II. L'ÉTAT DES LIEUX
A. LA COMPLEXITÉ DU SYSTÈME
Quatre facteurs au moins expliquent la complexité des interventions de la protection judiciaire de la jeunesse :
- l'exécution des décisions judiciaires concernant les mineurs et les jeunes majeurs par des acteurs multiples : État, départements, associations "habilitées",
- le partage des financements entre l'État et les départements, ceux-ci étant en principe en charge des mesures d'assistance éducative et des jeunes majeurs,
- la situation du système en aval de la décision du juge mais aussi de l'action d'autres systèmes : éducation nationale, affaires sociales... et protection administrative des jeunes par le département,
- enfin, la lenteur d'élaboration des schémas départementaux relatifs aux institutions sociales et médico-sociales, prévus par la loi du 30 juin 1975 modifiée.
Ce partage des compétences et des financements aboutit à un système très peu lisible, certainement peu motivant pour l'institution.
Le dispositif actuel de la protection judiciaire de la jeunesse peut être schématisé de la façon suivante :
Source : P.J.J.
B. LA LIMITATION DES MOYENS
1. L'institution judiciaire
Le nombre de juges des enfants est certainement devenu insuffisant pour traiter convenablement le problème de la délinquance des mineurs : aujourd'hui 244 juges des enfants sont en fonction dans 137 tribunaux, soit une moyenne d'un peu plus de 10 par ressort de cour d'appel, face à la montée de la délinquance juvénile. Au regard de la population prise en charge (essentiellement de 0 à 18 ans), il y a, dans les faits, un poste de juge des enfants pour 54.000 mineurs en moyenne.
2. Les moyens du secteur public
Les effectifs de la protection judiciaire de la jeunesse s'élevaient à 5.580 au 1er août 1995, pour un effectif de jeunes pris en charge d'environ 35.000 et quelque 432 structures d'accueil. Moins d'un agent sur deux est affecté aux structures de milieu ouvert.
Le secteur associatif habilité représente, quant à lui, plus de mille structures qui accueillent ou suivent plus des deux tiers des jeunes sous protection judiciaire.
C. DE NOUVELLES POSSIBILITÉS JUDICIAIRES
La loi du 8 février 1995 sur la réforme de l'organisation et des procédures judiciaires a donné au juge des instruments supplémentaires pour lutter contre la délinquance des jeunes :
- Mise en place à l'égard des mineurs de la procédure de la convocation par officier de police judiciaire, préalable à l'interrogatoire de première comparution, permettant ainsi de limiter le délai entre l'interpellation du mineur mis en cause et sa comparution devant un juge des enfants (article 5 de l'ordonnance du 2 février 1945).
Cette procédure permet de garantir davantage le traitement en temps réel des infractions pénales commises par des mineurs.
- Accroissement de la palette des mesures éducatives que peut prendre seul le juge des enfants en audience de cabinet.
Outre les mesures précédemment inscrites à l'article 8 de l'ordonnance du 2 février 1945, le magistrat peut désormais, lorsque le mineur est reconnu coupable des infractions qui lui sont reprochées :
ï le dispenser de toute mesure si les conditions prévues par le texte sont remplies en prévoyant, le cas échéant, que cette décision ne sera pas mentionnée au casier judiciaire ;
ï prononcer sa mise sous protection judiciaire pour une durée n'excédant pas cinq années ;
ï le placer dans un établissement habilité à accueillir des mineurs, dans le cadre de l'ordonnance du 2 février 1945.
- Enfin, la loi du 8 février 1995 a donné au juge des enfants compétence pour continuer à gérer les mesures provisoires de placement, prises à l'égard d'un mineur pendant l'instruction de son dossier, ceci jusqu'à sa comparution devant le tribunal pour enfants (article 10 dernier alinéa de l'ordonnance du 2 février 1945).