N° 61

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 octobre 2024

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur la proposition de loi
visant à
assurer l'équilibre du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles,

Par M. Jean-François RAPIN,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Bruno Belin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Emmanuel Capus, Thierry Cozic, Bernard Delcros, Thomas Dossus, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Stéphane Sautarel, Pascal Savoldelli, vice-présidents ; M. Michel Canévet, Mme Frédérique Espagnac, M. Marc Laménie, secrétaires ; MM. Arnaud Bazin, Grégory Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, M. Éric Bocquet, Mme Isabelle Briquet, M. Vincent Capo-Canellas, Mme Marie-Carole Ciuntu, MM. Raphaël Daubet, Vincent Delahaye, Vincent Éblé, Rémi Féraud, Stéphane Fouassin, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Raymond Hugonet, Éric Jeansannetas, Christian Klinger, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Jean-Baptiste Olivier, Olivier Paccaud, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Georges Patient, Jean-François Rapin, Mme Ghislaine Senée, MM. Laurent Somon, Christopher Szczurek,
Mme Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Sénat :

612 (2023-2024), 60 et 62 (2024-2025)

L'ESSENTIEL

Réunie le 23 octobre 2024 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a examiné le rapport de M. Jean-François Rapin sur la proposition de loi n° 612 (2023-2024) visant à assurer l'équilibre du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, déposée le 21 mai 2024 par Mme Christine Lavarde et plusieurs de ses collègues.

Cette proposition de loi vise à améliorer l'assurance en matière de catastrophes naturelles, et à favoriser le développement de la prévention face aux risques naturels majeurs. Elle découle des travaux menés au nom de la commission des finances par Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial de la mission « Écologie, développement durables »1(*), sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles. La proposition de loi s'inscrit également dans le sillage des réflexions menées dans le cadre du rapport sur les problèmes assurantiels des collectivités territoriales par le rapporteur général M. Jean-François Husson, ainsi que de la mission relative aux inondations de 2023 et du début de l'année 2024 de MM. Jean-François Rapin et Jean-Yves Roux.

Le rapport « Régime CatNat : prévenir la catastrophe financière »
de Mme Christine Lavarde, rapporteur spécial de la mission
« Écologie, développement durables »

Le mercredi 15 mai 2024, la commission des finances a adopté les recommandations du rapport de Mme Christine Lavarde suite à son contrôle budgétaire sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles (régime CatNat). Seize recommandations étaient ainsi formulées, et la présente proposition de loi en reprend neuf qui relèvent du niveau de la loi :

- mettre en place un mécanisme de revalorisation automatique du taux de surprime CatNat (article 1) ;

- interdire le paiement répété de la franchise lors de la succession rapide de catastrophes naturelles (article 2) ;

- instaurer une présomption de refus d'assurer pour motif d'exposition aux catastrophes naturelles dans les zones exposées en cas de saisine du Bureau central de tarification (article 3) ;

- interdire la rémunération des experts en fonction du résultat, ainsi que les liens capitalistiques entre la société d'experts et l'assureur (article 4) ;

- rétablir le principe de libre utilisation des indemnités d'assurance pour l'ensemble des sinistres provoqués par des catastrophes naturelles (article 5) ;

- diminuer la franchise en cas d'adoption de mesures de prévention par l'assuré et en informer celui-ci en amont afin de l'inciter à prendre ces mesures (article 6) ;

- accorder MaPrimeRénov' aux logements qui présentent une exposition aux risques importante, uniquement sous réserve que les travaux de prévention des risques nécessaires aient été réalisés (article 7) ;

- mise en place d'une avance remboursable pour la prévention des risques (article 8) ;

- étendre le champ du fonds pour la prévention des risques naturels majeurs à des mesures de prévention ciblées pour le risque sécheresse et le recul du trait de côte (article 9).

Source : « Régime CatNat : prévenir la catastrophe financière », Christine Lavarde, 15 mai 2024

I. UNE RÉFORME DE L'ASSURANCE DES CATASTROPHES NATURELLES

A. L'INSTAURATION D'UN MÉCANISME DE REVALORISATION AUTOMATIQUE DE LA SURPRIME EST NÉCESSAIRE POUR GARANTIR LA PÉRENNITÉ DU RÉGIME CATNAT

La soutenabilité financière du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, dit « régime CatNat », est menacée par le changement climatique. La présente proposition de loi vise tout d'abord à garantir sa pérennité à long terme. Le rapporteur a proposé dix amendements sur le texte, qui ont tous été adoptés par la commission des finances.

Pour mémoire, le régime CatNat est un régime d'assurance « public-privé » financé par une taxe sur les contrats d'assurance, appelée la « surprime CatNat ». Le régime est géré par la Caisse centrale de réassurance (CCR) qui bénéficie d'une garantie illimitée de l'État.

Le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles,
dit « régime CatNat »

Lorsque l'état de catastrophe naturelle a été déclaré par arrêté, les assureurs sont tenus d'assurer les victimes, au titre de la « garantie CatNat » obligatoire dans tout contrat garantissant les dommages aux biens, et en particulier dans l'assurance multirisque habitation (MRH). La reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle doit être demandée par la commune, dans un délai de 24 mois après l'événement.

En contrepartie, les compagnies d'assurance peuvent souscrire à une offre de réassurance de la Caisse centrale de réassurance (CCR), qui est une société anonyme intégralement détenue par l'État et qui bénéficie d'une garantie illimitée de sa part. Le régime est financé par une cotisation additionnelle assise sur la prime des contrats d'assurance, la « surprime CatNat ».

Le régime CatNat n'a vocation qu'à couvrir des risques naturels « inassurables » par le seul secteur privé. Il intègre notamment les inondations, les séismes, les cyclones (outre-mer) ainsi que le risque retrait gonflement des argiles (RGA). En revanche, il n'inclut pas les risques incendies, tempêtes, grêle et neige, car ils sont déjà couverts par des contrats d'assurance ordinaires.

Source : commission des finances

 
 
 
 

de ménages couverts pour les catastrophes naturelles en France métropolitaine

de coût estimé du risque retrait-gonflement des argiles entre 2020 et 2050

d'augmentation de la surprime « CatNat » pour les contrats habitation au 1er janvier 2025

de hausse de la sinistralité due au changement climatique à l'horizon 2050

Depuis sa création en 1982, le régime CatNat a fait ses preuves. Plus de 97 % des ménages en France métropolitaine sont couverts face aux catastrophes naturelles, et la garantie de l'État n'a été appelée qu'une seule fois, à l'occasion des tempêtes Lothar et Martin.

Toutefois, le régime est aujourd'hui à bout de souffle. Les sécheresses des dernières années et les inondations récentes ont considérablement diminué la provision d'égalisation de la CCR, qui sera à la fin 2024 à un niveau presque nul.

Évolution de la provision d'égalisation de la Caisse centrale de réassurance
et de la sinistralité depuis 2010 : un régime à bout de souffle

Source : commission des finances, d'après les données de la Caisse centrale de réassurance

De plus, le changement induira une pression forte sur le régime CatNat. En effet, le coût de la sinistralité des catastrophes naturelles devrait augmenter d'environ 40 % à l'horizon 2050 pour les seuls enjeux climatiques. Rien que le coût de la sinistralité « sécheresse » représenterait 43 milliards d'euros entre 2020 et 2050, contre 13,8 milliards d'euros au cours des trente années précédentes.

Évolution de la sinistralité entre 2020 et 2050

(en millions d'euros)

Note : les scénarios RCP 4.5 et 8.5 sont deux projections d'augmentation des températures utilisées en climatologie, avec la seconde qui représente une augmentation plus forte que la première.

Source : commission des finances, d'après les données de la CCR

L'augmentation du taux de la surprime de 12 % à 20 %, prévue le 1er janvier 2025, permettra de dégager des recettes supplémentaires pour le régime, mais celle-ci ne permettra pas de garantir son équilibre sur le long terme.

Pour répondre à cet enjeu, l'article 1er de la présente proposition de loi prévoit la mise en place d'un mécanisme de revalorisation automatique du taux de surprime, avec une clause de revoyure quinquennale. Cette mesure, inspirée des conclusions de la mission pour l'assurabilité des risques climatiques2(*), est indispensable. Pour faciliter la mise en oeuvre de cette disposition, la commission a adopté l'amendement COM-1 du rapporteur qui prévoit de décaler au 1er janvier 2027 son entrée en vigueur, et de ramener la durée de la clause de revoyure à trois ans.

B. UN RÉÉQUILIBRAGE DES RELATIONS ENTRE LES COMPAGNIES D'ASSURANCE ET LES ASSURÉS

La présente proposition de loi a également pour visée de rééquilibrer les rapports entre les assurés et les compagnies d'assurance, afin de favoriser une confiance mutuelle entre l'ensemble des acteurs. L'article 2 prévoit ainsi d'interdire la possibilité d'appliquer plusieurs fois la franchise d'assurance en cas de succession d'un même aléa naturel sur une période courte.

Des engagements sont parfois pris pour ne pas appliquer plusieurs fois la franchise, comme cela s'est produit lors des inondations du Pas-de-Calais de l'automne et de l'hiver derniers, mais faute de base légale, cette mesure a fait l'objet d'incompréhensions et d'incertitudes. L'article vise à apporter une clarification et une garantie en inscrivant ce principe dans la loi. Pour assurer de la souplesse du dispositif, l'amendement COM-2 supprime la condition de répétition même aléa naturel pour ne conserver que celle de la durée.

L'article 3 institue une présomption de refus d'assurance pour motif d'exposition aux catastrophes naturelles dans les zones les plus à risque, afin de faciliter la saisine du Bureau centrale de tarification (BCT). À l'heure actuelle, le requérant ne peut que très difficilement faire la preuve que le refus, par une entreprise d'assurance de souscrire un des contrats est lié à l'importance du risque de catastrophes naturelles auquel il est soumis. La présomption créée par le présent article vient ainsi faciliter la procédure de saisine du BCT. L'amendement COM-3 du rapporteur, adopté par la commission, complète ce dispositif en rendant obligatoire une voie de saisine électronique pour le Bureau central de tarification.

L'ébauche d'un véritable statut de l'expert en assurance « CatNat » doit permettre de renforcer l'attractivité de la profession.

La profession d'expert en assurance fait actuellement face à une « crise de confiance », qui a été mise en exergue lors des dernières catastrophes naturelles. L'article 4 vise à y remédier, en inscrivant directement dans la loi des garanties d'indépendance élémentaires vis-à-vis des compagnies d'assurances. L'ébauche d'un véritable statut de l'expert en assurance « CatNat », tel que le propose le présent article doit permettre à terme de renforcer son attractivité. La commission des finances a ainsi adopté l'amendement COM-8 du rapporteur qui permet ainsi d'étendre le champ du présent article aux experts d'assurés car la question de l'indépendance les concerne également. En effet, le développement de cette profession est plus récent, et les auditions menées par le rapporteur ont fait remonter des inquiétudes à ce sujet. Les experts d'assurance peuvent également jouer un rôle de conseil. Pour inciter à l'usage de l'indemnité d'assurance pour des reconstruction améliorée plutôt que des reconstructions, la commission des finances a adopté l'amendement COM-14 portant article additionnel après l'article 5 prévoit de rendre obligatoire dans le rapport d'expertise une présentation de mesures de réduction de la vulnérabilité qui pourraient être mises en place (article 5 bis du texte de la commission).

L'article 5 prévoit de revenir sur une disposition de l'ordonnance du 8 février 20233(*) qui, en matière de retrait-gonflement des argiles, obligeait les assurés à utiliser leur indemnité d'assurance pour réparer leur logement détérioré, les privant de la possibilité, le cas échéant d'utiliser cette indemnité pour se reloger ailleurs.

S'il partage l'intention de l'auteur de la proposition de loi, le rapporteur a aussi entendu les réserves des acteurs de l'assurance quant à la perspective d'un retour à une liberté totale d'affectation des indemnités versées en cas de RGA. L'amendement COM-9 du rapporteur, adopté par la commission, tend à proposer le meilleur compromis à date, à savoir le maintien d'un principe d'affectation assorti de deux exceptions législatives : le coût des réparations excède la valeur du bien, ou alors le bâtiment est devenu inhabitable.

II. INCITER À LA PRÉVENTION DES RISQUES POUR RÉDUIRE LES COÛTS FUTURS

A. AIDER LES PARTICULIERS À LA RÉALISATION DE TRAVAUX DE RÉDUCTION DE LA VULNÉRABILITÉ AUX RISQUES NATURELS

La réforme de la prévention des risques s'inscrit également dans une visée financière : favoriser la prévention des risques aujourd'hui doit permettre des économies plus tard sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles.

L'article 6 prévoit une diminution du montant de la franchise « CatNat » payée par les particuliers au prorata de la mise en place de mesures de prévention adaptées. Une telle disposition existe déjà pour les biens à usage professionnel. Si l'instrument de modulation proposé poursuit un objectif nécessaire, à savoir le renforcement des incitations à l'adoption par les particuliers de mesures de prévention des risques, sa mise en oeuvre opérationnelle paraît complexe. En conséquence, la commission des finances a supprimé cet article en adoptant l'amendement COM-10 du rapporteur.

L'article 7 prévoit l'instauration d'un dispositif de soutien à l'acquisition de prêts pour la prévention des risques, sur un modèle semblable à « l'éco-PTZ » qui existe aujourd'hui pour la rénovation énergétique. L'éco-PTZ rénovation énergétique est un dispositif qui a connu un déploiement significatif sur les dernières années, et qui représente une véritable aide à la rénovation énergétique. Son coût pour les finances publiques s'est en outre révélé raisonnable au regard du nombre de prêts délivrés.

Un dispositif similaire pour la prévention des risques paraît tout à fait indiqué. Il offre une véritable solution de financement pour les particuliers, tout en préservant les finances publiques. Son coût serait inférieur à 5 millions d'euros durant les premières années de son déploiement. En adoptant l'amendement COM-11 du rapporteur, la commission a levé une ambiguïté dans le texte de l'article pour garantir que le risque retrait-gonflement des argiles est bien inclus.

B. ÉLARGIR LE CHAMP DE LA POLITIQUE PUBLIQUE DE PRÉVENTION DES RISQUES NATURELS

L'article 8 prévoit que, dès lors qu'un diagnostic de vulnérabilité aux risques naturels majeurs a établi que le logement se situe dans une zone d'exposition élevée à un ou plusieurs risques naturels majeurs, la prime de transition énergétique, mieux connue sous le nom de MaPrimeRénov', ne peut être versée que sous la condition de la réalisation de travaux de prévention adaptés. À l'heure actuelle la vulnérabilité du bâti aux risques naturels ne fait pas partie des critères conditionnant le financement par MaPrimeRénov'. Or, la rénovation énergétique de logements fortement exposés aux risques naturels, et pour lesquels aucune mesure de prévention n'est prise, représente un véritable gâchis de dépense publique. L'amendement COM-12 du rapporteur, adopté par la commission, prévoit de restreindre le champ de cet article aux rénovations globales, où se concentrent les enjeux financiers.

L'article 9 étend le champ du fonds Barnier au financement d'études et de dispositifs expérimentaux pour la lutte contre le recul du trait de côte ainsi que de prévention des dommages provoqués par le retrait-gonflement des argiles. Le financement de travaux de prévention du risque retrait-gonflement des argiles (RGA) est en effet presque inexistant, alors que ce risque concerne près de la moitié des logements individuels sur le territoire métropolitain, et le fonds Barnier est un bon vecteur.

En revanche, l'intégration de la lutte contre le recul du trait de côte dans le champ du fonds Barnier, tel que le propose le présent article, soulève des difficultés, dans la mesure où ce risque n'est actuellement pas inclus dans le régime Catnat. La commission a donc adopté l'amendement COM-13 du rapporteur qui limite l'élargissement du fonds au RGA. Il n'en reste pas moins que le financement de la lutte contre le recul du trait représente aujourd'hui un véritable angle mort dans la politique publique de prévention des risques, et qu'il est impératif de mener une réflexion sur ce sujet.

C. RÉDUIRE LA VULNÉRABILITÉ DU BÂTI ET PROMOUVOIR LA CULTURE DU RISQUE

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable s'est saisie pour avis sur le texte, en désignant M. Pascal Martin comme rapporteur pour avis. La commission des finances a ainsi adopté cinq amendements proposés par le rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Ces amendements s'articulent autour de deux axes : renforcer les normes relatives au bâti et promouvoir la culture du risque. L'amendement COM-15 prévoit ainsi un renforcement des règles de construction issues de la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Élan) afin de réduire la vulnérabilité du bâti au RGA. En effet, des maisons construites depuis la promulgation de la loi Élan commencent déjà à se fissurer, ce qui impose d'adapter les normes applicables, ce qui était le sens de la recommandation n°9 du rapport de Christine Lavarde sur le régime CatNat.

Afin de sensibiliser au risque les acheteurs et les locataires, et encourager à la mise en oeuvre des mesures de préventions, l'amendement COM-18 prévoit de compléter l'état des risques annexé à l'acte de vente ou de location par une information relative au risque RGA, si le bien en question se situe dans une zone d'exposition moyenne ou forte. La promotion de la culture du risque doit également se faire au plus jeune âge, et c'est la raison pour laquelle l'amendement COM-15 intègre dans les programmes de l'école primaire la prévention des risques naturels majeurs.

L'amendement COM-19 complète l'article 8 par un amendement demandant au Gouvernement d'évaluer et de remettre au Parlement un rapport au terme d'un an sur les effets du conditionnement de l'octroi MaPrimeRénov' à la réalisation de travaux de prévention des risques sur la politique de rénovation énergétique. Enfin, l'amendement COM-17 prévoit que l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) doit accomplir ses missions « en tenant compte des enjeux de prévention des risques naturels », là aussi pour favoriser une meilleure intégration entre la politique de rénovation énergétique et celle de prévention des risques.

La commission a adopté la proposition de loi ainsi modifiée. Cette dernière sera examinée en séance publique le mardi 29 octobre 2024.

EXAMEN DES ARTICLES

CHAPITRE IER

AMÉLIORER LE FINANCEMENT DU RÉGIME D'INDEMNISATION DES CATASTROPHES NATURELLES ET MIEUX PROTÉGER LES ASSURÉS LORS DE LA PROCÉDURE D'INDEMNISATION

ARTICLE 1er

Mécanisme de revalorisation automatique du taux de la surprime CatNat

Le présent article prévoit d'instaurer un mécanisme de revalorisation automatique du taux de la cotisation additionnelle assise sur la prime des contrats d'assurance, appelée « surprime CatNat ».

La « surprime CatNat » a vocation à financer le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles (régime CatNat). Ce régime « public-privé » repose sur une offre de réassurance garantie par l'État, via la Caisse centrale de réassurance, en contrepartie de l'obligation pour les compagnies d'assurance d'inclure une garantie contre les catastrophes naturelles dans les contrats couvrant les dommages aux biens.

Depuis sa création en 1982, le régime CatNat a fait ses preuves, dans la mesure où la garantie de l'État n'a été appelée qu'une fois, en raison des tempêtes Lothar et Martin de 1999. D'autres pays européens, comme l'Allemagne, réfléchissent par ailleurs à mettre en place un système similaire d'assurance face aux catastrophes naturelles.

Cependant, le changement climatique menace aujourd'hui l'équilibre du régime. La sinistralité liée aux sécheresses, aux inondations et aux submersions marines est vouée à fortement augmenter lors des prochaines décennies. L'augmentation du taux de la surprime au 1er janvier 2025 de 12 % à 20 % (contrats d'habitation) ne suffira pas à garantir la pérennité du régime.

Pour préserver le régime CatNat sur le long terme, cet article prévoit ainsi une revalorisation annuelle du taux de la surprime, à partir d'un coefficient qui serait révisé tous les cinq ans pour prendre en compte l'évolution de la sinistralité ainsi que des prévisions sur le changement climatique.

La mise en place de ce mécanisme de revalorisation automatique nécessite néanmoins que les compagnies d'assurance puissent mettre à jour leurs systèmes informatiques, ce qui suppose de décaler la date de mise en oeuvre de cette disposition au 1er janvier 2027. En outre, une clause de revoyure triennale plutôt que quinquennale permettrait un suivi plus fin des effets du changement climatique sur le coût de la sinistralité. Ces deux modifications font l'objet de l'amendement COM-1 du rapporteur.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : LA « SURPRIME CATNAT » FINANCE LE RÉGIME D'INDEMNISATION DES CATASTROPHES NATURELLES

L'article L. 125-1 du code des assurances prévoit que les contrats d'assurance couvrant les dommages aux biens, comme les contrats d'assurance habitation ou automobiles, ouvrent droit à la garantie de l'assuré contre les effets des catastrophes naturelles. Il définit ensuite les catastrophes naturelles, comme « les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l'intensité anormale d'un agent naturel [...] lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n'ont pu empêcher leur survenance ou n'ont pu être prises. »

L'article L. 125-2 du même code précise que les compagnies d'assurance ont l'obligation d'insérer une clause mentionnant cette garantie dans les contrats susmentionnés.

Ces deux dispositions constituent la colonne vertébrale du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, couramment appelé « régime CatNat ». Les compagnies d'assurance ont l'obligation de couvrir les catastrophes naturelles, et en contrepartie, elles ont la possibilité de se faire réassurer auprès de la Caisse centrale de réassurance (CCR), qui est une société intégralement détenue par l'État et qui bénéficie de la garantie illimitée de celui-ci. Pour ces raisons, le régime CatNat est parfois qualifié de régime « public-privé ».

Le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles,
dit « régime CatNat »

Lorsque l'état de catastrophe naturelle a été déclaré par arrêté, les assureurs sont tenus d'assurer les victimes, au titre de la « garantie CatNat » obligatoire dans tout contrat garantissant les dommages aux biens, et en particulier dans l'assurance multirisque habitation (MRH). La reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle doit être demandé par la commune, dans un délai de 24 mois après l'événement.

Dans le même temps, les assurances peuvent souscrire à une offre de réassurance de la Caisse centrale de réassurance (CCR), qui est une société anonyme intégralement détenue par l'État, et qui bénéficie d'une garantie illimitée de sa part. Ces deux versants, une couverture obligatoire par les assureurs privés et une possibilité de réassurance garantie par l'État, constitue le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, dit « régime CatNat ».

Le régime CatNat n'a vocation qu'à couvrir des risques naturels « inassurables » par le seul secteur privé. Il intègre notamment les inondations, les séismes, les cyclones (outre-mer) ainsi que le risque retrait gonflement des argiles (RGA). En revanche, il n'inclut pas les risques incendies, tempêtes, grêle et neige, car ils sont déjà couverts par des contrats d'assurance ordinaires. Les catastrophes naturelles relevant du régime sont listées par une circulaire du 29 avril 2024 (IOME2322937C).

Source : commission des finances

L'article L. 125-2 du code des assurances prévoit que le régime CatNat est financé par une cotisation additionnelle assise sur la prime des contrats d'assurance, appelée « surprime CatNat ». Le taux de cette prime est fixé par arrêté, et il est codifié à l'article A 125-2 du code des assurances.

Dans le droit en vigueur, le taux de surprime est de 12 % pour les contrats multirisques habitation (MRH), et de 6 % pour les contrats d'assurance automobile.

Un arrêté du 22 décembre 2023 prévoit qu'à partir du 1er janvier 2025, il sera appliqué un relèvement du taux à 20 % pour les contrats MRH et à 9 % pour les contrats automobiles.

II. LE DROIT PROPOSÉ : LA MISE EN PLACE D'UN MÉCANISME DE REVALORISATION AUTOMATIQUE DU TAUX DE LA SURPRIME CATNAT

Le présent article modifie l'article L. 125-2 du code des assurances afin de prévoir à partir du 1er janvier 2026 une revalorisation annuelle et automatique du taux de la surprime CatNat.

La revalorisation se fait par application d'un coefficient, déterminé par décret. L'article précise également que ce coefficient doit être revu tous les cinq ans.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE DISPOSITION INDISPENSABLE POUR ASSURER LA SOUTENABILITÉ DU RÉGIME CATNAT

Le financement par la surprime sur les contrats d'assurance a permis de maintenir l'équilibre financier du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles. Depuis sa création en 1982, la garantie de l'État envers la CCR n'a été appelée qu'une seule fois, en raison des dommages exceptionnels provoqués par les tempêtes Lothar et Martin de 1999. L'État avait alors dû verser 263 millions d'euros.

Le régime CatNat permet ainsi une couverture large de l'assurance face aux catastrophes naturelles (plus de 97 % des ménages sont couverts en France métropolitaine), tout en préservant les finances publiques. Il inclut en outre des risques comme le retrait-gonflement des argiles (RGA), qui sont peu couverts d'ordinaire au titre des catastrophes naturelles. Une réflexion est d'ailleurs actuellement en cours en Allemagne pour mettre en place une garantie obligatoire pour les catastrophes naturelles, sur le modèle de ce qui existe en France.4(*)

Cependant, le changement climatique menace l'équilibre du régime CatNat. La Caisse centrale de réassurance, dans la troisième édition de son rapport sur l'évolution du coût des catastrophes naturelles, publié le 17 octobre 20235(*), estime que le coût de la sinistralité devrait augmenter d'environ 40 % à l'horizon 2050, et de 60 % si l'on intègre la progression de la valeur des biens.

En particulier, le coût du risque « retrait-gonflement des argiles » qui représente déjà la part la plus importante du régime CatNat, devrait fortement augmenter à l'horizon 2050. Une étude de France Assureurs, publiée en octobre 20216(*), chiffre le coût de la sinistralité « sécheresse » à 43 milliards d'euros entre 2020 et 2050, ce qui représente un triplement du coût constaté lors des trente années précédentes (13,8 milliards euros). Cette progression de la sinistralité est directement corrélée à l'augmentation de la fréquence des sécheresses.

Évolution de la sinistralité entre 2020 et 2050 (scénarios RCP 4.5 et RCP 8.5)

(en millions d'euros)

Note : les scénarios RCP 4.5 et 8.5 sont deux projections d'augmentation des températures utilisées en climatologie, avec la seconde qui représente une augmentation plus forte que la première.

Source : commission des finances, d'après les données de la CCR

Le rehaussement du taux à 20 % au 1er janvier 2025 était ainsi nécessaire, mais il ne sera pas suffisant pour garantir l'équilibre du régime CatNat dans la durée.

Un mécanisme de revalorisation automatique du taux de de la surprime, tel que proposé par le présent article, est donc souhaitable. Le rapport de la mission sur l'assurabilité des risques climatiques, menée par Thierry Langreney, Grégory Le Cozannet et Myriam Merad, soutient par ailleurs la mise en oeuvre d'un tel mécanisme. La deuxième recommandation du rapport prévoit ainsi d'« Instaurer un mécanisme d'indexation automatique du taux de surprime CatNat afin de prendre en compte les effets du changement climatique, en fixant la réévaluation annuelle initiale à 1 % des taux de surprime (soit 0,2 point de %) par an à compter de 2023. »7(*)

En effet, le décalage entre la décision de relever la surprime et son application effective, qui s'explique par la nécessité pour les compagnies d'assurance de mettre à jour leurs systèmes informatiques, fragilise le régime CatNat, comme l'indique la Caisse centrale de réassurance : « le rehaussement du taux de surprime de 12 à 20 % n'entrera en vigueur qu'au 1er janvier 2025 avec un effet à 100 % en 2026. Entre temps, le risque d'intervention de l'État restera très élevé le temps que la CCR reconstitue ses réserves. »8(*)

En outre, le taux de la surprime n'a été que très rarement adapté au cours des dernières décennies. La dernière revalorisation date du début des années 2000, à la suite des tempêtes Lothar et Martin de 1999. Par conséquent, la revalorisation prévue par l'arrêté du 22 décembre 2023 correspondra quasiment à doubler la surprime actuelle, ce qui se traduira par une augmentation annuelle de 20 à 25 euros des primes des contrats d'assurance habitation. Ces augmentations par à-coups sont dommageables pour les assurés et les compagnies d'assurance, et il est préférable d'avoir une progression de la surprime lissée dans le temps, comme le prévoit le présent article.

La clause de revoyure doit permettre de tenir compte de l'évolution des prévisions relatives au changement climatique ainsi que des données issues de la sinistralité.

La mise en place de ce mécanisme de revalorisation automatique nécessite néanmoins des délais de mises en oeuvre pour les compagnies d'assurance, afin qu'elles puissent mettre à jour leurs systèmes informatiques. Le rapporteur propose ainsi de décaler la date de mise en oeuvre de cette disposition au 1er janvier 2027.

En outre, une clause de revoyure triennale plutôt que quinquennale permettrait un suivi plus fin des effets du changement climatique sur le coût de la sinistralité. Ces deux dispositions font l'objet de l'amendement COM-1 du rapporteur.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 2

Suppression de l'application multiple de la franchise d'assurance
en cas de répétition d'un même aléa naturel

Le présent article prévoit que les franchises du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles ne s'appliquent désormais qu'une seule fois, lors de la succession d'un aléa de même nature, sur une période courte.

Rien n'interdit dans le droit existant d'appliquer plusieurs fois la franchise en cas de succession de catastrophes naturelles. Par exemple, un ménage qui subirait deux inondations en l'espace de trois semaines devraient, en théorie, payer la franchise pour l'assurance des dégâts causés par la première inondation, puis une nouvelle fois pour ceux causés par la seconde.

Dans la pratique, lorsque plusieurs catastrophes naturelles se succèdent, le Gouvernement demande souvent aux assureurs l'engagement de ne pas appliquer plusieurs fois la franchise. Cependant, cette demande n'est fondée sur aucune base légale, et sa portée exacte peut susciter des questionnements et des incompréhensions de la part des sinistrés.

Ces incertitudes plaident pour l'inscription dans la loi du principe selon lequel la franchise ne doit être payée qu'une fois lors de la succession rapide de plusieurs catastrophes naturelles. Cette nouvelle disposition permettrait ainsi de clarifier le champ de l'exemption de la double-franchise.

La définition de ce qu'est un « aléa de même nature » est toutefois particulièrement difficile à établir. Or, l'enjeu de l'article est d'éviter que des assurés qui ont été victimes d'une succession de catastrophes naturelles subissent une « double peine ». La commission a ainsi adopté l'amendement COM-2 du rapporteur qui prévoit supprimer la condition relative à la nature de l'aléa pour ne conserver que la contrainte temporelle.

La commission a adopté l'article 2 ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : L'ASSURANCE DES CATASTROPHES NATURELLES, DANS LE CADRE DU RÉGIME CATNAT, EST SOUMISE À UNE FRANCHISE

L'article L. 125-2 du code des assurances, qui détermine les principes du fonctionnement du régime CatNat, prévoit que « Les indemnisations résultant de cette garantie sont soumises à une franchise dont les caractéristiques sont définies par décret. » L'article précise que les caractéristiques de la franchise, et notamment son montant, « tiennent compte de l'aléa ». En ce qui concerne les professionnels et les personnes morales, la détermination de la franchise doit également tenir compte de « l'importance des capitaux assurés, de l'usage et de la taille des bien assurés ».

Les montants de franchise, selon les catégories d'assurés et les biens considérés, sont détaillées aux articles A. 125-6 et suivants du code des assurances. En particulier, la franchise applicable aux biens à usage d'habitation est de 380 euros (pour le phénomène de retrait-gonflement des argiles, elle est de 1 520 euros).

L'article D. 125-5-1 du code des assurances9(*) prévoit que pour chaque événement qui, dans une commune, a fait l'objet d'une décision de reconnaissance de l'état de catastrophe, le montant de la franchise est appliqué sur la totalité des dommages causés sur les biens.

Ainsi, dans le droit en vigueur, rien n'interdit d'appliquer plusieurs fois la franchise en cas de succession d'un aléa naturel de même nature. Par exemple, un ménage qui subirait deux inondations en l'espace de trois semaines devraient, en théorie, payer la franchise pour l'assurance des dégâts causés par la première inondation, puis une nouvelle fois pour ceux causés par la seconde.

II. LE DROIT PROPOSÉ : LA FIN DE L'APPLICATION MULTIPLE DE LA FRANCHISE EN CAS DE SUCCESSIONS DE CATASTROPHES NATURELLES

Le présent article modifie l'article L. 125-2 du code des assurances, pour préciser que les franchises du régime CatNat ne s'appliquent qu'une seule fois, lors de la succession d'un aléa de même nature, sur une période courte qui devra être définie par décret.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE DISPOSITION NÉCESSAIRE POUR GARANTIR LA SOLIDARITÉ NATIONALE EN CAS DE SUCCESSIONS DE CATASTROPHES NATURELLES

Dans la pratique, la succession de catastrophes naturelles peut conduire à la non-application de la franchise. Par exemple, à la suite des inondations de la fin de l'année 2023 et du début de l'année 2024 dans le Pas-de-Calais, l'ancien ministre de l'économie et des finances, Bruno Le Maire, a déclaré qu'« Il ne serait évidemment pas acceptable qu'un habitant inondé deux fois en deux mois, et qui n'aurait même pas pu bénéficier du lancement de travaux de rénovation, se voit doubler sa franchise. J'ai donc fait le point avec les assureurs. [...] [Ils] s'engagent à ce qu'il n'y ait pas de franchise demandée deux fois aux particuliers »10(*).

Cette mesure était bien sûr indispensable. La solidarité nationale impose que des assurés qui se retrouvent sinistrés à plusieurs reprises à la suite d'une succession de catastrophes naturelles ne soient pas obligés de payer plusieurs fois la franchise.

Cependant, faute d'une disposition correspondante dans la loi, le ministre s'était appuyé pour formuler cette demande sur un « guide d'indemnisation » des assureurs. Cette situation a conduit à des controverses sur l'application effective de l'engagement de ne pas faire payer une double franchise.

Ces incertitudes plaident pour l'inscription dans la loi du principe selon lequel la franchise ne doit être payée qu'une fois lors de la succession rapide de plusieurs catastrophes naturelles. Cette nouvelle disposition permettrait ainsi de clarifier le champ de l'exemption de la double-franchise.

La définition de ce qu'est un « aléa de même nature » est toutefois particulièrement difficile à établir. Une inondation par submersion, suivie d'une remontée de nappe phréatique, peuvent être considérées comme un ou deux événements différents selon les définitions retenues.

Or, l'enjeu de l'article est d'éviter que des assurés qui ont été victimes d'une succession de catastrophes naturelles subissent une « double peine » par l'application multiple de la franchise. La commission a ainsi adopté un amendement COM-2 supprimant la condition relative à la nature de l'aléa pour ne conserver que la contrainte temporelle

Décision de la commission : la commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 3

Présomption de refus d'assurance pour motif d'exposition aux catastrophes naturelles dans les zones les plus à risque

Le présent article prévoit l'introduction à l'article L. 125-6 du code des assurances d'une présomption de refus d'assurance pour motif d'exposition aux catastrophes naturelles dans les zones les plus à risque.

En renversant la charge de la preuve qui pèse actuellement sur l'assuré, cette présomption permet de faciliter la saisine par les assurés du bureau central de tarification (BCT), chargé de veiller au respect de l'obligation d'inclusion d'une garantie « CatNat » dans les contrats d'assurance prévues à l'article L. 125-1 du code des assurances.

La facilitation de la saisine du BCT devrait contribuer à lutter contre le recul de la couverture assurantielle dans les territoires les plus exposés aux risques de catastrophes naturelles.

Le rapporteur partage le constat de la nécessité de s'appuyer sur le BCT pour limiter le phénomène de non-assurance. La commission a ainsi adopté un amendement COM-3 permettant une saisine électronique de cette instance.

La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : UNE POSSIBILITÉ POUR L'ASSURÉ DE SAISIR LE BUREAU CENTRAL DE TARIFICATION EN CAS DE REFUS D'ASSURANCE CONTRE LES CATASTROPHES NATURELLES

A. UNE POSSIBILITÉ DE RECOURS CONTRE LE REFUS D'ASSURANCE

Pour mémoire, l'assurance « CatNat » constitue une garantie « facultativement obligatoire ». En effet, l'assurance « dommages aux biens » n'est obligatoire que pour les locataires et propriétaires d'immeubles placés en copropriété. Toutefois, dès lors qu'ils sont conclus, ces contrats d'assurance ouvrent droit à la garantie contre les effets des catastrophes naturelles sur les biens faisant l'objet de ces contrats, aux termes de l'article L. 125-1 du code des assurances. Dès lors, les entreprises d'assurance sont tenues d'insérer dans ces contrats une clause étendant leur garantie aux dommages liés aux effets des catastrophes naturelles11(*).

Pour prévenir le risque de voir les assureurs se soustraire à la solidarité nationale en refusant de délivrer ou de renouveler un contrat socle couvrant les risques de catastrophes naturelles, et ainsi échapper à l'obligation de garantie, en particulier dans les zones très exposées à ces risques, le législateur a confié à un organisme dédié le soin de veiller au respect de l'obligation de garantie : le bureau central de tarification.

Créé par la loi n° 58-208 du 27 février 195812(*), le bureau central de tarification peut être saisi par tout assuré qui s'est vu refuser par une entreprise d'assurance, en raison de l'importance du risque de catastrophes naturelles auquel il est soumis, la souscription d'un des contrats qui ouvrent droit à la garantie « CatNat ». Le BCT peut imposer à l'entreprise d'assurance concernée la souscription du contrat demandé comprenant la garantie contre les effets des catastrophes naturelles. Cependant, lorsque le risque présente une importance ou des caractéristiques particulières, le bureau central de tarification peut demander à l'assuré de lui présenter, dans les mêmes conditions, un ou plusieurs autres assureurs afin de répartir le risque entre eux13(*).

Pour autant, comme indiqué supra, la seule présence d'une garantie obligatoire « CatNat » dans un contrat de garantie de biens ne crée pas d'obligation pour les entreprises d'assurance de conclure de tels contrats. Pour le juge administratif, le bureau central de tarification ne peut ainsi être saisi que du refus par une entreprise d'assurances d'insérer dans un contrat souscrit par lui une clause étendant la garantie aux dommages liés aux risques de catastrophe naturelle14(*).

B. UNE CHARGE DE LA PREUVE PESANT SUR L'ASSURÉ

Actuellement, le bureau central de tarification est peu saisi de demandes concernant la garantie « CatNat » et rend donc chaque année un nombre limité de décisions. Sur l'année 2023, le BCT a rendu 337 décisions en matière d'assurance automobile, 136 en matière d'assurance construction, 65 en matière d'assurance médicale, et 127 en matière d'assurance habitation, mais seulement trois au titre de sa compétence en matière de catastrophes naturelles15(*). Ce nombre limité de décisions ne présage pas du nombre de saisines. Pour trois décisions relatives au risque de catastrophes naturelles, on compte douze saisines, dont deux dossiers irrecevables, six dossiers incomplets et un dossier sans suites.

La faiblesse de ces chiffres semble indiquer que, dans les zones de France métropolitaine les plus exposées aux risques de catastrophes naturelles, la problématique du refus d'assurance n'est pas majeure. Néanmoins, deux facteurs peuvent contribuer au faible nombre de décisions rendues par le BCT en matière de catastrophes naturelles :

- d'une part, une forte méconnaissance par les particuliers de la possibilité de saisir le BCT et de ses compétences, combinée à des modalités de saisine peu dématérialisées et une procédure complexe ;

- d'autre part, la difficulté pour le requérant d'apporter la preuve que le refus par une entreprise d'assurance, de souscrire un des contrats mentionnés à l'article L. 125-1 du code des assurances, est lié à l'importance du risque de catastrophes naturelles auquel il est soumis, hormis dans le cas où l'assureur motive explicitement son refus par ce risque.

Sur ce dernier point, le BCT se déclare incompétent lorsque le refus de souscrire de tels contrats est lié à un motif autre que le refus d'y inscrire la garantie obligatoire « CatNat ». Il est ainsi possible, pour un assureur souhaitant se soustraire à cette obligation de solidarité nationale, de motiver un refus de souscription par d'autres motifs que le risque de catastrophe naturelle.

À cet égard, le risque de voir progresser la non-assurance du fait du risque « CatNat » est réel. La diminution de la couverture assurantielles des territoires les plus exposés serait dramatique, dans un contexte de multiplication des évènements climatiques aigus.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA CRÉATION D'UNE PRÉSOMPTION DE REFUS D'ASSURANCE POUR MOTIF D'EXPOSITIONS AUX CATASTROPHES NATURELLES DANS LES ZONES LES PLUS À RISQUE

Le présent article introduit à l'article L. 125-6 du code des assurances une présomption de refus d'assurance pour motif d'exposition aux catastrophes naturelles dans les zones les plus à risques.

Il prévoit que, dans le cadre d'une saisine du bureau central de tarification par un assuré s'étant vu refuser la souscription d'un contrat d'assurance contre les « dommages aux biens », lorsque le bien concerné est situé dans une zone exposée aux catastrophes naturelles, le BCT impose à l'entreprise d'assurance concernée la souscription du contrat demandé, comprenant la garantie contre les effets des catastrophes, sauf à ce que l'entreprise d'assurance prouve que son refus est motivé par une raison autre que l'importance du risque « CatNat ».

Le principe selon lequel la charge de la preuve repose sur l'assuré est ainsi conservé, le présent article n'introduisant une exception que pour les biens situés dans les zones les plus à risque. La définition de ces dernières est renvoyée au pouvoir réglementaire.

La présomption de refus d'assurance introduite par le présent article n'est pas irréfragable. L'entreprise d'assurance concernée conserve la possibilité de prouver que son refus n'est pas motivé par l'importance du risque de catastrophes naturelles.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE MESURE PERMETTANT DE FACILITER LA SAISINE PAR LES ASSURÉS DU BUREAU CENTRAL DE TARIFICATION POUR PRÉVENIR LE RECUL DE LA COUVERTURE ASSURANTIELLE

En introduisant une présomption de refus d'assurance pour motif d'exposition aux catastrophes naturelles dans les zones les plus à risques, le présent article permet de lever un obstacle conséquent à la saisine du bureau central de tarification par les assurés. La facilitation du recours au BCT, qui demeure peu saisi sur les risques de catastrophes naturelles, paraît de nature à contrer un éventuel mouvement de retrait des entreprises d'assurance des territoires les plus exposés à ce type de risques ou de sélection des assurés. La possibilité d'une saisine du BCT par l'assuré permettrait également d'inciter les assureurs à mieux motiver leurs décisions de refus d'assurance.

S'il renforce sensiblement les droits des assurés, le dispositif proposé demeure proportionné, en affirmant le caractère réfragable de la présomption de refus. Les entreprises d'assurance concernées par les litiges portées à la connaissance du BCT conservent la possibilité de prouver que leur refus est motivé par d'autres raisons que l'exposition au risque de catastrophes naturelles.

Pour autant, le dispositif de présomption de refus d'assurance pour motifs d'exposition au risque de catastrophes naturelles ne permet pas de pallier l'ensemble des difficultés rencontrées par les usagers dans leur relation au bureau central de tarification. Les auditions menées auprès des différentes parties prenantes du régime d'indemnisation ont en effet porté à la connaissance du rapporteur les difficultés pratiques de recours à cette instance. Les conditions matérielles de la procédure de saisine du BCT sont remarquablement archaïques au regard des enjeux. Il n'est actuellement pas possible pour un usager de saisir cette instance par voie dématérialisée, la demande devant obligatoirement être faite par courrier.

Pour cette raison, la commission a adopté l'amendement COM-3 du rapporteur, qui complète le présent article pour introduire à l'article L. 125-6 du code des assurances une possibilité de saisine du bureau central de tarification par voie électronique.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 4

Garanties d'indépendance des experts en assurance
des catastrophes naturelles

Le présent article prévoit certaines garanties d'indépendance pour les experts en matière d'assurance des catastrophes naturelles.

La profession d'experts en assurance, qu'ils exercent sur demande des compagnies d'assurance ou des assurés, n'est pas une profession réglementée, et il n'existe aucune garantie d'indépendance à l'heure actuelle dans la loi. Un décret à ce sujet est en préparation, mais il ne concerne que le retrait-gonflement des argiles.

Or, la profession fait actuellement face à une « crise de confiance », qui a été mise en exergue lors des dernières catastrophes naturelles. Il est par conséquent indispensable d'écrire directement dans la loi des garanties d'indépendance élémentaires, afin de s'assurer que les experts puissent remplir leur fonction.

En outre, l'ébauche d'un véritable statut de l'expert en assurance, tel que le propose le présent article constitue une première étape vers une revalorisation de la profession, qui doit conduire à renforcer son attractivité.

Le présent article ne traite toutefois que des experts exerçant sur demande des compagnies d'assurance. Or, la question de l'indépendance concerne également les experts agissant pour le compte des assurés. En effet, le développement de cette profession est plus récent, et les auditions menées par le rapporteur ont fait remonter des inquiétudes à ce sujet. Le rapporteur propose ainsi d'étendre le champ du présent article aux experts d'assurés par l'amendement COM-8.

La commission a adopté l'article 4 ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : AUCUNE GARANTIE N'EXISTE DANS LA LOI AU REGARD DE L'INDÉPENDANCE DES EXPERTS D'ASSURANCE

La profession d'experts en assurance, que ce soit pour les assureurs ou les assurés, n'est pas une profession réglementée. En particulier, il n'existe aujourd'hui aucune qualification minimale requise pour exercer en tant qu'expert en assurance dans le domaine des catastrophes naturelles. Il n'existe pas non plus de garanties d'indépendance des experts d'assurance dans la loi.

L'article 1er de l'ordonnance du 8 février 202316(*) prévoit qu'un décret en Conseil d'État doit préciser, dans le cas des experts examinant les dommages causés par les phénomènes de retrait-gonflement des argiles : « les obligations incombant aux experts désignés par les assureurs dans la conduite de l'expertise [...] le contenu du rapport d'expertise ainsi que les modalités et délais d'élaboration de l'expertise. » Le décret n'a toutefois pas encore été publié.

II. LE DROIT PROPOSÉ : UN RENFORCEMENT DES GARANTIES D'INDÉPENDANCE DES EXPERTS EXERÇANT DANS LE DOMAINE DES CATASTROPHES NATURELLES

Le présent article insère un article L. 125-2-1 A dans le code des assurances, dans l'objectif de déterminer certaines garanties d'indépendance pour les experts en matière d'assurance des catastrophes naturelles.

Le I prévoit que les sociétés d'expertises désignées par l'assureur pour évaluer un sinistre à la suite de la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle doivent n'avoir aucun lien capitalistique avec l'assureur, et ne doivent pas réaliser auprès du même assureur une proportion de leur chiffre d'affaires supérieure à un seuil dont la définition est renvoyée à un décret.

Le II dispose que les contrats passés entre l'assureur et les sociétés d'expertise qu'il désigne à la suite de la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ne peuvent contenir de clause liant le montant de la rémunération globale de la société d'expertise au résultat de l'expertise menée.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : DES GARANTIES D'INDÉPENDANCE INDISPENSABLES POUR ÉTABLIR LA CONFIANCE AVEC LES EXPERTS

L'expertise en assurance pour les catastrophes naturelles fait aujourd'hui face à une crise de confiance. Le député Vincent Ledoux, dans le cadre de la mission qu'il menait sur le retrait-gonflement des argiles, a ainsi déclaré aux Assises de la sécheresse, organisées par la Compagnie des experts agréés : « Les victimes et les maires que j'ai rencontrés estiment très majoritairement que les experts sont de mèche avec les assurances, que le système est verrouillé, et qu'ils ne s'en sortiront pas. »17(*)

Le journal Challenges, titrait, dans un numéro du 4 janvier 2024, à la suite des inondations dans le Pas-de-Calais : « Inondations, incendies... Peut-on faire confiance aux experts d'assurance ? ». Christine Lavarde, dans son rapport sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles18(*), ainsi que le rapport de la mission conjointe de contrôle sur les inondations survenues en 2023 et au début de l'année 202419(*) faisaient le même constat.

La profession a déjà adopté des règles déontologiques en interne, et aucun des rapports précités ne fait état de pression des compagnies d'assurance sur les experts. Toutefois, des écarts sont possibles, et les représentants des experts eux-mêmes ont souligné l'intérêt pour leur profession de l'inscription de garanties d'indépendance dans la loi.

La profession fait également face à des difficultés de recrutement, qui sont particulièrement visibles lors des principaux événements de catastrophes naturelles. En effet, la longueur des délais d'indemnisation s'explique principalement par la durée des expertises, qui elle-même découle du manque d'experts qualifiés. L'ébauche d'un véritable statut de l'expert en assurance, tel que le propose le présent article est une première étape vers une revalorisation de la profession, qui doit conduire à renforcer son attractivité.

Une certification de la formation des experts en assurance peut également être envisagée, mais cette disposition relève du domaine réglementaire, et il convient de s'assurer qu'elle ne conduise pas à restreindre trop fortement le vivier d'experts disponible.

Le présent article ne traite que des experts exerçant sur demande des compagnies d'assurance. Or, la question de l'indépendance concerne également les experts agissant pour le compte des assurés. En effet, le développement de cette profession est plus récent20(*), et les auditions menées par le rapporteur ont fait remonter des inquiétudes à ce sujet. Le rapporteur propose ainsi d'étendre le champ du présent article aux experts d'assurés par l'amendement COM-8.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté l'article ainsi modifié.

ARTICLE 5

Rétablissement de la liberté d'utilisation des indemnités d'assurance
en cas de sinistre provoqué par le phénomène de retrait-gonflement
des argiles (RGA)

Le présent article prévoit :

- d'une part de rétablir la liberté d'utilisation des indemnités d'assurance allouées dans le cadre du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles en cas de sinistre provoqué par le phénomène de retrait-gonflement des argiles (RGA). Cela suite à l'obligation imposée par l'ordonnance du 8 février 2023 à l'assuré d'utiliser exclusivement ces indemnités pour réparer les dommages consécutifs au phénomène de RGA ;

- d'autre part que lorsque, dans le cadre du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, un assureur établit que le phénomène de RGA constitue la cause déterminante d'un sinistre, celui-ci notifie cette information dans un délai de trois mois au maire sur le territoire duquel ce sinistre a eu lieu.

S'il partage l'intention de l'auteur de la proposition de loi, le rapporteur a aussi entendu les réserves des acteurs de l'assurance quant à la perspective d'un retour à une liberté totale d'affectation des indemnités versées en cas de RGA. La commission a ainsi adopté l'amendement COM-9 du rapporteur qui représente le meilleur compromis à date, à savoir le maintien d'un principe d'affectation assorti de deux exceptions législatives claires :

- d'une part si le coût des réparations excède la valeur du bien ;

- d'autre part si le bâtiment est devenu inhabitable.

La commission a adopté l'article 5 ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : UN PRINCIPE GÉNÉRAL DE LIBERTÉ D'UTILISATION DES INDEMNITÉS D'ASSURANCE MIS À MAL DANS LE CADRE DU PHÉNOMÈNE DE RGA, PAR UNE ORDONNANCE DE FÉVRIER 2023

A. UN PRINCIPE GÉNÉRAL DE LIBERTÉ D'UTILISATION DES INDEMNITÉS D'ASSURANCE

1. Le principe général est celui de la liberté d'affectation...

S'agissant de l'usage des indemnités d'assurance, il existe un principe général qui postule la liberté qui s'attache à leur affectation. Un sinistré peut en effet, par principe, disposer librement de l'indemnisation versée par son assurance. Il n'est en aucun cas tenu de l'utiliser pour réparer son bien sinistré. Ce principe a été établi et confirmé à plusieurs occasions par la jurisprudence de la Cour de Cassation. À titre d'exemple, l'arrêt n° 81-13 080 de la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation du 16 juin 1982 avait souligné que « l'assuré qui a droit au règlement de l'indemnité n'est pas tenu de l'employer à la remise en état de l'immeuble endommagé, ni de fournir des justifications particulières ». Cet arrêt fondateur a été confirmé par de nombreuses décisions ultérieures.

2. ...même s'il supporte quelques rares exceptions circonscrites

Il serait faux cependant d'affirmer qu'il n'existe aucune exception à ce principe de libre affectation de l'indemnité d'assurance.

La première et la principale d'entre-elles relève du cas particulier de l'assurance dommages ouvrages destinée à couvrir les dommages dont sont présumés responsables les constructeurs d'un bâtiment. Dans le cadre de cette assurance et en vertu des dispositions de l'article L. 242-1 du code des assurances, les indemnités versées par l'assureur doivent obligatoirement être affectées à la réparation de l'ouvrage concerné.

S'agissant de l'assurance dommages cette fois-ci, l'article L. 121-17 du même code prévoit une exception au principe de libre usage mais dans une hypothèse très précise et bien délimitée. L'obligation d'affectation d'une indemnité d'assurance dommages ne s'applique que dans le cas de la prise d'un arrêté communal et dans la seule limite des montants nécessaires à la réalisation des mesures de remises en état prescrites par cet arrêté.

Cette interprétation de l'article L. 121-17 a été confirmée par plusieurs arrêts récents de la Cour de Cassation. Un arrêt du 18 avril 201921(*) précise ainsi que « l'étendue de l'obligation d'affectation des indemnités (...) est limitée au montant de ces indemnités nécessaire à la réalisation des mesures de remises en état prescrites (...) par un arrêté du maire ».

Enfin, certains contrats d'assurance peuvent parfois comprendre des clauses dites « d'utilisation de l'indemnisation ». Ces clauses visent à contraindre l'assuré à utiliser l'indemnité pour réparer ou remplacer le bien sinistré. Le Juge accepte ce type de clauses à condition cependant qu'elles ne dénaturent pas le principe général de libre affectation.

L'illustration la plus commune de ces clauses est ce que l'on appelle « l'indemnité différée » qui intervient dans l'hypothèse d'une indemnisation dite « en valeur à neuf ». Dans le cadre de cette procédure, le sinistré se voit verser une première indemnité dite « immédiate » correspondant à la valeur des biens endommagés et devant être remplacés, de laquelle est déduit un pourcentage correspondant à leur vétusté. Dans un second temps, à condition qu'il apporte la justification de la réparation ou du remplacement des biens concernés, le sinistré perçoit une seconde indemnité dite « complémentaire » ou « différée » correspondant à la valeur de la vétusté des biens sinistrés.

B. L'ORDONNANCE DU 8 FÉVRIER 2023 A RENVERSÉ LE PRINCIPE DE LIBRE AFFECTATION POUR LES SEULS SINISTRÉS VICTIMES DU PHÉNOMÈNE DE RGA

Pour tenter d'apporter des solutions aux problématiques relevant de la reconnaissance et de la prise en charge du risque lié au phénomène de retrait gonflement des argiles (RGA) parfois aussi appelé « risque sécheresse », l'article 161 de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite loi « 3DS », avait habilité le Gouvernement d'alors à prendre par voie d'ordonnance des mesures de nature à améliorer la prise en charge de ce risque au sein du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles. Dans le cadre de cette habilitation du Parlement, le Gouvernement de l'époque a déposé l'ordonnance attendue le 8 février 202322(*).

Or, entre autres mesures, parfois très bienvenues comme l'assouplissement des critères de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle en matière de risque RGA, cette ordonnance a instauré une disposition visant, pour ce seul risque RGA, à renverser totalement le principe général de libre utilisation des indemnités d'assurance.

En effet, l'article 1er de l'ordonnance est venu apporter une modification à l'article L. 125-2 du code des assurances pour, dans le cadre du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, contraindre les sinistrés victimes du phénomène de RGA à exclusivement utiliser le montant de l'indemnisation reçue de leur assurance pour réparer les dommages occasionnés par ce phénomène sur leur habitation.

La quinzième phrase du quatrième alinéa de la nouvelle rédaction de cet article L. 125-2 dispose ainsi que « pour ces sinistres, l'indemnité due par l'assureur doit être utilisée par l'assuré pour réparer les dommages consécutifs aux mouvements de terrain différentiels ». La deuxième partie de la phrase fait même une référence explicite à l'exception circonscrite au principe de libre utilisation des indemnités d'assurance dommage prévue par l'article L. 121-17 du code des assurances (voir supra) pour préciser que l'obligation d'affectation à laquelle sont désormais tenus les sinistrés victimes du phénomène de RGA est totale puisqu'elle s'impose « sans que cette utilisation ne soit subordonnée à l'adoption préalable de l'arrêté mentionné au troisième alinéa de l'article L. 121-17 ».

S'il était appliqué de façon stricte, ce renversement du principe de libre affectation des indemnités d'assurance versée en cas de RGA priverait d'indemnisation un sinistré qui, plutôt que de réparer son bien endommagé sur place, prendrait la décision de s'installer ailleurs, dans une zone moins exposée à cet aléa.

L'article 1er d'un décret du 4 février 202423(*) a cependant prévu d'accommoder cette obligation d'affectation des indemnités d'assurance en l'assortissant d'une dérogation. Selon cette dérogation, à condition que le montant des travaux nécessaires soit supérieur à la valeur vénale du bien endommagé, le sinistré peut alors disposer librement de l'indemnisation, le cas échéant pour déménager ailleurs. Cette dérogation figure désormais à l'article R. 125-6-1 du code des assurances qui stipule à cet égard que « si le montant des travaux de réparation permettant la remise en état effective du bien est supérieur à la valeur de la chose assurée au moment du sinistre, cette obligation d'utilisation de l'indemnité ne s'applique pas ».

II. LE DROIT PROPOSÉ : RÉTABLISSEMENT DE LA LIBERTÉ D'USAGE DES INDEMNITÉS D'ASSURANCE EN CAS DE SINISTRE PROVOQUÉ PAR LE PHÉNOMÈNE DE RGA

Le présent article procède à deux modifications de l'article L. 125-2 du code des assurances.

Le du présent article revient sur la disposition introduite par l'ordonnance du 8 février 2023 afin de rétablir la liberté d'utilisation des indemnités d'assurance allouées dans le cadre du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles suite à un sinistre provoqué par le phénomène de RGA. Pour ce faire le 1° propose la suppression des quinzième et seizième phrases du quatrième alinéa de l'article L. 125-2 du code des assurances qui précisaient.

Le du présent article prévoit quant à lui que lorsque dans le cadre du régime de catastrophe naturelle, après expertise, une assurance a établi que la cause déterminante d'un sinistre est bien le phénomène de RGA, celle-ci est tenue de notifier cette information au maire de la commune concernée dans un délai de trois mois.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : PRÉVOIR DEUX DÉROGATIONS LÉGISLATIVES AU PRINCIPE SELON LEQUEL LES INDEMNISATIONS DU PÉRIL RGA DOIVENT ÊTRE AFFECTÉES À LA RÉPARATION DES BIENS SINISTRÉS

A. BIEN QUE LE RAPPORTEUR PARTAGE L'INTENTION DE L'AUTEUR DE LA PROPOSITION DE LOI, LE RETOUR AU PRINCIPE DE LIBRE UTILISATION DE L'INDEMNISATION RENCONTRE DES OBSTACLES

Le rapporteur souscrit aux intentions de l'auteur de la proposition de loi et notamment au fait qu'il n'est en théorie pas entièrement satisfaisant de renverser le principe de libre affectation des indemnisations d'assurance pour une seule catégorie de sinistrés.

Parallèlement, il a aussi entendu les réserves qui ont pu être formulées par les représentants des assurances, la CCR et les services de l'État, notamment quant à la perspective de rétablir sans accommodements le principe de liberté d'utilisation des indemnisations versées en cas de sinistres dus au phénomène de RGA telle qu'il prévalait avant l'ordonnance du 8 février 2023.

Plusieurs arguments ont été avancés pour défendre le nouveau principe visant à imposer l'affectation de l'indemnisation à la réparation des biens endommagés.

Il a pu être observé des situations dans lesquelles certains propriétaires qui n'avaient pas utilisé leur indemnisation pour réparer leur bien ou seulement pour effectuer des travaux partiels et superficiels qui ne respectaient pas les prescriptions de l'expertise ont mis en vente ce bien. Cette situation, qui laisse subsister sur le marché des biens déjà très dégradés et dont l'état est susceptible d'empirer n'est bien évidemment pas souhaitable.

La question du devenir des biens abandonnés par leurs occupants qui décideraient de se reloger ailleurs en utilisant leur indemnisation doit aussi faire l'objet d'une solution pérenne. Cette situation est un « angle mort » de la législation actuelle puisque rien n'est prévu pour les biens des propriétaires qui se saisiraient de la dérogation prévue par le décret précité du 4 février 2024. À ce jour, l'administration n'a toujours pas trouvé de solution à ce problème.

Bien consciente de cette difficulté, dans son rapport d'information de mai 2024 sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles24(*), l'auteur de la proposition de loi avait notamment suggéré que « pour éviter ces phénomènes, les propriétaires qui feraient le choix d'utiliser leur indemnisation pour déménager ailleurs devraient avoir l'obligation de céder leur bien à titre gracieux à la commune sur le territoire duquel il se trouve. Dans un deuxième temps, le fonds Barnier pourrait être mobilisé pour participer au financement des opérations de démolition et de remise en état des terrains concernés ». Le rapporteur appelle le Gouvernement à étudier sérieusement cette solution qui apparaît comme la plus cohérente qui puisse être envisagée.

Les représentants des assureurs ont également indiqué au rapporteur que selon eux, le rétablissement de la libre affectation des indemnités en cas de RGA constituerait un « mauvais signal » dans la mesure où 48 % du territoire national et plus de 54 % de l'habitat individuel, soit plus de 10 millions de maisons, se trouvent désormais exposées à ce risque. De leur point de vue, il pourrait être dangereux de laisser penser qu'une partie potentiellement significative de ces biens seraient susceptibles d'être laissés à l'abandon. Selon eux, il est essentiel de rendre plus résilient le parc de maisons individuelles existantes en réparant les biens endommagés selon les prescriptions des expertises.

Par ailleurs, la première des priorités, partagée par le rapporteur comme par l'auteur, doit être de protéger le bâti existant par la mise en place de dispositifs de prévention efficaces qui éviteront de devoir recourir à de lourdes et coûteuses mesures de remédiations telles que des reprises de fondations.

B. LE PRINCIPE D'AFFECTATION DE L'INDEMNITÉ RGA DOIT ÊTRE ASSORTI DE DÉROGATIONS DE PORTÉE LÉGISLATIVE

Si le rapporteur comprend les réserves exprimées sur la perspective d'un rétablissement d'une totale liberté d'usage des indemnités de sinistres causés par le phénomène de RGA, il n'en considère pas moins que des dérogations doivent permettre de traiter des cas particuliers dans lesquels une réparation du bien n'aurait tout simplement pas de sens économiquement ou bien pour des cas extrêmes dans lesquels, compte-tenu de l'ampleur des dommages causés à leur bien et du péril encouru, certains propriétaires ne pourraient tout simplement plus envisager de rester dans leur logement.

Ce dernier exemple, qui comporte une dimension psychologique que des regards purement techniques ou économiques pourraient conduire à évacuer, ne doit pas être ignoré. Les conséquences psychologiques de voir son bien fissuré et devenu inhabitable ne doivent pas être négligées par les décideurs publics. C'est avant tout pour venir en aide aux sinistrés que le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles existe, pas pour les forcer à demeurer « ad vitam æternam » dans une habitation qui menace ruine et dans laquelle ils ne supportent plus de faire leur vie.

Aussi, afin de prendre en considération l'ensemble de ces éléments, le rapporteur a-t-il proposé à la commission d'adopter l'amendement COM-9 qui modifie l'article afin de maintenir le principe d'une affectation des indemnités liées au phénomène RGA à la réparation du bien endommagé tout en l'assortissant de deux exceptions législatives, qui ne peuvent être laissées au bon vouloir du pouvoir réglementaire :

l'une de nature économique, si le montant des travaux nécessaires à la réparation du bien endommagé dépasse sa valeur vénale ;

l'autre de nature plus « psychologique », si le logement endommagé est inhabitable.

S'il laisse entier la question du devenir des biens abandonnés, ce compromis semble aux yeux du rapporteur être aujourd'hui le mieux à même de répondre aux différents enjeux de ce sujet sensible.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 5 bis (nouveau)

Intégration d'un « scénario de reconstruction améliorée »
dans le rapport d'expertise

Le présent article, issu d'un amendement COM-14 du rapporteur, prévoit d'inclure dans les rapports d'expertise à la suite d'un sinistre lié à une catastrophe naturelle un « scénario de reconstruction amélioré ». Ce dernier prend la forme de préconisations de travaux de reconstruction visant à réduire la vulnérabilité au risque de catastrophes naturelles.

Une meilleure information des usagers, au moment de la survenue d'un sinistre, constitue une incitation à privilégier non pas une reconstruction à l'identique mais une reconstruction améliorée en identifiant les travaux les plus pertinents à mettre en oeuvre.

La commission a adopté cet article.

I. LE DROIT EXISTANT : UNE OBLIGATION DE TRANSMISSION DU RAPPORT D'EXPERTISE À L'ASSURÉ

L'article 6 de la loi n° 2021-1837 relative à l'indemnisation des catastrophes naturelles du 28 décembre 2021, dite « loi Baudu », a modifié l'article L. 125-2 du code des assurances afin de renforcer la compréhension par l'assuré des conclusions de l'expertise en cas de matérialisation du risque de catastrophe naturelle.

D'une part, l'article L. 125-2 du code des assurances prévoit une obligation, pour l'assureur, de communiquer à l'assuré le rapport d'expertise définitif au sinistre déclaré. Cette obligation se trouve renforcée dans le cas des sinistres causés par le phénomène de sécheresse-réhydratation des sols. Dans ce cas de figure, « l'assureur communique également à l'assuré un compte rendu des constatations effectuées lors de chaque visite ». Pour autant, dans de nombreux cas, les associations de sinistrés ont constaté une mise en oeuvre perfectible de la communication obligatoire du rapport d'expertise.

D'autre part, lorsque l'assuré conteste auprès de l'assureur les conclusions du rapport d'expertise, « l'assureur informe l'assuré de sa faculté de faire réaliser une contre-expertise dans les conditions prévues au contrat et de se faire assister par un expert de son choix ».

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : L'INSCRIPTION DE RECOMMANDATIONS DE MESURES DE PRÉVENTION DANS LES RAPPORTS D'EXPERTISE

Le présent article est issu de l'amendement COM-14 du rapporteur.

Il modifie la treizième phrase du quatrième alinéa de l'article L. 125-2 du code des assurances pour préciser que le rapport d'expertise comprend des préconisations de travaux de réduction de la vulnérabilité.

En prévoyant une obligation d'inclure dans le rapport d'expertise, dont la transmission à l'assuré est obligatoire, des préconisations de mesures de prévention, le présent article introduit une incitation pour les particuliers à mettre à profit les travaux de réparation pour réduire la vulnérabilité de leur bien. Ce « schéma de reconstruction amélioré » tend ainsi à renforcer la résilience des biens à usage d'habitation dans les zones les exposées aux risques de catastrophes naturelles.

Cette disposition s'inspire des diagnostics de vulnérabilité effectués dans les habitations sinistrées et prévus dans le cadre de l'expérimentation « Mieux reconstruire après inondation » (dite Mirapi), créée par l'article 224 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 202125(*). Les diagnostics identifient les fragilités principales des biens aux inondations, et notamment celles pouvant être corrigées par des travaux de réduction de vulnérabilité. Ils en retirent des propositions, classées par ordre de priorité et des estimations de coûts de solutions de réduction de la vulnérabilité aux inondations.

L'expérimentation Mirapi prévoit également un mécanisme de co-financement par l'État de travaux de prévention, déduction faite des indemnités d'assurance et moyennant un reste à charges pour l'assuré. En effet, si l'état du droit ne prévoit pas une obligation de reconstruction à l'identique, le principe de libre utilisation par l'assuré de la somme versée par l'assureur étant même affirmée par la jurisprudence26(*), les assurés sont réticents à recourir à une reconstruction améliorée. Dès lors que l'indemnité d'assurance ne peut pas dépasser le montant de la valeur de la chose assurée au moment du sinistre27(*), les coûts excédentaires engendrés par une reconstruction améliorée sont supportés par les assurés.

Position de la commission : la commission a adopté cet article.

CHAPITRE II

RENFORCER LA POLITIQUE DE PRÉVENTION DES RISQUES NATURELS MAJEURS

ARTICLE 6

Diminution de la franchise payée par les particuliers en cas d'adoption par ceux-ci de mesures de prévention

Le présent article prévoit un mécanisme de modulation à la baisse des franchises des particuliers en cas d'adoption de mesures de prévention. Ce dispositif de modulation est accompagné d'une information des assurés précisant ses conditions de mise en oeuvre.

Si l'instrument de modulation proposé poursuit un objectif nécessaire, à savoir le renforcement des incitations à l'adoption par les particuliers de mesures de prévention des risques, sa mise en oeuvre opérationnelle paraît complexe. D'une part, le montant modéré de la franchise pour les biens assurés par les particuliers limiterait le caractère incitatif de la modulation. D'autre part, la détermination du taux de modulation en fonction des mesures des prévention adoptées constituerait un exercice délicat.

Pour ces raisons, suivant la proposition du rapporteur, la commission a supprimé l'article 6.

I. LE DROIT EXISTANT : UN MONTANT DE FRANCHISE DÉTERMINÉ PAR RISQUE ET TYPE DE BIEN NE POUVANT FAIRE L'OBJET, SAUF EXCEPTIONS, DE MODULATION

Aux termes de l'article L. 125-2 du code des assurances, les indemnisations résultant de la garantie « CatNat » sont soumises à une franchise dont les caractéristiques sont définies par décret. L'assuré ne peut souscrire un contrat d'assurance pour couvrir la part de risque laissée à sa charge par la franchise28(*). Les caractéristiques des franchises et en premier lieu leur montant :

- doivent tenir compte, pour l'ensemble des contrats, de l'aléa ;

- doivent tenir compte, pour les professionnels et les personnes morales de droit privé ou de droit public, de l'importance des capitaux assurés, ainsi que de l'usage et de la taille des biens assurés ;

- peuvent tenir compte, pour les véhicules terrestres à moteur et les biens qui ne sont pas destinés à un usage professionnel, des franchises applicables aux autres garanties portant sur des aléas naturels prévues dans les contrats d'assurance catastrophe naturelle.

Niveau de la franchise par type de bien et de risque

Type de bien

Niveau de la franchise

Référence (code des assurances)

Bien à usage d'habitation

380 euros ou, en cas de RGA, 1 520 euros.

A. 125-6

Véhicule terrestre à moteur (VTM)

380 euros.

A. 125-6-1

Bien à usage professionnel autre que VTM

10 % du montant des dommages matériels directs avec franchise plancher de 1 140 euros (ou 3 050 euros en cas de RGA). Franchise plafond de 10 000 euros pour les entreprises dont la surface est inférieure à 300 mètres carrés29(*), réduction possible en cas de mesures de prévention pour les autres.

A. 125-6-2 et A. 125-6-3

Autres biens (dont ceux des collectivités et de leurs groupements)

Valeur la plus élevée entre :

- 10 % du montant des dommages matériels directs (avec franchise plancher de 1 140 euros ou, en cas de RGA, 3 050 euros) ;

- le montant de la franchise le plus élevé figurant au contrat pour les garanties couvrant les biens ;

- le montant déterminé par arrêté selon la nature du phénomène.

A. 125-6-4

Perte d'exploitation

Franchise plancher de 1 140 euros

A. 125-6-5

Source : commission des finances, d'après le code des assurances

Pour mémoire, la loi n° 2021-1837 du 28 décembre 2021 relative à l'indemnisation des catastrophes naturelles a interdit l'application d'une modulation de franchise à la charge des assurés dans les communes non dotées du plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPRN) en fonction du nombre de constatations de l'état de catastrophe naturelle intervenues pour le même risque, autrement dit le même aléa climatique, au cours des cinq années précédant la date de la nouvelle constatation. Pour autant, la loi du 28 décembre 2021 a maintenu le principe d'une modulation à la hausse de la franchise pour les biens assurés par les collectivités territoriales et leurs groupements pour lesquels un plan de prévention des risques naturels prévisibles a été prescrit mais non approuvé dans les délais réglementaires30(*).

S'agissant des biens à usage professionnel, le code des assurances dispose, à son article A. 125-6-3, que l'assureur peut proposer à l'assuré une réduction du montant de la franchise, à condition que ce dernier puisse démontrer la mise en oeuvre de mesures de prévention des risques de catastrophes naturelles. Pour autant, la réduction de franchise ne peut conduire à fixer un montant de franchise inférieur aux montants planchers, indiqués en valeur absolue à l'article A. 125-6-2 du même code, soit 1 140 euros sauf pour les dommages RGA où le plancher est de 3 050 euros.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE MODULATION DE LA FRANCHISE D'ASSURANCE EN CAS D'ADOPTION DE MESURES DE PRÉVENTION

Le présent article modifie le quatrième alinéa de l'article L. 125-2 du code des assurances afin de permettre une modulation de la franchise d'assurance payée par les assurés en cas d'adoption de mesures de prévention.

D'une part, il prévoit une diminution du montant de la franchise au prorata de l'ampleur des mesures de prévention adaptées au regard de l'exposition au risque, lorsque l'assuré a mis en oeuvre de telles mesures. Les critères de modulation du montant de la franchise sont renvoyés au pouvoir réglementaire.

D'autre part, le présent article prévoit une information des assurés sur ce nouveau dispositif de modulation en précisant que les documents fournis par l'assureur et décrivant les conditions d'indemnisation mentionnent, en sus des franchises applicables, les conditions de leur modulation en fonction de la mise en oeuvre de mesures de prévention.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UNE MESURE INCITATIVE DONT L'OPÉRATIONNALITÉ PARAÎT LIMITÉE

Le présent article vise à inciter les particuliers à mettre en oeuvre des mesures de prévention contre les risques de catastrophes naturelles. Le dispositif proposé s'inspire de la réduction de franchise existant pour les entreprises, à condition qu'elles puissent démontrer la mise en oeuvre de mesures de prévention des risques.

Pour autant, si l'objectif poursuivi, à savoir renforcer la culture du risque chez les particuliers, est évidemment partagé par le rapporteur, le dispositif proposé paraît complexe dans sa portée et sa mise en oeuvre.

D'une part, la portée incitative du mécanisme de réduction de la franchise n'est pas évidente. Le montant des franchises prévues pour les particuliers est en effet relativement limité : 380 euros pour les biens à usage d'habitation ou les véhicules terrestres à moteur et 1 520 euros pour les biens à usage d'habitation en cas de risque RGA. Si ces sommes peuvent représenter des montants conséquents pour les ménages les plus modestes, leur modulation n'apporterait pas un effet de levier suffisant pour encourager les particuliers à prévoir des mesures d'adaptation. Sauf à envisager une augmentation des franchises, pour refléter l'augmentation du risque de catastrophes naturelles, le caractère effectif du présent article ne semble pas satisfaisant.

D'autre part, les modalités pratiques de mise en oeuvre de la réduction de franchise paraissent complexes. Le calcul des coefficients de modulation en fonction de la nature et du montant des travaux de prévention impliquera un travail précis lors de son élaboration et des dispositifs de contrôle et de validation lors de son application. Il existe ainsi un risque que le coût de gestion du dispositif soit supérieur au bénéfice apporté aux assurés, sans permettre l'adoption de mesures de prévention efficaces.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la commission a adopté l'amendement COM-10 du rapporteur supprimant l'article.

Proposition de la commission : la commission des finances a supprimé cet article.

ARTICLE 7

Instauration d'un dispositif de soutien à l'acquisition de
prêts pour la prévention des risques

Le présent article prévoit l'instauration d'un dispositif de soutien à l'acquisition de prêts pour la prévention des risques, sur un modèle semblable à « l'éco-PTZ » qui existe aujourd'hui pour la rénovation énergétique.

L'éco-PTZ rénovation énergétique est un dispositif qui a connu un déploiement significatif sur les dernières années, et qui représente une véritable aide à la rénovation énergétique. Son coût pour les finances publiques s'est en outre révélé raisonnable au regard du nombre de prêts délivrés (moins de 50 millions d'euros par ans), en comparaison notamment de MaPrimeRénov' (plus de 2 milliards d'euros en 2024).

Un dispositif similaire pour la prévention des risques, tel que proposé par le présent article, est tout à fait indiqué. Il offre une véritable solution de financement pour les particuliers, tout en préservant les finances publiques. Son coût serait inférieur à 5 millions d'euros durant les premières années de son déploiement.

La mention de la prévention des risques naturels « majeurs » dans le dispositif présente toutefois une ambiguïté sur la question de savoir si le retrait-gonflement des argiles (RGA) en fait partie ou non, bien que l'intention de l'auteur est qu'il le soit. La commission a ainsi adopté l'amendement COM-11 visant à lever toute confusion en parlant de « risques naturels » en général.

La commission a adopté l'article 7 ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : IL EXISTE UNE AIDE À L'ACQUISITION DE PRÊTS POUR LA RÉNOVATION ÉNERGÉTIQUE

L'article 244 quater U du code général des impôts prévoit l'existence d'un prêt à taux zéro pour les travaux de rénovation énergétique. Ce prêt à taux zéro concerne des travaux de natures variées, comme les travaux d'isolation des toitures ou des murs, ainsi que des travaux de remplacement de systèmes de chauffage.

L'ensemble des travaux ouvrant droit à la prime de transition énergétique (MaPrimeRénov'), à une aide accordée par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) au titre de la lutte contre la précarité énergétique, ou même qui permettent plus généralement d'atteindre « une performance énergétique globale minimale du logement » sont inclus dans le champ de « l'éco-PTZ rénovation énergétique ».

Le montant de l'avance remboursable attribuée à ce titre ne peut excéder la somme de 30 000 euros, sauf pour certains types de travaux, comme les rénovations globales du logement, auquel cas il peut atteindre 50 000 euros.

Le dispositif prend la forme d'un crédit d'impôt accordé aux établissements de crédits et aux sociétés de financements qui vient compenser l'écart entre le taux d'intérêt prévu par le marché et un taux à 0 %. En conséquence, ce dispositif est plus coûteux pour les finances publiques à mesure que les taux d'intérêt augmentent, mais il est dans le même temps plus incitatif pour les particuliers.

II. LE DROIT PROPOSÉ : UN OUTIL D'AIDE AU FINANCEMENT DE LA PRÉVENTION DES RISQUES

Le présent article modifie l'article 244 quater U pour inclure dans son champ les travaux de prévention des risques naturels majeurs. En conséquence, il crée une nouvelle voie de financement des mesures de prévention des risques, similaire à ce qui existe pour la rénovation énergétique.

Les modalités de fonctionnement du prêt seraient similaires à celles applicables à la rénovation énergétique. En particulier, le montant de l'avance remboursable ne pourrait excéder la somme de 30 000 euros par logement.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UN DISPOSITIF APPORTANT UNE VÉRITABLE AIDE AUX PARTICULIERS DANS LA PRÉVENTION DES RISQUES

Les aides à l'acquisition de prêt représentent des solutions de financement complémentaires pertinentes pour le domaine de la prévention. Ils présentent en particulier un véritable intérêt pour les ménages de classe moyenne, qui disposent de suffisamment de ressources pour rembourser un prêt, mais qui ne peuvent pas assumer l'ensemble des coûts de travaux qui peuvent se révéler être particulièrement lourds.

Le prêt à taux zéro, déjà mis en oeuvre dans le domaine de la rénovation énergétique a déjà fait ses preuves. Il a en effet connu une progression importante sur les dernières années, passant de 35 574 éco-PTZ émis en 2019 à 82 049 en 202231(*), à la faveur de l'augmentation des taux d'intérêt. Toutefois, malgré cela, son coût est resté limité pour les finances publiques (45 millions d'euros en 2023, contre 39 millions d'euros en 2019).

Nombre d'émissions d'éco-PTZ et coût du crédit d'impôt

 

2019

2020

2021

2022

2023

Nombre d'éco-prêts émis

35 574

42 107

61 034

82 049

105 082

Coût du crédit d'impôt (en millions d'euros)

39

32

35

29

45

Source : commission des finances, d'après les données de la Société de gestion des financements et de la garantie de l'accession sociale à la propriété

Le coût de l'aide à l'acquisition de prêt pour la prévention des risques prévu par le présent article serait limité, équivalent à moins de à 5 millions d'euros par an durant les premières années de déploiement du dispositif.

Le plafonnement de l'avance remboursable à 30 000 euros est également pertinent. En effet, cette somme correspond au coût des opérations les plus lourdes de prévention du retrait-gonflement des argiles ou des inondations. Les mesures plus coûteuses ont généralement une dimension collective, qui peut être plus adéquatement prise en charge par le fonds Barnier.

La mention de la prévention des risques naturels « majeurs » dans le dispositif présente toutefois une ambiguïté sur la question de savoir si le retrait-gonflement des argiles (RGA) en fait partie ou non. L'intention de l'auteur de la proposition de loi est bien que les mesures de prévention du RGA soit incluses dans ce nouvel outil de financement, et donc la commission a adopté l'amendement COM-11 du rapporteur visant à lever toute confusion en parlant de « risques naturels » en général. Cet amendement n'a aucune incidence sur le périmètre du dispositif.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté l'article ainsi modifié.

ARTICLE 8

Conditionnement de MaPrimeRénov' à la réalisation de travaux de prévention des risques

Le présent article prévoit que dès lors qu'un diagnostic de vulnérabilité aux risques naturels majeurs a établi que le logement se situe dans une zone d'exposition élevée à un ou plusieurs risques naturels majeurs, MaPrimeRénov' ne peut être versée que sous la condition de la réalisation de travaux de prévention adaptés.

MaPrimeRénov' a été créée par la loi de finances pour 2020, et représente désormais le principal dispositif de subvention publique d'aide à la rénovation énergétique des particuliers.

À l'heure actuelle, la vulnérabilité du bâti aux risques naturels ne fait pas partie des critères conditionnant le financement par MaPrimeRénov'. Or, la rénovation énergétique de logements fortement exposés aux risques naturels, et pour lesquels aucune mesure de prévention n'est prise, représente un gâchis de dépense publique.

Le conditionnement de MaPrimeRénov' tel que le prévoit le présent article est donc une mesure conduisant à préserver les finances publiques, mais également à inciter à la réalisation de travaux relatifs à la prévention des risques, conjointement à ceux de rénovation énergétique.

Il doit donc s'accompagner d'aides à la réalisation de travaux de prévention des risques, et c'est d'ailleurs le sens de l'article 7 de la présente proposition de loi, qui institue une avance remboursable à destination des ménages.

Cependant, les rénovations énergétiques dites « monogestes », c'est-à-dire qui ne portent que sur un seul type de travaux, comportent moins d'enjeux financiers que les rénovations globales. Par conséquent, la commission a adopté l'amendement COM-12 du rapporteur visant à restreindre le champ de l'article à ce dernier type de rénovation.

La commission des finances a également adopté l'amendement COM-19, du rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, qui prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur les conséquences du présent article sur la politique publique de rénovation énergétique des logements.

La commission a adopté l'article 8 ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : MAPRIMERÉNOV' EST LE PRINCIPAL DISPOSITIF DE SUBVENTION PUBLIQUE D'AIDE À LA RÉNOVATION ÉNERGÉTIQUE POUR LES PARTICULIERS

La loi de finances pour 202032(*) a créé la prime de transition énergétique, dénommée « MaPrimeRénov' ». À l'origine, cette prime était ciblée sur les ménages les plus modestes, mais, dans le sillage du plan de relance, la loi de finances pour 202133(*) a ouvert la prime de transition énergétique à tous les propriétaires. Les ménages les plus aisés ne sont cependant éligibles aux aides que pour les rénovations globales et les travaux d'isolation.

Les travaux pouvant être financés par MaPrimeRénov' sont déterminées par voie réglementaire, et notamment le décret du 14 janvier 2020 relatif à la prime de transition énergétique. Celle-ci finance les travaux de rénovation thermique à hauteur de leurs coûts, dans la limite de quatre plafonds, qui dépendent des revenus des ménages. Ces quatre plafonds se déclinent en quatre « couleurs » (bleu, jaune, violet, rose).

Catégories de revenus utilisées dans le cadre
du programme « MaPrimeRénov' » en 2024

en euros

Composition du foyer

Ménages
aux revenus très modestes (bleu)

Ménages
aux revenus modestes (jaune)

Ménages
aux revenus intermédiaires (violet)

Ménages aux revenus supérieurs (rose)

Une personne

17 009

23 541

21 805

28 657

30 549

40 018

> 30 549

> 40 018

Deux personnes

24 875

34 551

31 889

42 058

44 907

58 827

> 44 907

> 58 827

Trois personnes

29 917

41 493

38 349

50 513

54 071

70 382

> 54 071

> 70 382

Quatre personnes

34 948

48 447

44 802

58 981

63 235

82 839

> 62 235

> 82 839

Cinq personnes

40 002

55 427

51 281

67 473

72 400

94 844

> 72 400

> 94 844

Personne supplémentaire

+ 5 045

+ 6 970

+ 6 462

+ 8 486

+ 9 165

+ 12 006

> + 9 165

> + 12 006

Note : les nombres en italiques sont les catégories de revenus applicables en Île-de-France. Les catégories de revenus présentées sont également applicables pour les forfaits ainsi que pour MaPrimeRénov' Sérénité.

Source : Commission des finances, d'après le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires

II. LE DROIT PROPOSÉ : UN CONDITIONNEMENT DE MAPRIMERÉNOV' À LA RÉALISATION DE TRAVAUX DE PRÉVENTION DES RISQUES NATURELS POUR LES LOGEMENTS EXPOSÉS

Le présent article modifie le II de l'article 15 de la loi de finances pour 2020 afin de prévoir que, du moment qu'un diagnostic de vulnérabilité aux risques naturels majeurs a établi que le logement se situe dans une zone d'exposition élevée à un ou plusieurs risques naturels majeurs, la prime de transition énergétique ne peut être versée que sous la condition de la réalisation de travaux de prévention adaptés.

Le niveau d'exposition au risque empêchant le versement de la prime et les travaux de prévention requis sont renvoyés à un décret. 

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UN CONDITIONNEMENT NÉCESSAIRE POUR MIEUX ORIENTER LES SUBVENTIONS À LA RÉNOVATION ÉNERGÉTIQUE

À l'heure actuelle la vulnérabilité du bâti aux risques naturels ne fait pas partie des critères conditionnant le financement par MaPrimeRénov'. Or, la rénovation énergétique de logements fortement exposés au risques naturels, et pour lesquels aucune mesure de prévention n'est prise, représente un gâchis de dépense publique.

Le rapport du député Vincent Ledoux souligne à juste titre que : « la mission appelle l'attention sur le pilotage de ces financements dans les zones à risque RGA. Il serait inconséquent de rénover des logements sans avoir un minimum d'assurance sur leur résistance future à ce risque RGA. »34(*) Le même raisonnement peut être étendu à toutes les zones d'exposition forte aux risques naturels : il serait inconséquent de continuer à subventionner via MaPrimeRénov' des logements qui possèdent une chance importante de subir des inondations.

En particulier, les rénovations globales sont des travaux très lourds qui ont vocation à rendre le logement efficace d'un point de vue énergétique pour les décennies à venir. Or, le risque est qu'ils aient été faits en vain si des travaux de prévention des risques n'ont pas été réalisés dans le même temps.

Au contraire, une rénovation globale est l'occasion d'adapter le logement face aux risques naturels majeurs, comme le souligne le rapport de Christine Lavarde, rapporteur de la mission « Écologie, développement et mobilité durable » : « il est logique d'inciter les ménages qui entreprennent une rénovation globale à réaliser, dans le même temps, des travaux de prévention des risques. Dit autrement, il convient de ne pas « louper le coche » de d'adaptation d'un logement au changement climatique. »35(*)

Bien entendu, une telle disposition doit s'accompagner d'aides à la réalisation de travaux de prévention des risques. C'est le sens de l'article 7 de la présente proposition de loi, qui institue une avance remboursable à destination des ménages qui souhaitent réaliser des travaux de prévention des risques.

Cependant, les rénovations énergétiques dites « monogestes », c'est-à-dire qui ne portent que sur un seul type de travaux, comportent moins d'enjeux financiers que les rénovations globales. Par conséquent, la commission adopté l'amendement COM-12 du rapporteur visant à restreindre le champ de l'article à ce dernier type de rénovation.

La commission des finances a également adopté l'amendement COM-19, du rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, qui prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement au Parlement sur les conséquences du présent article sur la politique publique de rénovation énergétique des logements.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 8 bis (nouveau)

L'Agence nationale de l'habitat (ANAH) doit accomplir ses missions en tenant compte des enjeux de prévention des risques

Le présent article, introduit par la commission des finances en adoptant un amendement du rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, précise que l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) doit accomplir ses missions en tenant compte des enjeux de prévention des risques.

La commission a adopté l'article 8 bis.

L'Agence nationale de l'habitat est un opérateur de l'État rattaché à la mission « Cohésion des territoires », qui a notamment pour missions définies à l'article L. 321-1 du code de la construction et de l'habitation de mener des politiques de lutte contre l'habitat indigne, d'adaptation des logements privés pour la perte d'autonomie et de rénovation énergétique. L'ANAH est connue notamment pour assurer la gestion de la prime de transition énergétique, dite « MaPrimeRénov' ».

Issu d'un amendement COM-17 déposé au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable par Pascal Martin, rapporteur pour avis, le présent article prévoit, en modifiant l'article L. 321-1 du code de la construction et de l'habitation, que l'ANAH doit accomplir ses missions « en tenant compte des enjeux de prévention des risques naturels ».

Cet article doit être compris en conjonction de l'article 8 de la présente proposition de loi, qui prévoit que MaPrimeRénov' soit conditionnée, dans le cas des rénovations globales, à la réalisation de travaux de prévention des risques pour les logements les plus exposés. L'enjeu est que la politique de réduction de la vulnérabilité des logements aux risques naturels majeurs et celle de rénovation énergétique ne fonctionnent plus en silo, mais de les intégrer au sein d'une même politique de l'adaptation des logements au changement climatique.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article.

ARTICLE 9

Extension du fonds Barnier aux dispositifs expérimentaux en matière de lutte contre le RGA et le recul du trait de côte

Le présent article prévoit d'étendre le champ du fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit « fonds Barnier », au financement d'études et de dispositifs expérimentaux de prévention des dommages provoqués par le retrait-gonflement des argiles ainsi que par le recul du trait de côte.

Le financement de travaux de prévention du risque retrait-gonflement des argiles (RGA) est presque inexistant, alors que ce risque concerne près de la moitié des logements individuels sur le territoire métropolitain. Le fonds Barnier, dont l'efficacité est reconnue, pourrait prendre en charge des mesures de prévention de ce risque, sachant que le RGA est inclus dans le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles (régime CatNat).

L'intégration de la lutte contre le recul du trait de côte dans le champ du fonds Barnier, tel que le propose le présent article, soulève une vraie question au sujet d'un risque qui représente aujourd'hui un véritable angle mort dans la politique publique de prévention des risques.

Toutefois, sa mise en oeuvre soulève des difficultés, dans la mesure où ce risque n'est pas inclus dans le régime Catnat. Suivant le rapporteur, la commission a donc décidé en adoptant l'amendement COM-13 de ne conserver que le RGA dans l'élargissement prévu par le présent article. Il sera toutefois nécessaire de mener une réflexion sur le financement de la prévention du recul du trait de côte.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : LE FONDS BARNIER EST LE PRINCIPAL VECTEUR DE LA POLITIQUE DE PRÉVENTION DES RISQUES NATURELS DE L'ÉTAT

L'article L. 561-3 du code de l'environnement prévoit l'existence du Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), communément appelé le « fonds Barnier ».

Le fonds Barnier permet de financer l'acquisition de biens à l'amiable ou par expropriation lorsque les biens en question sont exposés à un risque, dans les conditions prévues à l'article L. 561-1 du code de l'environnement.

Il peut également financer les dépenses liées à la limitation de l'accès et à la remise en état des terrains accueillant les biens exposés, le cas échéant en s'appuyant sur un établissement public foncier.

En outre, il peut financer des mesures de réduction de la vulnérabilité prises par les collectivités territoriales sur les territoires dotés d'un plan de prévention des risques naturels (PPRN). De même, le Fonds intervient pour financer des mesures de prévention menées par les petites entreprises et les particuliers sur leurs habitations.

Le fonds Barnier finance enfin quelques mesures au bénéfice de l'État, comme les travaux de mise en conformité des digues domaniales de protection contre les crues et les subventions marines.

Jusqu'en 2021, le fonds Barnier était financé par un prélèvement obligatoire de 12 % en forme de « surprime » sur la prime payée par les assurés au titre de la garantie contre les catastrophes naturelles. À partir de cette année, le fonds a été intégré au budget de l'État, au programme 181 « Prévention des risques » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Il est donc désormais financé par des crédits budgtaires

II. LE DROIT PROPOSÉ : UNE EXTENSION DU CHAMP DU FONDS BARNIER AU FINANCEMENT DE DISPOSITIFS EXPÉRIMENTAUX POUR LA LUTTE CONTRE LE RECUL DU TRAIT DE CÔTE ET LE RETRAIT-GONFLEMENT DES ARGILES

Le présent article modifie le III de l'article L. 561-3 du code de l'environnement pour que le fonds Barnier puisse contribuer au financement d'études et de dispositifs expérimentaux de prévention des dommages provoqués par le retrait-gonflement des argiles ainsi que par le recul du trait de côte.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UN ÉLARGISSEMENT SOUHAITABLE DU FONDS BARNIER AU RETRAIT-GONFLEMENT DES ARGILES

À l'heure actuelle, la « doctrine » du fonds Barnier prévoit qu'il ne peut financer que des mesures de prévention pour des risques « menaçant gravement la vie humaine ». Pour cette raison, le risque retrait-gonflement des argiles (RGA) ainsi que le recul du trait de côte ne peuvent faire l'objet d'aucun financement par ce biais.

Cependant, cette doctrine n'est pas inscrite dans la loi pour ce qui concerne le volet « prévention du fonds Barnier »36(*). L'article L. 561-3 du code de l'environnement énonce, pour le cas général, que « le fonds contribue à la prise en charge des études et travaux de prévention rendus obligatoires par un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé ». L'article L. 562-1 prévoit que les plans de prévention des risques naturels (PPRN) prévisibles peuvent être élaborés pour un certain nombre de risques, qui sont listées, mais n'évoque pas de conditions relatives à la menace pour la vie humaine. Par ailleurs, le fonds Barnier peut déjà financer des travaux qui portent sur des risques qui ne menacent pas directement la vie humaine dans la zone dite des 50 pas géométriques en outre-mer, sans que ceux-ci ne soient prescrits par un PPRN37(*).

En outre, le critère de la « menace envers la vie humaine » n'a pas pour effet de réduire l'aléa moral. En effet, une politique de prévention des risques s'inscrit toujours dans une stratégie à l'échelle locale, et le présent article ne conduit pas à donner un droit « acquis » à des financements du fonds Barnier.

Pour toutes ces raisons, il est souhaitable, en ce qui concerne le volet « prévention » du fonds Barnier, de privilégier le critère des économies sur le long terme pour définir les dispositifs qui devraient être ou non éligibles à une subvention38(*).

Dans son rapport de contrôle sur le RGA, Christine Lavarde, rapporteur de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » défendait un élargissement du fonds Barnier au risque sécheresse pour cette raison. Le risque RGA concerne près de la moitié des logements individuels sur le territoire métropolitain, et il est paradoxal que ses mesures de prévention ne fassent l'objet d'aucun soutien public.

En particulier, elle relevait que les mesures de prévention dites « horizontales », qui sont encore à l'étude, pouvaient potentiellement générer des économies importantes, et le fonds Barnier serait tout à fait dans son rôle en participant au financement de leur expérimentation.

Mesures « horizontales » et « verticales »
de prévention du retrait-gonflement des argiles

Les mesures verticales désignent les opérations qui agissent directement sur la structure du bâtiment. Elles peuvent par exemple consister en une rigidification de la structure par l'injection de résine, ou en l'installation de micropieux au niveau des fondations. Ces mesures ont une efficacité prouvée, et elles sont également utilisées pour redresser des bâtiments fragilisés par le RGA.

Les mesures horizontales répondent à une logique différente : elles consistent à agir sur l'environnement du bâtiment, afin de limiter en amont du sinistre la variation de la teneur en eau du sol. Elles peuvent notamment désigner des techniques d'imperméabilisation de la surface du sol aux abords direct de la surface du bâti, afin de limiter l'évaporation sur la surface. D'autres solutions consistent à agir sur la végétation, avec par exemple l'installation d'écrans anti-racinaires.

Les mesures qui portent sur l'environnement du bâti présentent un coût moyen de 10 000 euros, qui nettement moins élevé que celui des mesures curatives (plusieurs dizaines de milliers d'euros). Ces techniques sont toutefois expérimentales à l'heure actuelle, et par conséquent, elles ne sont aussi reconnues par les compagnies que le sont les mesures dites « verticales ».

L'« initiative sécheresse », lancée le 12 septembre 2023 par Frances assureurs, la CCR, et la Mission risques naturels (MRN) a vocation à définir une démarche de prévention pérenne pour les maisons existantes exposées et non sinistrées.

Source : rapport d'information n° 354 (2022-2023) de Mme Christine Lavarde fait au nom de la commission des finances sur le financement du risque de retrait gonflement des argiles et de ses conséquences sur le bâti

L'intégration de la lutte contre le recul du trait de côte dans le champ du fonds Barnier, tel que le propose le présent article, soulève une vraie question au sujet d'un risque qui représente aujourd'hui un angle mort dans la politique publique de prévention des risques. Toutefois, sa mise en oeuvre soulève des difficultés. En effet, le recul du trait de côte ne fait pas partie des risques couverts par le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, contrairement au RGA, ce qui pourrait rendre complexe son financement par le fonds Barnier.

La commission a donc adopté l'amendement COM-13 du rapporteur, qui prévoit de ne conserver que le RGA dans l'élargissement prévu par le présent article. De la sorte, le champ d'intervention du fonds Barnier coïnciderait avec le périmètre du régime CatNat. Il n'en reste pas moins nécessaire de mener une réflexion sur le financement de la prévention du recul du trait de côte.

Décision de la commission : la commission a adopté cet article ainsi modifié.

ARTICLE 10 (nouveau)

Renforcement des normes de construction pour prévenir les dommages causés par le phénomène de retrait-gonflement des argiles (RGA)

Le présent article, introduit par la commission des finances en adoptant un amendement du rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, prévoit de renforcer les normes de construction dans les zones exposées au risque de retrait-gonflement des argiles (RGA) :

- d'une part en prévoyant la réalisation d'une véritable étude géotechnique avant la vente d'un terrain constructible ;

- d'autre part d'imposer que la construction, en matière de profondeur des fondations, se conforme aux recommandations d'une étude géotechnique, quand aujourd'hui il est possible de recourir à des profondeurs de fondations forfaitaires insuffisantes.

La commission a adopté l'article 10.

I. LE DROIT EXISTANT : DES NORMES DE CONSTRUCTION RENFORCÉES PAR LA LOI « ÉLAN » DE 2019 MAIS ENCORE INSUFFISANTES POUR PRÉVENIR LES DOMMAGES CAUSÉS AU BÂTI PAR LE PHÉNOMÈNE DE RETRAIT-GONFLEMENT DES ARGILES (RGA)

En France, historiquement, les études de sol préalables à la construction de maisons individuelles n'étaient pas obligatoires. Alors que les conséquences du phénomène de RGA se faisaient toujours plus prégnantes, la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi « Élan », a renforcé le cadre normatif existant en imposant de nouvelles normes de construction plus exigeantes visant à limiter la vulnérabilité des nouvelles constructions de maisons individuelles au phénomène de RGA.

Elle prévoyait notamment l'obligation de réaliser une étude géotechnique préalable avant la vente d'un terrain constructible dans les zones exposées au risque RGA. Cependant, cette étude préalable ne consiste qu'en un diagnostic du sol assez sommaire de type « G1 ». Ce type d'études ne permet pas de dimensionner les fondations de la construction. Seule une étude de type « G2 » est en mesure de déterminer la profondeur nécessaire des fondations au regard de l'exposition du site au phénomène de RGA.

Dans son rapport précité de mai 2024 sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles39(*), Christine Lavarde avait noté les conséquences potentiellement très dommageables de ces études trop sommaires. En effet, elles peuvent le cas échéant cacher une très mauvaise et très coûteuse surprise à l'acquéreur du terrain au moment de construire. Elle écrivait notamment que des professionnels du financement avaient attiré son attention « sur le renchérissement significatif du coût d'édification d'une maison si les études réalisées par le constructeur révèlent la nécessité de creuser plus profondément. Ce surcoût peut remettre en cause l'intégralité du projet, les futurs propriétaires n'ayant pas la capacité de lever plus d'emprunt. Ils se retrouvent alors avec un terrain sur lequel ils ne peuvent édifier leur projet de logement ».

La loi Élan prévoyait aussi un renforcement de l'encadrement normatif au moment de la construction d'une nouvelle maison. L'article L. 132-7 du code de la construction et de l'habitation dispose ainsi désormais que le maître d'ouvrage d'une construction en zone exposée au risque RGA doit faire le choix entre deux options :

- la première consiste à réaliser et suivre les recommandations de construction d'une étude géotechnique de conception de type « G2 » ;

- la seconde consiste à respecter de façon forfaitaire des techniques particulières de construction définies par voie réglementaire.

Les techniques particulières de construction ont été précisées par l'arrêté du 22 juillet 2020 relatif aux techniques particulières de construction dans les zones exposées au phénomène de mouvement de terrain différentiel consécutif à la sécheresse et à la réhydratation des sols. L'article 2 de cet arrêté prévoit ainsi des fondations renforcées d'une profondeur d'au moins :

80 centimètres en zone d'exposition moyenne au risque RGA ;

1,20 mètre en zone d'exposition forte.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UN RENFORCEMENT BIENVENU DES RÈGLES DE CONSTRUCTION AFIN DE MIEUX PRÉVENIR LE RISQUE DE RGA POUR LES CONSTRUCTIONS NEUVES

Le présent article additionnel est issu d'un amendement COM-15 de M. Pascal Martin, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Il vise à renforcer les règles de construction des maisons neuves afin de mieux les protéger des conséquences liées au phénomène de RGA.

Pour ce faire, l'article prévoit de modifier trois articles de la section 4 du chapitre II du titre III du livre Ier du code de la construction et de l'habitation.

Le du présent article prévoient ainsi de modifier l'article L. 132-5 du code afin de rendre obligatoire la réalisation d'une véritable étude géotechnique de type « G2 » avant la vente d'un terrain constructible et non pas seulement une simple étude superficielle comme il est prévu aujourd'hui (voir supra).

Le vise quant à lui à modifier l'article L. 132-6 pour que la construction d'un nouvel ouvrage s'appuie systématiquement sur une étude géotechnique de type « G2 ».

Le de ce même article prévoit enfin que le constructeur doit se conformer aux recommandations de l'étude géotechnique quand aujourd'hui il est possible de recourir à des profondeurs de fondations forfaitaires (voir supra).

Les nouvelles règles de construction imposées par la loi Élan ont constitué une première étape importante. En raison de l'ampleur toujours plus importante prise par le phénomène RGA, l'enjeu est en effet considérable. Alors que le stock de maisons déjà construites est toujours plus menacé par cet aléa, il est indispensable, a minima, d'en prémunir dès à présent les constructions nouvelles, sans quoi le stock de maisons menacées ne ferait que croître de même que les coûts de ce risque pour le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, mettant en péril, à terme, sa pérennité même.

Les règles de construction sont absolument décisives pour immuniser les nouvelles constructions du risque RGA. Suite à leur renforcement par la loi Élan, sont-elles pour autant aujourd'hui adaptées à l'enjeu? D'après notamment les analyses que Christine Lavarde a livré dans son rapport précité de mai 2024, la réponse est manifestement non. Sur ce sujet en particulier, elle écrivait notamment : « d'ores et déjà, il apparaît que les premières analyses sont très mitigées. Alors que l'épaisseur de la couche d'argile active est souvent de plusieurs mètres, d'après un sondage effectué en janvier 2022 par la Fédération française du bâtiment, un tiers des constructions post loi Élan seraient réalisées en optant pour la profondeur de fondations forfaitaire40(*), c'est à dire sans étude de sol (...) la direction générale du Trésor a notamment révélé que de premières maisons construites selon les normes prévues par la loi Élan commencent déjà à se fissurer ».

Ce constat est particulièrement inquiétant et suppose de prendre d'urgence des mesures pour ajuster les normes de construction introduites par la loi Élan.

Le rapport de la mission « Langreney » partage le constat de Christine Lavarde sur ce sujet. Il s'appuie notamment sur le modèle espagnol qui prévoit des normes de construction significativement plus exigeantes qu'en France. Ce rapport soulignait que l'analyse des normes de construction prévues par la loi Élan « laisse présumer une fragilité de notre dispositif » et « conduit à s'interroger sur l'efficacité des mesures législatives sur les constructions neuves retenues en France ».

Aussi le rapport d'information de Christine Lavarde comme la mission « Langreney » recommandaient-ils de renforcer d'urgence les règles de construction afin de réellement immuniser les maisons nouvelles des conséquences du phénomène de RGA.

Cet article est donc important pour améliorer la prévention et l'adaptation du bâti à l'amplification du risque RGA.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article.

ARTICLE 11 (nouveau)

Inscription dans les programmes de l'école primaire de l'éducation à la prévention des risques

Le présent article, introduit par la commission des finances en adoptant un amendement du rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, prévoit d'intégrer dans les programmes de l'école primaire l'éducation à la prévention des risques naturels.

La commission a adopté l'article 11.

L'article L. 312-19 du code de l'éducation fixe le cadre de l'éducation à l'environnement et au développement durable à l'école primaire. Il prévoit qu'elle « a pour objectif de sensibiliser les enfants aux enjeux environnementaux et à la transition écologique », et qu'elle « permet la transmission et l'acquisition des connaissances et des savoirs relatifs à la nature, à la nécessité de préserver la biodiversité, à la compréhension et à l'évaluation de l'impact des activités humaines sur les ressources naturelles et à la lutte contre le changement climatique. »

L'article 5 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « climat et résilience » a introduit, au sein du code de l'éducation, une section et un article unique destinés à « l'éducation à l'environnement et au développement durable ».

Issu d'un amendement COM-16 déposé au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable par Pascal Martin, rapporteur pour avis, le présent article prévoit, en modifiant l'article L. 312-19 du code de l'éducation d'intégrer dans les programmes de l'école primaire l'éducation à la prévention des risques naturels.

La prévention des risques ne fait en effet l'objet d'aucune disposition spécifique dans les programmes d'enseignement scolaire, et la culture du risque doit être promue dès le plus jeune âge.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article.

ARTICLE 12 (nouveau)

Information des acquéreurs et locataires de biens de leur exposition au risque de retrait-gonflement des argiles (RGA)

Le présent article, introduit par la commission des finances en adoptant un amendement du rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, prévoit de compléter l'état des risques que le bailleur ou le vendeur doit annexer à l'acte de vente ou de location par une information relative au risque RGA si le bien en question se situe dans une zone d'exposition moyenne ou forte.

La commission a adopté l'article 12.

Conformément aux dispositions de l'article L. 125-5 du code de l'environnement, lors d'une location ou d'une vente immobilière, le vendeur ou le bailleur est tenue d'annexer à l'acte de vente ou au contrat de location un état des risques. Ce document a vocation à informer l'acquéreur ou le locataire des risques naturels et miniers auxquels le bien est susceptible d'être exposé du fait de sa localisation.

Au regard des dispositions actuelles de l'article L. 125-5, la mention du phénomène RGA dans cet état des risques n'est requise que dans l'hypothèse où la zone concernée est couverte par un plan de prévention des risques RGA. Or, ces plans ne couvrent qu'environ 5 % des communes françaises quand le risque RGA concerne d'ores et déjà 48 % du territoire national et plus de 54 % de l'habitat individuel, c'est-à-dire plus de 10 millions de maisons.

Issu d'un amendement COM-18 déposé au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable par Pascal Martin, rapporteur pour avis, le présent article prévoit, en modifiant le I de l'article L. 125-5 du code de l'environnement, de compléter les informations obligatoires de l'état des risques en incluant le phénomène de RGA pour l'ensemble des biens immobiliers situés dans des zones d'exposition moyenne et forte à cet aléa.

Il apparaît nécessaire de résoudre ce décalage flagrant entre d'un côté la portée, réduite à la portion congrue, de l'obligation actuelle de mentionner le phénomène de RGA dans l'état des risques et de l'autre l'ampleur considérable des territoires exposés à cet aléa.

Par ailleurs, cette amélioration de l'information des locataires et des acquéreurs est un préalable indispensable à leur sensibilisation au risque et à la mise en oeuvre des mesures de prévention adaptées, qui sont par ailleurs au coeur de l'esprit de la présente proposition de loi.

Décision de la commission : la commission des finances a adopté cet article.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 23 octobre 2024 sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a examiné le rapport de M. Jean-François Rapin sur la proposition de loi n° 612 (2023-2024) visant à assurer l'équilibre du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles.

M. Claude Raynal, président. - Nous poursuivons avec l'examen du rapport de Jean-François Rapin sur la proposition de loi de notre collègue Christine Lavarde visant à assurer l'équilibre du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles.

Je salue la présence de Pascal Martin, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Il nous revient ce matin d'examiner la proposition de loi de notre collègue Christine Lavarde visant à assurer l'équilibre du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles. Son passage en séance publique aura lieu mardi 29 octobre.

Ce texte est la traduction de neuf des recommandations du contrôle budgétaire mené par Christine Lavarde sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, dont notre commission a adopté les conclusions le 15 mai dernier. Notre collègue avait également effectué auparavant un travail centré sur le risque relatif au retrait-gonflement des argiles (RGA).

La proposition de loi s'inscrit également dans le sillage de la mission d'information menée par Jean-François Husson sur les problèmes assurantiels des collectivités territoriales, ainsi que dans celui de la mission que j'ai moi-même rapportée avec Jean-Yves Roux, de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, sur les inondations survenues en 2023 et au début de l'année 2024, notamment dans le Pas-de-Calais.

Ainsi, voilà deux ans que la commission des finances mène un travail approfondi sur l'assurance des catastrophes naturelles et le financement de la prévention des risques, et ce texte en est l'un des aboutissements.

Les inondations récentes en Ardèche sont l'une des illustrations - trop nombreuses - que l'adaptation de nos territoires et de notre régime assurantiel face à la multiplication des catastrophes naturelles est un sujet absolument majeur.

En effet, le changement climatique conduira à une augmentation certaine de la fréquence et de l'intensité des inondations - nous avons déjà pu le constater lors des dernières décennies. La sinistralité liée à la sécheresse devrait quant à elle exploser : il est estimé que celle-ci représentera 43 milliards d'euros entre 2020 et 2050, contre 13 milliards d'euros les trente années précédentes.

Jusqu'à présent, le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, dit régime CatNat, a fait la preuve de sa durabilité. La garantie de l'État n'a été appelée qu'une seule fois, en 2000, à la suite des tempêtes Lothar et Martin, et le taux de couverture contre les catastrophes naturelles en métropole est de 97 %. De nombreux pays européens - on me l'a redit souvent en audition - envient ce dispositif.

Toutefois, le régime est à bout de souffle. La provision pour égalisation de la Caisse centrale de réassurance (CRR) tombera à zéro à la fin de l'année, et le risque que la garantie de l'État soit mobilisée est réel. L'augmentation du taux de la surprime de 12 % à 20 % au 1er janvier 2025 offrira une respiration au régime, mais au prix d'une augmentation brutale du coût de la prime d'assurance pour les assurés.

L'article 1er de la proposition de loi prévoit ainsi la mise en place d'un mécanisme de revalorisation automatique annuelle du taux de la surprime, pour tenir compte des effets du changement climatique. Il doit ainsi permettre de lisser l'augmentation de la surprime dans le temps, et permettre une véritable adaptation de notre modèle assurantiel.

L'amendement que je propose est d'ordre purement technique. Il vise à décaler la date de mise en oeuvre de la revalorisation au 1er janvier 2027, pour permettre aux compagnies d'assurances de modifier leurs systèmes informatiques, et de ramener la clause de revoyure du coefficient de revalorisation à trois ans, contre cinq ans dans le texte initial.

L'article 2 vise à supprimer la possibilité d'appliquer de manière répétée la franchise d'assurance en cas de succession d'un même aléa naturel sur une période courte. Il s'agit d'une mesure de justice, parfois appliquée dans la pratique, mais qui, faute de base légale, est souvent mal comprise. Je propose un amendement tendant à assouplir le dispositif, en supprimant la condition du « même aléa naturel ».

L'article 3 introduit une présomption de refus d'assurances pour motif d'exposition aux catastrophes naturelles dans les zones les plus à risque. Actuellement, la possibilité de saisine du bureau central de tarification (BCT) est entravée par la difficulté pour les assurés de prouver que le refus d'assurance « dommages aux biens » est lié au risque CatNat. Dans un souci de prévenir le risque de non-assurance, le dispositif proposé renverse la charge de la preuve et impose aux entreprises d'assurances d'établir que ce refus est motivé par d'autres raisons que le risque CatNat.

L'ensemble des personnes entendues a souligné l'archaïsme des modes de saisine du BCT. C'est pourquoi je propose un amendement prévoyant une possibilité de saisine électronique de cette instance.

J'en viens ensuite à l'article 4, qui introduit certaines garanties d'indépendance pour les experts en matière d'assurance des catastrophes naturelles. Alors que la profession fait face à une véritable crise de confiance dans nos territoires, il n'existe actuellement aucun encadrement des experts d'assurance. Le dispositif du présent article prévoit donc une garantie de l'indépendance capitalistique des sociétés d'expertise par rapport aux entreprises d'assurances, en premier lieu, et une déliaison entre leur rémunération et les résultats de leur expertise, en second lieu. Cette ébauche de statut des experts devrait permettre de rehausser la confiance des assurés dans cette profession et de renforcer son attractivité alors que les récents épisodes d'inondations ont souligné le manque d'experts.

La rédaction initiale de l'article 4 ne traitant que des experts exerçant sur demande des compagnies d'assurances, je propose par un amendement COM-8 d'étendre le champ de ces dispositions aux experts agissant pour le compte des assurés.

L'article 5 promeut deux dispositifs distincts. D'une part, il prévoit de rétablir la liberté d'utilisation des indemnités d'assurance en cas de sinistre provoqué par le phénomène de retrait-gonflement des argiles. D'autre part, il impose à l'assureur, lorsque celui-ci établit que le phénomène de RGA constitue la cause déterminante d'un sinistre, de notifier cette information dans un délai de trois mois au maire de la commune. Cet article revient ainsi sur l'obligation imposée à l'assuré par l'ordonnance du 8 février 2023 d'utiliser exclusivement ces indemnités pour réparer les dommages consécutifs au phénomène de RGA.

Si je partage l'objectif défendu par l'article 5, un retour à une liberté totale d'affectation des indemnités versées en RGA ne me paraît pas opportun, notamment au regard du risque de fraude. Les assurés peuvent en effet effectuer des travaux superficiels et vendre le bien. Il me semble donc souhaitable de maintenir le principe d'affectation en prévoyant deux exceptions claires : lorsque le coût des réparations excède la valeur du bien, d'une part, et lorsque le bâtiment est devenu inhabitable, d'autre part. C'est le sens de l'amendement COM-9.

L'article 6 prévoit un dispositif de modulation de la franchise en cas d'adoption de mesures de prévention par les assurés. Je partage l'objectif poursuivi par cet article, à savoir le renforcement de la culture du risque chez les particuliers. Toutefois, je crains que l'opérationnalité de ce dispositif ne soit pas établie. Le faible montant des franchises - 380 euros pour les biens à usage d'habitation ou les véhicules terrestres à moteur et 1 520 euros pour les biens à usage d'habitation en cas de risque RGA - rend la modulation peu incitative. Je propose donc la suppression de cet article.

Pour autant, dans un même objectif de renforcement des incitations à l'adoption de mesures préventives, je propose d'insérer un article additionnel après l'article 5 pour inclure, dans les rapports d'expertise, des préconisations sur les travaux de réduction de la vulnérabilité du bien. Ce dispositif s'inspire de ce qui est prévu dans le cadre de l'expérimentation « Mieux reconstruire après inondation », dite Mirapi.

Cette identification des travaux nécessaires intervient en complément de l'article 7, qui crée un dispositif incitatif de soutien à l'acquisition de prêts pour la prévention des risques, sur un modèle semblable à ce qui existe pour la rénovation énergétique.

Cette disposition nous paraît importante pour permettre la diffusion d'une véritable culture du risque au sein de la population. Les travaux réalisés par les particuliers sont l'un des angles morts de la politique de prévention, et cet article a vocation à y remédier. L'amendement que je propose a seulement pour objectif de lever une ambiguïté dans l'article pour être certain que le RGA y est bien inclus.

L'article 8 prévoit de conditionner l'octroi de MaPrimeRénov' à la réalisation de travaux de prévention des risques pour les logements les plus exposés. Pour citer Jean-Marc Jancovici, qui s'est exprimé au sujet de la proposition de loi, la question posée par cet article est « désagréable, mais pertinente ». Est-il raisonnable de continuer à subventionner la rénovation énergétique de logements qui pourraient disparaître au bout de quelques années en raison de catastrophes naturelles ? L'enjeu est celui de la cohérence de la politique d'adaptation au changement climatique.

Toutefois, il convient de s'assurer que cet article vise les travaux qui présentent les enjeux financiers les plus importants. L'amendement que je propose prévoit ainsi, conformément à l'intention de l'auteur du texte, de limiter l'application de l'article aux subventions pour les travaux de rénovations globales.

Enfin, l'article 9 étend le champ du fonds pour la prévention des risques naturels majeurs à des dispositifs expérimentaux relatifs à la prévention du retrait-gonflement des argiles et du recul du trait de côte. Le risque RGA concerne près de la moitié des logements individuels, et il n'existe aucun soutien public de grande ampleur à sa prévention ! De plus, ce risque est assuré dans le cadre du régime CatNat.

Même s'il s'agit d'une question majeure, le fait que le recul du trait de côte ne soit pas couvert par le régime CatNat peut poser des difficultés techniques à son intégration dans le champ du fonds Barnier. Je propose donc un amendement pour le retirer.

Ce texte représente une véritable avancée dans l'adaptation de notre régime d'assurance et le financement de la politique de prévention des risques. Il s'agit d'une politique de long terme, mais l'urgence de prendre des mesures fortes se fait de plus en plus sentir. Cette proposition de loi parvient à tenir cet équilibre : elle apporte une réponse aux enjeux du présent tout en préparant l'avenir.

Enfin, je me félicite du travail coordonné entre les deux commissions.

M. Pascal Martin, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. - Il me revient de vous présenter les résultats des travaux que j'ai conduits au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable.

Je ne reviendrai pas sur l'économie générale du texte, connue des membres de cette commission et dont notre collègue Jean-François Rapin a rappelé les enjeux.

Ce texte est nécessaire pour garantir la pérennité du régime CatNat ; je vous propose de l'enrichir, exclusivement dans sa dimension relative à la prévention des risques.

L'article 8 de la proposition de loi prévoit, pour les logements les plus exposés au risque, de conditionner le bénéfice du dispositif de MaPrimeRénov' à la réalisation de travaux de prévention adaptés. Il me semble nécessaire que cette disposition de bon sens, pragmatique, ne constitue pas un frein à l'effort de rénovation énergétique des logements. Je vous propose donc un amendement COM-19, qui prévoit que le Gouvernement remette au Parlement une évaluation ex post de l'impact de ce conditionnement sur la politique de rénovation énergétique.

Il me semble par ailleurs opportun de faire de l'école un lieu d'acculturation aux risques naturels majeurs. Nos enfants seront en effet les premiers exposés aux aléas naturels dans les années à venir et il est de notre responsabilité de leur donner les clefs de compréhension de ces phénomènes. L'amendement COM-16, qui transcrit une recommandation du rapport d'information de Jean-François Rapin et de Jean-Yves Roux relatif aux inondations survenues en 2023 et au début de l'année 2024, s'inscrit dans cette volonté.

Il faut également renforcer la culture du risque au stade de la cession de terrain et de la construction d'un logement ensuite, en renforçant les exigences des études géotechniques du sol. La loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Élan) prévoit, en effet, dans les zones exposées au risque de RGA, l'obligation de réaliser une étude géotechnique dite « G1 », au stade de la cession du terrain ou de la construction du logement. Au stade de la construction, le particulier peut soit recourir à une étude « G2 », qui permet réellement d'adapter le bâti, soit suivre des prescriptions minimales fixées par décret qui sont, de l'aveu de l'ensemble des acteurs du secteur, insuffisamment robustes pour prévenir le phénomène de RGA. Je vous propose, dans l'amendement COM-15, de rendre l'étude « G2 » obligatoire, comme le préconise le rapport d'information de Christine Lavarde.

Je propose également de renforcer l'information des locataires et des acheteurs d'un bien en faisant figurer, au sein de l'état des risques obligatoires, les informations relatives à l'exposition au risque RGA. Tel est le sens de l'amendement COM-18 que je soumets à votre appréciation.

Enfin, l'amendement COM-17 vise à améliorer la prévention des risques tout au long de la durée de vie des logements. L'Agence nationale de l'habitat (Anah) est chargée d'améliorer la qualité de l'habitat. À ce titre, cette agence de l'État est notamment responsable du pilotage du programme de rénovation énergétique MaPrimeRénov'. Pour assurer une plus grande cohérence entre atténuation du changement climatique et adaptation à ses effets, il apparaît opportun de préciser que, dans ses missions, l'Anah prend en compte les enjeux de la prévention des risques.

Mme Christine Lavarde, auteur de la proposition de loi. - Monsieur le président, je vous remercie d'avoir demandé l'inscription de ce texte à l'ordre du jour des travaux du Sénat.

Cette proposition de loi émane de l'ensemble des travaux de notre assemblée. Elle s'inscrit dans la longue tradition du Sénat qui, depuis 2019, avec la mission d'information menée par Michel Vaspart et par Nicole Bonnefoy, le conduit à s'intéresser au sujet des catastrophes naturelles. C'était la première des deux chambres à le faire, mais le Sénat avait été ensuite court-circuité par l'Assemblée nationale. Actuellement, la donne a changé et le Sénat pourrait retrouver ses lettres de noblesse sur ce sujet que nous connaissons bien. Ce texte, transpartisan, a été largement ouvert à tous les signataires. J'ai travaillé en étroite collaboration avec Jean-François Rapin et Pascal Martin ; je souscris à l'ensemble de leurs propositions, qui rendent le texte encore plus consensuel et plus facilement applicable.

La question des moyens est importante. On nous rétorque que certaines de ces mesures coûtent cher. Mais, à compter de 2025, la prime CatNat augmentera pour tous les assurés, tant pour les contrats habitation qu'automobile. L'assiette de cette prime donne lieu à une autre surprime, actuellement une taxe affectée au budget général, qui, auparavant, transitait par un compte d'affectation spéciale (CAS).

Jusqu'à présent, les recettes collectées s'élevaient à environ 220 millions d'euros. À compter de 2025, le montant du prélèvement atteindra 450 millions d'euros. Dans ces conditions, on ne peut pas nous dire qu'il n'y a pas d'argent pour la prévention des risques, notamment pour le phénomène de RGA, grand oublié jusqu'à présent.

M. Claude Raynal, président. - Nous ne pouvions pas nous en tenir à un rejet du texte de Sandrine Rousseau, car il s'agit d'un sujet très important que nous devons traiter.

Avec ce texte, une autre solution est proposée. Nous verrons bien ce que l'Assemblée nationale en fera, mais la commission des finances ne devait pas apparaître comme un acteur bloquant qui ne propose pas de solutions.

Mme Ghislaine Senée. - Le Sénat porte un grand intérêt aux risques naturels majeurs. Le texte issu de l'Assemblée nationale a été rejeté par le Sénat, alors même qu'il traitait tout particulièrement du RGA et de l'indemnisation des personnes concernées.

La présente proposition de loi ne facilitera pas l'accès des victimes aux indemnités. Toutefois, elle permet au régime CatNat de perdurer - c'est là un point important. Le 1er janvier prochain, les surprimes passeront de 12 % à 20 %.

Ce texte comporte des avancées : la suppression de la double franchise, l'inscription dans la loi des conflits d'intérêts pour les experts et le prêt à taux zéro (PTZ) pour les travaux de prévention, entre autres.

Cela dit, deux sujets m'interpellent, au premier rang desquels l'exclusion de MaPrimeRénov' des logements situés dans des zones à risque naturel élevé. La maison sinistrée continue d'appartenir à son propriétaire. Les maires le savent bien, ces logements en déshérence risquent d'être squattés. Je n'ai pas identifié de propositions visant à résoudre ce problème. Ne faut-il pas avoir recours au fonds Barnier pour pouvoir les détruire à partir du moment où ils sont inhabitables ? Ce sujet fait l'objet d'un impensé.

Je suis membre du Conseil d'orientation pour la prévention des risques naturels majeurs (COPRNM). Plusieurs expérimentations relatives à la prévention sont actuellement menées, sur l'initiative de France Assureurs, de la CRR ou du Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema). À ce stade, nous ne disposons pas encore de standards clairement établis ; le travail est en cours.

Un point m'inquiète. Même dans le cadre des remédiations totales, il peut y avoir des stades 2 ou 3 : après un premier problème, de nouveaux désordres peuvent survenir. L'article 5 me semble précipité, étant donné que nous ne disposons pas de standards définitivement établis en matière de prévention.

M. Jean-François Husson, rapporteur général. - Je salue l'initiative de Christine Lavarde, ainsi que la qualité du travail mené sur cette proposition de loi, largement cosignée par de nombreux collègues.

Nous sommes au coeur du travail parlementaire d'évaluation, car le dispositif actuel est à bout de souffle ; il est proche de la rupture. Les solutions qui avaient été trouvées ne supposaient pas nécessairement des modifications législatives, mais le travail mené avec les acteurs du monde de l'assurance et de la réassurance aboutit à un résultat qui, je l'espère, sera largement soutenu, car cela touche non seulement les collectivités, mais aussi l'ensemble des Français.

Nos collègues ont cherché à maintenir les équilibres du système assurantiel des catastrophes naturelles, qui a une vertu : la mutualisation des risques. En cas de déséquilibre, il faut faire bouger les lignes : cela ne nous fait pas nécessairement plaisir, mais place les uns et les autres face à leurs responsabilités.

Je plaide pour un développement de la culture du risque et de la prévention. Au Japon, le risque sismique est intégré par tous les niveaux de la société. En France, les catastrophes naturelles sont diverses et multiples ; je pense notamment au RGA : si les préconisations en matière de construction avaient été respectées, nous aurions moins de problèmes.

Cette situation nous alerte sur le risque de non-assurance ou du renoncement de certains acteurs du monde de l'assurance, qui considèrent que l'aléa devient certain - dans ces conditions, ce n'est plus un risque.

J'appelle de mes voeux, après l'examen du texte en séance au Sénat, son examen rapide à l'Assemblée nationale.

M. Michel Canévet. - Je salue l'initiative des auteurs de cette proposition de loi, ainsi que la qualité des exposés des deux rapporteurs.

La semaine dernière, de graves inondations ont eu lieu dans notre pays. Certains de nos concitoyens n'auraient pas été suffisamment prévenus de leur intensité : la prévention est une attente extrêmement forte des Français.

Je souhaite relayer trois questions posées par des élus vendéens à Annick Billon.

Premièrement, il faudrait mener un travail sur la méthodologie mise en oeuvre pour caractériser les catastrophes naturelles, car les communes présentant un sol très argileux ne sont pas suffisamment prises en considération. Sans modification, les sinistrés pourraient ne jamais être indemnisés.

Deuxièmement, faut-il envisager qu'une contre-expertise soit effectuée sans que les deux experts aient échangé au préalable pour valider ou non la première expertise ?

Troisièmement, sur quels critères l'indépendance des experts vis-à-vis des compagnies d'assurances serait-elle évaluée ?

Mme Ghislaine Senée. - Dès lors que 50 % des maisons individuelles sont susceptibles de subir des aléas forts, exclure celles-ci de MaPrimeRénov' réduit le champ d'action du dispositif. Certes, on peut comprendre qu'un logement pouvant être inondé ne soit pas rénové, mais un certain nombre de ces maisons exposées ne souffrent d'aucun désordre à ce stade. Cette exclusion empêchera certaines personnes, faute de moyens, de mener à bien des travaux de rénovation.

Je m'inquiète d'une éventuelle dénaturation du fonds Barnier, qui fonctionne particulièrement bien : n'aurait-il pas fallu suivre les recommandations du rapport Langreney et créer un fonds ad hoc pour gérer le phénomène du RGA plutôt que de solliciter le fonds Barnier ?

Enfin, le trait de côte est non pas un aléa, mais une donnée naturelle : il faut le retirer des critères éligibles au fonds Barnier.

M. Marc Laménie. - J'adresse moi aussi mes remerciements aux rapporteurs ainsi qu'à tous les collègues.

Nous l'avons souvent constaté ces derniers temps : des petites rivières dont on ne parle jamais sont à l'origine d'inondations dévastant les locaux des particuliers et des entreprises.

On regrette souvent le manque d'entretien de ces petits cours d'eau et de leurs ouvrages hydrauliques. Les intervenants sont nombreux : les collectivités territoriales, mais aussi les opérateurs de l'État tels que Voies navigables de France (VNF), qui ont un rôle à jouer. Des mesures sont-elles prévues dans ce texte en la matière ?

M. Thierry Cozic. - Je me réjouis de l'inscription de ce texte à l'ordre du jour des travaux de notre assemblée.

Cette proposition de loi est attendue dans les territoires. Ainsi, la Sarthe est fortement exposée au phénomène du RGA. Le travail du Sénat sera particulièrement observé par nos concitoyens. Christine Lavarde l'a rappelé, nous ne partons pas de rien : Nicole Bonnefoy mène ce combat depuis des années.

Les propositions d'amélioration du texte me semblent aller dans le bon sens ; le groupe socialiste prendra le temps de les étudier, le débat aura lieu en séance.

À l'instar de Ghislaine Senée, je souhaiterais qu'un vrai débat soit organisé autour de MaPrimeRénov', car nos concitoyens qui ont recours à ce dispositif sont souvent ceux qui ont peu de moyens. Envisager d'en exclure les habitations menacées par un risque naturel ne me semble pas aller dans le bon sens. Le rapporteur peut-il préciser ses intentions et le sens de son amendement déposé à ce sujet ?

M. Victorin Lurel. - A-t-on une idée précise de l'impact de ces mesures sur le coût des primes d'assurance ? Certes, il faut rééquilibrer et pérenniser le système, mais comment ces hausses seront-elles accueillies par les assurés ? Pour le moment, il s'agit d'une inquiétude comptable, mais a-t-on quelque idée de ce que cela représentera sur le plan financier ?

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Monsieur Canévet, vous avez raison : la révision de la cartographie des RGA n'était pas forcément l'objectif initial sous-tendu par cette proposition de loi. Toutefois, l'élaboration d'une cartographie générale des risques est en cours. Au-delà de la question des coûts évoqués par Victorin Lurel, le texte vise à couvrir à l'avenir l'ensemble du territoire national par l'assurance. L'État et le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) travaillent sur cette question.

Depuis 2019, plusieurs rapports ont été publiés : celui de Nicole Bonnefoy et de Michel Vaspart, mais aussi celui que j'ai rédigé avec Jean-Yves Roux. Ils contiennent des mines de proposition : n'hésitez pas à vous en saisir pour combler les angles morts de ce texte - sur certains points, nous manquons encore de visibilité et nous manquons de temps pour réenclencher le dialogue entre le Parlement et l'État.

Monsieur Canévet, le contrôle des sociétés d'experts obéit aux règles du régime de droit commun de contrôle des entreprises. Les critères définis à l'article 4 ont été choisis justement car ils sont objectivables. Nous avons souhaité étendre ces dispositions aux experts d'assurés : à l'heure actuelle, nous pouvons tous exercer cette fonction autour de cette table, sans avoir reçu une quelconque reconnaissance d'une assurance ou, demain, un label ou une formation. L'objectif est non pas d'établir une nouvelle réglementation, mais bien d'assurer une objectivation des règles applicables aux personnes qui relaient les intérêts des assurances et des assurés.

L'information des assurés sur la possibilité de faire une contre-expertise est désormais obligatoire. Mais nous constatons que cette disposition n'est pas toujours appliquée.

Madame Senée, nous n'avons pas traité la question de l'abandon des maisons de sinistrés, car nous avons identifié des écueils. Le premier est le suivant : il s'agit du secret de l'assurance. Quid de la capacité de l'assureur à donner des informations à l'autorité publique en cas de transaction avec l'assuré ? L'assureur peut-il prévenir le maire qu'une maison sera prochainement abandonnée ?

J'en viens au second écueil. En cas d'abandon et si la maison devait être cédée à la commune, le maire se retrouve alors avec un paquet abandonné, ce qui engendre des frais de protection. Une telle disposition serait contraire à l'article 40 de la Constitution, en instaurant une charge imposée à la commune. C'est en effet la collectivité qui doit assumer le coût de la destruction de la maison. Ce sujet mérite d'être approfondi.

Je sais que l'exclusion de MaPrimeRénov' de ces habitations menacées soulève des inquiétudes. Mais le Sénat est l'assemblée du bon sens et du pragmatisme : est-il judicieux d'accorder une prime de rénovation à un bâtiment alors que ce dernier a déjà été soumis à une catastrophe naturelle et que le risque n'a pas été supprimé ? Nul dogmatisme de ma part, c'est simplement une question de bon sens. Budgétairement, nous en sommes au moment où l'on trie les blessés : que doit-on faire en premier lieu, où est l'urgence ? Tel est le sens de notre proposition : il faut supprimer le risque avant de recevoir une subvention au titre de MaPrimeRénov, pour que cette dernière soit la plus efficace possible - bien sûr, nous n'excluons personne de ce dispositif. Reste une question pendante à laquelle je n'ai pas de réponse pour le moment : à la suite d'une catastrophe naturelle, un assuré peut-il de nouveau solliciter une subvention pour des travaux d'isolation identiques ?

Monsieur Cozic, notre travail traduit non pas un aboutissement, mais une prolongation du chemin tracé dans plusieurs rapports du Sénat.

Monsieur Laménie, nous n'avons pas abordé le sujet des ouvrages hydrauliques et leurs opérateurs : ce sujet technique ne fait pas partie du périmètre de cette proposition de loi.

Monsieur Lurel, le premier impact de ces phénomènes sur les primes d'assurance se manifestera le 1er janvier prochain pour couvrir les difficultés que pourrait rencontrer la CCR. Nous faisons face à des événements dont l'intensité sera exponentielle ; voilà pourquoi nous prônons une montée en charge très progressive. Les taux seront fixés par décret et une révision triennale est prévue.

Nous nous inscrivons dans une démarche progressive, avec une vision à long terme pour ne pas nous retrouver dans la situation actuelle : il faut bien reconnaître que cette PPL traite aussi l'urgence.

M. Claude Raynal, président. - Avant d'examiner le texte, il revient à la commission d'adopter le périmètre indicatif de la proposition de loi au titre de l'article 45 de la Constitution. Je vous propose qu'il concerne toutes dispositions qui ont une incidence sur la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ; toutes dispositions qui ont une incidence sur la connaissance et la prévention des risques naturels ainsi que sur l'indemnisation des dommages qu'ils sont susceptibles de causer ; toutes dispositions qui ont une incidence sur l'information des collectivités territoriales, des personnes, des entreprises et des associations de sinistrés concernant les démarches visant à mobiliser les dispositifs d'aides et d'indemnisation susceptibles d'être engagés après des risques naturels.

Il en est ainsi décidé.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Avec l'amendement COM-1, nous repoussons la hausse progressive du taux de la surprime à 2027, pour des raisons techniques, et nous proposons une durée de trois ans pour chaque clause de revoyure.

M. Pascal Savoldelli. - Nous voterons contre cet amendement, car nous souhaitons supprimer cet article lors de la séance publique.

Nous confronterons avec attention les votes de chacun sur cette proposition de loi avec ceux sur les montants alloués au fonds Barnier lors de l'examen du projet de loi de finances.

Mme Christine Lavarde. - Sans problème !

M. Pascal Savoldelli. - Nous verrons alors si le fonds Barnier en reste à son niveau actuel - 225 millions d'euros - et ce que décideront les défenseurs de cette proposition de loi, à laquelle nous ne nous opposerons pas. Les engagements pris seront-ils tenus ?

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - J'ai présenté ma position sur le fonds Barnier dans une interview accordée au journal Le Moniteur la semaine dernière. Christine Lavarde et moi-même sommes d'accord : le montant demandé aux assurés doit revenir aux assurés. Soyez rassuré, monsieur Savoldelli, notre position est très claire.

La CCR a estimé le besoin de financement immédiat pour le fonds Barnier à 300 millions d'euros.

L'amendement COM-1 est adopté.

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 1er

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Nous ne disposons pas encore d'information suffisante sur le temps nécessaire induit par une expertise obligatoire sur l'évolution du logement en matière de rénovation énergétique, ainsi que le prévoit l'amendement COM-4. Il faudrait nous assurer que cette disposition ne grève pas le temps des expertises en situation dégradée.

L'amendement COM-4 n'est pas adopté.

Article 2r

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Le texte de Mme Lavarde évoque un « aléa de même nature ». Mais définir cette notion est particulièrement difficile, tant pour le RGA que pour les inondations ; pour ce dernier cas, nous pouvons par exemple faire face deux ou trois mois après le sinistre à des remontées de nappes phréatiques. L'amendement COM-2 tend à résoudre cette difficulté.

L'amendement COM-2 est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - L'amendement COM-3 permet de saisir le bureau central de tarification par voie électronique.

L'amendement COM-3 est adopté. En conséquence, l'amendement COM-5 devient sans objet.

L'article 3 est ainsi rédigé.

Article 4

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - L'amendement COM-8 a pour objet d'ajouter les mots « ou l'assuré » après le mot « assureur », afin d'inclure les sociétés agissant pour le compte des assurés dans le champ de l'article.

L'amendement COM-8 est adopté.

L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 5

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - L'amendement COM-9 vise à maintenir le principe d'une affectation des indemnités liées au phénomène de RGA à la réparation du bien endommagé tel qu'il a été instauré par l'ordonnance du 8 février 2023, principe que l'article 5 vise à supprimer. Il l'assortit cependant de deux exceptions : lorsque les coûts de reconstruction dépassent la valeur vénale du bien, et lorsque le bien devient inhabitable.

L'amendement COM-9 est adopté.

L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 5

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - L'amendement COM-14 vise à introduire une obligation d'inclure dans le rapport d'expertise, dont la transmission à l'assuré est obligatoire, des préconisations de mesures de prévention des risques naturels.

L'amendement COM-14 est adopté et devient article additionnel.

Article 6

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - L'amendement COM-10 vise à supprimer cet article.

L'amendement COM-10 est adopté.

L'article 6 est supprimé.

Article 7

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - La mention de la prévention des « risques naturels majeurs » dans le dispositif présente une ambiguïté sur la question de savoir si le RGA en fait partie ou non. L'intention de l'auteur de la proposition de loi est bien que les mesures de prévention du RGA soient incluses dans ce nouvel outil de financement. L'amendement COM-11 vise à lever l'ambiguïté.

L'amendement COM-11 est adopté.

L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 8

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Avis défavorable à l'amendement COM-6, qui vise à supprimer l'article 8, tendant à conditionner l'octroi de MaPrimeRénov' à des travaux de prévention des risques pour les logements les plus exposés.

L'amendement COM-6 n'est pas adopté.

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - L'amendement COM-12 vise à limiter le conditionnement de MaPrimeRénov' aux travaux de rénovation énergétique d'une certaine ampleur, c'est-à-dire les rénovations globales.

L'amendement COM-12 est adopté.

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement COM-19, qui prévoit un rapport du Gouvernement transmis au Parlement sur les conséquences du conditionnement de MaPrimeRénov'.

L'amendement COM-19 est adopté.

L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 8 

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement   COM-17 : l'Anah doit tenir compte des enjeux de prévention des risques dans ses activités.

L'amendement COM-17 est adopté et devient article additionnel.

Article 9

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - L'amendement COM-13 tend à supprimer la fin de l'alinéa pour retirer la mention au trait de côte.

L'amendement COM-13 est adopté.

L'article 9 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 9 

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement COM-15, qui tend à renforcer les règles de construction afin de prévenir les dommages au bâti résultant du RGA.

L'amendement COM-15 est adopté et devient article additionnel.

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement COM-16, qui vise à inscrire la prévention des risques au programme de l'école primaire.

L'amendement COM-16 est adopté et devient article additionnel.

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Avis favorable à l'amendement COM-18, qui a pour objet d'informer les locataires et les acquéreurs de biens sur leur exposition au risque RGA.

L'amendement COM-18 est adopté et devient article additionnel.

La proposition de loi organique est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

TABLEAU DES SORTS

Article 1er

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. RAPIN, rapporteur

1

Décalage de la date d'entrée en vigueur de l'article et clause de revoyure triennale

Adopté

Article(s) additionnel(s) après l'article 1er

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Mme SENÉE

4

Obligation de faire figurer dans le rapport d'expertise des propositions de travaux pouvant être combinés avec des travaux de prévention des risques pour atteindre une rénovation énergétique performante

Rejeté

Article 2

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. RAPIN, rapporteur

2

Suppression de la condition "même aléa naturel" pour l'interdiction de l'application répétée de la franchise en cas de succession de catastrophes naturelles

Adopté

Article 3

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. RAPIN, rapporteur

3

Possibilité de saisine par voie électronique du Bureau central de tarification

Adopté

Mme SENÉE

5

Suppression de la possibilité pour l'entreprise d'assurance de renverser la présomption de refus d'assurance pour motif d'exposition aux catastrophes naturelles dans les zones les plus à risque

Satisfait ou
sans objet

Article 4

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. RAPIN, rapporteur

8

Extension des garanties d'indépendance relatives à la rémunération aux sociétés d'experts agissant pour le compte des assurés

Adopté

Article 5

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. RAPIN, rapporteur

9

Création de dérogations à l'obligation d'affecter exclusivement l'indemnisation d'assurance à la réparation du bien endommagé en cas de sinistres liés au phénomène de RGA

Adopté

Article(s) additionnel(s) après l'article 5

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. RAPIN, rapporteur

14

Obligation d'inclure dans le rapport d'expertise des propositions de réduction de la vulnérabilité aux risques

Adopté

Article 6

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. RAPIN, rapporteur

10

Suppression de l'article

Adopté

Article 7

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. RAPIN, rapporteur

11

Suppression d'une ambiguïté dans le dispositif

Adopté

Article 8

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Mme SENÉE

6

Suppression de l'article

Rejeté

M. RAPIN, rapporteur

12

Conditionner MaPrimeRénov' à la réalisation de travaux de prévention des risques pour les logements exposés uniquement pour les rénovations globales

Adopté

M. Pascal MARTIN

19

Évaluation de l'impact du conditionnement de la prime de transition écologique aux travaux de prévention des risques

Adopté

Article(s) additionnel(s) après l'article 8

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Pascal MARTIN

17

Prise en compte par l'Anah des enjeux de la prévention des risques

Adopté

Article 9

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. RAPIN, rapporteur

13

Conserver uniquement le retrait-gonflement des argiles dans l'élargissement du fonds Barnier prévu par l'article 9

Adopté

Article(s) additionnel(s) après l'article 9

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. Pascal MARTIN

15

Renforcement des études géotechniques et des règles préalables à la construction de bâti neuf dans les zones soumises au risque RGA

Adopté

M. Pascal MARTIN

16

Ajout de la prévention des risques à l'éducation à l'environnement et au développement durable

Adopté

M. Pascal MARTIN

18

Ajout aux informations obligatoires de l'état des risques l'exposition au risque retrait-gonflement des argiles

Adopté

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45
DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie »41(*).

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie42(*).

Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte43(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial44(*).

En application de l'article 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des finances a arrêté, lors de sa réunion du 22 mai 2024, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 612 (2022-2023) visant assurer l'équilibre du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles.

Ce périmètre comprend :

- toutes dispositions qui ont une incidence sur la reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle ;

- toutes dispositions qui ont une incidence sur la connaissance et la prévention des risques naturels ainsi que sur l'indemnisation des dommages qu'ils sont susceptibles de causer ;

- toutes dispositions qui ont une incidence sur l'information des collectivités territoriales, des personnes, des entreprises et des associations de sinistrés concernant les démarches visant à mobiliser les dispositifs d'aides et d'indemnisation susceptibles d'être engagés après des risques naturels.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mme Christine LAVARDE, sénateur présentant le texte

Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

- Mme Marie-Anne LAVERGNE, conseillère financement de l'économie et outre-mer du ministre

- Mme Eléonore CECILLON, adjointe au chef de bureau des produits d'assurance à la direction générale du Trésor.

Direction générale du Trésor (DG Trésor)

- M. Martin LANDAIS, sous-directeur des assurances ;

- Mme Eléonore CECILLON, adjointe au chef du bureau ASSUR2 « Entreprises et intermédiaires d'assurance ».

Direction générale de la prévention des risques (DGPR)

- Mme Véronique LEHIDEUX, cheffe de service des risques naturels et hydrauliques ;

- M. Louis LOUBRIAT, chef du bureau de l'action territoriale.

France Assureurs

- M. Paul ESMEIN, directeur général ;

- Mme Viviana MITRACHE, directrice des Affaires publiques France ;

- M. Christophe DELCAMP, directeur des assurances de dommages et de responsabilité ;

- Mme Anne-Sophie ROUSSEL-TRUFFY, responsable risque habitation & Outre-mer ;

- M. Arnaud GIROS, responsable affaires parlementaires & gouvernementales.

Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR)

- M. Jean-Paul Faugère, vice-président ;

- Mme Véronique BENSAID-COHEN, conseillère parlementaire du gouverneur de la Banque de France ;

- M. Gabriel PREGUIÇA, chargé de mission.

MAIF

- Mme Hélène N'DIAYE, directrice générale adjointe en charge de l'assurance de personnes, des Investissements, de l'actuariat et de la data ;

- M. Morgan LE GORBELEC, chargé d'affaires publiques.

- Mme My-Lan NGUYEN, conseillère parlementaire en charge des élus locaux.

Caisse Centrale de Réassurance (CCR)

- M. Edouard VIEILLEFOND, directeur général ;

- M. Antoine QUANTIN, directeur des réassurances, conseil et modélisation ;

- Mme Rose-Marie TUNIER, directrice de la communication et des affaires publiques.

Médiateur de l'assurance

- M Arnaud CHNEIWEISS, médiateur de l'assurance ;

- Mme Aude PICART, responsable du pôle ABR.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl23-612.html


* 1 Sur les programmes 113 « Paysages, eau et biodiversité », 174 « Energie, climat et après-mines, 181 « Prévention des risques », 217 « Conduite des politiques de l'écologie », 345 « Service public de l'énergie », 380 « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires ».

* 2 « Adapter le système assurantiel français face à l'évolution des risques climatiques », Thierry Langreney, Gonéri Le Cozannet, Myriam Merad, décembre 2023.

* 3 Article 1 de l'ordonnance n° 2023-78 du 8 février 2023 relative à la prise en charge des conséquences des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols : « Pour ces sinistres, l'indemnité due par l'assureur doit être utilisée par l'assuré pour réparer les dommages consécutifs aux mouvements de terrain différentiels ».

* 4 « Régime cat'nat : l'Allemagne pourrait s'inspirer du modèle français », L'Argus de l'assurance, 27 juin 2024 ; « Catastrophes naturelles : en Allemagne, le débat sur une assurance obligatoire avance », Nathalie Steiwer, Les Echos, 6 avril 2023. En comparaison de la France, seul un Allemand sur deux est couvert face aux catastrophes naturelles.

* 5 Les conséquences du changement climatique sur le coût des catastrophes naturelles en France à horizon 2050, Caisse centrale de réassurance, septembre 2023. Cette étude se fonde sur les scénarios RCP 8.5 et RCP 4.5 du GIEC, qui repose sur des hypothèses distinctes relatives à l'émission de gaz à effet de serre dans les prochaines années.

* 6 « Impact du changement climatique sur l'assurance à l'horizon 2050 », France Assureurs, octobre 2021.

* 7 « Adapter le système assurantiel français face à l'évolution des risques climatiques », Thierry Langreney, Gonéri Le Cozannet, Myriam Mérad, décembre 2023 page 10.

* 8 Caisse centrale de réassurance, cité dans le rapport de Christine Lavarde « Le régime CatNat : prévenir la catastrophe financière », 15 mai 2024.

* 9 Article issu de l'article 1er du décret n° 2022-1737 du 30 décembre 2022.

* 10 Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances, cité dans l'article « Inondations dans le Pas-de-Calais : les assureurs n'appliqueront pas deux fois la franchise aux sinistrés », Sébastien Acedo, L'argus de l'assurance, 7 janvier 2024.

* 11 Article L. 125-2 du code des assurances.

* 12 Loi n° 58-208 du 27 février 1958 instituant une obligation d'assurance en matière de circulation de véhicules terrestres à moteur.

* 13 Article L. 125-6 du code des assurances.

* 14 Conseil d'État, 8e et 3e sous-sections réunies, 15 juin 2005, Département de Corse du Sud, n° 266970.

* 15 Rapport d'information n° 603 (2023-2024) fait par Christine Lavarde, au nom de la commission des finances, sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, enregistré le 15 mai 2024.

* 16 Ordonnance n° 2023-78 du 8 février 2023 relative à la prise en charge des conséquences des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols.

* 17 Vincent Ledoux, 6 octobre, cité par l'article « Catastrophes naturelles : les experts sur la sellette », Géraldine Dauvergne, L'argus de l'assurance, 17 avril 2024.

* 18 Rapport fait au nom de la commission des finances du Sénat, « Régime CatNat : prévenir la catastrophe financière », Christine Lavarde.

* 19 Rapport fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et de la commission des finances du Sénat par la mission conjointe de contrôle relative aux inondations survenues en 2023 et au début de l'année 2024, Jean-François Rapin et Jean-Yves Roux.

* 20 Elle a été encouragée par l'article 6 de la loi n° 2021-1837 du 28 décembre 2021 relative à l'indemnisation des catastrophes naturelles (dite « loi Baudu ») qui prévoit que l'assureur doit informer l'assuré de sa faculté de faire réaliser une contre-expertise.

* 21 Cass. 2e civ., 18 avr. 2019, n° 18-13.371.

* 22 L'ordonnance n° 2023-78 du 8 février 2023 relative à la prise en charge des conséquences des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols.

* 23 Décret n° 2024-82 du 5 février 2024 relatif aux conditions d'indemnisation des conséquences des désordres causés par le phénomène naturel de mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols.

* 24 Rapport d'information n° 603 (2023-2024) au nom de la commission des finances sur le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, par Mme Christine LAVARDE, mai 2024.

* 25 Initialement prévue pour trois ans, l'expérimentation a été prolongée pour deux ans supplémentaires par l'article 228 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024, jusqu'au 26 septembre 2026.

* 26 Cour de cassation, Civ. 1ère, 16 juin 1982, n° 81-13.080.

* 27 Article L. 121-1 du code des assurances.

* 28 Article D. 125-5 du code des assurances.

* 29 Pour les exploitations agricoles, le seuil de surface est de 1 500 m2.

* 30 Article L. 125-2, alinéa 6 du Code des assurances.

* 31 Données de la Société de gestion des financements et de la garantie de l'accession sociale à la propriété, citées par la commission d'enquête sur la rénovation énergétique, page 140.

* 32 Article 15 de la loi n° 2019 1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

* 33 Article 241 de la loi n° 2020 1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021.

* 34 Rapport « RGA, n'attendons pas que ce soit la cata ! », Vincent Ledoux, octobre 2023, page 66.

* 35 Rapport fait au nom de la commission des finances du Sénat, « Régime CatNat : prévenir la catastrophe financière », Christine Lavarde, 15 mai 2024, page 61

* 36 La condition n'est explicite que pour les expropriations ainsi que pour les opérations relatives aux cavités humaines : « Il peut contribuer aux opérations de reconnaissance et travaux de comblement des cavités souterraines menaçant gravement les vies humaines, dès lors que ce traitement est moins coûteux que l'expropriation prévue à l'article L. 561-1 du présent code » (II de l'article L. 561-3 du code de l'environnement).

* 37 Article 227 de la loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023 de finances pour 2024.

* 38 Le rapport de la mission sur l'assurabilité des risques climatiques a formulé une recommandation similaire : « Maximiser le retour sur investissements et subventions du FPRNM pour le Régime en établissant une priorisation liée aux économies attendues et en adoptant une démarche pro-active en direction des acteurs-clés. »

* 39 « Régime CatNat : prévenir la catastrophe financière », Christine Lavarde, 15 mai 2024.

* 40 80 centimètres au minimum en zone d'exposition moyenne et 1,20 mètre en zone d'exposition forte.

* 41 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 42 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 43 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 44 Décision n° 2011-637 DC du 28 juillet 2011 - Loi organique relative au fonctionnement des institutions de la Polynésie française, confirmée par les décisions n° 2016-732 DC du 28 juillet 2016 - Loi organique relative aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu'au Conseil supérieur de la magistrature, et n° 2017-753 DC du 8 septembre 2017 - Loi organique pour la confiance dans la vie politique.

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