II. ...NE RÉSOUD PAS LE PROBLÈME DE L'INSUFFISANTE MOBILITÉ DES CHERCHEURS
La mobilité des chercheurs est indispensable à
l'équilibre démographique des équipes de recherche.
Or, le tableau ci-dessous montre bien qu'elle est encore insuffisante :
Des mesures ont cependant été prises afin de promouvoir la mobilité des chercheurs vers l'enseignement supérieur et vers l'entreprise, et de manière à accélérer le départ à la retraite des chercheurs afin de lisser l'évolution du taux de recrutement sur plusieurs années.
A. LA MOBILITÉ VERS L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
La nécessité de disposer d'un plus grand nombre
d'enseignants a conduit à une réflexion nouvelle sur les passages
de corps de chercheurs dans les corps d'enseignants-chercheurs.
Afin de faciliter cette mobilité, 520 postes ont été
créés aux budgets des exercices 1990 à 1995 du
ministère de l'éducation nationale destinés exclusivement
à offrir cette possibilité supplémentaire aux chercheurs
des EPST.
Les conditions de cette mobilité ont été organisées
par la circulaire n° 90-010 du 10 janvier 1990, et le
décret n°90-894 du 1er octobre 1990 modifiant le décret
n° 84-431 du 6 juin 1984 portant statut du corps des professeurs
d'université et du corps des maîtres de conférences. Ce
texte permet aux chercheurs d'être détachés puis ensuite
intégrés dans les corps d'enseignants-chercheurs.
Ces mesures ont permis sur les années 1990 à 1995 à
500 chercheurs environ d'être accueillis sur des postes
d'enseignants-chercheurs dans l'enseignement supérieur par la voie du
détachement et par la voie du recrutement direct.
La situation est actuellement de 70 mobilités par an dont
50 correspondent à des recrutements par concours dans le corps des
professeurs d'université et 20 à des détachements.
Une circulaire du directeur général de la recherche et de la
technologie du 20 novembre 1996, relative à la mobilité
entre chercheurs et enseignants-chercheurs, a précisé les enjeux
de cette mobilité, les mesures d'incitation arrêtées et les
objectifs fixés :
- offrir à au moins 150 maîtres de conférences ou
professeurs, le bénéfice, pendant deux ans, d'une
délégation auprès du CNRS leur permettant d'avoir une
activité de recherche à plein temps pendant cette
période ;
- réciproquement, permettre à un nombre comparable de
chercheurs des EPST et des EPIC dont au moins 100 chercheurs du CNRS, de
bénéficier d'un détachement ou d'un recrutement à
titre définitif dans les universités ou les autres
établissements d'enseignement supérieur.
Les mesures d'incitation concernent à la fois les chercheurs mobiles qui
pourront se porter candidats à une prime d'encadrement doctoral et de
recherche, sans attendre la prise d'effet de leur détachement ou de leur
recrutement et les laboratoires accueillant un chercheur en détachement
ou recrutement définitif. Une subvention de 50.000 francs à
200.000 francs, selon les besoins identifiés et l'ampleur de
l'accueil, sera versée en 1997 à leur établissement de
rattachement. Cette subvention est destinée à faciliter la mise
en oeuvre de la politique de recherche de l'établissement, l'insertion
matérielle du nouvel universitaire et la poursuite de ses
activités de recherche dans les meilleures conditions possibles.
B. LA MOBILITÉ DES CHERCHEURS VERS LES ENTREPRISES
Le ministère mettra comme condition au financement des
projets de recherche d'envergure des entreprises, notamment des groupes
industriels dans le cadre des grands programmes technologiques, un engagement
de leur part d'accueillir des chercheurs des organismes publics (EPSCP et EPST)
(cf. dès 1997 Rhône-Poulenc pour le programme "REACTIF" et Peugeot
et Renault pour le programme "PREDIT").
Afin d'inciter les chercheurs à accepter une mobilité vers les
entreprises, les gains de rémunération possibles dans le cas d'un
détachement, qui étaient auparavant limités à
30 % ont été portés à 50 %.
C. L'AUGMENTATION DES DÉPARTS À LA RETRAITE
L'article 89 de la loi n° 96-1093 du
16 décembre 1996 relative à l'emploi dans la fonction
publique et à diverses mesures d'ordre statutaire met fin au maintien en
surnombre jusqu'à 68 ans des directeurs de recherche.
La loi n° 86-1304 du 23 décembre 1986 avait prévu
que les professeurs de l'enseignement supérieur et les directeurs de
recherche des établissements publics à caractère
scientifique et technologique, lorsqu'ils atteignent la limite d'âge de
65 ans, sont, sur leur demande, maintenus en activité, en
surnombre, jusqu'à ce qu'ils atteignent 68 ans. Des dispositions
analogues ont été adoptées pour les membres du Conseil
d'Etat, les magistrats de la Cour des comptes et les membres de l'Inspection
générale des finances, ainsi que pour les magistrats hors
hiérarchie de la Cour de cassation.
L'article 89 a mis fin, par mesure législative, à la
possibilité de maintenir en activité des directeurs de recherche
lorsqu'ils atteignent la limite d'âge de 65 ans.
Ne sont concernés que les directeurs de recherche de première
classe et les directeurs de recherche de classe exceptionnelle du CNRS et de
l'INSERM, qui sont les seuls directeurs de recherche
bénéficiaires des dispositions de la loi du
23 décembre 1986. Les effectifs concernés
représentaient, sur l'année 1996, 100 surnombres dont le
coût s'élevait à 73 millions de francs. Avec
l'augmentation prévisible des départs à la retraite, si le
maintien en activité jusqu'à 68 ans avait été
maintenu, les surnombres auraient atteint un effectif de 150 chercheurs au
début des années 2000 et 250 chercheurs dans les
années 2004.
S'agissant de la période transitoire, il a été retenu une
déduction progressive de la durée des maintiens en
activité, qui seront totalement résorbés au 30 juin
1998.
Il convient de préciser que les conséquences de la mesure pour
les directeurs de recherche concernés sont atténuées sur
trois points :
-parce que le chercheur maintenu en activité en surnombre ne conservait
pas la plénitude de ses droits : il ne pouvait avancer de grade ni
d'échelon, et la pratique du CNRS et de l'INSERM fait qu'il ne pouvait
pas conserver la direction de son laboratoire ;
- parce que la loi du 23 septembre 1984 avait accordé une
bonification de services de trois ans aux fonctionnaires dont la limite
d'âge avait été réduite de 68 ans à
65 ans, et que cette bonification de services est accordée, que le
fonctionnaire demande ou non le bénéfice de son maintien en
activité. La suppression du maintien en activité n'aura donc pas
de conséquences sur le calcul de la pension de l'agent ;
- parce que les directeurs de recherche peuvent bénéficier
de l'éméritat.
L'éméritat a été créé par
l'article 11 de la loi du 23 décembre 1985 relative à
la recherche et au développement technologique, complété
par le décret du 17 juin 1992. Le titre de directeur de recherche
émérite peut être conféré, lors de leur
admission à la retraite, aux directeurs de recherche justifiant d'une
contribution particulièrement importante aux travaux de recherche. Cette
décision est prise par le conseil d'administration sur proposition du
conseil scientifique. Sa durée est fixée à cinq ans
renouvelables. L'éméritat autorise les directeurs de recherche
à participer aux jurys de thèse, à diriger des travaux de
séminaire et à contribuer aux travaux de recherche.
Les décrets n° 96-1242, 1243 et 1244 du 26
décembre 1996 créent une indemnité de départ
à la retraite anticipée des chercheurs du CNRS, de l'INSERM et de
l'INRA entre 60 et 64 ans.
Une incitation particulière au départ à la retraite est
nécessaire pour les chercheurs qui pourront rarement justifier avant
65 ans d'un nombre d'annuités suffisant en raison de leur
recrutement tardif, et qui ont en outre à supporter, du fait de leur
titularisation, le coût de rachat des points de retraite au titre du
régime des pensions civiles de l'Etat.
Une "indemnité de départ volontaire" existait déjà
pour les chargés de recherche du CNRS, de l'INSERM et de l'INRA
démissionnant de l'organisme. Cette indemnité est égale
à une année de traitement brut.
Les décrets intervenus en décembre 1996 ont étendu cette
indemnité aux hercheurs demandant à faire valoir leurs droits
à la retraite avant 64 ans: son montant, qui varie entre huit mois
et deux mois de traitement brut, est d'autant plus élevé que le
chercheur prend sa retraite tôt.
Par ailleurs, pour accroître l'efficacité de cette mesure, il est
prévu d'en limiter l'application à trois ans, ce qui aura pour
conséquence d'augmenter les départs à la retraite dans les
années 1997 à 1999 par effet d'appel sur les chercheurs ayant
entre 60 et 64 ans, lesquels représentent des tranches d'âges
plus nombreuses.
Le CNRS bénéficie en outre, à titre
expérimental pour 1997, d'une mesure exceptionnelle pour les ITA et les
techniciens de physique nucléaire en fonction dans les unités
devant connaître une restructuration thématique ou
géographique. Le dispositif d'incitation au départ à la
retraite anticipée des chercheurs leur est étendu dans les
mêmes conditions.
D. LES DISPOSITIONS VISANT À AUGMENTER LA MOBILITÉ EN 1998
Les mesures visant à augmenter les départs
à la retraite des chercheurs continueront à jouer en 1998, qu'il
s'agisse de la fin du maintien en surnombre des directeurs de recherche
jusqu'à 68 ans ou de l'incitation au départ à la
retraite anticipée avant 64 ans.
L'objectif de développement de la mobilité doit être
maintenu en 1998, à la fois pour permettre de relancer le recrutement
avant que les départs à la retraite ne prennent la relève
et comme outil de décloisonnement vers l'enseignement supérieur
et vers le secteur des entreprises. Le plan de recrutement de maîtres de
conférences et de chargés de recherche lancé entre 1988 et
1993, et depuis en grande partie interrompu, doit être actualisé
et relancé à la fois par une reprise des créations de
postes et par un développement de la mobilité.
Pour étudier toutes ces questions, le ministre de l'éducation
nationale, de la recherche et de la technologie a mis en place une table ronde
sur l'emploi scientifique, qui doit terminer ses travaux en septembre. Il a
notamment demandé aux directeurs d'organismes de recherche de
réfléchir aux moyens de développer les échanges
entre organismes de recherche d'une part et entreprises et universités
d'autre part. Le ministre a notamment la volonté d'augmenter
significativement la mobilité des chercheurs des EPST et des EPIC vers
les universités. Il a demandé aux organismes de recherche et aux
établissements d'enseignement supérieur d'étudier un
système dans lequel des postes seraient réservés pendant
deux ans dans les universités à l'accueil des chercheurs.