II. LES NOUVELLES MODALITÉS DE FINANCEMENT DU PRÊT À TAUX ZÉRO


Le projet de loi de finances pour 1997 modifie profondément les modalités de financement du prêt à taux zéro, en revenant sur le dispositif adopté pour 1996.

On peut tout d'abord rappeler les multiples décisions prises quant au financement du prêt à taux zéro mis en place depuis seulement août 1995.

- La loi de finances rectificative du 4 août 1995 avait créé, d'une part, un chapitre 65-51 « Réforme de l'accession à la propriété » doté de 700 millions de francs et, d'autre part, un compte d'affectation spéciale n° 902-28 « Fonds pour l'accession à la propriété » alimenté par une contribution exceptionnelle des organismes collecteurs du 1 % de 1 milliard de francs.

- La loi de finances pour 1996 a supprimé le chapitre 65-51 dont elle a reporté les dotations disponibles sur un nouvel article du chapitre 65-48 doté de 6,9 milliards en autorisations de programme et de 3,2 milliards en crédits de paiement et a modifié les ressources du compte d'affectation spéciale en instituant un prélèvement pérenne sur les ressources du 1 % d'un rendement annuel estimé à 900 millions de francs.

- Enfin, l'extension temporaire du prêt à taux zéro dans l'ancien a été financée à partir du chapitre 65-02 du budget des charges communes.

Le projet de loi de finances pour 1997 bouleverse ce dispositif existant par :

- l'article 29 qui modifie la contribution du 1 % logement en mettant en place un prélèvement de 50 % du total des sommes perçues au titre du 1 % logement (collecte + encours), soit environ 7 milliards de francs.

Il est prévu que ce prélèvement exceptionnel soit également opéré en 1998.

- L'article 45 qui crée un nouveau compte d'affectation spéciale n° 902-30 « Fonds pour le financement de l'accession à la propriété » alimenté par le prélèvement prévu à l'article 29 doté de 7 milliards de francs en autorisations de programme et de 3,5 milliards en crédits de paiement.

- Enfin, 3,5 milliards de crédits de paiement sont inscrits sur l'article 40 du chapitre 65-48.


Une fois encore, l'État choisit de prélever sur les fonds issus du 1 % logement pour équilibrer son budget.

Rendue obligatoire en 1953 pour les entreprises privées de 10 salariés et plus, cette « participation à l'effort de construction » reste improprement appelée 1 %. À la suite de réductions successives, son taux est fixé depuis 1992 à 0,45 % de la masse salariale. Les entreprises n'ont pas vu pour autant leurs charges s'alléger puisqu'elles versent 0,50 % de leur masse salariale au Fonds national d'aide au logement (FNAL), qui gère l'une des aides à la personnes inscrites au budget de l'État.

De plus, depuis 1995, les organismes collecteurs du 1 % versent une contribution annuelle au « Fonds pour l'accession à la propriété » qui finance les aides à l'accession à la propriété, toujours pour le budget de l'État. Un milliard de francs a été ainsi versé en 1995. Pour 1996, le principe d'un prélèvement correspondant à 6,8 % de la collecte et des retours de prêts, soit 900 millions de francs, a été pérennisé.

Mais cette année, et pour 1998, cette contribution exceptionnelle fait l'objet d'un accord des partenaires sociaux à travers la signature avec l'État le 16 septembre dernier d'une convention qui a pour ambition de conserver et développer le système du 1 % logement.

Pour réussir cet objectif, l'État accède à un désir ancien des partenaires sociaux en mettant en place par voie législative une structure fédérant le réseau des collecteurs du 1 %.

Selon le rapport de notre excellent collègue M. Marcel-Pierre Cléach, l'esprit de la réforme proposée par le projet de loi n° 58 (1996-1997) relatif à l'Union d'économie sociale du logement se résume en trois mots clés : paritarisme, solidarité et efficacité. L'union d'économie sociale du logement, société anonyme coopérative à capital variable, à laquelle adhèrent à titre obligatoire les CIL (comités interprofessionnels du logement) et de manière volontaire les partenaires sociaux, donne à ces derniers à travers le comité paritaire d'emploi des emplois, la capacité de proposer des politiques nationales d'emploi des fonds qui feront l'objet de conventions signées avec l'État.

La solidarité des partenaires sociaux s'exprime à travers les deux prélèvements exceptionnels de 7 milliards de francs auxquels ils ont consenti pour 1997 et 1998.

L'efficacité du dispositif passe enfin par une gestion plus efficace des fonds collectés par les CIL, par l'abaissement de leurs coûts de gestion et par l'atténuation d'une concurrence coûteuse et absurde entre eux puisque la ressource collectée est gratuite. Enfin, les partenaires sociaux se sont engagés, en signant la convention du 16 septembre dernier à maintenir l'efficacité du 1 % logement en matière d'aide au logement à son niveau atteint en 1996.

Or, il s'avère que, malgré des réserves importantes illustrées par un actif évalué à 106 milliards de francs, le dispositif du 1 % logement a perdu de sa marge de manoeuvre. Selon certaines estimations 2 ( * ) , l'équilibre constaté en 1994 et 1995 entre les ressources et les emplois du 1 % logement est un équilibre sur le « fil du rasoir ». À l'origine de cette situation délicate : l'effort d'investissement exceptionnel qui a été réalisé en 1994 à la suite du plan de relance à l'accession sociale à la propriété. Un effort qui a, en fait, été non pas financé avec des ressources de long terme, mais avec la trésorerie des collecteurs.

Face à une dégradation rapide de la situation financière, le circuit du « 1 % logement » a, de fait, « perdu une large part de la flexibilité qui l'a si souvent caractérisé et lui permettait de faire face à des sollicitations nouvelles ou de s'engager dans une stratégie de relance ou de soutien des marchés »


En 1995, les ressources générées par les organismes collecteurs se sont établies à 12,90 milliards de francs, en recul de 4 %. La production de prêts aux personnes physiques s'est élevées à 7,45 milliards (-24 %) et aux personnes morales à 5,3 milliards de francs (-14 %).

La participation des employeurs à l'effort de construction contribue, chaque année, à la construction et l'acquisition de 60.000 logements locatifs sociaux. Elle permet également, en complément de la PALULOS, de réhabiliter 100.000 logements. Elle facilite également l'acquisition, la construction de la réhabilitation par les salariés de 150.000 logements. Elle contribue ainsi au maintien de 150.000 emplois dans le bâtiment et industries annexes.

On peut donc légitimement s'inquiéter des effets de ces deux prélèvements exceptionnels prévus en 1997 et 1998 sur les capacités contributives du 1 % dans le secteur du logement.

Selon toute vraisemblance, pour y parvenir, l'Union d'économie sociale du logement devra emprunter, mais ceci inévitablement se reportera sur le coût des ressources mises à disposition, tant pour les personnes physiques que pour les organismes constructeurs. C'est pourquoi, malgré l'engagement des partenaires sociaux et de l'État à travers la convention du 16 septembre, votre rapporteur pour avis émet des doutes sur le maintien de la capacité contributive du 1 % logement en faveur du logement locatif social.

Par ailleurs, à moyen terme, il reste préoccupé par le dispositif à mettre en oeuvre en 1999. On peut craindre que le Gouvernement soit dans l'impossibilité de « renoncer » à cette ressource exceptionnelle, ce qui équivaudrait à la disparition du 1 % logement. Cette éventualité serait très préjudiciable au secteur du parc social notamment du fait de la capacité de réponse du 1 % logement aux besoins locaux, de sa souplesse de mise en oeuvre, et de son rôle dans le bouclage financier des opérations.

* 2 Commentaires extraits d'une étude de M. Michel Mouillard, professeur à Paris-X Nanterre sur les perspectives du 1 % logement.

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