7. Audition de M. Claude Guéant, directeur général de la police nationale
La commission a entendu le mercredi 29 janvier 1997 M. Claude Guéant, directeur général de la police nationale.
M. Claude Guéant a rappelé que la police nationale accueillait depuis 1985 des policiers auxiliaires effectuant leur service national. Il a précisé que les postes budgétaires, au nombre de 8.725 en 1997, avaient été réduits d'un millier, tout en soulignant que la totalité des emplois n'avait jamais été pouvue en raison de l'insuffisance du nombre de candidats, le ratio de candidatures par rapport aux postes offerts n'étant que de 1,2.
S'agissant de l'affectation des policiers auxiliaires, le directeur général de la police nationale a indiqué que la majorité des jeunes du service national étaient utilisés à des missions de sécurité publique, mais que l'emploi des policiers auxiliaires concernait la totalité des missions de police à l'exception toutefois de celles de maintien de l'ordre ou de police judiciaire.
Il s'est félicité du bilan très positif de cette forme de service national qui a permis un renforcement de la présence policière tout en constituant un vivier au sein duquel sont recrutés 40 % des gardiens de la paix. Il a considéré que le recours aux policiers auxiliaires constituait désormais un élément très utile au fonctionnement de la police nationale.
Evoquant la réforme en cours, M. Claude Guéant a rappelé que l'arrivée de volontaires s'effectuerait à partir de l'an 2000, ceux-ci remplaçant à partir de 2002 la totalité des effectifs de policiers auxiliaires. Il a relevé que la rémunération d'un volontaire s'élèverait à 2.000 F par mois alors que celle d'un appelé effectuant son service national dans la police se limite à 830 F ; le budget de rémunérations consacré aux policiers auxiliaires, s'il était maintenu à son niveau actuel de 108 millions de francs, ne permettrait de recruter qu'un effectif réduit de moitié. Il a par ailleurs constaté qu'en l'état actuel des choses, il était difficile d'évaluer le flux de volontaires qui se dirigeraient vers la police nationale.
Le directeur général de la police nationale a ensuite évoqué les différentes mesures susceptibles de favoriser le volontariat. Il a précisé que ses services participeraient activement au rendez-vous citoyen, à la fois dans les phases de présentation générale et en vue de valoriser les carrières dans la police nationale. Il a annoncé la publication prochaine d'un décret permettant d'instituer, au sein du recrutement des gardiens de la paix, un quota réservé aux volontaires. Il a enfin ajouté que la récente réforme des personnels de la police nationale, qui se traduit notamment par une diminution du nombre des commissaires et des officiers de police, permettrait de dégager des économies, évaluées à 260 millions de francs par an, qui pourront être en partie consacrés à la rémunération des volontaires.
A la suite de l'exposé de M. Claude Guéant, M. Serge Vinçon a souhaité obtenir des éclaircissements, d'une part sur les modalités de sélection des volontaires, d'autre part sur les conditions d'application de l'article L. 2-7 du projet de loi portant réforme du service national, aux termes duquel les activités offertes aux volontaires ne peuvent correspondre ni à des " emplois permanents ", ni à des " emplois nécessaires au fonctionnement normal de l'organisme d'accueil ". Il s'est interrogé en outre sur la préparation aux concours de la police nationale dont pourraient bénéficier les volontaires pendant leur service, sur le coût du volontariat et enfin sur la contribution de la police au rendez-vous citoyen.
M. Bertrand Delanoë s'est interrogé sur les sentiments suscités, au sein de la police, par le " plan d'action gendarmerie 2002 ", ainsi que sur l'appréciation personnelle portée par le directeur général sur ce texte.
M. Maurice Lombard, après avoir souligné les risques de corporatisme que pouvait présenter un recrutement privilégié des policiers parmi les volontaires, s'est demandé si des quotas d'accès à la police nationale pouvaient être réservés à d'anciens volontaires dans les armées, voire à des militaires professionnels.
M. Jean Clouet s'est interrogé sur le coût que représenterait le volontariat dans la police nationale pour les collectivités territoriales.
M. Daniel Goulet a souligné les nécessités d'une formation adaptée pour les jeunes accomplissant leur volontariat dans la police nationale afin de les préparer à un plan de carrière satisfaisant.
M. Xavier de Villepin, président, après avoir relevé que les emplois budgétaires dans la police nationale n'étaient pas aujourd'hui tous pourvus, s'est inquiété des conséquences éventuelles d'un nombre insuffisant de volontaires, compte tenu notamment d'une rémunération peu attractive. Il a interrogé M. Claude Guéant sur la possibilité, pour la police nationale, de mettre en place un contrat court, à l'exemple de l'engagement envisagé par la gendarmerie.
Répondant aux questions des commissaires, M. Claude Guéant a apporté les précisions suivantes :
- la formule du contrat court présentait un intérêt limité pour la police car la rémunération envisagée dans ce cadre se comparait au traitement d'un policier débutant ;
- même si le niveau des effectifs de volontaires recrutés par la police nationale présentait de grandes incertitudes, la perspective d'une carrière éventuelle dans la police pouvait constituer une réelle incitation ; ainsi, aujourd'hui, les policiers auxiliaires accédaient à près de 2.000 des quelque 5.000 emplois offerts en moyenne chaque année aux concours de la police nationale ; il importait, dès lors, de mettre à profit la période du volontariat pour assurer une bonne formation aux concours existants ;
- les critères de sélection actuels des policiers auxiliaires, légèrement différents de ceux qui président au recrutement des militaires du service national, ne devraient pas être modifiés dans le cadre du volontariat ;
- l'application de l'article L. 2-7 du projet de loi portant réforme du service national pouvait présenter quelques difficultés juridiques ; toutefois les policiers auxiliaires accomplissaient des missions à la frontière des tâches de sécurité et d'assistance, à l'exclusion du maintien de l'ordre et de la police judiciaire ; en outre, ils se trouvaient toujours en position de subordination vis-à-vis d'un policier professionnel ;
- la rémunération des volontaires nécessiterait des crédits supplémentaires par rapport à ceux prévus aujourd'hui pour les policiers auxiliaires (108 millions de francs en 1997 pour les soldes et compléments de soldes) ; le coût pour l'Etat d'un auxiliaire s'élevait à 75.000 F par an ; aujourd'hui, l'hébergement et les frais de nourriture des policiers auxiliaires, à l'exception de ceux servant dans les services spécialisés, étaient pris en charge par les collectivités territoriales ; ce système, entré dans les usages, devrait, selon le directeur général, se perpétuer dans le cadre du volontariat ;
- le rendez-vous citoyen devrait mobiliser 50 fonctionnaires de police en 1997, et 250 à 300 policiers, à terme ; disposant de quelque 2.000 formateurs, la police nationale bénéficiait d'une bonne expérience dans ce domaine ;
- le " plan d'action gendarmerie 2002 " fixait à la gendarmerie un projet à moyen terme comparable à celui mis en oeuvre par la police nationale dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation du 21 janvier 1995 relative à la sécurité ; les redéploiements prévus par la gendarmerie visaient à renforcer la présence de cette force dans les zones suburbaines qui relèvent de sa compétence ; il importait d'éviter les doubles emplois et d'assurer une bonne coordination entre la gendarmerie et la police au service de la sécurité ;
- il existait déjà des modalités particulières de recrutement dans la police dans le cadre des emplois réservés ; la part faite aux volontaires dans les concours d'accès à la police devait constituer à la fois un instrument de reconnaissance et un élément attractif ;
- si la durée de la formation avait été ramenée, à la suite du plan Vigipirate, de deux à un mois, il serait préférable, dans la perspective du volontariat, de revenir à une durée de formation de deux mois suivie par douze mois de service au sein de la police nationale.