ARTICLE 10
(ART. 78-2-1 NOUVEAU DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE)
VISITES ET CONTRÔLES D'IDENTITÉ DANS LES LIEUX PROFESSIONNELS
DANS LE CADRE DE LA LUTTE CONTRE LE TRAVAIL ILLÉGAL

Cet article figurait à l'origine dans le projet de loi relatif au renforcement de la lutte contre le travail illégal dont il a été disjoint.

L'article 10 crée dans le code de procédure pénale un article 78-2-1 pour faciliter l'accès dans les lieux professionnels des officiers de police judiciaire et agents de police judiciaire chargés de lutter contre le travail illégal aux fins d'y contrôler, au travers des registres et des vérifications d'identité, la régularité des emplois. Son insertion dans le présent texte permet sa coordination avec l'article 2 auquel il sert de fondement.

En effet, l'article 2 prévoit qu'à l'occasion de ces contrôles, comme pour ceux prévus aux articles 78-1 et 78-2 du code de procédure pénale, les ressortissants étrangers pourront être tenus de présenter leurs titres de séjour, ce qui permettra de vérifier la régularité de leur présence sur le territoire et leur autorisation de travail.

A l'heure actuelle, le code du travail en ses articles L. 611-8 et L. 611-13 prévoit :

- d'une part, l'accès sans restriction des inspecteurs du travail dans les établissements et la possibilité pour eux de se faire présenter l'ensemble des registres et documents obligatoires pour contrôler le travail illégal sans qu'ils puissent procéder à des contrôles d'identité ;

- et d'autre part, dans le cadre des enquêtes préliminaires sur le travail illégal et l'emploi d'étrangers sans titres, sur ordonnance du président du tribunal de grande instance rendue sur réquisitions du procureur, la visite par les officiers de police judiciaire des lieux de travail, pour perquisitionner et procéder à des saisies même lorsqu'il s'agit de locaux habités (loi n° 90-9 du 2 janvier 1990 non soumise au Conseil constitutionnel).

Le présent article met à leur disposition une procédure plus simple, donc plus rapide et plus efficace tout en intégrant des garanties sine qua non.

Les officiers de police judiciaire assistés des assistants de police judiciaire pourront, sur réquisitions écrites du procureur de la République, procéder sur les lieux de travail, sauf s'ils constituent un domicile, à des contrôles d'identité des employés afin de vérifier qu'ils figurent sur le registre du personnel et que les déclarations préalables à l'embauche ont été effectuées. Ils pourront à cet effet se faire présenter ces documents.

Les réquisitions du procureur visent des infractions prévues aux articles L. 324-9 (travail illégal) et L. 341-6 (emploi d'un étranger sans autorisation de travail) du code du travail. Elles sont limitées dans la durée (un mois) et dans l'espace (désignation des lieux).

Ces réquisitions sont présentées à la personne disposant des lieux.

Tel était le dispositif initial du projet de loi.

Outre une nouvelle rédaction, adoptée à l'initiative de la commission des Lois approuvée par le Gouvernement, qui inverse l'ordre des opérations (vérification des registres puis contrôle d'identité) et étend ce contrôle à la dissimulation des activités, l'Assemblée nationale a prévu que ces visites puissent également être effectuées, sur réquisitions du procureur de la République spécialement motivées, dans " les locaux principalement à usage professionnel " (amendements de MM. Léonard et Philibert approuvés par la commission des Lois et le Gouvernement).

Cette extension, quelque peu contradictoire en apparence avec l'exclusion des domiciles, répond au souci d'éviter que l'immunité du domicile ne soit conférée à un local professionnel muni de quelques commodités domestiques.

Ce souci qui répond à des considérations pratiques très compréhensibles compte tenu de la nature des infractions poursuivies ne justifie pourtant pas que les règles habituelles de protection du domicile, voire des locaux mixtes (qui sont donc, ainsi, en partie des domiciles) soient écartées au bénéfice d'une procédure qu'il paraît préférable de réserver à un lieu strictement professionnel.

Le procureur est sans aucun doute un magistrat garant du respect de la liberté individuelle au titre de l'article 66 de la Constitution ainsi qu'a pu le rappeler le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 93-326 DC du 11 août 1993, mais il a également indiqué dans une autre décision que doit être " prise en considération l'hypothèse dans laquelle des locaux susceptibles d'être visités serviraient, pour partie, de domicile " (décision 90-281 DC du 27 décembre 1990).

Compte tenu de l'existence d'autres procédures d'accès aux locaux susceptibles d'être qualifiés de domicile, toutes commandées par un magistrat du siège, il est apparu préférable à la commission des Lois d'écarter l'extension aux locaux mixtes (article 611-13 du code du travail précité, et plus généralement, dans le cadre des procédures judiciaires.).

La commission des Lois vous proposera en conséquence un amendement de suppression du dernier alinéa.

Elle a, pour le surplus, approuvé la rédaction de l'Assemblée nationale.

Votre commission vous propose d' adopter cet article ainsi modifié.

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