 |
Haïti |
13 |
13 |
26 |
Madagascar |
120 |
87 |
207 |
Mali |
50 |
57 |
107 |
Maurice |
17 |
8 |
25 |
Mauritanie |
87 |
53 |
140 |
Namibie |
4 |
13 |
17 |
Mozambique |
11 |
9 |
20 |
Niger |
48 |
67 |
115 |
La Dominique |
2 |
10 |
12 |
La Grenade |
2 |
5 |
7 |
Ste Lucie |
4 |
9 |
13 |
St. Vincent |
1 |
3 |
4 |
St. Christophe |
1 |
1 |
2 |
Trinidad |
0 |
1 |
1 |
Rwanda |
0 |
5 |
5 |
St. Thomas |
4 |
8 |
12 |
Sénégal |
190 |
117 |
307 |
Seychelles |
9 |
9 |
18 |
Tchad |
40 |
73 |
113 |
Togo |
20 |
14 |
34 |
Zaïre |
2 |
0 |
2 |
France |
60 |
72 |
132 |
Total |
1 752 |
1 299 |
3 051 |
La disparition programmée de nombreux postes a nourri
chez les assistants techniques un climat de doute. Parallèlement, les
missions des coopérants s'inscrivent dans un cadre plus exigeant :
définition de lettres de missions de plus en plus précises et
limitation de la durée de séjour dans un Etat à six ans
afin de favoriser la mobilité et renouveler les compétences.
Dès lors les attentes de ces personnels devraient être mieux
prises en compte et il convient de relever à cet égard trois
évolutions favorables :
- l'amélioration du
dispositif de concertation
à travers
les commissions consultatives paritaires ministérielles et locales pour
les questions d'ordre individuel, et dans les pays dont les effectifs de
l'assistance technique civile atteignent cinquante coopérants, les
commissions techniques paritaires locales -relais essentiel pour la
préparation des comités techniques paritaires centraux ;
- une meilleure prise en compte de l'importance des responsabilités
exercées dans la définition des
primes de fonction
et la
reprise des ajustements change-prix en zone franc ;
- l'instauration d'une
indemnité de logement
aujourd'hui
limitée aux coopérants de Côte d'Ivoire, mais dont
l'extension à d'autres pays doit être envisagée sous
certaines conditions.
Cependant votre rapporteur regrette de nouveau que la titularisation des
contractuels de l'assistance technique autorisée par la loi n°
84-16 du 11 janvier 1984 (dite loi " Le Pors ") n'ait reçu
qu'une appréciation très partielle. Quelque deux cents
ayants-droit parvenus après juillet 1993 au terme de leur mission en
coopération demeurent rémunérés par le
ministère des affaires étrangères et le secrétariat
d'Etat à la coopération dans l'attente de leur réinsertion
dans une administration. Certes, certaines mesures ponctuelles ont permis de
nouveaux départs en coopération, des mises à disposition
ou quelques réinsertions dans des ministères techniques. Mais ces
initiatives ne sont pas à la mesure d'un problème qui appelle un
règlement global au niveau interministériel.
Enfin, votre rapporteur souhaiterait souligner sa profonde inquiétude
sur le sort des
postes de coopérants aujourd'hui pourvus par des
appelés
. En effet, après la suppression de l'obligation du
service national, le remplacement de plus de 800 coopérants du service
national (CSN) actuels par des professionnels, pourrait entraîner une
dépense supplémentaire de 200 millions de francs venant s'ajouter
aux 77 millions de francs consacrés aujourd'hui aux CSN par le budget de
la coopération. En outre, la qualité des personnels
recrutés dans le cadre du volontariat soulève de fortes
incertitudes pour l'avenir.
b) L'assistance militaire technique : une double priorité pour la formation et le renforcement des capacités africaines de maintien de la paix
Les crédits liés à la coopération
militaire (chapitre 41-42) s'élèveront à 703 millions de
francs en 1998 contre 739 millions de francs en 1997, soit une réduction
de 5 %. Cette baisse s'appliquera exclusivement à l'assistance militaire
technique.
Quant aux deux autres volets traditionnels de la coopération militaire,
ils connaissent une évolution contrastée : l'aide en
matériel est maintenue à son niveau de 1997 (soit 180 millions de
francs) tandis que la formation des stagiaires bénéficie d'une
dotation (104,2 millions de francs) en hausse de 13,7 %. Parallèlement,
notre coopération militaire s'efforcera de promouvoir les
capacités africaines de maintien de la paix.
.
Des effectifs réduits de 11 %
La décrue progressive des effectifs d'assistants militaires techniques
se poursuit cette année avec la suppression de 70 postes en 1998 (de 640
à 570 assistants). Elle s'inscrit dans une tendance de fond
commandée par deux facteurs principaux : la contrainte budgétaire
d'une part, la finalité de la coopération d'autre part -les
cadres nationaux devant se substituer à terme aux coopérants
militaires.
Toutefois, il est impératif de maintenir un taux d'encadrement suffisant
pour l'utilisation de l'aide en matériel.
A l'avenir, les missions d'assistance militaire devront justifier leurs
effectifs en formulant, dans l'esprit qui prévaut pour l'assistance
civile, des projets d'action précis sur un échéancier
déterminé.
Répartition des effectifs de coopérants
militaires
Evolution des postes AMT 1996-1997 et prévisions 1998
1996 |
1997 |
Prévisions 1998 |
|
Angola |
2 |
2 |
4 |
Bénin |
24 |
22 |
22 |
Burkina Faso |
14 |
14 |
15 |
Burundi |
24* |
0 |
0 |
Cambodge |
17* |
15 |
15 |
Cameroun |
54 |
50 |
45 |
Cap Vert |
1 |
0 |
0 |
Centrafrique |
63 |
59 |
59 |
Comores |
34 |
28 |
16 |
Congo |
25 |
23 |
7 |
Côte d'Ivoire |
50 |
45 |
40 |
Djibouti |
47 |
41 |
34 |
Gabon |
60 |
51 |
40 |
Guinée |
29 |
27 |
26 |
Guinée équatoriale |
4 |
4 |
4 |
Madagascar |
25 |
24 |
22 |
Malawi |
1 |
1 |
1 |
Mali |
25 |
23 |
21 |
Mauritanie |
52 |
47 |
42 |
Mozambique |
4 |
2 |
0 |
Niger |
50 |
44 |
42 |
Sénégal |
32 |
31 |
31 |
Tchad |
60 |
55 |
55 |
Togo |
34 |
32 |
29 |
TOTAL |
714 |
640 |
570 |
*Burundi : Fermeture de la Mission d'assistance militaire
à l'été 96.
*Cambodge - Pour mémoire, effectifs sur le budget des affaires
étrangères.
.
L'aide en matériels
Après une baisse de 10 % en 1996, les crédits dévolus
à l'aide en matériels avaient été rétablis
en 1997 à leur niveau de 1995 -soit 180 millions de francs. Le projet de
loi de finances initiale pour 1998 préserve cette dotation. En effet,
l'aide directe demeure très sollicitée par les pays africains.
L'aide, même s'il convient de ménager une certaine souplesse dans
son attribution, devrait à l'avenir répondre davantage à
l'application de projets bilatéraux inscrits dans la stratégie
d'une coopération contractuelle.
La mission militaire de coopération portera notamment ses efforts sur le
développement des établissements centralisés de
réparation et de reconstruction du matériel automobile des
armées afin de réhabiliter au moindre coût le plus grand
nombre de véhicules anciens et d'en éviter le remplacement
prématuré et coûteux par des matériels neufs.
.
La formation : la priorité accordée désormais
à un enseignement à vocation régionale dispensé en
Afrique
La formation des cadres officiers et sous-officiers des armées et des
gendarmeries des pays d'Afrique francophone constitue l'axe prioritaire de
notre coopération militaire. Les crédits qui lui sont
destinés progresseront de 13,7 % en 1998 pour s'élever à
104 millions de francs.
Cependant si l'on prend également en compte la part des crédits
de l'assistance technique militaire (art. 10) et de l'aide en matériel
(art. 40) consacrés plus particulièrement à la formation,
l'effort dans ce domaine porte sur un montant de 280 millions de francs, soit
près de 40 % du budget total annuel de la mission.
Une forte inflexion sera imprimée en 1998 en faveur de la formation au
sein d'écoles africaines à vocation régionale.
Le nombre des stagiaires dans les écoles françaises, soit 1 300
personnes en 1997, devrait être maintenu en 1998. De nouvelles
filières spécialisées et adaptées aux besoins des
pays partenaires ont été développées dans les
écoles militaires françaises pour mieux répondre à
la demande de formation (cours supérieur international de Gendarmerie
à Melun, cours supérieur du Commissariat de l'armée de
terre à Montpellier, cours supérieur de l'Ecole de l'air à
Salon de Provence, cours supérieur de l'Ecole navale à
Lanvéoc Poulmic).
La formation dans les écoles françaises s'adresse principalement
aux personnels de haut niveau -officiers ou spécialistes- appelés
à exercer des responsabilités importantes dans leur pays.
L'enseignement dans ce cadre n'apparaît pas toujours adapté aux
réalités des armées africaines, en raison notamment du
retard technologique des matériels employés (pour l'artillerie
par exemple).
C'est pourquoi la coopération militaire entend soutenir le
développement
d'écoles nationales à vocation
régionale
. Aucun pays d'Afrique francophone n'a en effet les moyens
de disposer d'un système complet de formation. Aujourd'hui trois
écoles de ce type fonctionnent à Thiès au
Sénégal (formation initiale des officiers), à Abidjan
(gendarmerie), à Koulikouro au Mali (formation des officiers et des
sous-officiers d'administration). Elles ont accueilli, en 1997, 93 stagiaires
officiers et sous-officiers de 19 nationalités différentes. Par
ailleurs, plusieurs projets pourraient se concrétiser en 1998 en
Mauritanie (Rosso, technique automobile), au Togo (Lomé,
médecine).
La mission militaire de coopération prévoit former près de
300 stagiaires africains supplémentaires dans les écoles
nationales à vocation régionale.
Au cours des cinq prochaines années, le développement des
écoles africaines à vocation régionale se poursuivra afin
d'assurer sur le continent africain la moitié de la formation
aujourd'hui dispensée en France.
.
Le renforcement des capacités africaines de maintien de la
paix
Aujourd'hui, trop de conflits meurtrissent encore l'Afrique et nourrissent
l'afropessimisme, prétexte au désengagement pour les pays
occidentaux. C'est pourquoi la France défend de longue date le concept
de force africaine de paix dont le principe avait été
adopté lors du sommet franco-africain de 1994.
A l'automne 1996, les Etats-Unis avaient repris ce projet sous la forme d'une
" force africaine de réponse aux crises " forte d'une
dizaine
de milliers d'hommes répartis entre des bataillons mis à
disposition par un nombre limité de pays africains et placés
" en attente ". L'emploi de ces formations aurait reposé en
fait principalement sur un financement international tout en conférant
aux Etats-Unis une responsabilité particulière sur le
règlement des conflits dans une région particulièrement
sensible aux intérêts français.
Le dispositif envisagé s'est toutefois heurté aux
réticences de nombreux Etats africains. En mai 1997, les
Américains et les Britanniques se sont dès lors ralliés
à la formule préconisée par la France d'un renforcement
des capacités africaines de maintien de la paix, non par la
création d'une force permanente mais par un effort de formation et
d'équipement.
L'approche française repose sur un système institutionnel ouvert
et multilatéral placé sous l'égide des Nations unies et de
l'Organisation de l'unité africaine (OUA) avec un groupe de soutien
destiné à informer des efforts en cours les Etats africains
intéressés et les donateurs potentiels
7(
*
)
, un
groupe de coordination constitué par les
pays engagés dans des actions concrètes, et enfin, des groupes ad
hoc plus restreints destinés à organiser un exercice
multinational de maintien de la paix, équiper un bataillon ou
créer un centre régional de formation au maintien de la paix.
Cette initiative présente un double mérite : la coordination des
efforts entrepris par les trois grandes puissances, l'élargissement de
la base des donateurs pour des opérations pour lesquelles la France
paraissait bien seule jusqu'à présent.
D'ores et déjà la France a commencé à
réorienter sa coopération militaire pour participer au
renforcement des capacités africaines de maintien de la paix à
l'intérieur du cadre multilatéral dont les contours s'esquissent.
Ainsi, dès 1998, la France consacre 50 millions de francs au maintien de
la paix.
Ces crédits bénéficieront au programme de renforcement des
capacités africaines de maintien de la paix (RECAMP), contribution
française au maintien de la paix dans le cadre de l'accord de mai
dernier.
De même, les Etats-Unis ont consacré 15 millions de dollars
à la formation au maintien de la paix en 1997, de 8 bataillons dans 7
pays africains.
Trois opérations ont été ou seront conduites dans le cadre
du programme RECAMP :
- l'organisation à Dakar du 21 au 23 octobre 1997 d'une
conférence sur le renforcement des capacités africaines de
maintien de la paix suivie en février 1998 de l'exercice franco-africain
" Guidimakha " rassemblant près de 3 000 Africains et 500
Français ;
- la création en Côte d'Ivoire, près de Yamoussoukro d'un
centre de formation au maintien de la paix ;
- le prépositionnement à Dakar dès la fin de cette
année du matériel nécessaire à l'équipement
d'un bataillon africain de maintien de la paix disponible pour tous les pays
participant au programme RECAMP.
B. UNE AIDE PROJET ENCORE INSUFFISANTE
L'aide publique a principalement vocation à financer
des projets de développement. Cependant, au cours des dernières
années, l'accumulation des difficultés budgétaires
rencontrées par nombre d'Etats africains a contraint la France, ainsi
d'ailleurs que les autres bailleurs de fonds, à contribuer de
façon toujours plus importante au rééquilibrage de budgets
défaillants.
Cette orientation s'est trouvée encore renforcée dans le cadre du
plan d'accompagnement de la dévaluation du franc CFA.
En bonne logique, les concours financiers devraient se réduire
progressivement. La tendance est amorcée depuis 1997 et il convient de
s'en réjouir car elle permet de dégager une marge de manoeuvre
-certes encore trop limitée- pour renforcer l'aide projet
destinée à devenir le socle de notre coopération.
1. Les concours financiers
Après une baisse de 21,6 % en 1997, les concours financiers se réduisent de nouveau de 30 % en 1998. Cette baisse traduit sans doute l'achèvement du programme exceptionnel d'accompagnement de la dévaluation du franc CFA et le retour à la croissance des économies de la zone franc. Cependant certains équilibres demeurent fragiles et l'évolution des concours financiers anticipe peut-être à l'excès sur un assainissement durable des finances publiques.
a) Une baisse importante des concours financiers
Les concours financiers recouvrent trois volets distincts :
- l'aide budgétaire d'urgence destinée au financement
d'opérations exceptionnelles,
- les bonifications de prêts d'ajustement structurel accordés par
la Caisse française de développement pour soutenir les programmes
économiques et financiers mis en oeuvre par les pays à revenus
intermédiaires (Côte d'Ivoire, Cameroun, Gabon, Congo) avec
l'approbation du FMI,
- les dons en faveur de l'ajustement structurel accordés par la Caisse
française de développement pour soutenir les plans de
redressement mis en oeuvre par les pays les moins avancés avec
l'approbation du FMI.
Pour 1998, l'aide budgétaire est maintenue au même niveau depuis
1995, soit 90 millions de francs, les crédits de bonifications
d'ajustement structurel s'élèvent à 130 millions de
francs, soit une baisse de 56 % et les dons en faveur de l'ajustement
structurel à 350 millions de francs, soit une baisse de 17,6 %.
Le niveau modeste de consommation des crédits en 1997 justifie sans
doute les ajustements opérés dans le projet de loi de finances
pour 1998. Cependant le retour aux équilibres financiers ne se
présente pas de la même façon dans tous les pays de la zone
franc. En outre il s'avère parfois fragile.
b) Un retour aux équilibres financiers contrastés et fragiles
En Côte d'Ivoire, le solde primaire (recettes et dons
projets moins dépenses hors intérêts de la dette) s'est
progressivement rétabli : d'un déficit de 95 milliards de francs
CFA en 1993 il est passé à un excédent de 210 milliards de
francs CFA en 1997. Quant au solde budgétaire (solde primaire -
intérêts de la dette) le déficit s'est réduit de 354
milliards de francs en 1993 à 105 milliards de francs en 1997. Ce solde
a été financé, pour l'essentiel, par des prêts de
l'extérieur, la Côte d'Ivoire ayant bénéficié
d'allégements de dettes et d'apports en appuis budgétaires et
prêts-projets substantiels notamment de la partie française.
Cependant, il existe des facteurs de fragilité :
- le poids de la dette malgré les restructurations opérées
en 1997 (et notamment l'accord signé avec le Club de Londres permettant
de ramener l'encours de la dette commerciale de 6,8 milliards de dollars
à 2,6 milliards) : la Côte d'Ivoire subira encore une contrainte
forte en raison de la diminution sensible des financements extérieurs
(les appuis budgétaires et les prêts projets passent de 287,7
milliards de francs CFA en 1996 à 229,7 milliards en 1997) ;
- un équilibre encore insuffisant des recettes et dépenses
publiques : l'augmentation des recettes, notamment, nécessiterait un
élargissement de l'assiette fiscale et donc des mesures politiques
difficiles (comme la remise en cause du champ actuel des exonérations).
Au Cameroun, les efforts considérables accomplis depuis trois ans en
matière d'ajustement structurel ont permis à ce pays de
bénéficier de l'appui des bailleurs de fonds (octroi d'un
prêt par le FMI en août 1997 au titre de la facilité
d'ajustement structurel renforcée). Toutefois l'assainissement des
conditions de la gestion des finances publiques n'a pas été
poussé suffisamment loin. Dès lors, les perspectives de recettes
demeurent pour l'heure, en-deçà du niveau espéré
pour assurer le succès des programmes mis en oeuvre par le FMI.
Ces deux exemples le montrent, si la tendance de fond reste positive, les
mauvaises surprises ne peuvent être exclues et justifient une certaine
prudence dans l'appréciation de la baisse des concours financiers.
2. L'aide-projet : une priorité confirmée mais vulnérable
a) Des moyens accrus pour le fonds d'aide et de coopération et les dons-projets
Le chapitre 68-91 comprend principalement la dotation du
Fonds
d'aide et de coopération (art. 10) et les dons-projets relevant de la
Caisse française de développement (art. 40).
Les autorisations de programmes liées aux projets mis en oeuvre sur
décision du Fonds d'aide et de coopération (FAC) progressent de
4,35 % et 1998 (de 1 195 millions de francs à 1 247 millions de francs)
mais les crédits de paiement se réduisent pour leur part de 2 %
(de 1 095 millions de francs à 1 073 millions de francs).
Dans la mesure où aucun transfert de crédits n'est intervenu en
1997 entre la direction générale des relations culturelles,
scientifiques et techniques et le ministère de la coopération
pour prendre en compte l'extension du champ de la coopération
décidée en 1996, le Fonds d'aide et de coopération
intéresse essentiellement les pays d'Afrique francophone -même si
l'Angola et, dans une moindre mesure, le Mozambique et la Namibie
bénéficient en 1997 d'un effort particulier. Les programmes de
coopération intéressant les 34 nouveaux pays
intégrés en 1996 au champ de compétence de la
Coopération reposent sur un financement de la DGRSCT mis en oeuvre par
une cellule commune aux deux ministères instituée en octobre 1996.
DÉCISIONS OUVERTES EN 1997 - RÉPARTITION PAR
PAYS
TOTAL |
% |
|
OPÉRATIONS D'INTÉRÊT GÉNÉRAL |
343 300 000,00 |
52,24 |
OPÉRATIONS INTER-ETATS |
20 000 000,00 |
3,03 |
PROGRAMME DES ETATS |
295 750 000,00 |
44,74 |
ANGOLA |
17 000 000,00 |
2,57 |
ANTIGUA |
0,00 |
0,00 |
BÉNIN |
14 000 000,00 |
2,12 |
BURKINA-FASO |
2 000 000,00 |
0,30 |
BURUNDI |
3 000 000,00 |
0,45 |
CAMBODGE |
0,00 |
0,00 |
CAMEROUN |
32 0000 000,00 |
4,84 |
CAP-VERT |
2 000 000,00 |
0,30 |
CENTRAFRIQUE |
0,00 |
0,00 |
COMORES |
0,00 |
0,00 |
CONGO |
10 250 000,00 |
1,55 |
COTE D'IVOIRE |
41 000 000,00 |
6,20 |
DJIBOUTI |
9 000 000,00 |
1,36 |
DOMINIQUE |
0,00 |
0,00 |
GABON |
3 500 000,00 |
0,53 |
GAMBIE |
0,00 |
0,00 |
GRENADE |
0,00 |
0,00 |
GUINÉE |
0,00 |
0,00 |
GUINÉE-BISSAO |
2 000 000,00 |
0,30 |
GUINÉE EQUATORIALE |
2 000 000,00 |
0,30 |
HAÏTI |
12 000 000,00 |
1,82 |
ILE MAURICE |
2 000 000,00 |
0,30 |
MADAGASCAR |
18 200 000,00 |
2,75 |
MALI |
15 000 000,00 |
2,27 |
MAURITANIE |
18 500 000,00 |
2,80 |
MOZAMBIQUE |
9 000 000,00 |
1,36 |
NAMIBIE |
3 0000 000,00 |
0,45 |
NIGER |
3 000 000,00 |
0,45 |
RWANDA |
20 000 000,00 |
3,03 |
SAO TOMÉ |
1 800 000,00 |
0,27 |
SÉNÉGAL |
27 500 000,00 |
4,16 |
SEYCHELLES |
0,00 |
0,00 |
ST-KITTS ET NEVIS |
0,00 |
0,00 |
ST-VINCENT |
0,00 |
0,00 |
STE-LUCIE |
5 000 000,00 |
0,76 |
TCHAD |
0,00 |
0,00 |
TOGO |
9 000 000,00 |
1,36 |
ZAÏRE |
14 000 000,00 |
2,12 |
TOTAL GÉNÉRAL |
661 050 000,00 |
100,00 |
Les priorités sectorielles du FAC n'ont pas
été marquées par des inflexions notables par rapport
à l'année 1996. L'enseignement, la francophonie, la santé
et le développement social demeurent dans l'ordre décroissant les
trois principaux domaines concernés par l'aide projet.
Ces données toutefois, revêtent de plus en plus un
caractère indicatif. Le FAC constitue en effet l'une des principales
variables d'ajustement
dans la contribution de la coopération aux
régulations budgétaires. Ainsi en 1997 les gels ont porté
sur 594 millions de francs en autorisations de programme (soit 25 % de
l'enveloppe, dont 228 millions annulés par l'arrêté du 9
juillet 1997) et sur 80 millions de francs en crédits de paiement (soit
4 % de la dotation, dont 57 millions annulés). Indolores sur le papier,
ces coupes budgétaires ont hélas des conséquences
très pratiques sur le terrain. Ainsi, cette année, quatre projets
d'intérêt général, pour un montant de 42 millions de
francs, ont été remis en cause, parmi lesquels deux programmes de
lutte contre la mortalité maternelle (10 millions de francs) et contre
le paludisme (12 millions de francs).
La part dévolue à la
gestion déconcentrée
des crédits du FAC s'est développée et représente,
aux termes d'une instruction ministérielle applicable au 1er janvier
1996, au moins 15 % de l'enveloppe programmée chaque année en
faveur de chaque pays.
Dans les pays de la zone franc et les pays pour lesquels la programmation
annuelle des crédits du FAC dépasse 12 millions de francs, les
crédits déconcentrés sont divisés en deux guichets
: le premier, destiné à financer les projets
bénéficiant à l'Etat et à ses démembrements,
le second doté des deux tiers des crédits au minimum,
affecté aux projets présentés par les acteurs de la
société civile et les collectivités territoriales. Ce
second guichet forme le
Fonds social de développement
,
prolongement du Fonds spécial de développement institué
entre 1994 et 1996 pour accompagner la dévaluation du franc CFA.
Dans les autres pays, les crédits déconcentrés sont
regroupés en un guichet unique.
Dans les deux cas, la procédure retenue vise à rapprocher la
prise de décision et la mise en oeuvre des projets FAC au coût
limité (entre 50 00 F et 20 millions de francs) de leur
bénéficiaire sur le terrain. Cette orientation répond
à une préoccupation majeure d'efficacité et de
proximité qui caractérise l'évolution de notre aide.
.
Les dons projets
Financés par la Caisse française de développement sur des
crédits délégués par le secrétariat d'Etat
à la coopération, les dons projets interviennent dans les
domaines traditionnels de la compétence de la Caisse
(développement économique, infrastructures, aménagement
urbain, environnement). L'utilisation de ces crédits ne fait pas l'objet
d'une programmation particulière : en fonction de leur degré de
maturation, les projets seront présentés par la CFD à ses
instances de décision.
Les dons projets connaissent une évolution contrastée : une
baisse de 9 % des autorisations de programme (qui s'élèent
à 1 milliard de francs) et une hausse de 25,7 % des crédits de
paiement (qui représentent 900 millions de francs). Après une
baisse continue des crédits de paiement depuis plusieurs années,
cette dernière mesure permet de procéder à un rattrapage
nécessaire et d'accorder enfin le rythme des décaissements aux
engagements pris par la Caisse.
b) La coopération privée et décentralisée : quelle priorité ?
Depuis plusieurs années déjà l'appui aux
initiatives privées et décentralisées figure au rang des
priorités de notre coopération. En novembre 1997, le
Congrès des Maires de France, à Paris, a retenu la
coopération décentralisée pour thème central de ses
débats. Toutefois, il existe un décalage entre le discours
officiel et la réalité du soutien financier apporté par
l'Etat.
La coopération décentralisée en particulier
bénéficie d'une dotation fort modeste de l'ordre de 12,5 millions
de francs en 1998 (en baisse de 17 % par rapport à 1997) au chapitre
42-24. En outre, cette année le tiers des opérations de
partenariat avec les collectivités locales ont été
annulées ou différées du fait de la régulation
budgétaire
Il est vrai que la coopération décentralisée
bénéficie également d'une dotation au titre du FAC (24
millions de francs en 1997). Les deux imputations budgétaires ne
clarifient certes pas l'effort financier de l'Etat mais elles correspondent
à deux axes distincts : les crédits du chapitre 42-24
bénéficient en priorité aux contrats de plan
Etat-région (le secrétariat d'Etat à la coopération
a noué des engagements avec 9 régions métropolitaines et
d'outre-mer) ; les crédits du FAC s'inscrivent dans le cadre
d'engagements pluriannuels contractés avec les collectivités
locales en dehors du cadre fixé par les contrats de plan.
Les dotations destinées aux organisations non gouvernementales (11,3
millions de francs soit une baisse de 15 %) et aux associations de volontaires
(126 millions de francs soit une légère diminution de 1,6 %) ne
permettent pas davantage d'affirmer une priorité particulière
pour ces nouvelles formes de coopération.
CONCLUSION
L'avenir de notre coopération repose sur quatre
priorités :
- le maintien, au sein du gouvernement, d'un interlocuteur particulier pour nos
partenaires africains, gage de la pérennité d'un lien
privilégié avec le continent ;
- l'encouragement de la présence française (à travers nos
entreprises comme nos coopérants) en Afrique ;
- une mobilisation de l'Europe en faveur de l'aide au développement dans
la perspective de la mise en place à l'échéance 2000 d'un
nouvel accord entre l'Union européenne et les pays ACP
(Afrique-Caraïbes-Pacifique) alors même que, comme l'ont
montré les négociations sur le montant du huitième Fond
européen de développement, beaucoup de nos voisins sont
tentés par un désengagement ;
- la sauvegarde de l'effort consacré par la France à l'aide
publique au développement.
A cet égard, même si le projet de budget de la coopération
prolonge certaines des évolutions intéressantes engagées
les années passées (en faveur du redressement de l'aide-projet en
particulier), il accentue encore la baisse des crédits dévolus
à ce volet majeur de notre rayonnement international.
Il apparaît aujourd'hui urgent d'infléchir cette tendance
extrêmement préoccupante.
Nos amis africains ne comprendraient toutefois pas que nous rejetions les
moyens, même modestes, consacrés à la coopération ;
c'est pourquoi votre rapporteur vous invite à donner un avis favorable
à l'adoption des crédits du secrétariat d'Etat à la
coopération.
EXAMEN EN COMMISSION
La commission des Affaires étrangères, de la
Défense et des Forces armées a examiné le présent
avis au cours de sa réunion du mercredi 19 novembre 1997.
A la suite de l'exposé du rapporteur pour avis, M. Philippe de Gaulle
s'est interrogé sur les liens existant aujourd'hui entre le Gabon,
l'ex-Zaïre et le Congo. Il a par ailleurs rejeté le jugement selon
lequel les événements récents en Afrique centrale devaient
être mis au débit du précédent gouvernement. Il
s'est enfin interrogé sur l'attitude des gouvernements des pays
concernés au regard de la politique d'immigration adoptée par la
France.
Mme Paulette Brisepierre, rapporteur pour avis, a évoqué les
liens existant entre le Congo, le Gabon et l'ex-Zaïre. Elle a
également souligné le rôle important joué par
l'Angola et estimé que la situation dans l'ex-Zaïre apparaissait
plus fluctuante compte tenu des incertitudes liées aux positions
adoptées par M. Laurent-Désiré Kabila. Elle a par ailleurs
rappelé les enjeux économiques majeurs que constituait
l'existence de ressources pétrolières considérables dans
le Golfe de Guinée. Après avoir évoqué le
récent déplacement qu'elle avait effectué au
Congo-Brazzaville, elle a estimé que pour l'heure, ce pays avait besoin
de tous ses ressortissants dans le cadre de la politique de
réconciliation nationale pour procéder à la reconstruction
économique. En outre, Mme Paulette Brisepierre, rapporteur pour avis, a
estimé que ses interlocuteurs congolais, au plus haut niveau, avaient
souhaité un retour rapide d'une présence française
renforcée dans leur pays.
M. Jacques Habert a d'abord relevé que le souhait manifesté par
le Président de la République, lors de son intervention au sommet
de la francophonie à Hanoi, de favoriser l'obtention de visas pour les
jeunes Africains désireux de venir étudier en France, avait
rencontré une chaleureuse approbation des autres pays membres de la
francophonie. Il a également reconnu, avec le rapporteur pour avis, la
mise en place de nouveaux regroupements régionaux en Afrique, où
l'Angola tenait désormais une place importante. Il s'est par ailleurs
inquiété de l'avenir des coopérants du service national.
Enfin, il a regretté que la Caisse française de
développement (CFD) privilégie le soutien aux grandes entreprises
au détriment des PME-PMI.
M. Xavier de Villepin, président, a précisé que le
Sénat comptait l'un de ses membres au sein du conseil de surveillance de
la Caisse française de développement et a estimé que la
concertation entre cet organisme et le secrétariat d'Etat à la
coopération s'organisait dans des conditions globalement satisfaisantes.
Mme Paulette Brisepierre, rapporteur pour avis, a estimé que, sur le
terrain, les missions de coopération et les agences de la CFD avaient su
nouer, en général, de bonnes relations. En outre, elle a
indiqué que la CFD disposait d'agents compétents et
expérimentés mais qu'il convenait de développer l'appui
apporté par cet acteur majeur de la coopération aux PME-PMI
françaises.
Le rapporteur pour avis a par ailleurs précisé, à
l'intention de M. Jacques Habert, que l'indemnisation, souhaitable, de nos
compatriotes qui avaient tout perdu au Congo, pouvait reposer sur des aides
indirectes telles que des dégrèvements d'impôts ou des
exonérations de taxes que le gouvernement français paraissait en
mesure de pouvoir obtenir de son homologue congolais. Mme Paulette Brisepierre,
rapporteur pour avis, a insisté sur la nécessité d'agir
rapidement dans ce pays où la France pouvait retrouver une position
majeure.
M. Jean Clouet s'est interrogé sur le rôle joué par le
Royaume-Uni dans ses anciennes colonies en Afrique. Mme Paulette Brisepierre,
rapporteur pour avis, a rappelé que le Royaume-Uni s'était
largement désengagé du continent africain. Elle a
également souligné que ce pays n'avait pas tissé des liens
aussi forts que ceux noués par la France avec les pays africains
francophones. Elle a cité en exemple la réussite de
l'enseignement français à l'étranger qui avait permis de
créer une relation privilégiée entre les Français
expatriés et les ressortissants des Etats africains. Elle a
souligné que les pays d'Afrique anglophone sollicitaient de plus en plus
l'aide de la France. Enfin, elle a souligné à nouveau la
nécessité d'une présence française forte sur le
continent africain.
M. Xavier de Villepin, président, a ajouté que les relations
tissées entre le Royaume-Uni et l'Afrique apparaissaient davantage
d'ordre économique que culturel et que si les entreprises britanniques
investissaient en Afrique anglophone, elles le faisaient à leurs propres
risques et sans le soutien de leur pays. Il a également estimé
que la France devait rechercher l'appui de nouveaux alliés sur le
continent, tels que l'Afrique du Sud ou l'Ethiopie.
A la suite de ce débat, la commission a donné un avis favorable
à l'adoption des crédits de la coopération inscrits dans
le projet de loi de finances pour 1998.
1
La Mission interafricaine de suivi des
accords de Bangui (La Misab).
2
Il est aujourd'hui avéré que les tirs d'obus sur
Kinshasa étaient provoqués par les forces du Président
Lissouba dans le cadre d'une stratégie d'internationalisation du conflit.
3
" L'éclatement africain " in Ramsès 1998.
4 " Aucun pays ne peut permettre que son territoire soit utilisé par des groupes ou des mouvements armés pour déstabiliser politiquement ou militairement les autres pays voisins ".
5
Evolutions calculées en mai 1997.
6
Le Monde, 28 juin 1997.
7
Les réunions de ce groupe se tiendront alternativement
à New York, au siège des Nations unies et à Addis Abeba au
siège de l'OUA.