SECONDE PARTIE :
OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR
Première observation : l'augmentation de 6% des
crédits de l'aménagement du territoire doit être
relativisée.
L'augmentation du montant des crédits de l'aménagement du
territoire provient de la hausse de 106% de la dotation des crédits de
paiement alloués à la prime d'aménagement du territoire.
Ces crédits avaient fait l'objet d'une dotation exceptionnellement basse
en 1997 afin de permettre la consommation des crédits reportés
accumulés année après année. La dotation pour 1998
correspond à un retour au niveau de 1996.
L'engagement, pris par le précédent gouvernement, de favoriser
la consommation des crédits reportés ayant été
respecté et couronné de succès, le nouveau gouvernement
s'est trouvé dans l'obligation d'augmenter la dotation de la PAT afin de
pouvoir maintenir constant le volume des versements.
Cette opération lui permet d'afficher un budget en augmentation
alors que, d'une part, les sommes dépensées au titre de la PAT
vont en réalité rester constantes et que, d'autre part, les
crédits de la DATAR et du fonds national d'aménagement et de
développement du territoire sont en baisse.
Deuxième observation : l'assainissement de la gestion
de la PAT ne remet pas en cause la nécessité de réformer
ses critères d'éligibilité.
La PAT est une subvention d'équipement, gérée au niveau
national et versée, pour des projets créateurs d'emplois,
à des entreprises qui réalisent des opérations concernant
des activités industrielles et tertiaires dans des zones prioritaires
définies par décret en Conseil d'Etat.
La géographie d'application de la PAT a fait l'objet d'une
réforme en 1995 à la suite, d'une part, d'observations de la
Commission européenne et, d'autre part, de la volonté de cibler
cette aide sur les zones prioritaires d'aménagement du territoire. Ces
zones sont des zones rurales ou faiblement industrialisées aux
caractéristiques différentes des zones pour lesquelles la PAT
avait été initialement imaginée. Or,
la réforme
de la géographie de la PAT n'a pas été accompagnée
d'une réforme de ses critères d'éligibilité
.
La principale condition à remplir pour être éligible
à la prime d'aménagement du territoire est la
création
de 20 emplois permanents en trois ans
. Pour les activités tertiaires
hautement qualifiées ou les activités de recherche, ce seuil peut
être ramené à 10 emplois.
En milieu rural, peu d'entreprises ont les moyens de se lancer dans des
opérations d'une telle ampleur, si bien que
le bénéfice
de la PAT se trouve concentré sur quelques projets de grande taille
,
souvent localisés dans des villes et donc moins favorables à
l'aménagement du territoire.
La réforme des conditions d'éligibilité à la PAT
correspond donc à une ardente nécessité, d'autant plus
que, selon les informations obtenues par votre rapporteur auprès du
DATAR,
la plupart des subventions sont accordées par le CIALA en
dérogation aux critères existants
.
Troisième observation : certaines dispositions de la loi
d'orientation du 4 février 1995 n'ont toujours pas été
mises en oeuvre.
Le gouvernement n'a pas repris à son compte l'avant-projet de
schéma national d'aménagement du territoire
présenté à Auch en avril 1997. Pour autant, il ne remet
pas en cause le principe d'un schéma national tel que contenu dans
l'article 2 de la loi d'orientation du 4 février 1995.
Le gouvernement a annoncé que le schéma ferait l'objet d'un
nouvel examen dans le cadre de la révision de la loi d'orientation.
Le
fonds national de développement des entreprises
ne fait
toujours l'objet d'aucune dotation. Prévu par l'article 43 de la loi
d'orientation, il permettrait de distribuer des aides aux entreprises
désireuses d'investir dans les régions
défavorisées
6(
*
)
et qui ne rencontrent pas le soutien des banques, peu intéressées
par la faible dimension de leurs projets.
Le FNDE a fait l'objet de l'ouverture d'un compte auprès de la banque
de développement des petites et moyennes entreprises. Il a
été décidé qu'il serait doté d'un milliard
de francs sur deux ans à partir de recettes de privatisation.
Votre rapporteur condamne les entraves à la volonté du
législateur et souhaite que l'ouverture de capital de France
Télécom constitue l'occasion d'un premier versement significatif,
qui permettrait à ce fonds de devenir opérationnel dès
1998.
La gestion des autres fonds prévus par la loi n'est pas optimale :
Le
fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables
(FITTVN)
ne fait pas l'objet de la gestion interministérielle
envisagée au moment du vote de la loi. Il n'a pas permis d'augmenter
significativement l'effort en faveur des transports car il est utilisé
par le ministère de l'équipement, des transports et du logement
pour financer des programmes qui figuraient auparavant au budget de l'Etat. En
outre, votre rapporteur s'inquiète du fait que, pour la première
fois cette année, une fraction des ressources du FITTVN va être
consacrée à des dépenses d'entretien du réseau
routier, détournant ainsi complètement le fonds de sa vocation
initiale de financement d'infrastructures nouvelles.
Le
fonds de gestion de l'espace rural
(FGER)
fait l'objet d'un
volume important de reports et d'annulations de crédits depuis sa mise
en place en 1995. A cet égard, l'année 1997 a été
exemplaire puisque 145 des 150 millions de francs votés en loi de
finances initiale ont fait l'objet d'une annulation au mois de juillet 1997.
Votre rapporteur souhaite que les subventions du FGER puissent enfin être
distribuées.
Les crédits relatifs au FGER
(en millions de francs)
Le
maintien des services publics en milieux ruraux
faisait l'objet des articles 28 et 29 de la loi d'orientation. Ces dispositions
ne sont pas appliquées, ce qui explique le maintien du moratoire sur la
fermeture des services publics.
La loi subordonne la levée du moratoire à la conclusion par les
établissements de service public de contrats de service public ou de
contrat de plan d'entreprise. A ce jour, seules EDF et GDF ont signé de
tels contrats avec l'Etat.
La
politique des pays va être poursuivie par le gouvernement
.
250 territoires ont déjà opté pour ce mode d'organisation.
La notion de pays sera au centre de la réforme de la loi d'orientation,
sans que l'on sache vraiment ce qu'elle recouvre dans l'esprit du gouvernement
actuel.
Quatrième observation : les acquis de la loi de 1995 doivent
être préservés.
La loi d'orientation avait mis l'accent sur la nécessité de
mesures spécifiques en faveur du monde rural
. Ainsi, les zones de
revitalisation rurales ont été créées et,
conformément à l'article 61 de la loi, le gouvernement
précédent procédait à l'élaboration d'un
" Plan pour l'avenir du monde rural ".
Votre rapporteur regrette que le nouveau gouvernement ne reprenne pas ce plan
à son compte, et n'envisage pas de prendre des mesures en faveur du
monde rural dans la future loi d'orientation. Celles-ci sont renvoyées
à la future loi d'orientation agricole.
Il note que le ministre à identifié comme l'une de ses trois
priorités le "
soutien aux financements d'investissements de
taille modeste, susceptibles de fixer des activités durables dans des
zones d'aménagement du territoire peu industrialisées et
connaissant des difficultés démographiques
", mais sans
préciser de quelle manière.
Selon les informations recueillies par votre rapporteur auprès de la
DATAR, le gouvernement envisage de revenir sur l'objectif,
véritable
charte du désenclavement
, contenu dans la loi de 1995 selon lequel
"
en 2015, aucune partie du territoire, en métropole
(continent), ne sera située à plus de cinquante kilomètres
ou quarante-cinq minutes d'automobile, soit d'une autoroute ou d'une route
express à deux fois deux voies en continuité sur le réseau
national, soit d'une gare desservie par le réseau ferroviaire à
grande vitesse
. "
Cette disposition constitue une sécurité pour les zones mal
desservies et une assurance pour les entreprises hésitantes à
venir s'y installer. Votre rapporteur déplore son abandon annoncé.
S'agissant du
zonage
, le gouvernement insiste sur le caractère
nécessairement transitoire de telles mesures et, en réponse
à une question écrite de notre collègue M. Michel Moreigne
parue au Journal officiel du 16 octobre 1997, a annoncé son intention de
"
remettre à plat l'ensemble des mesures de discrimination
positive et des zonages existants avant la mise en place des nouveaux contrats
de plan et quand les modalités de la réforme des fonds
structurels européens auront été
arrêtées
".
Votre rapporteur approuve les efforts qui pourraient être entrepris pour
circonscrire le zonage aux territoires les plus en difficulté et pour
améliorer la lisibilité des dispositifs.
Néanmoins, il estime que
l'amélioration de l'environnement
des entreprises commence par la stabilité juridique
. Il
déplore le trouble que des déclarations envisageant un possible
retour sur les mesures de discrimination positive peut susciter chez les
entreprises qui prennent des risques en effectuant des investissements dont la
rentabilité ne sera effective qu'après plusieurs années.
Il adhère à l'orientation de l'observation de la Commission des
finances de l'Assemblée nationale, adoptée à
l'unanimité, visant à accorder, en priorité, les
subventions du FNADT aux entreprises souhaitant réaliser un projet dans
une zone de revitalisation rurale.
Cinquième observation : le réseau de la DATAR à
l'étranger est un atout à préserver.
Votre rapporteur tient à souligner la qualité des services
rendus à la France, en termes d'emplois créés notamment,
par les bureaux de la DATAR à l'étranger. Il se félicite
qu'aucune suppression de poste ne les affecte cette année, mais
déplore que la réduction des moyens de fonctionnement de la DATAR
porte une fois encore sur les bureaux de l'étranger.
Votre rapporteur tient également à souligner la
différence de moyens entre deux services à l'activité
complémentaire : la DATAR à l'étranger, qui compte 70
agents, et les postes d'expansion économique (PEE), dont l'effectif
s'élève à environ 2000 agents.
Il s'interroge sur la
manière dont les bureaux de la DATAR à l'étranger vont,
dans les années qui viennent, compenser la suppression des
coopérants du service national, dont le concours était
précieux.