TITRE IX - DISPOSITIONS DIVERSES

Article 43 - Disposition relative aux sociétés de développement régional en liquidation

Commentaire : le présent article accorde une autorisation législative rétroactive aux actes accomplis par l'État dans le cadre de la liquidation amiable de trois sociétés de développement régional, LORDEX, CENTREST et la SDR de Picardie.

Les sociétés de développement régional connaissent, depuis le début des années quatre-vingt, des difficultés financières sérieuses, au point que trois d'entre elles, celle de Lorraine, LORDEX, celle du centre de l'est, CENTREST et celle de Picardie, ont dû être mises en liquidation amiable sous le contrôle d'un administrateur nommé par la commission bancaire.

Il n'y a pas lieu de revenir ici sur la problématique d'ensemble des SDR, sujet exploré par les commissions des finances des deux assemblées ( 4 ( * )) .

Le présent article a un objet très précis : valider les actes de l'État » déjà accomplis, dans le cadre des trois liquidations, non dans l'ensemble de leurs aspects, mais uniquement pour le cas où ils seraient contestés sur le fondement de l'absence d'autorisation législative.

I. L'INTERVENTION DE L'ÉTAT DANS LA CONSOLIDATION DES SOCIÉTÉS DE DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL EST JUSTIFIÉE PAR LEUR RÔLE DANS LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE LOCAL

A l'exception de la SDR de Corse, la CADEC, l'État est absent du capital des SDR. Il ne nomme ni n'agrée leurs dirigeants. La présence d'un commissaire du gouvernement au sein de leurs conseils d'administration n'est justifiée que par les avantages fiscaux dont bénéficient les SDR.

Pour autant, l'État ne pouvait se désintéresser de leur sort.

L'État apporte en effet sa garantie, en vertu de la loi n°53-30 du 7 février 1953 modifiée, aux emprunts des SDR, soit directement, soit, depuis 1987, à travers la garantie des émissions de FINANSDER, société financière chargée de leur refinancement, créée en 1983 pour gérer la dette commune, et dont les SDR détiennent la totalité du capital. Cette société emprunte sur le marché obligataire avec la garantie de l'État et reprête aux SDR sur des durées équivalentes.

Le montant actuel des garanties accordées s'élève à plus de 30 milliards de francs.

En outre, le rôle des SDR, au service du financement des PME, ne peut être oublié. Ces instruments locaux du développement économique doivent être consolidés par la puissance publique.

II. LES MODALITÉS DE L'INTERVENTION DE L'ÉTAT POUR RÉSOUDRE LA CRISE FINANCIÈRE DES SOCIÉTÉS DE DÉVELOPPEMENT RÉGIONAL

L'intervention de l'État dans le redressement financier des SDR prend trois formes.

1. La consolidation globale de la situation financière des SDR.

Même si les SDR ne se sont pas réunies en réseau, le risque de faillites en chaîne n'est pas à négliger.

En raison de l'importance des emprunts groupés, comportant des clauses de défaut croisées selon lesquelles en cas de non paiement par l'un quelconque des débiteurs, l'ensemble des prêts devient exigible par anticipation, la mise en jeu de l'une de ces clauses par le dépôt de bilan de l'une des SDR aurait pu placer en grande difficulté l'ensemble des SDR.

En outre, les SDR ont souscrit des prêts auprès de la Communauté européenne du charbon et de l'acier et auprès de la Banque européenne d'investissement. Ces prêts comportent des clauses particulières au terme desquelles le prêteur peut demander le remboursement du prêt dès que la situation de la société lui paraît de nature à mettre en cause sa solvabilité finale. De telles clauses pourraient être invoquées par ces institutions européennes si la situation des SDR n'était pas apurée à bref délai, de façon à leur garantir le paiement final de leurs prêts.

Enfin, FINANSDER gère un fonds de garantie mutualisé qui s'analyse comme un dépôt des SDR lequel, s'il était amené à être utilisé pour couvrir les pertes de l'une des SDR, dans le cas par exemple d'un dépôt de bilan, pourrait provoquer des pertes à due concurrence dans les SDR saines contributrices.

Pour ces motifs, le règlement ordonné du cas des SDR en difficulté a été entrepris depuis plus de deux ans. Ce règlement doit apporter des solutions au cas par cas, dans le but d'aider ces sociétés à surmonter ces difficultés afin de leur permettre de jouer à nouveau un rôle actif dans le développement régional des PME.

Sur un plan général, les SDR devraient se recentrer sur leurs missions originelles d'apporteurs de capitaux à long ternie aux PME : fonds propres, crédit bail immobilier, crédit à long terme.

2. La restructuration de l'actionnariat des SDR.

Afin de favoriser la restructuration de l'actionnariat des SDR financièrement saines pour leur redonner une capacité d'action nouvelle, celles-ci ont été ou seront adossées sur un actionnaire principal assurant, à terme, leur financement et responsable de leur devenir.

Ces actionnaires principaux sont les Caisses d'épargne et la Caisse des dépôts et consignations.

3. La liquidation amiable des trois SDR les plus en difficulté.

Pour les trois SDR les plus en difficulté, LORDEX, CENTREST et PICARDIE, un processus de liquidation amiable a été enclenché.

Afin d'éviter un dépôt de bilan dont les conséquences ont été évoquées, les pouvoirs publics ont entrepris des négociations avec les principaux actionnaires et créanciers, au premier rang desquels figure FINANSDER pour 310,9 millions de francs répartis de la façon suivante :

- 116,5 millions de francs dans CENTREST,

- 39,2 millions de francs dans LORDEX,

- 155,2 millions de francs dans PICARDIE.

Dans chaque cas, un protocole de liquidation amiable a été conclu.

Les créanciers participeront au comblement du passif de liquidation en contrepartie d'un engagement de l'Etat d'apurer les passifs de liquidation résiduels de ces institutions.

Le coût direct actualisé pour l'Etat de la liquidation de ces trois SDR sera de l'ordre de 1,25 milliard de francs.

Les encours à gérer devraient diminuer rapidement. Le montant des remboursements d'emprunts accordés par ces SDR était estimé, au 31 décembre 1995, à 10 milliards de francs et devrait diminuer progressivement Pour passer à 4 milliards de francs en 1999 et s'éteindre totalement en 2007, compte non tenu de la cession d'encours des filiales de crédit-bail des SDR, pour un montant de 2,4 milliards de francs.

Les actifs des SDR concernées, constitués d'encours de crédit pour environ 5 milliards de francs et de participations industrielles pour environ 700 millions de francs, seront cédés, avec une forte décote.

La charge financière supportée par l'Etat devrait s'étaler entre 1997 et 2008 et pourrait s'éteindre aux alentours de 2002.

Un contrôle a été mis en place pour préserver les intérêts patrimoniaux de l'État. Un administrateur provisoire a été nommé à LORDEX et PICARDIE par la commission bancaire. L'État dispose de surcroît d'un unique commissaire du gouvernement pour les trois SDR, afin d'assurer une meilleure coordination et un suivi de leurs actions. Enfin, les pouvoirs publics pourraient prochainement bénéficier des services d'une banque conseil.

III. LA LIQUIDATION AMIABLE DES TROIS SDR DOIT ÊTRE VALIDÉE PAR LE LÉGISLATEUR

Les conventions de liquidation amiable ont été conclues entre l'Etat, les actionnaires et les créanciers de CENTREST (28 septembre 1994), LORDEX (3 janvier 1995) et PICARDIE (31 mars 1995).

Or, l'État a apporté sa garantie sans autorisation préalable du Parlement.

Le présent article propose donc de valider tous les actes accomplis et les garanties accordées par l'État dans le cadre de cette liquidation amiable.

Il s'agit d'éviter que ces actes ne soient contestés en raison de l'absence d'une autorisation législative. Cette validation ne concerne que leur contestation sur le terrain du défaut de base légale.

Une telle procédure a déjà été mise en oeuvre par les articles 18 et 19 de la loi n°95-1251 du 28 novembre 1995, relative à l'action de l'État dans les plans de redressement du Crédit Lyonnais et du Comptoir des entrepreneurs, pour valider les actes accomplis et les engagements pris par l'État dans le cadre du redressement des deux établissements précités.

Alors que le rapporteur de la commission des finances de l'Assemblée nationale avait proposé la suppression de cet article au motif que l'article 83 de la loi de finances pour 1995, qui prescrit au Gouvernement de déposer en annexe du projet de loi de finances initiale un rapport décrivant chacune des opérations de crédit à court, moyen ou long terme ou des opérations financières bénéficiant de la garantie de l'État, n'était toujours pas appliqué, aucun document n'ayant été déposé à cet effet, l'Assemblée nationale a adopte cet article sans modification.

Le rapport en question a en effet été déposé entre-temps. Par ailleurs, lors de la séance du 7 mars 1996, le ministre de l'économie et des finances, M. Jean Arthuis, a précisé qu'il s'attacherait à renforcer la connaissance et l'évaluation du patrimoine de l'Etat et annoncé la constitution d'une mission "afin que soient présentés au Parlement des comptes consolidés des entreprises dont l'État est l'actionnaire majoritaire ou dont il détient des participations significatives".

Cette réforme, destinée à renforcer l'information du Parlement et à lui permettre de mieux exercer sa mission de contrôle de l'action gouvernementale et des administrations, permettra sans doute d'éviter qu'à l'avenir le Parlement valide l'octroi de garanties financières par l'État, en étant informé seulement a posteriori.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 4 Rapports Sénat n° 44, 1994-1995 - Jean Arthuis, Paul Loridant, Philippe Marini et Assemblée nationale n° 1841 (1994) - Gérard Trémège.

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