ARTICLE 65 - Aménagement de la réduction dégressive des cotisations patronales de sécurité sociale relatives aux bas salaires
Commentaire : L'article 65 pérennise et modifie le dispositif de "ristourne dégressive fusionnée" sur les bas salaires, issu de l'article 113 de la loi de finances pour 1996.
I. LE DISPOSITIF DE LA RISTOURNE DÉGRESSIVE "FUSIONNÉE"
A. LE PRINCIPE DE BASE
La ristourne dégressive "fusionnée" est issue de la fusion :
- de l'exonération de cotisations d'allocations familiales instituée par la loi du 17 juillet 1993, rendue pluriannuelle par la loi quinquennale sur l'emploi du 20 décembre 1995, et qui devait concerner tous les salaires inférieurs ou égaux à 1,6 SMIC à partir du 1er janvier 1998.
- de la ristourne dégressive de cotisations sociales sur les bas salaires instituée par la loi du 4 août 1995 relative à des mesures d'urgence pour l'emploi et la sécurité sociale, concernant les salaires inférieurs ou égaux à 1,2 SMIC.
La fusion de ces deux dispositifs a été opérée par l'article 113 de la loi de finances pour 1996, qui a prévu la mise "entre parenthèses" entre le 1er octobre 1996 et le 31 décembre 1997. des deux dispositifs précédents, au profit d'une ristourne dégressive "fusionnée", concernant tous les salaires allant du SMIC à 1,33 SMIC.
B. LE CHAMP D'APPLICA TION DU RÉGIME
Les entreprises pouvant bénéficier de la nouvelle réduction sont les mêmes que celles comprises dans le champ d'application de la loi du 4 août 1995 : entreprises du secteur privé marchand, (régime général et régime agricole), associations, syndicats professionnels et établissements publics industriels et commerciaux, et employeurs relevant du régime spécial de sécurité sociale des marins.
Par ailleurs, la réduction est étendue aux employeurs relevant des régimes spéciaux des mines et des notaires, sous réserve d'adaptations réglementaires.
C. LE CALCUL DE LA RÉDUCTION DÉGRESSIVE
Pour les salaires égaux ou supérieurs au SMIC mensuel, et inférieurs ou égaux au SMIC mensuel majoré de 33 % , le montant de la réduction est dégressif.
Il est ainsi calculé : (1.33 SMIC - rémunération) x 0.55. le coefficient de 0,55 étant fixé par décret.
Actuellement le montant de la ristourne est de 1.212,79 francs pour le SMIC, puis linéairement dégressif jusqu'à 1.33 SMIC.
Pour les salaires inférieurs au SMIC mensuel, la réduction est égale au produit de la rémunération par un coefficient égal à 0,182.
D. LE CUMUL AVEC D'AUTRES AVANTAGES
Actuellement, la ristourne dégressive n'est plus cumulable avec un allégement de cotisations d'allocations familiales.
Elle est en revanche cumulable avec :
- l'allégement des charges sociales en faveur de l'aménagement et de la réduction du temps de travail dans le cadre de la loi "de Robien" du 11 juin 1996.
- l'abattement de charges sociales en faveur du travail à temps partiel prévu par l'article L 322-12 du code du travail, actuellement fixé à 30 %.
En cas de cumul de mesures d'allégement, l'ordre d'application est le suivant :
- l'allégement "de Robien" est appliqué aux cotisations dues,
- puis le cas échéant, l'abattement "temps partiel",
- enfin, la ristourne dégressive.
E. LE CAS DU TEMPS PARTIEL
Le mode de calcul de la réduction ne dépend pas du nombre d'heures de travail rémunérées.
En effet, la réduction est calculée en fonction des seules rémunérations versées au cours du mois : c'est la "dé-proratisation" de la ristourne, qui prouve évidemment un avantage important au temps partiel.
F. LES EXCEPTIONS AU RÉGIME
1. Le maintien d'exonérations de cotisations d'allocations familiales
L'exonération de cotisations d'allocations familiales reste en vigueur :
- pour les entreprises situées en zone de revitalisation rurale,
- pour les entreprises nouvelles exonérées d'impôt,
- pour certaines entreprises publiques.
2. Le cas particulier des secteurs du textile, habillement, cuir et chaussure
Par ailleurs, pour tenir compte de difficultés sectorielles spécifiques, l'article 99 de la loi du 12 avril 1996 portant diverses mesures d'ordre économique et financier a porté le plafond des salaires concernés par la ristourne à 1,5 SMIC dans le cadre de conventions passées avec les entreprises des secteurs du textile, de l'habillement, du cuir et de la chaussure, portant sur l'emploi et tenant compte de l'aménagement et de la réduction du temps de travail, et ce jusqu'au 31 décembre 1997.
II. LES PROPOSITIONS DE L'ARTICLE 65
L'article 65 aménage de façon importante le dispositif de la ristourne dégressive.
A. LA PÉRENNISATION DE LA RISTOURNE FUSIONNÉE
Le paragraphe de l'article 65 rend permanent le dispositif qui n'était prévu, au départ, que pour une période allant du 1er octobre 1996 au 31 décembre 1997.
Par conséquence, les deux dispositifs antérieurs : exonérations de cotisations d'allocations familiales et ristourne sur les salaires allant jusqu'à 1,2 SMIC, sont supprimés.
Les exonérations de cotisations d'allocations familiales demeurent pour les zones de revitalisation rurale, les entreprises nouvelles, et certaines entreprises publiques.
B. LES RÈGLES DE NON CUMUL
Les règles de cumul de la ristourne avec les autres allégements de charges restent inchangées.
C. LE PLAFOND DES SALAIRES CONCERNÉS
L'article 65 propose de ramener le plafond des salaires concernés de 1,33 à 1,3 SMIC, soit un montant mensuel de 8.662.77 francs (à l'issue de la revalorisation de 4 % du SMIC décidée le 1er janvier dernier).
Cette mesure procure une économie budgétaire de 2.1 milliards de francs.
Le gouvernement fait valoir qu'elle ne remet pas le dispositif en cause, et qu'à l'issue de la revalorisation du SMIC de juillet dernier, le "1,3 SMIC" de 1998 sera supérieur au "1,33 SMIC" des premiers mois de 1997.
Par ailleurs, le gouvernement s'apprête à geler, par décret, le montant maximum de la réduction dégressive au niveau de 1997, soit 1.212,79 francs : dès lors, les revalorisations du SMIC n'auraient plus d'incidence sur l'avantage procuré par la ristourne. Cette mesure permettrait une économie budgétaire de 400 millions de francs.
D. LA "REPRORATISATION" DE LA RISTOURNE DÉGRESSIVE
L'article 65 réintroduit la proportionnalité de la ristourne au nombre d'heures travaillées, afin de supprimer l'avantage, jugé excessif, accordé par la "dé-proratisation" au travail à temps partiel.
E. DES MESURES DE COORDINATION
L'article 65 procède, au surplus, à diverses mesures de coordination, rendues notamment nécessaires par la suppression de l'exonération de cotisations d'allocations familiales, et par la "reproratisation" de la ristourne.
Il apporte une précision utile d'exigence de respect des dispositions spécifiques en matière de durée maximale du travail, dans des secteurs tels que ceux des transports routiers.
III - LA POSITION DE VOTRE COMMISSION
Votre commission considère que la ristourne de charges sociales sur les bas salaires est un élément essentiel de défense des emplois peu qualifiés ; elle concerne actuellement un peu moins de cinq millions de salariés.
Son effet sur l'emploi est incontestable : ainsi, les documents de préparation de la conférence internationale sur l'emploi et les salaires du 10 octobre 1997 relèvent que "après avoir augmenté sur la période 1970-1984, le coût relatif du travail peu qualifié a retrouvé, au cours des années récents, son niveau de 1970, sous l'effet notamment de la réduction des charges sociales pesant sur les bas salaires", et aussi que "la relative bonne résistance de l'emploi, dans une conjoncture peu favorable résulte pour partie des premiers effets de la baisse du coût du travail au voisinage du salaire minimum (- 12,6 % depuis 1993)".
C'est pourquoi votre commission vous propose de rétablir le plafond des salaires concernés à 1.33 SMIC. L'argument selon lequel l'augmentation du SMIC du mois de juillet compenserait l'abaissement du seuil n'est pas recevable à ses yeux : les entreprises doivent pouvoir compter sur un avantage stable à partir de leurs grilles de salaires.
Par ailleurs, votre commission déplore que le gouvernement entende "geler" par voie réglementaire le niveau maximum de la ristourne au niveau atteint en 1997.
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.