B. DES CONDITIONS DE MISE EN OEUVRE DÉSASTREUSES
Les mesures proposées paraissent en effet composer les éléments d'une partition inachevée et mal construite. Combinées aux dispositions du projet de loi de finances, leur adoption aurait de surcroît des conséquences néfastes pour l'épargne.
1. Une réforme inachevée
a) La non réforme de l'impôt sur le revenu
D'un point de vue fiscal, l'augmentation des
prélèvements sociaux est concevable mais suppose, pour rester
économiquement cohérente, une diminution des taux de
l'impôt sur le revenu.
En effet, très schématiquement
deux politiques fiscales sont possibles :
La première consiste à augmenter les taux et à
rétrécir l'assiette
:
c'est la position interventionniste.
Plus les taux sont élevés, plus les "
niches fiscales
"
sont efficaces, et plus il est possible d'orienter l'épargne là
où on le souhaite (logement social, PME, cinéma, outre-mer...).
La seconde consiste à réduire les taux et à
élargir l'assiette : c'est la position défendue par votre
commission des finances
. Elle repose sur deux principes : l'impôt ne
doit pas décourager la production de richesses ; l'impôt doit
être neutre (ce qui n'est pas le cas avec des taux élevés,
puisque les niches fiscales ont précisément pour objet d'orienter
les choix des agents économiques).
Or, si l'on considère à la fois le projet de loi de financement
et le projet de loi de finances, on se rend compte que
les mesures
proposées par le gouvernement actuel
n'empruntent aucune des ces
deux voies.
Elles
consistent au contraire à augmenter les taux
et à élargir l'assiette. C'est tout simplement de la surtaxation.
Les agents économiques privés d'échappatoires,
risquent d'être découragés ou de partir à
l'étranger.
Cette politique fiscale n'est donc pas économiquement
cohérente et comporte de graves risques récessifs.
b) La non réforme du système de protection sociale
D'un point de vue social, la réforme proposée
aboutit à faire financer une part croissante des dépenses
sociales par l'impôt. Un tel choix est tout à fait envisageable,
et même dans une certaine mesure souhaitable
. Mais il suppose, pour
être cohérent, que soient également réformées
les structures qui déterminent les dépenses, ce qui n'est pas le
cas.
Or, l'adaptation aux perspectives démographiques des régimes
de retraite, et notamment des régimes spéciaux, ne semble
toujours pas à l'ordre du jour, tandis que le Gouvernement utilise les
outils de maîtrise des dépenses d'assurance maladie dont il a
hérité pour porter l'ONDAM au-delà de sa progression
spontanée pour 1998.
Tant que le gouvernement sera incapable de maîtriser les
dépenses sociales, et notamment les dépenses de santé, le
Parlement sera condamné à consentir des hausses de
prélèvements.
Or, cette augmentation des
prélèvements renchérit le coût du travail et
contribue, ce faisant à aggraver, le chômage. Elle incite les
entreprises à délocaliser leur production, ou, dans le meilleur
des cas, à arbitrer le capital contre le travail.
Cette politique sociale constitue une fuite en avant qui ne permettra pas
de résoudre le problème du chômage.