III. UN IMPÉRATIF ESSENTIEL : AMÉLIORER ENCORE LE TRANSFERT DE TECHNOLOGIE VERS LES ENTREPRISES INNOVANTES
Rappelons en premier lieu que si la France figure au 4e rang
des pays industrialisés pour son effort en recherche et
développement technologiques, elle n'occupe que le 22e rang quand
on se réfère à sa réussite en termes de mise sur le
marché de produits ou de prise de brevets d'innovation.
Si l'on veut citer des exemples français de ces " poules aux oeufs
d'or " de l'économie que sont les entreprises dont la croissance
annuelle dépasse pendant dix ans les 30 % par an, comme Gemplus ou
Business Object, on est vite limité à quelques
sociétés, alors qu'elles se comptent par centaines dans le seul
Etat de Californie.
Ces entreprises se caractérisent pas un taux de croissance
particulièrement élevé (15 % à 20 % par
an), et des besoins de financement très supérieurs à ceux
des PME traditionnelles.
Il s'avère en outre que désormais l'innovation technologique
intéresse non seulement les entreprises de haute technologie mais
l'ensemble des entreprises. En effet, celles-ci sont confrontées
à un double défi : celui de la mondialisation des marchés
et celui de la réactivité qui s'impose désormais face
à l'accélération de la mise sur le marché de
produits nouveaux. L'appropriation la plus rapide de l'innovation technologique
apparaît alors comme la seule solution susceptible de garantir la
rentabilité financière des entreprises et plus
généralement la compétitivité nationale.
Il importe donc de créer les conditions d'une valorisation satisfaisante
de l'innovation technologique. Votre rapporteur s'y attache avec une constance
qui ne s'est pas démentie depuis plus de dix ans. C'est en effet la
seule manière stable de relancer l'emploi de nos compétences sur
notre territoire.
L'effort doit, en ce domaine, s'orienter dans trois directions :
- coordonner les initiatives en matière de transfert de
technologies ;
- orienter l'épargne vers les entreprises innovantes ;
- favoriser l'attribution des fonds nationaux et européens aux PME
innovantes.
A. UN IMPÉRATIF : COORDONNER LES INITIATIVES EN MATIÈRE DE TRANSFERT DE TECHNOLOGIE
A la différence des grandes entreprises dont la demande
d'innovation répond généralement à un besoin
clairement identifié, celle des PME-PMI reste le plus souvent
imprécise, diffuse et mal formulée. C'est la raison pour laquelle
le transfert de technologie vers les petites entreprises s'effectue le plus
souvent par l'intermédiaire d'une structure d'aide dont la
compétence s'étend du diagnostic à la formulation de la
demande, de la recherche de la technologie au choix d'une ingénierie
financière adaptée.
Il existe en France un potentiel très important capable de fournir
aux PME les partenaires dont elles ont besoin.
Des structures de valorisation nombreuses, dans les laboratoires de la
recherche publique, dans les universités, les écoles
d'ingénieurs, les Instituts universitaires et technologiques, les
lycées techniques et les organismes de recherche se sont mises en place.
D'autres structures se sont spécialisées dans la diffusion de
l'information technique ou dans le transfert de technologie. Celles-ci sont
d'autant plus nombreuses que les efforts accomplis par l'Etat ont
été relayés par les collectivités locales.
Le résultat de cette multiplicité de partenaires s'est traduit
par un foisonnement de l'offre.
L'agence nationale de valorisation de la recherche
(ANVAR) continue
à occuper un rôle central. La politique de l'Agence est
principalement axée sur l'aide aux projets innovants ,
l'accompagnement des créations d'entreprises innovantes, l'augmentation
du potentiel de ressources des PME-PMI par l'aide au recrutement de cadres de
recherche, le soutien des transferts de technologies, le développement
du partenariat européen et régional et la sensibilisation des
jeunes à l'innovation. Son rôle a été
réaffirmé par le décret n° 97-682 du 31 mai 1997
relatif à l'aide à l'innovation. La mission d'évaluation
du dispositif français en faveur de l'innovation industrielle et du
développement technologique confiée à M. Henri
Guillaume sera l'occasion de renforcer ses moyens.
L'ANVAR a une bonne pratique du travail en réseau -qu'il soit
intrarégional (réseau de diffusion technologique, Directions
régionales de l'industrie, de la recherche et de l'environnement,
collectivités locales...) ou international (Eurêka, réseau
européen des agences).
En outre, les délégations larges accordées aux
délégués régionaux lui permettent une
rapidité d'action très rare pour un organisme dépendant de
l'Etat.
Quelques chiffres permettent de prendre la mesure de son action auprès
des petites et moyennes entreprises innovantes.
En ce qui concerne l'aide à l'innovation, sur les 1800 PME-PMI dont
l'effort de recherche-développement a été soutenu en 1996
à hauteur de 1,207 milliard, 55% ont fait appel à l'ANVAR
pour la première fois. Ce taux s'élève à 66% si on
considère celles qui n'avaient pas eu de contacts avec l'Agence depuis
au moins quatre ans. Près de la moitié de ces PME-PMI (45,3%)
sont des entreprises jeunes, de moins d'un an d'existence, en croissance ou
présentant un potentiel de croissance, avec une progression du chiffre
d'affaires d'au moins 25% sur les deux derniers exercices.
En 1996, l'ANVAR a soutenu 86 transferts de technologies pour un montant de 88
millions de francs, auxquels il convient d'ajouter 13 recours à des
conseils destinés à préparer des transferts pour un
montant de 1 million de francs.
L'ANVAR a aidé en 1996 à la création de 398 jeunes
entreprises pour un montant total de 179 millions de francs. Ces PME nouvelles
représentent 19,3% des projets d'innovation, 27,6% des recrutements de
cadres de recherche et de développement et 27% des acquisitions de
technologies aidés par l'ANVAR. Il faut, par ailleurs, souligner que 44%
des projets soutenus concernent les secteurs de haute technologie.
A ses côtés, sont apparus de nombreux partenaires qui, sous des
statuts divers proposent aux PME une offre très
hétérogène
. On peut citer, outre les agences
régionales d'information scientifique et technique (ARIST), les centres
régionaux d'innovation et de transfert de technologie (CRITT). Sous des
formes juridiques variées (le plus souvent il s'agit d'associations type
loi de 1901 ), les CRITT permettent une mise en commun des compétences
d'organismes publics ou privés existant dans les régions en
matière de recherche, de formation et de technologie (Centres de
recherche, Universités, écoles d'ingénieurs, IUT,
lycées techniques). Ils peuvent connaître la demande industrielle
représentée par les chambres de commerce et d'industrie, les
syndicats professionnels et les groupements d'industriels, de financiers. Ils
sont au nombre de 130 environ répartis sur l'ensemble du territoire.
Mais, outre les CRITT, existent bien d'autres organisations . On peut
citer les centres techniques, les centres technologiques qui regroupent des
compétences parfois très ciblées, les
sociétés spécialisées de recherche sur contrat, les
consultants privés ou encore les conseillers technologiques.
L'analyse des différentes structures d'aide au transfert fait
apparaître un
ensemble assez hétérogène.
Cette hétérogénéité soulève plusieurs
difficultés. Les PME-PMI ont souvent du mal à identifier
l'interlocuteur ou le prestataire dont elles ont besoin, la confusion naissant
entre une mission de service public (conseiller l'entreprise et déceler
ses vrais besoins) et une activité de consultant (vendre des services de
conseil, éventuellement pour partie financés par des aides de
l'Etat).
Les pouvoirs publics ont tenté de définir un concept de
Centres de ressources technologiques
(CRT), structure capable de
réaliser des prestations technologiques sur mesure pour des PME dans les
conditions professionnelles du monde industriel. Annoncée dans le cadre
des contrats de plan Etat-régions (1994-1998), leur mise en place est
encore en cours.
La qualification des CRT, précisée par un label national, se
définit à partir de critères qui ont varié, mais
qui pour l'essentiel se résument ainsi :
- le
professionnalisme
dans l'exécution des prestations,
notamment en termes de résultat, de coût, de délai et de
confidentialité ;
- le
partenariat
par la constitution, le cas échéant,
d'une équipe mixte avec une PME sur un projet innovant de
l'entreprise ;
- la
compétence
qui implique souvent l'adossement à un ou
plusieurs laboratoires de recherche.
Aujourd'hui, 21 centres de ressources technologiques,
sélectionnés parmi 43 dossiers examinés, ont
été labellisés par la " commission nationale des
CRT ". Une première sélection avait été
préalablement effectuée par les comités de pilotage en
région (constitués dans chaque région par le
délégué régional à la recherche et à
la technologie, le directeur régional de l'industrie, de la recherche et
de l'environnement, le délégué de l'ANVAR et le
représentant du Conseil régional) parmi les 120 demandes
recensées dans les 14 régions qui avaient
déposé des dossiers.
Une augmentation des moyens des CRT labellisés est prévue pour
couvrir le surcoût occasionné par l'activité de prestataire
technologique des PME (20 millions de francs en 1997 de
délégation de crédits en région).
Une évaluation des CRT et de leur labellisation est en cours avec les
divers partenaires (CRT, PME, comité de pilotage en région,
évaluateurs et ministères de tutelle).
Elle portera notamment sur les conséquences économiques de
l'action des CRT dans les entreprises clientes en termes d'emplois, de chiffre
d'affaires, d'exportation et de création d'entreprises.
Une autre initiative intéressante peut être citée . Il
s'agit de la "
route des hautes technologies
",
organisme
chargé de coordonner et d'impulser l'ensemble du dispositif de transfert
qui a été lancée en région
Provence-Alpes-Côte d'Azur. Elle a pour mission d'améliorer la
cohérence et la lisibilité du dispositif d'aide au transfert, de
mener des actions ciblées ou transversales de nature à rendre
plus efficaces et plus proches des préoccupations des entreprises les
structures de transfert de technologie, de faciliter la création de
clubs d'entreprises analogues, de diffuser les expériences
étrangères, de mettre en réseau les compétences, de
faciliter l'implantation de structures de financement.