II. LE PARTENARIAT FRANCO-SUD-AFRICAIN
La présence française en Afrique du Sud remonte historiquement à l'installation de Huguenots au Cap en 1688, à la suite de la révocation de l'Edit de Nantes. Des relations étroites entre les deux pays ne se sont toutefois développées qu'à partir des années 1960. La coopération nucléaire et les échanges militaires en ont été les deux axes privilégiés.
La condamnation de l'apartheid par la France et son association aux sanctions internationales ont assuré à notre pays la sympathie de la nouvelle Afrique du Sud. Les contacts réguliers de haut niveau sont désormais acquis entre les deux partenaires. Certes, les rapports privilégiés qu'entretient naturellement l'Afrique du Sud avec l'Allemagne et le monde anglo-saxon ne sauraient faire de la France un partenaire de premier plan, en dépit des efforts accomplis par notre pays sur le plan commercial et en matière d'aide. Toutefois, les priorités qui sont désormais, pour le diplomatie sud-africaine, les relations avec l'Afrique, l'Océan Indien et l'Europe peuvent renforcer l'importance du partenariat franco-sud-africain aux yeux de Pretoria.
A. UN DIALOGUE POLITIQUE SOUTENU
Suspendus après 1975, les contacts politiques entre la France et l'Afrique du Sud ont repris en 1990, lors de la libération de Nelson Mandela. Les visites en France du leader de la lutte contre l'apartheid en 1990, 1991 et 1992 ont confirmé le soutien apporté par la France à la transition sud-africaine. Après le voyage de M. Alain Juppé en janvier 1994, la visite du président François Miterrand a été la première visite d'un chef d'Etat occidental dans la nouvelle Afrique du Sud. Le séjour à Paris de Nelson Mandela en juillet 1996 en a constitué le prolongement.
Mentionnons également les séjours à Paris, en 1996, du Ministre des finances sud-africain, M. Trevor Manuel, puis du Ministre de la Défense, M. Joe Modise.
Le soutien français à la transition sud-africaine s'est également traduit, entre autres manifestations, par la contribution d'experts français à l'élaboration de la nouvelle constitution.
B. UNE COOPERATION BILATERALE DYNAMIQUE, DES RELATIONS COMMERCIALES A DEVELOPPER
1. La France, premier bailleur d'aide européen de l'Afrique du Sud
L'accord de coopération culturelle, scientifique et technique passé entre les deux pays le 4 novembre 1994 constitue le cadre d'une véritable coopération institutionnelle. Celle-ci vise essentiellement la formation à tous les niveaux, depuis la formation technique de base jusqu'à la formation des cadres, sans oublier la formation administrative.
Dans un autre domaine, l'Institut français d'Afrique du Sud, inauguré en 1994 à Johannesburg, est le cadre de manifestations culturelles appréciées, ainsi qu'un centre de recherche en sciences humaines et un centre de documentation sur la France et le monde francophone.
L'effort français concerne également le développement urbain (électrification, logement social), ainsi que la gestion des ressources en eau.
De manière générale, la coopération franco-sud-africaine s'appuie prioritairement sur la coopération scientifique et technique (41 % des crédits d'intervention), puis sur la politique éducative et sur l'aide à l'enseignement du français (32 %), même si l'enseignement du français ne peut qu'être gêné par l'existence de onze langues parlées en Afrique du Sud. Les alliances françaises, l'action artistique et la communication représentent 27 % des crédits d'intervention. 2 ( * )
L'aide française est, de loin, avec 86 millions de dollars en 1995, la première des aides européennes apportées à l'Afrique du Sud, devant les aides britannique et allemande.
2. Les relations commerciales franco-sud-africaines : un bilan nuancé
* La France n'est que le sixième partenaires commercial avec seulement 3,9 % du marché sud-africain en 1996. L'Allemagne représente 16,7 % du marché sud-africain (11,8 % pour les Etats-Unis, 11,1 % pour la Grande-Bretagne et 10,3 % pour le Japon). Les exportations françaises reposent sur les biens d'équipement professionnels, les semi-produits industriels et sur les biens de consommation. L'Afrique du Sud demeure fournisseur de matières premières et de produits de base.
* Les relations commerciales bilatérales connaissent néanmoins un certain essor. Les exportations françaises ont progressé de 10 % en 1995, et les entreprises françaises semblent bien placées dans les appels d'offre pour des projets d'équipement important (adduction d'eau, bâtiments et travaux publics, télécommunications). C'est ainsi que l'Afrique du Sud est devenue le premier débouché de la France en Afrique sub-saharienne , devant la Côté d'Ivoire. Nos échanges sont excédentaires en notre faveur. Mentionnons aussi que notre part du marché sud-africain, certes modestes, représente plus de deux fois notre part moyenne du marché asiatique.
* Notre pays n'est que la quatrième investisseur étranger en Afrique du Sud. Le stock d'investissements français a néanmoins plus que doublé depuis 1993, et représente désormais plus de trois milliards de francs .
On compte aujourd'hui 125 entreprises françaises présentes en Afrique du Sud, et soutenues par une agence de promotion réciproque des investissements et de la coopération industrielle (OCSAF). Notons également que le respect, par la France, de sanctions économiques est à l'origine d'un certain retard en matière d'investissements.
C. UN ATOUT POUR LA FRANCE : DES INTERETS REGIONAUX CONVERGENTS
L'Afrique du Sud et la France ont en commun leur intérêt pour le continent africain et pour l' Océan indien .
• Conscients du rôle particulier que joue la France en Afrique, les Sud-Africains sont également intéressés par le développement de leurs échanges avec l' Afrique francophone . L'Afrique sera donc probablement un terrain privilégié de la coopération franco-sud-africaine.
• L'Afrique du Sud jouant un rôle majeur dans l'élaboration d'une association des pays riverains de l'Océan indien, il pourra être utile de convaincre nos partenaires sud-africains que La Réunion a sa place dans ce regroupement. A cet égard, La Réunion est - avec la région Bretagne - un acteur important de la coopération décentralisée entre la France et l'Afrique du Sud.
• La connivence suscitée par ces intérêts régionaux communs peut atténuer la seule véritable friction dans les relations bilatérales que constitue la négociation de l'accord de libre-échange entre l'Afrique du Sud et l'Union européenne . En effet, la prudence dont fait preuve la France du fait de la fragilité de certains de ses produits agricoles et industriels conduit Pretoria à voir dans la France un obstacle majeur à la conclusion de l'accord - alors même que les secteurs susceptibles d'être exclus du libre-échange ne dépassent pas 4 % de la production agricole totale de l'Afrique du Sud.
* 2 Jean Cluzel, Du modèle canadien à l'appel sud-africain , LGDJ, 1996.