CHAPITRE V LES EXIGENCES COÛTEUSES DE LA SOLIDARITÉ
Après l'accession à la propriété, la seconde priorité du gouvernement est le logement de nos concitoyens en difficulté. Mais autant le gouvernement fait preuve d'audace pour remédier à une situation ubuesque aux termes de laquelle des centaines de milliards de francs ont été engloutis par le système bancaire pour construire des bureaux vides alors que des centaines de milliers de personnes vivent dans la rue, autant il fait preuve d'atermoiements pour résoudre le problème de l'explosion des aides à la personne.
I. LE LOGEMENT DES PLUS DEMUNIS
La politique du logement des ménages les plus modestes fait appel à quatre vecteurs financiers principalement : le PLA très social, la ligne d'hébergement d'urgence, l'ANAH et les Fonds de solidarité (FSL).
A. LA POLITIQUE D'URGENCE ET D'INSERTION
Ø Le PLA-TS (logements d'insertion) fait l'objet d'un taux de subvention de 20 % (qui peut aller jusqu'à 25 % par dérogation préfectorale).Il est destiné aux personnes percevant moins de 60 % des plafonds de ressources PLA. Le loyer maximal est de 80 % de celui d'un logement PLA. Depuis février 1995, son taux d'intérêt est de 4,8 % (contre 5,8 % auparavant).
En 1994, le programme de PLA-TS a été porté de 10.000 logements financés prévus en loi de finances initiale à 20.000 dans le cadre du plan en faveur du logement des plus démunis. Pour 1995, 20.000 PLA-TS ont été programmés en loi de finances initiale et dans le cadre du plan d'urgence une dotation supplémentaire de 465 millions de francs a été ouverte en loi de finances rectificative de printemps.
Ø La ligne budgétaire d'hébergement d'urgence a été créée en collectif budgétaire de 1993 pour subventionner la réalisation d'opérations d'hébergement d'urgence et de logement temporaire. La dotation budgétaire, de 100 millions de francs, a été reconduite en loi de finances initiale pour 1994 et en 1995 1 ( * ) .
Le bénéfice des subventions a été ouvert aux organismes HLM, aux Sociétés d'Économie Mixte, aux collectivités locales et à leurs groupements, aux CCAS et à tous les organismes (notamment la SONACOTRA) et associations oeuvrant dans le domaine de l'insertion par le logement.
Le taux de subvention est fixé à 50% maximum de la dépense toutes taxes comprises, non plafonnée.
Depuis le lancement du programme d'hébergement d'urgence et de logement temporaire en 1993, 153 millions de francs de subventions ont été accordés dont 89,3 millions de francs en Ile de France et 63,7 millions de francs en province.
Sur les 333 opérations financées, 85 ont concerné l'Ile de France et 248 la province. Le nombre de logements ou places créés peut être estimé à 4.812 dont 1.891 en Ile de France et 2.921 en province.
le taux de subvention moyen se situe autour de 39 % (37 % en Ile de France et 43 % en province).
Le coût moyen par logement ou place est de 81.164 F et le montant moyen de subvention par logement ou place est de 31.778 F.
Les opérations sont de natures extrêmement diverses mais consistent, dans leur grande majorité, en la création de structures d'accueil d'urgence (centres d'hébergement, foyers, résidences ou hôtels sociaux) ou de logements temporaires dits logements-passerelles (mobilisation du patrimoine vacant de l'État et des collectivités territoriales).
Ø la loi de finances rectificative de l'été a décidé le financement de 20.000 logements supplémentaires d'urgence et d'insertion. Bien que le ministre du logement ait annoncé une répartition par moitié entre les deux types d'habitation, la répartition des crédits correspond davantage à 8.000 logements d'insertion et 12.000 logements d'urgence (dont 10.000 avant la fin de l'année).
Les objectifs de logements d'urgence et d'insertion
- Ile de France 7.000
- Nord-Pas de Calais 2.300
- Rhône alpes 1.400
-PACA 1.000
- Pays de la Loire 1.000
- Aquitaine 800
- Bretagne 800
- Languedoc-Roussillon 700
- Midi-Pyrénées 700
- Centre 600
- Lorraine 600
- Haute-Normandie 500
- Auvergne 400
- Picardie 400
- Bourgogne 300
- Basse-Normandie 300
- Poitou-Charentes 300
- Alsace 200
- Champagne-Ardennes 200
- Franche-Comté 200
- Limousin 200
- Corse 100
TOTAL 20.000
L'enveloppe de 465 millions de francs ouverte en loi de finances rectificative 1995 au titre des PLA-TS a été répartie ainsi entre les régions, en fonction de l'objectif de 8.000 logements
- Alsace 1,93
- Aquitaine 20,27
- Auvergne 6,69
- Bourgogne 5,37
- Bretagne 19,68
- Centre 17,59
- Champagne-Ardennes 6,12
- Corse 0,72
- Franche-Comté 4,65
- Ile de France 186,35
- Languedoc-Roussillon 10,09
- Limousin 2,54
- Lorraine 11,42
- Midi-Pyrénées 8,84
- Nord-pas de Calais 44,47
- Basse-normandie 6,98
- Haute-Normandie 15,17
- Pays de la Loire 19,86
- Picardie 9,66
- Poitou-Charentes 8,34
- provence Alpes-Côte d'Azur 16,82
- Rhône-Alpes 41,16
TOTAL 465,00
60 % de ces crédits étaient délégués au niveau local début août.
La ligne d'hébergement d'urgence a, quant à elle, été abondée de 400 millions de francs.
Jusqu'au 31 mars 1996, les subventions sont accordées sur décision du préfet de département dans la limite de certains plafonds. Au-delà de ces plafonds et pour certaines opérations (achats d'hôtels meublés), la décision de subvention est prise par un comité interministériel de pilotage national et sont notifiées au préfet de département par le directeur de l'habitat et de la construction.
Les opérations subventionnables doivent créer des capacités nouvelles disponibles toute l'année et être mobilisables sur une durée minimale de 5 années, sauf en cas de coûts extrêmement faibles.
Un premier bilan de cette action a été tiré par le ministre le 28 septembre. Les résultats communiqués par les préfets au 15 septembre sont les suivants : 8.268 logements sont au stade opérationnel et devraient pouvoir accueillir des familles avant la fin de l'année.
Répartition régionale des 8.268 logements d'urgence "opérationnels" le 15 septembre 1995
- Ile de France 2.995
- Nord-Pas de Calais 835
- Languedoc-Roussillon 621
- Rhône-Alpes 499
- Midi-Pyrénées 367
- Aquitaine 354
- PACA 285
- Pays de la Loire 284
- Alsace 243
- Bretagne 233
- Champagne-Ardennes 228
- Lorraine 217
- Centre 197
- Bourgogne 169
- Picardie 166
- Franche-Comté 151
- Poitou-Charentes 145
- Haute-Normandie 140
- Limousin 67
- Basse-Normandie 50
- Auvergne 23
- Corse 0
Les opérations doivent aboutir en priorité à la création de véritables logements et non pas d'hébergements collectifs. Pour les créations ou réhabilitations de tels locaux, chaque famille doit disposer d'un espace privatif, seuls les équipements sanitaires et de cuisine pouvant être communs à quelques familles. Les opérations concernant des chambres à partager par plus de 3 personnes n'appartenant pas à la même famille sont exclues. De même, les normes de peuplement de l'allocation de logement doivent être respectées. Enfin, sont exclus les locaux rattachés à des structures d'hébergement mais non strictement liés à l'hébergement et non mis à la disposition exclusive des occupants (accueil de jour, restaurant public, banque alimentaire...)
À la fin du mois d'août 1995, le ministre du logement a annoncé avoir demandé la réquisition de 500 logements appartenant à des propriétaires institutionnels pour contribuer au plan d'urgence.
B. LE ROLE DE L'ANAH EN FAVEUR DE L'INSERTION
Le régime des aides de l'ANAH, à destination du parc locatif privé, permet l'octroi de subventions majorées (allant jusqu'à 70 %) dans le cas où les logements sont attribués à des ménages défavorisés, notamment dans le cadre des Programmes sociaux thématiques (PST). Le loyer est plafonné et le logement fait l'objet d'une convention ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement (APL).
En 1993, une nouvelle aide majorée de l'ANAH a été créée au titre des interventions spéciales à caractère social. Le bénéfice de ces subventions est ouvert aux associations agréées par le préfet, qui louent un logement du parc privé et le mettent à disposition de personnes défavorisées.
Par ailleurs, le plafond des travaux subventionnables est dorénavant de 40.000 F pour toutes les interventions spéciales à caractère social de l'ANAH.
En 1995, dans le cadre du plan d'urgence, certaines subventions de l'ANAH ont été majorées afin de réduire le nombre de logements vacants et d'accélérer la remise sur le marché locatif de logements privés destines à accueillir des ménages défavorisés. Une dotation de 303 millions de francs a été ouverte pour financer ce plan.
Les mesures correspondantes sont les suivantes : - les logements vacants (inoccupés depuis le 1er juillet 1994) remis sur le marché et conventionnés peuvent bénéficier d'une majoration de la subvention de 20.000 F par logement si le logement fait l'objet d'une convention avec l'État ; - les interventions spéciales à caractère social concernent une nouvelle catégorie : les travaux réalisés par les propriétaires à condition qu'ils concluent un contrat de location avec un organisme agréé qui le met à disposition de personnes défavorisées ; - une majoration de 10.000 F de la subvention si le logement et vacant depuis le 1er juin 1995, pour les travaux réalisés, dans le cadre des interventions à caractère social, par un organisme agréé ou par un propriétaire ; - la création des logements "d'insertion privés" : en dehors des périmètres couverts par un PST, le logement bénéficie d'aides du niveau de celles attribuées en PST si le logement fait l'objet d'une convention avec l'État et à condition que le propriétaire s'engage à louer à des personnes défavorisées ; - la majoration de la subvention de l'ANAH pour les logements vacants (inoccupés depuis le 1er juillet 1995) loués dans le cadre des PST et des logements d'insertion privés ; pour les transformations en logements de locaux non destinés à cet usage, la condition d'ancienneté de la vacance n'est pas exigée. |
C. LES FONDS DÉPARTEMENTAUX DE SOLIDARITÉ POUR LE LOGEMENT
Dans le cadre de la politique en faveur du logement des ménages les plus modestes, les FSL se révèlent être des partenaires de plus en plus importants, notamment pour l'accompagnement social.
Chaque FSL bénéficie d'une participation obligatoire de l'État et du Conseil général, ce dernier devant verser au moins autant que l'État. Les autres partenaires du logement (collectivités locales, organismes bailleurs, Caisses d'Allocations Familiales, collecteurs du "1 %",...) sont invités à participer volontairement au financement de ces fonds.
Évolution de la part de l'État au financement des FSL (Crédits disponibles - en millions de francs)
En 1995, les crédits prévus par la loi de finances initiale, de 220 millions de francs, ont été abondés à hauteur de 110 millions de francs en loi de finances rectificative.
Dépenses des FSL en 1992, 1993 et 1994
En 1994, les aides se sont décomposées en 337,7 millions de francs d'aides au maintien pour le paiement des impayés de loyer soit 44,1 % des aides, 247 millions de francs d'aides à l'accès pour le paiement des dépôts à l'entrée dans les lieux et les frais d'installation soit 32,3 % des aides, 17,4 millions de francs de mises en jeu de garanties consécutives à des impayés de ménages garantis soit 2,3 % des aides et 146,8 millions de francs d'ASLL soit 19,2 % des aides.
En outre, dans 21 départements, 16 millions de francs ont été consacrés à l'hébergement et à l'urgence, via le financement d'associations (contre 7 millions de francs en 1993 sur 11 départements). Cela correspond notamment au soutien des associations bénéficiant par ailleurs de l'aide au logement temporaire (ALT).
* 1 D'où sont sobriquet de "ligne des 100 millions de francs".