ANNEXE III
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le
mardi 21 octobre 1997
sous la
Présidence de M. Christian Poncelet, président, puis de
M. Roland du Luart, vice-président
, la commission a
procédé à l'
audition de M. Jean-Pierre Masseret,
secrétaire d'Etat aux anciens combattants.
M. Jean-Pierre Masseret
a, tout d'abord,
présenté les
grandes masses du budget des anciens combattants. Il a rappelé que les
crédits proposés pour 1998 s'élevaient à 23,9
milliards de francs. Concernant le titre III, doté de 1,2 milliard de
francs, il a précisé que 864 millions étaient
destinés aux frais de personnel et que 88 emplois étaient
supprimés sans que le fonctionnement des services
déconcentrés soit remis en cause. Il a également
évoqué les 265 millions de francs de subvention de fonctionnement
à l'Office national des anciens combattants (ONAC) et à
l'Institution nationale des invalides (INI). A propos de la répartition
des 24,7 milliards de francs du titre IV, il a insisté sur le poids
prépondérant des crédits affectés aux pensions
d'invalidité (1,5 milliard de francs).
Par ailleurs,
M. Jean-Pierre Masseret
a tenu à replacer le
budget des anciens combattants dans son contexte à la fois structurel,
en insistant sur la diminution inéluctable et inexorable du nombre des
ressortissants, et conjoncturel, en rappelant les priorités du
Gouvernement en matière d'emploi des jeunes et de solidarité.
Toutefois, il a observé que 41 % des économies liées
à l'évolution démographique, soit 330 millions de
francs, étaient réutilisées en faveur des ressortissants
vivants.
Ensuite,
M. Jean-Pierre Masseret
a énuméré les
trois mesures nouvelles du budget des anciens combattants :
l'indemnisation des étrangers déportés depuis la France
entre 1940 et 1945 et ayant acquis depuis lors la nationalité
française ; la prise en compte pour l'attribution de l'allocation
différentielle du Fonds de solidarité des revenus du foyer
au-delà d'un plafond de 25.000 francs ; l'alignement sur le
droit commun des dates de remboursement par l'Etat de la majoration des rentes
constituées par les anciens combattants.
Il s'est félicité du vote par l'Assemblée nationale de 40
millions de francs supplémentaires pour le budget des anciens
combattants, lors de la discussion de l'article d'équilibre, et a
présenté les mesures complémentaires que ces
crédits permettront de financer. Il a alors annoncé la
transformation du système de revalorisation de la rente mutualiste en
prenant en compte non plus le plafond majorable, mais le point d'indice.
Après avoir rappelé que le plafond de cette rente correspondait
aujourd'hui à 91 points, il a souhaité le relever dès
cette année à 95 points pour le faire ensuite évoluer
en fonction du rapport constant. Le coût de cette mesure est
évalué à 5 millions de francs. Il a, en outre,
déclaré que les crédits en faveur de la politique de la
mémoire seraient majorés de 7 millions de francs, tout en
insistant sur le fait que les cérémonies organisées
à l'occasion du quatre-vingtième anniversaire de l'armistice de
1918 seraient financées par des crédits interministériels.
A cet égard, il a manifesté son désir de rassembler sur
les lieux de bataille des représentants de tous les pays ayant combattu
aux côtés de la France. Par ailleurs, il a proposé
d'augmenter de 3 millions de francs les crédits affectés aux
dépenses sociales de l'ONAC. Enfin, afin d'élargir les conditions
d'attribution de la carte d'ancien combattant au bénéfice des
anciens combattants d'Afrique du Nord, il a annoncé la création
d'une nouvelle procédure dans laquelle la condition, pour
prétendre à la carte d'ancien combattant, d'avoir
participé à une opération de feu pourrait être
remplacée par une présence de 18 mois en Algérie. Il
a estimé que la prise en compte de ce nouveau critère qui devrait
permettre l'attribution de 80.000 cartes supplémentaires,
répondait ainsi au souci du Gouvernement d'accorder la reconnaissance
à ceux qui avaient répondu à l'appel de la Nation. Il a
précisé que 25 millions de francs seraient affectés
dès 1998 au financement de cette mesure.
Par ailleurs,
M. Jean-Pierre Masseret
s'est ému de
la
situation des anciens combattants ayant cotisé quarante annuités,
chômeurs de longue durée et en fin de droits. Il a
déclaré que ce dossier constituait l'une de ses grandes
préoccupations et qu'il s'était rapproché du
ministère de l'emploi pour trouver une solution satisfaisante.
En conclusion, il a fait état de 40 priorités
répertoriées par le secrétariat d'Etat aux anciens
combattants et s'est engagé à les faire parvenir à la
commission des finances dans les meilleurs délais.
Un large débat s'est alors ouvert.
M. Alain Lambert, rapporteur
général,
a demandé des renseignements sur les
difficultés de gestion rencontrées par l'ONAC.
En réponse,
M. Jean-Pierre Masseret
s'est montré soucieux
de maintenir les services déconcentrés de l'ONAC mais a reconnu
que la gestion de cet organisme devait être améliorée. Il a
annoncé qu'il avait chargé un contrôleur
général des armées d'une mission d'information sur la
structure financière de l'ONAC. A cet égard, il a
évoqué la vétusté des maisons de retraite
gérées par cette institution ainsi que l'étroitesse de sa
marge de manoeuvre financière en raison de la distorsion entre la
pesanteur des rémunérations du personnel et la flexibilité
des recettes.
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial,
a constaté que le
budget était caractérisé par une stabilité
générale du dispositif juridique, administratif et financier. Il
a fait valoir que ce budget ne comprenait aucune mesure véritablement
novatrice et qu'il ne pourrait porter un jugement que lorsqu'il
connaîtrait le contenu des 40 engagements pris par le
secrétaire d'Etat. Il a fait remarquer que la diminution de
360 millions de francs était purement comptable et que si l'effet
démographique était neutralisé, le budget connaissait une
légère hausse. Il a regretté l'interruption du programme
pluriannuel de rénovation des sépultures de guerre. Il s'est
montré favorable à une reprise de la discussion sur la
décristallisation et s'est inquiété de la menace de
disparition qui semble peser, à terme, sur le secrétariat d'Etat
aux anciens combattants.
En réponse,
M. Jean-Pierre Masseret
a salué la
qualité du rapport de M. Jacques Baudot sur la politique de la
mémoire et a affirmé que ce dernier avait joué un
rôle non négligeable dans les négociations sur
l'augmentation des crédits affectés aux actions en faveur de la
mémoire. Il a estimé que si une réflexion
générale sur les missions et le champ d'activité du
secrétariat d'Etat aux anciens combattants était
nécessaire, elle ne devait pas remettre en cause la
pérennité de ce dernier. A ce sujet, il a déclaré
que le rattachement du secrétariat d'Etat au ministère de la
défense avait été bien accueilli par le monde des anciens
combattants.
M. François Trucy
a demandé des informations
complémentaires à propos de la construction de mémoriaux
en l'honneur des anciens combattants d'Afrique du Nord, du rapatriement des
morts d'Indochine, du statut des anciens combattants dans les opérations
de maintien de la paix et du mémorial de Provence.
M. René Régnault
s'est félicité de la
politique engagée par le nouveau secrétaire d'Etat aux anciens
combattants. Il a salué l'élargissement des conditions
d'attribution de la carte d'ancien combattant en Afrique du Nord. Il a
toutefois insisté sur la nécessité d'améliorer la
situation des anciens combattants d'Afrique du Nord qui arrivent à
l'âge de la retraite et de mieux prendre en compte les pathologies
affectant les anciens combattants.
M. Emmanuel Hamel
s'est interrogé sur le nombre de
bénéficiaires de la procédure, votée l'année
dernière, qui permet aux volontaires ayant combattu aux
côtés des républicains pendant la guerre d'Espagne
d'obtenir la carte d'ancien combattant. Il s'est demandé si la mesure en
faveur des anciens combattants d'Afrique du Nord proposée par le
secrétaire d'Etat ne risquait pas d'en exclure certains.
Mme Marie-Claude Beaudeau
a reconnu que la diminution du nombre des
ressortissants devrait logiquement conduire à une baisse des
crédits du budget des anciens combattants. Toutefois, elle a
rappelé que le nombre de revendications non satisfaites restait
élevé. Elle a estimé nécessaire la levée des
forclusions pour les combattants volontaires de la résistance et a
déclaré soutenir la revendication des cheminots anciens
combattants et ayant servi en Afrique du Nord à pouvoir
bénéficier de la campagne double. Elle a évoqué le
problème des missions humanitaires accomplies en Algérie entre
1962 et 1964 et les difficultés liées à la
complexité du rapport constant.
M. Marcel Lesbros, rapporteur pour avis au nom de la commission des
affaires sociales,
a plaidé pour la déduction du temps
passé en Algérie dans la prise en compte de la retraite des
anciens combattants d'Afrique du Nord, chômeurs de longue durée.
Il a également souhaité que le Gouvernement reconnaisse que les
événements en Algérie, loin de ressembler à de
simples opérations de maintien de l'ordre, constituaient une
véritable guerre.
M. Roland du Luart
s'est interrogé sur l'indemnisation des
anciens incorporés de force dans le Reichsarbeitsdienst (service du
travail du Reich) et le Kriegshilfedienst (service de l'aide de guerre) et sur
les problèmes rencontrés par les neuf écoles de
rééducation professionnelle gérées par l'ONAC.
En réponse,
M. Jean-Pierre Masseret
s'est déclaré
en faveur d'un programme de construction de mémoriaux en l'honneur des
anciens combattants d'Afrique du Nord. Il a affirmé que les militaires
ayant participé aux opérations de maintien de la paix
constituaient la quatrième génération du feu et avaient le
même statut que les autres anciens combattants. Par ailleurs, il a fait
remarquer que le principe de territorialité, retenu pour l'attribution
du titre d'ancien combattant dans les compagnies de gendarmerie ayant
exercé en Afrique du Nord, était moins avantageux que le
critère proposé par le secrétariat d'Etat aux anciens
combattants (à savoir la présence de 18 mois en Algérie)
puisqu'il ne concernait que 20.000 anciens combattants, contre 80.000 pour ce
dernier dispositif. A cet égard,
M. Jean-Pierre Masseret
a
justifié l'inscription de 25 millions de francs dans le budget 1998
par son caractère symbolique : il s'agit d'une nouvelle mesure qui
bénéficiera par la suite de crédits évaluatifs et
ne pourra pas être soumise aux régulations budgétaires.
A propos du rapport constant,
M. Jean-Pierre Masseret
a
déclaré que l'Assemblée nationale venait de
désigner ses représentants et que la commission allait
bientôt se réunir afin de rechercher un paramètre plus
lisible.
Concernant la campagne double, il a insisté sur les
inégalités de situation entre un ancien combattant fonctionnaire
et un ancien combattant salarié de droit privé et a estimé
qu'il chercherait surtout à améliorer le sort des soldats qui
étaient régis par un contrat de droit privé.
M. Jean-Pierre Masseret
a, en outre, rappelé que la loi de 1989
levait toutes les forclusions. Il a toutefois reconnu que les conditions
imposées par le décret d'application rendaient difficile
l'attribution de la carte de combattant volontaire de la résistance.
C'est pourquoi il a habilité les préfets à faire une
enquête administrative afin de déterminer si les personnes
postulant pour cette carte remplissaient les conditions nécessaires.
Par ailleurs,
M. Jean-Pierre Masseret
s'est montré favorable
à l'utilisation du terme de guerre pour décrire les
événements d'Algérie à condition que cette
reconnaissance terminologique soit déconnectée des
conséquences juridiques et budgétaires qu'elle devrait
normalement entraîner. Ensuite, il a fait remarquer que tout ancien
combattant d'Afrique du Nord au chômage devait percevoir au minimum
4.500 francs par mois par le biais de l'allocation différentielle
et de l'allocation de préparation à la retraite.
A propos des incorporés de force, il a rappelé que la
participation à des opérations de feu constituait une condition
indispensable pour bénéficier de l'indemnisation prévue
par l'accord franco-allemand de 1979 et qu'il avait demandé que soient
recensées les unités du Reichsarbeitsdienst et du
Kriegshilfedienst ayant servi de renfort aux unités de combat.
Concernant les écoles de rééducation professionnelle de
l'ONAC, il a reconnu les désaccords entre la direction
départementale de l'action sanitaire et sociale et le secrétariat
d'Etat aux anciens combattants sur les prix de journée et le manque de
transparence des subventions versées par le Fonds social
européen. Il a précisé que le contrôleur
général des armées nommé pour analyser la gestion
de l'ONAC était également chargé d'une mission
d'information sur ses écoles de rééducation
professionnelle. Il a toutefois tenu à saluer la qualité de la
formation et des résultats de ces dernières.
**La commission a ensuite procédé, sur le rapport de
M.
Jacques Baudot, rapporteur spécial,
à
l'examen des
crédits des anciens combattants et de l'article 62
rattaché
.
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial,
a estimé que tant
que les 40 priorités du secrétaire d'Etat aux anciens
combattants ne seraient pas transmises à la commission des finances,
cette dernière ne disposerait pas de tous les éléments
pour forger son opinion sur le budget.
La commission a
alors
décidé de réserver son vote
sur les
crédits des anciens combattants
jusqu'à la
réception des 40 propositions du ministre.
**Réunie à nouveau le
jeudi 20 novembre 1997
, sous la
présidence de
M. Christian Poncelet, président,
la
commission a procédé à l'examen des
articles
rattachés au budget des anciens combattants
. Elle
a adopté
successivement l'article 62
visant à indemniser les
étrangers déportés depuis la France ayant acquis depuis
lors la nationalité française,
l'article 62 bis
tendant à établir les modalités du calcul du montant
maximal de la rente mutualiste donnant lieu à majoration par l'Etat,
l'article 62 ter
,
conduisant à élargir le nombre
de bénéficiaires de la carte du combattant, et
l'article 62
quater
, majorant l'allocation du fonds de solidarité en faveur des
chômeurs anciens combattants d'Afrique du nord. Puis, elle a
décidé de proposer au Sénat de
repousser le budget des
anciens combattants
.