B. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS QUI PROFITE ESSENTIELLEMENT AUX DÉPENSES D'INVESTISSEMENT
L'augmentation des crédits du ministère de la
culture pour 1998 recouvre des
évolutions contrastées.
Les moyens de fonctionnement du ministère ainsi que les dépenses
d'intervention connaissent un taux de progression de 2,5 % soit une
croissance inférieure à celle du budget du ministère. Les
subventions de fonctionnement aux établissements publics, quant à
elles, progressent à un rythme comparable : 3,77 %. En
revanche, les dépenses en capital, qui sont les principales
bénéficiaires de l'effort budgétaire accompli en faveur de
la culture, augmentent de 20 %, cette progression profitant
essentiellement aux dépenses de restauration et de conservation du
patrimoine monumental (+ 39,3 %).
1. Un renforcement des capacités d'action du ministère
a) Les moyens du ministère
Les crédits du titre III (moyens des services)
augmentent de 2,6% en 1998. Il s'élèvent à
7,106 milliards de francs.
Les dépenses de personnel
: un effort est accompli en 1998
en faveur de l'emploi. Les dotations des chapitres finançant les
rémunérations et les charges sociales liées à
l'activité des personnels
progressent de 2,2%,
s'établissant ainsi à 3.032,09 millions de francs.
Le total
des emplois publics relevant du ministère augmentera de 61
unités,
soit 27 créations pour les emplois
budgétaires de l'Etat auxquelles s'ajouteront 34 créations nettes
sur les budgets des établissements publics.
Les 27 créations d'emplois permettent de solder le plan de stabilisation
des vacataires de surveillance, le relais étant pris par les mesures de
résorption de l'emploi précaire arrêtées l'an
dernier dans le cadre de la loi du 16 décembre 1996.
Les créations d'emplois et les mesures de redéploiement
permettront un renforcement des services patrimoniaux des directions
régionales de l'action culturelle (15 emplois) et des services de
l'architecture (17 emplois).
En ce qui concerne les établissements publics, il faut noter que
l'effectif minimum nécessaire à l'ouverture de la
Bibliothèque nationale de France (BNF) sur le site Tolbiac en 1998 sera
assuré. En effet, après l'ouverture en novembre 1996 du
haut-de-jardin qui regroupe les salles de lecture et les espaces d'exposition
et de conférences destinés au grand public, les salles de lecture
consacrées aux chercheurs (rez-de-jardin) seront inaugurées
l'année prochaine, à une date qui reste à
déterminer.
Les autres
dépenses de fonctionnement
s'élèveront à 599 millions de francs (soit
+ 3,25 %)
et bénéficient de mesures nouvelles d'un
montant de 21,7 millions de francs. Il s'agit là d'une progression
modérée pour des chapitres qui sont régulièrement
frappés par des mesures d'annulation et, compte tenu du fait que sur les
moyens nouveaux, 8 millions de francs permettront le relogement de la
direction régionale des affaires culturelles d'Ile-de-France, rendu
nécessaire par le chantier de réhabilitation du Grand-Palais.
Les subventions de fonctionnement aux établissements publics
augmentent, à structure constante, de 3,77 %
et
s'établissent pour 1998 à 3,397 milliards de francs.
Cet accroissement profitera aux écoles d'architecture qui
bénéficieront d'une mesure nouvelle de 19 millions de
francs. Le montant minimal de crédits nécessaires à
l'ouverture du site Tolbiac de la Bibliothèque nationale de France sera
assuré, ce qui correspond à une subvention de fonctionnement de
600,286 millions de francs pour 1998.
Un effort particulier sera accompli en direction des établissements
d'art lyrique, chorégraphique et dramatique dont le ministère de
la culture assure la gestion, qui bénéficient d'une mesure
nouvelle de 25 millions de francs dont l'essentiel (17 millions de
francs) sera consacré à l'actualisation de la subvention de
fonctionnement et de la dotation à la caisse de retraite de
l'Opéra national de Paris.
L'établissement public du Grand Louvre bénéficiera d'une
augmentation de sa dotation de 4,3 millions de francs correspondant aux
dépenses de fonctionnement résultant de l'ouverture au public de
nouveaux espaces d'exposition permanente.
Il importe également de souligner la création d'un nouvel
établissement public, l'agence d'ingénierie culturelle, dont la
subvention de fonctionnement s'élève à 28,75 millions
de francs. Cet établissement résulte d'une restructuration des
différents pôles de maîtrise d'ouvrage culturelle du
ministère. Cette opération se traduit par une économie en
emplois et en crédits de 31,5 millions de francs résultant
de la suppression de la subvention de fonctionnement et d'emplois non
budgétaires de l'établissement public du Grand Louvre
(- 37,717 millions de francs) et de l'Agence foncière et
technique de la région parisienne (-22,493 millions de francs).
b) Les crédits d'intervention
Ces crédits traduisent traditionnellement les choix
opérés par le ministre pour l'orientation de la politique
culturelle.
Ils s'élèvent pour 1998 à
4,59 milliards de francs soit une progression à structure constante
de 2 ,55 % par rapport à 1997
.
Cette progression résulte, d'une part, de l'inscription de
13,13 millions de francs supplémentaires au titre de
l'actualisation de la dotation générale de
décentralisation des bibliothèques, d'autre part, d'une
revalorisation, à hauteur de 29 millions de francs, des
crédits de commandes artistiques qui bénéficie notamment
au Fonds du patrimoine (+ 13,5 millions de francs) et, enfin, de
l'augmentation des dépenses d'intervention culturelle.
Les dépenses d'intervention culturelle s'élèvent pour
1998 à 3,42 milliards de francs soit une progression de 4 %
par rapport à la loi de finances pour 1997 et de 7,3 % si l'on
tient compte du montant régulé des crédits disponibles
pour 1997
. Les mesures nouvelles s'élèvent à
138 millions de francs et devraient s'accompagner d'un important effort de
redéploiement notamment de la part des directions du ministère en
charge du spectacle vivant.
Il est à noter que
les interventions culturelles
déconcentrées
s'élèvent à 1 ,773
milliards de francs et
représentent 52% du montant total des
dépenses d'intervention.
Cette répartition résulte de
la poursuite de la déconcentration et consacre la priorité
donnée à l'action en région.
Mme Catherine Trautmann a indiqué que les capacités
d'intervention du ministère seront réorientées
"
afin de favoriser les créateurs les plus dynamiques et de
participer pleinement à la démocratisation de l'accès
à la culture, à l'éducation artistique, au soutien
à l'emploi et à l'aménagement du territoire
".
Afin d'atteindre ces objectifs, elle a indiqué que l'effort
budgétaire accompli en 1998 au profit des interventions culturelles
s'accompagnerait d'une clarification des relations entre l'Etat et ses
partenaires. Celle-ci reposera, d'une part, sur une formalisation des
obligations imposées aux réseaux culturels subventionnés
dans le cadre d'une " charte du service public " et,
d'autre part,
sur un développement de la contractualisation avec les
collectivités locales notamment grâce à un fonds de
contractualisation.
Cette démarche annoncée par la ministre, si elle est
inspirée par un souci louable de clarification du cadre des
interventions culturelles de l'Etat ne permet guère d'identifier les
priorités qui seront retenues en la matière, compte tenu du
manque de lisibilité des documents budgétaires.
Votre rapporteur souligne que la présentation des crédits
d'intervention du titre IV a été, cette année,
à nouveau modifiée afin de distinguer la part des interventions
culturelles d'intérêt national (chapitre 43-20) et celle des
interventions déconcentrées (chapitre 43-30).
Cette
nomenclature si elle permet aux services du ministère une plus grande
souplesse de gestion, complique l'exercice du contrôle parlementaire
.
En effet, les modifications qui lui ont été apportées
depuis plusieurs années révèlent une tendance à la
globalisation de la présentation des crédits.
Elles ont en effet conduit à confondre dans de vastes entités des
actions autrefois financées sur des lignes distinctes permettant
d'identifier les crédits qui y étaient affectés. Ainsi,
par exemple, la fusion sur une seule ligne dite " de développement
culturel ", déclinée en crédits centraux et
crédits déconcentrés, des mesures destinées aux
écoles d'architecture, aux actions en direction des publics scolaires et
aux enseignements spécialisés rend difficile la lecture du
" bleu ".
C'est donc essentiellement sur le fondement des indications fournies par le
ministère que peut être appréciée l'évolution
des crédits d'intervention.
Le tableau ci-après rend compte de la progression des crédits
d'intervention du titre IV pour chaque direction ou
délégation du ministère :
TITRE IV
CRÉDITS D'INTERVENTION DU
MINISTÈRE DE LA CULTURE
(développement culturel et
enseignements)
Présentation par directions et
délégations, hors audiovisuel
(en millions de francs)
LFI 97 (1) |
PLF 98 |
Variation
|
|
Archives | 13,6 | 15,1 | + 11 |
Livre et lecture (2) | 1 037 | 1 051 | + 1 |
Patrimoine | 136,2 | 142,9 | + 5 |
Musées | 219,5 | 252 | + 15 |
Arts plastiques | 310,8 | 315,3 | + 1 |
Architecture | 72,7 | 80,7 | + 11 |
Musique et danse | 981,1 | 999,9 | + 2 |
Théâtre et spectacles | 978,7 | 1 000,7 | + 2 |
Développement et formations | 391,2 | 440,9 | + 13 |
Langue française | 7 | 7,5 | + 7 |
Actions internationales | 44,2 | 45,6 | + 3 |
Cinéma (CNC) | 283,6 | 209,6 | - 12 |
Centre national d'art Georges Pompidou (3) | 23,7 | 27,7 | + 17 |
Total Titre IV | 4 454,3 | 4 589,9 | + 3 |
(1)
Hors réserve parlementaire et
crédits audiovisuels
(2)
Y compris dotation générale de
décentralisation pour les bibliothèques
(3)
Commandes d'oeuvres pour le musée d'art
moderne
Les principales actions retenues au titre des mesures nouvelles qui
s'élèvent globalement à 180 millions de francs sont
les suivantes :
- actions dans le domaine de l'écrit (livres, archives) : 3
MF ;
- architecture et patrimoine : 17 MF ;
- musées et arts plastiques : 22 MF ;
- spectacle vivant et cinéma : 40 MF ;
- développement culturel et enseignement artistique en milieu
scolaire : 55 MF dont 23 millions de francs pour la
création d'un fonds spécial de contractualisation.
2. Un accroissement significatif des dépenses en capital
Les dépenses en capital bénéficient d'un
accroissement sensible qui profite essentiellement aux crédits
affectés au patrimoine monumental.
Les autorisations de programme augmentent de 614,43 millions de francs par
rapport à la loi de finances pour 1997 soit une progression de 20% et
les crédits de paiement de 263,13 millions de francs, soit une
progression de 7,4 %.
a) Une relance de la politique du patrimoine
En 1998, les crédits de paiement et les autorisations
de programme consacrées à l'exécution de la loi de
programme n° 93-1437 du 31 décembre 1993 sur le
patrimoine monumental s'élèveront respectivement à
1,319 milliard de francs (soit + 9,3 % par rapport à la
loi de finances initiale pour 1997) et à 1,616 milliard de francs
(soit + 39 % par rapport à la loi de finances pour 1997).
Les autorisations de programme inscrites dans le projet de loi de finances
pour 1998 représentent donc 96 % de la dotation actualisée
prévue par la loi de programme, soit 1,677 milliard de francs.
Ce retour à la loi de programme est particulièrement bienvenu. En
effet, en 1996, les crédits inscrits dans la loi de finances pour 1996
avaient été gelés en cours d'exercice, puis annulés
en fin d'année à hauteur de 265 millions de francs. Pour
1997, compte tenu de l'étalement sur une année
supplémentaire des engagements pluriannuels de l'Etat
décidé par la loi de finances pour 1997, les crédits
avaient été réduits de 34,6 % et les autorisations de
programme pour 1997 ne représentaient que 61,6 % du montant
fixé par la loi de programme.
Face aux conséquences qu'une telle diminution risquait d'avoir sur
l'activité des entreprises spécialisées dans la
restauration des monuments historiques et sur l'état sanitaire du parc
immobilier, le Gouvernement, répondant en cela aux souhaits du
Sénat, s'était engagé à maintenir constant le
niveau d'engagement des crédits, afin de permettre aux entreprises de
conserver une activité proche de celle constatée dans les
premières années d'exécution de la loi de programme.
En 1997, une gestion plus dynamique des crédits consacrés au
patrimoine monumental a donc été conduite.
L'effort de mobilisation des autorisations de programmes votées, qu'il
s'agisse d'autorisations de programme affectées à des
opérations dont le démarrage était retardé ou de
reliquats relatifs à des opérations terminées mais non
clôturées, a été accentué. Les délais
afférents aux phases de la procédure qui précèdent
l'engagement, notamment ceux concernant les subdélégations des
autorisations de programme aux directeurs régionaux des affaires
culturelles et la conclusion des conventions avec les propriétaires de
monuments, ont été réduits. L'immobilisation des
autorisations de programme a été évitée dès
qu'il pouvait être procédé à des affectations
successives de crédits. Enfin, la possibilité ouverte en 1997 de
déléguer 80 % des autorisations de programme en début
de gestion a également contribué à l'amélioration
du taux d'engagement.
Les données dont disposent votre rapporteur ne concernent que le premier
semestre de l'année 1997. Elles font apparaître au 5 juin que par
rapport aux taux constatés à la même date en 1996 :
- le montant des autorisations de programme engagées est
supérieur de 80 % ;
- et le montant des crédits mandatés est en augmentation de
17 % ;
Dans ces conditions, il est donc possible d'espérer que le montant
des crédits engagés en 1997 sera voisin de celui constaté
en 1996 voire même supérieur.
Cette gestion s'est traduite mécaniquement par une diminution du
" stock " des autorisations disponibles à la fin de
l'année 1997, ce qui, compte tenu de la majoration des crédits
pour 1998, n'entraînera pas au premier semestre 1998 un ralentissement de
l'activité dans le secteur de la restauration des monuments historiques.
L'effort de gestion accompli en 1997 devrait être poursuivi en 1998. Les
instructions données aux préfets de région ont d'ores et
déjà été confirmées et il est prévu
que les crédits commenceront à être engagés avant
que ne soient parvenus aux services les circulaires d'emplois des
crédits déconcentrés.
Le relèvement des autorisations de programme est proportionnellement
plus élevé pour les subventions aux propriétaires publics
ou privés (+ 64 %) que pour les investissements
exécutés directement par l'Etat (+ 28,7 %).
L'essentiel des crédits de restauration sera consacré à la
poursuite d'opérations en province, que l'étalement de la loi de
programme avait contraint à différer en dépit de leur
urgence. Il s'agit en particulier des opérations de restauration des
cathédrales de Sens, de Bourges, de Rouen et de Lyon, des abbayes de
Cluny et du Thoronet ainsi que des châteaux d'Oiron et de Gaillon.
Le retour à des dotations comparables à celles que
prévoyait la loi de programme sur le patrimoine monumental permettra
également de lancer de nouvelles opérations concentrées
essentiellement sur la conservation des grands édifices cultuels
(cathédrales de Chartres et de Clermont-Ferrand, Notre-Dame de Paris,
basilique de Vézelay et abbaye de l'Ardenne).
Enfin, une attention particulière sera prêtée à la
restauration d'édifices civils dont l'état exige des
interventions rapides et importantes, en particulier les arènes d'Arles,
les halles de Reims et le Koifhus de Colmar. En ce qui concerne les monuments
parisiens, il faut noter qu'une ouverture de crédits de
150 millions de francs d'autorisations de programme est destinée
à couvrir la première tranche des travaux de restauration du
Grand Palais qui porte sur les fondations, les charpentes métalliques et
les toitures de la nef.
b) Une politique d'investissement dynamique
Les autorisations de programme -hors patrimoine monumental-
augmentent de 4 %.
Les crédits d'investissement permettront notamment
de remettre en
état le patrimoine bâti de grandes institutions culturelles
.
Le centre Georges Pompidou entame un programme de réaménagement
de ses espaces intérieurs, rendu nécessaire pour des raisons
tenant à la fois à l'usure du bâtiment,
fréquenté par plus de 150 millions de visiteurs depuis son
ouverture en 1977, et à des choix d'amélioration des fonctions
réparties dans le centre. Le coût des travaux est estimé
à un montant de 440 millions de francs (valeur 1994).
L'année 1998 sera la première année pleine des travaux de
réaménagement intérieur du centre. Le centre national
d'art et de culture Georges Pompidou bénéficiera pour 1998 d'une
subvention d'équipement qui s'élèvera à
157 millions de francs en autorisations de programme et à
125,95 millions de francs en crédits de paiement.
La deuxième tranche des travaux conduits par l'établissement
public du Grand Louvre, qui a débuté en 1990, s'achèvera
en 1999. Elle concerne à la fois le réaménagement des
espaces intérieurs et la rénovation des abords du Palais. A son
terme, le Palais du Louvre se trouvera entièrement consacré
à la conservation des oeuvres d'art. Pour l'année 1998, la
dotation budgétaire, qui sera désormais affectée à
l'agence d'ingénierie culturelle, s'élève à
220,6 millions de francs d'autorisations de programme (+ 40 %)
et à 246,95 millions de francs de crédits de paiement
(-8,62 %).
Un plan de maintenance immobilière de la Bibliothèque nationale
de France sera engagé en 1998 pour un montant de 30 millions de
francs.
Il faut souligner, par ailleurs, que 187,7 millions de francs seront
consacrés à des opérations de rénovation de
bâtiments affectés au ministère de la culture et de la
communication, ce qui permettra de mettre en oeuvre le projet de regroupement
immobilier des services centraux.
Des moyens seront également consacrés à de grands
projets en région
. Le centre de la mémoire contemporaine de
Reims bénéficie notamment de 144 millions de francs
d'autorisations de programme, inclus dans le budget de l'agence
d'ingénierie culturelle.
Par ailleurs, les opérations cofinancées avec les
collectivités territoriales (rénovation de théâtres,
établissements d'enseignement spécialisé,
équipements de diffusion culturelle, ...) connaissent une augmentation
significative de 45 millions de francs soit une progression de 18 %.